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Suite à un cambriolage, des certificats d’authenticité d’oeuvres ne permettent pas de rapporter la preuve de l’existence au domicile des objets déclarés volés au moment du cambriolage, ni même de la détention de ces objets à un moment quelconque.
Il est constant qu’en application de l’article 1353 du code civil, il appartient à l’assuré de justifier le montant qu’il réclame à son assureur ce qui suppose qu’il rapporte la preuve de l’existence et de la valeur des biens dérobés. La compagnie d’assurances n’est pas liée par la valeur des biens mobiliers déclarée par l’assuré au moment de la souscription du contrat, sa déclaration ne dispensant pas l’assuré de rapporter la preuve de l’existence des biens déclarés volés, et, hors le cas d’une clause de valeur agréée, de leur valeur. – Il est recommandé de vérifier les conditions générales du contrat d’assurance pour comprendre les obligations de l’assuré et de l’assureur en cas de sinistre, notamment en ce qui concerne la preuve des biens déclarés volés. – Il est conseillé de conserver tous les documents permettant d’attester de l’existence et de la valeur des biens assurés, tels que les factures, les certificats d’authenticité et les photographies, pour faciliter la justification du montant réclamé à l’assureur. – Il est recommandé de consulter les dispositions du contrat d’assurance concernant les modalités de transmission et de conservation des images prises lors d’une intrusion, afin de savoir comment obtenir ces preuves en cas de sinistre. |
→ Résumé de l’affaireMme [R] a souscrit un contrat d’assurance multirisques habitation avec la MACIF, incluant une garantie vol-vandalisme pour ses objets précieux. Après un cambriolage en août 2018, elle a déclaré le sinistre à la MACIF, mais cette dernière a refusé de l’indemniser. Mme [R] a alors assigné la MACIF en justice pour obtenir réparation. Le tribunal judiciaire de Cusset a rejeté sa demande d’indemnisation, mais Mme [R] a fait appel de cette décision. Elle demande à la cour de condamner la MACIF et la société IMA Protect à l’indemniser pour le vol de ses objets précieux, ainsi que pour d’autres dommages. La MACIF et la société IMA Protect contestent ces demandes et demandent le rejet de l’appel de Mme [R].
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→ Les points essentielsSur la garantie de la MACIF et sa responsabilité du fait du refus de garantie :Il sera rappelé en premier lieu qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et qu’elle n’a pas à se prononcer sur les demandes de « constater que… » ou de « dire et juger que…» lorsque celles-ci ne correspondent pas à des prétentions au sens des articles 4, 31 et 954 du code de procédure civile, mais en réalité à des moyens ou arguments invoqués au soutien des véritables prétentions. Sur la garantie au titre des objets déclarés volés :Les parties sont opposées non pas sur l’existence même du sinistre et les circonstances dans lesquelles celui-ci s’est produit, mais sur la réalité du préjudice subi par Mme [R]. Il est constant qu’en application de l’article 1353 du code civil, il appartient à l’assuré de justifier le montant qu’il réclame à son assureur ce qui suppose qu’il rapporte la preuve de l’existence et de la valeur des biens dérobés. Il convient de préciser que, contrairement à ce que soutient l’appelante, la compagnie d’assurances n’est pas liée par la valeur des biens mobiliers déclarée par l’assuré au moment de la souscription du contrat, sa déclaration ne dispensant pas l’assuré de rapporter la preuve de l’existence des biens déclarés volés, et, hors le cas d’une clause de valeur agréée, de leur valeur. Mme [R] sollicite en l’espèce la somme de 101’806 euros correspondant au plafond de garantie pour les objets précieux, considérant que le refus de garantie opposé par la compagnie d’assurances est constitutif d’une faute. Sur la responsabilité de la SAS Ima Protect :Mme [R] considère que la société Ima Protect a commis une faute à son égard en s’abstenant de prévenir les enquêteurs de la présence de détecteurs d’images et de la possibilité d’exploiter les images prises au moment du cambriolage, en procédant à leur destruction et encore en ne transmettant pas ces mêmes images à la MACIF. Contrairement à ce que soutient Mme [R], l’article 22.2 des conditions générales du contrat conclu le 23 mars 2017 avec la société Ima Protect, qui prévoit que celle-ci, dans le cadre des relations avec l’assureur, « transmet ‘au prescripteur’ les informations recueillies à l’occasion de l’exécution du contrat », ne concerne pas le recueil et la transmission des images, dont les modalités sont spécifiquement prévues par l’article 22. 4 des conditions générales. Il résulte de cette clause que la société Ima Protect n’avait aucunement l’obligation, suite à l’intrusion, de transmettre spontanément les images à Mme [R] ou aux enquêteurs et qu’il appartenait au contraire à Mme [R] elle-même de prendre l’initiative d’une consultation et d’avertir les services chargés de l’enquête de la possibilité d’obtenir les images, sur réquisition. Sur les dépens et les frais irrépétibles :Le jugement sera confirmé sur la condamnation aux dépens et l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Mme [R], qui succombe pour l’essentiel de ses prétentions, sera condamnée aux dépens d’appel ainsi qu’à payer, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 3000 euros à la MACIF et la même somme à la société Ima Protect. Les montants alloués dans cette affaire: – Somme allouée à Mme [R] au titre de la garantie contractuelle : 321,60 euros
– Somme allouée à la SCP Southon-Amet-Dussap au titre des dépens d’appel : Montant non spécifié – Somme allouée à la société d’assurance mutuelle MACIF au titre de l’article 700 : 3000 euros – Somme allouée à la SAS Ima Protect au titre de l’article 700 : 3000 euros |
→ Réglementation applicable– Code de procédure civile :
– Article 954 : La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n’a pas à se prononcer sur les demandes de “constater que…” ou de “dire et juger que…” lorsque celles-ci ne correspondent pas à des prétentions au sens des articles 4, 31 et 954 du code de procédure civile. – Code civil : – Code de la sécurité intérieure : – Code de procédure civile : |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Maître Sébastien RAHON
– Maître Alexandre SIMONIN – Maître Bernard SOUTHON – Maître Anne Cécile BLOCH – Maître Julien TRUDELLE |
→ Mots clefs associés & définitions– Motifs de la décision
– Garantie de la MACIF – Responsabilité du fait du refus de garantie – Garantie au titre des objets déclarés volés – Preuve de l’existence et de la valeur des biens dérobés – Montant réclamé par Mme [R] – Qualité de propriétaire des biens – Certificats d’authenticité – Preuve de la présence des biens au domicile – Garantie au titre du remplacement du vitrage brisé – Responsabilité de la SAS Ima Protect – Motifs de la décision: Raisons qui ont conduit à prendre une décision
– Garantie de la MACIF: Engagement de la compagnie d’assurance MACIF à couvrir certains risques – Responsabilité du fait du refus de garantie: Obligation de la compagnie d’assurance à indemniser en cas de refus injustifié de garantie – Garantie au titre des objets déclarés volés: Couverture d’assurance pour les biens déclarés volés – Preuve de l’existence et de la valeur des biens dérobés: Éléments permettant de prouver l’existence et la valeur des biens volés – Montant réclamé par Mme [R]: Somme demandée par Mme [R] à titre d’indemnisation – Qualité de propriétaire des biens: Statut de propriétaire des biens volés – Certificats d’authenticité: Documents attestant de l’authenticité des biens – Preuve de la présence des biens au domicile: Éléments démontrant que les biens étaient présents au domicile avant le vol – Garantie au titre du remplacement du vitrage brisé: Couverture d’assurance pour le remplacement du vitrage brisé – Responsabilité de la SAS Ima Protect: Obligation de la société SAS Ima Protect en lien avec l’affaire |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
DE RIOM
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
Du 2 avril 2024
N° RG 22/00904 – N° Portalis DBVU-V-B7G-FZUU
-LB- Arrêt n°
[T] [G] épouse [R] / Compagnie d’assurance MACIF, S.A.S. IMA PROTECT
Jugement au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CUSSET, décision attaquée en date du 28 Mars 2022, enregistrée sous le n° 20/00615
Arrêt rendu le MARDI DEUX AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
M. Philippe VALLEIX, Président
M. Daniel ACQUARONE, Conseiller
Mme Laurence BEDOS, Conseiller
En présence de :
Mme Céline DHOME, greffier lors de l’appel des causes Mme Marlène BERTHET, greffier lors du prononcé
ENTRE :
Mme [T] [G] épouse [R]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 1]
Représentée par Maître Sébastien RAHON, avocat au barreau de CLERMONT- FERRAND et par Maître Alexandre SIMONIN, avocat au barreau de VERSAILLES
Timbre fiscal acquitté
APPELANTE
ET :
Compagnie d’assurance MACIF
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par Maître Bernard SOUTHON de la SCP SOUTHON BERNARD ET AMET-DUSSAP ANNE, avocat au barreau de MONTLUCON
Timbre fiscal acquitté
S.A.S. IMA PROTECT
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Maître Anne Cécile BLOCH de la SELARL ANNE CÉCILE BLOCH AVOCAT, avocat au barreau de CUSSET/VICHY et par Maître Julien TRUDELLE de la SELARL LEX PUBLICA, avocat au barreau D’ANGERS
Timbre fiscal acquitté
INTIMEES
DÉBATS :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 08 février 2024, en application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme BEDOS, rapporteur.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 2 avril 2024, après prorogé du délibéré initiallement prévu le 26 mars 2024 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par M. VALLEIX, président et par Mme BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Mme [T] [R], propriétaire d’une maison d’habitation principale située [Adresse 2] à [Localité 1] (Puy-de-Dôme) dans laquelle elle résidait avec son époux, M. [H] [R], a souscrit le 27 avril 2017 un contrat multirisques habitation auprès de la société d’assurance mutuelle à cotisations variables Mutuelle Assurance des Commerçants et Industriels de France, des cadres et salariés de l’industrie et du commerce (MACIF).
Mme [R] a déclaré lors de la souscription du contrat la présence de biens mobiliers à son domicile, objets précieux compris, pour une valeur maximale de 152 702 euros, le contrat prévoyant un plafond de garantie en cas de vol ou d’actes de vandalisme de 101 806 euros pour les objets précieux.
Le bénéfice de la garantie vol-vandalisme étant subordonné à l’installation d’un système de détection d’intrusion relié à une station de télésurveillance agréée, Mme [R] a souscrit à cette fin un contrat auprès de la société IMA Protect le 23 mars 2017.
Le 21 août 2018 à 16h47, la société IMA Protect a détecté une alarme d’intrusion au domicile des époux [R] et envoyé sur les lieux un agent de sécurité. Celui-ci a constaté que la maison avait été cambriolée et a avisé les forces de l’ordre.
M. [H] [R] a déposé plainte auprès de la gendarmerie de [Localité 9] pour vol avec effraction commis à son domicile, pendant qu’il se trouvait en vacances avec son épouse, déclarant le vol de plusieurs oeuvres d’art.
Mme [R] a déclaré le sinistre à son assureur la MACIF, signalant la disparition des objets suivants :
– Bronze à patine brune-verte d’Aimé Jules Dalou, « Vertu Républicaine », valeur estimée : 15 000 euros ;
– « Frère et s’ur », bronze à patine brune [Z] [P], valeur estimée : 35 000 euros ;
– Cartel et sa console d’applique à décor marqueté, époque Louis XV, valeur estimée : 8000 euros ;
– Pendule en verre blanc moulé pressé partiellement patiné à motif de deux femmes drapées flanquant le cadran, de R. Lalique, valeur estimée : 20 000 euros ;
– Oiseau de jardin, bronze à patine verte de [D] [F], valeur estimée : 20 000 euros.
Mme [R] a produit à l’appui de sa déclaration de sinistre cinq certificats de valeur datés du 5 mai 2004 et signés par M. [J] [I], présenté comme expert honoraire auprès de la cour d’appel de Paris.
La MACIF a dressé un « rapport de reconnaissance vol », chiffrant le montant d’ouverture autour de 102 000 euros TTC.
Le 26 août 2018, elle a confié une misssion d’expertise à Mme [W], du cabinet Elex. Celle-ci a conclu à la mise en oeuvre de la garantie sous réserve :
– de l’authenticité des certificats transmis pour justifier de la valeur « des objets précieux déclarés volés » ;
– que les certificats fournis aient été établis par un professionnel qualifié ;
– que les biens n’aient pas été acquis pour les besoins de l’exercice d’une activité professionnelle.
La MACIF a déposé plainte avec constitution de partie civile à l’encontre de M. [H] [R] et Mme [T] [G] épouse [R] qui ont été poursuivis pour des faits de tentative d’escroquerie commis du 21 août 2018 au 24 octobre 2018.
Par jugement du 14 novembre 2019, le tribunal correctionnel de Cusset a prononcé la relaxe au bénéfice du doute de M. [H] [R] et Mme [T] [G] épouse [R],.
Par courriers des 23 janvier 2019 et 7 janvier 2020, le conseil de Mme [R] a demandé à la compagnie la MACIF de faire connaître sa position sur l’indemnisation du préjudice résultant du vol des objets précieux, réclamant également l’indemnisation des frais de réparation d’un vitrage, brisé lors des faits. La compagnie d’assurances a refusé d’accorder l’indemnisation réclamée au titre de ce sinistre.
Par acte d’huissier en date du 3 juin 2020, Mme [R] a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Cusset la MACIF pour obtenir sa condamnation au règlement des sommes suivantes :
-101 806 euros au titre de l’indemnisation pour les objets d’art et bijoux volés,
– 321, 60 euros en remboursement du remplacement d’un vitrage brisé,
– 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,
– 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par exploit du 8 mars 2021, Mme [R] a fait assigner en intervention forcée la société IMA Protect, sollicitant la production par cette dernière de certaines pièces et documents, avant de conclure à sa condamnation solidaire avec la MACIF à l’indemnisation de son préjudice.
Par jugement du 28 mars 2022, le tribunal judiciaire de Cusset a statué en ces termes :
« -Déboute Mme [T] [R] de sa demande de condamnation solidaire de la MACIF et de IMA Protect à lui verser 101’806 euros et 321,60 euros ;
-Déboute Mme [T] [R] de sa demande de condamnation solidaire de la MACIF et de IMA Protect à lui verser 10’000 euros ;
-Condamne Mme [T] [R] à verser au titre de l’article 700 du code de procédure civile :
-3000 euros à la MACIF, prise en la personne de son représentant légal ;
-2000 euros à la société IMA Protect ;
-Déboute Mme [T] [R] de sa demande au titre des dépens et de l’article 700 du code de procédure civile ;
-Condamne Mme [T] [R] aux entiers dépens, dont distraction au bénéfice de la SCP Southon-Amet-Dussap, avocat au barreau de Montluçon ;
-Déboute Mme [T] [R] de sa demande au titre des dépens ;
-Rappelle que l’exécution provisoire du présent jugement en toutes ses dispositions est de droit.
Mme [R] a relevé appel de cette décision par déclaration électronique du 26 avril 2022.
Vu les conclusions en date du 21 juillet 2022 aux termes desquelles Mme [R] demande à la cour de :
‘Dire Mme [T] [R] recevable et bien fondée en son appel ;
Y faisant droit,
Infirmer totalement le jugement du tribunal judiciaire de Cusset n° RG 20/00612 du 28 mars 2022 ;
Et statuant à nouveau,
Constater et juger que la MACIF doit appliquer sa garantie au titre du vol commis au domicile
de Mme [T] [R] le 21 août 2018 et que son refus est constitutif d’une faute ainsi que d’une réticence dolosive ;
Constater et juger que la société IMA Protect a commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle à l’égard de Mme [T] [R] ;
Constater et juger que la société MACIF et la société IMA Protect sont partenaires et doivent assumer in solidum l’indemnisation de Mme [T] [R] ;
Condamner en conséquence in solidum la MACIF et la société IMA Protect et à tout le moins la MACIF à payer à Mme [T] [R] les sommes de :
– 101.806 euros en indemnisation des objets d’arts et des bijoux volés ;
– 321,60 euros en remboursement du vitrage brisé et remplacé ;
Condamner in solidum la MACIF et la société IMA Protect et à tout le moins la MACIF à payer à Mme [T] [R] la somme de 10 000 euros pour réticence dolosive ;
En tout état de cause :
Débouter les intimés de toutes demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires à ce qui précède et dirigées contre Mme [T] [R] ;
Condamner in solidum la MACIF et la société IMA Protect et à tout le moins la MACIF à payer à Mme [T] [R] la somme de 10.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Vu les conclusions en date du 19 octobre 2022 aux termes desquelles la MACIF demande à la cour de :
‘-Confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Cusset le 28 mars 2022 ;
-Débouter en conséquence Mme [R] de l’ensemble de ses demandes ;
-Condamner Mme [R] à payer et porter à la MACIF la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
-Condamner Mme [R] aux entiers dépens et dire qu’il sera fait application des dispositions de l’article 699 du CPC au profit de la SCP Southon-Amet-Dussap, avocats aux offres de droit.’
Vu les conclusions en date du 21 octobre 2022 aux termes desquelles la société IMA Protect demande à la cour de :
‘Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Cusset le 28 mars 2022 dans toutes ses dispositions ;
Débouter Mme [T] [R] de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre de la société IMA Protect ;
Condamner Mme [T] [R] au paiement d’une somme de 3500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamner Mme [T] [R] aux entiers dépens.’
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions susvisées pour l’exposé complet des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.
Il sera rappelé en premier lieu qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et qu’elle n’a pas à se prononcer sur les demandes de « constater que… » ou de « dire et juger que…» lorsque celles-ci ne correspondent pas à des prétentions au sens des articles 4, 31 et 954 du code de procédure civile, mais en réalité à des moyens ou arguments invoqués au soutien des véritables prétentions.
-Sur la garantie de la MACIF et sa responsabilité du fait du refus de garantie :
-Sur la garantie au titre des objets déclarés volés :
Les parties sont opposées non pas sur l’existence même du sinistre et les circonstances dans lesquelles celui-ci s’est produit, mais sur la réalité du préjudice subi par Mme [R].
Il est constant qu’en application de l’article 1353 du code civil, il appartient à l’assuré de justifier le montant qu’il réclame à son assureur ce qui suppose qu’il rapporte la preuve de l’existence et de la valeur des biens dérobés.
Il convient de préciser que, contrairement à ce que soutient l’appelante, la compagnie d’assurances n’est pas liée par la valeur des biens mobiliers déclarée par l’assuré au moment de la souscription du contrat, sa déclaration ne dispensant pas l’assuré de rapporter la preuve de l’existence des biens déclarés volés, et, hors le cas d’une clause de valeur agréée, de leur valeur.
Mme [R] sollicite en l’espèce la somme de 101’806 euros correspondant au plafond de garantie pour les objets précieux, considérant que le refus de garantie opposé par la compagnie d’assurances est constitutif d’une faute.
Elle soutient que cinq oeuvres d’art de grande valeur ont été dérobées à son domicile lors du cambriolage, à savoir :
-un bronze à patine brune-verte d’Aimé Jules Dalou, « Vertu Républicaine »,
-un bronze à patine brune [Z] [P] « Frère et S’ur »,
-un cartel et sa console d’applique à décor marqueté, époque Louis XV,
– une pendule en verre blanc moulé pressé partiellement patiné à motif de deux femmes drapées flanquant le cadran, de R. Lalique,
-un oiseau de jardin, bronze à patine verte de [D] [F].
Pour s’opposer à la demande, la MACIF souligne en premier lieu que Mme [R] ne précise pas en quelle qualité (propriétaire, dépositaire, détenteur) elle réclame une indemnisation alors que, selon les conditions générales du contrat d’assurance, les biens mobiliers assurés sont :
-ceux appartenant à l’assuré,
-ceux dont l’assuré à la garde et l’usage,
-ceux de toute autre personne dont le domicile est celui de l’assuré,
situés à l’intérieur de l’habitation ou des dépendances assurées.
Mme [R] évoque dans ses écritures sa qualité de propriétaire des biens, indiquant « qu’il ressort des conditions générales et particulières du contrat que les objets précieux [lui ] appartenant sont bien garantis en cas de vol ».
Il résulte du procès-verbal d’audition de M. [H] [R] à l’occasion de l’enquête de gendarmerie diligentée suite à la plainte déposée par la compagnie d’assurances, que celui-ci a déclaré avoir acquis ces biens à [Localité 8], auprès de plusieurs antiquaires, pour la somme totale d’« une quinzaine de millions de francs », ce pour son usage personnel et non dans la perspective de les revendre.
Si Mme [R] ne produit aucune facture permettant de confirmer l’acquisition par son époux des objets déclarés volés, il semble donc cependant qu’elle considère devoir être indemnisée en qualité de propriétaire des biens qui auraient été achetés par son époux.
La compagnie d’assurances fait valoir encore qu’au-delà de l’imprécision relative aux droits de l’assurée sur les biens déclarés volés, l’absence de production de toute facture est préjudiciable à la preuve de l’existence même des objets au domicile de Mme [R] au moment du cambriolage.
Mme [R] relève en réponse que la preuve de l’existence des biens dérobés peut résulter de documents autres qu’une facture alors qu’il est précisé en page 46 des conditions générales du contrat d’assurance : « Vous devez conserver tous les documents permettant d’attester de l’existence et de la valeur de vos biens (factures, photographies’). Pour les objets précieux, en l’absence de factures, vous devez faire établir un état descriptif de ces biens par des professionnels qualifiés (joailliers’) et fournir des reproductions photographiques permettant l’identification de chaque objet ».
Pour justifier du bien-fondé de sa demande, Mme [R] produit ainsi, pour chaque objet déclaré, un certificat d’authenticité et de valeur avec une photographie de l’objet, chacun daté du 5 mai 2004 et signé par M. [J] [I], présenté comme expert honoraire auprès de la cour d’appel de Paris.
La compagnie d’assurances fait cependant observer à juste titre que ces certificats d’authenticité ne permettent aucunement de rapporter la preuve de la présence dans la maison de Mme [R] des objets déclarés volés alors qu’il est établi que, contrairement à ce qu’a soutenu M. [H] [R] dans un premier temps lors de son audition dans le cadre de l’enquête de gendarmerie, les photographies reproduites sur ces documents n’avaient manifestement pas été prises au domicile des époux [R].
Il est en effet apparu lors de l’enquête que les photographies des certificats d’authenticité étaient parfaitement similaires à des photographies trouvées au cours des investigations sur des sites Internet de vente aux enchères, s’agissant tant de l’angle de vue, que du cadrage, de la luminosité, de la couleur du fond, et même de l’heure sur les pendules, ou encore, pour la pendule Lalique, de la présence d’un objet noir sur la gauche pour tenir l’objet. Il a également été relevé que le cartel, qui selon Mme [R] était posé chez elle sur une console, était présenté sur la photographie sur une applique murale.
M. [H] [R] a d’ailleurs soutenu en définitive après ses premières déclarations que les photographies avaient été prises par M. [I], ce dont celui-ci n’avait cependant aucun souvenir précis ainsi que cela résulte de sa propre audition et de la confrontation avec M. [R] au cours de l’enquête.
Il apparaît en outre, ainsi que le fait valoir la partie intimée, que la fiabilité des certificats d’authenticité est elle-même sujette à caution, ces documents présentant plusieurs anomalies :
– Il est ainsi apposé sur ces documents un tampon avec la mention « expert près la cour d’appel de Paris », alors que M. [I] n’était plus expert en 2004 ;
– M. [I] est aussi présenté comme « expert honoraire près la cour d’appel de Paris », alors que celui-ci n’a jamais reçu cette distinction honorifique ;
– Les investigations menées sur le système informatique de M. [I] ont permis d’établir que la présentation des certificats d’authenticité communiqués, supposés avoir été établis en 2004, correspondait à celle, très différente, utilisée par M. [I] seulement à partir de 2009 ;
– Les certificats mentionnent une adresse qui n’a été celle de M. [I] qu’à partir de 2008.
Par ailleurs, ces certificats d’authenticité attribués à M. [I] n’ont pas été retrouvés dans les archives des certificats conservés par celui-ci dans son système informatique.
Il résulte de ces explications que les certificats d’authenticité versés aux débats ne permettent pas de rapporter la preuve de l’existence au domicile de M. et Mme [R] des objets déclarés volés au moment du cambriolage, ni même de la détention par M. et Mme [R] de ces objets à un moment quelconque.
Mme [R] produit également, pour prouver qu’elle détenait à son domicile les objets déclarés volés, trois attestations, la première émanant de son gendre, la deuxième d’un plombier intervenu à plusieurs reprises à son domicile, la troisième d’un réparateur de réseau Internet. Toutefois ces témoignages ne sont pas suffisamment précis et circonstanciés pour qu’il puisse être considéré que l’appelante rapporte la preuve qui lui incombe.
Mme [R] produit aussi en pièce n°14 une photographie de l’intérieur de son domicile, sur laquelle, selon elle, il est possible de voir les différents objets d’art concernés par la déclaration de vol. Ce cliché très sombre est en réalité inexploitable et ne permet aucunement de prouver que les objets déclarés volés se trouvaient bien dans la pièce photographiée.
Il sera observé qu’il ressort en revanche d’une photographie extraite du téléphone de Mme [R], prise avant la date du cambriolage, que les objets supposés se trouver dans la vitrine de la pièce cambriolée, à savoir les deux bronzes et la pendule électrique, ne s’y trouvaient pas au moment où la photographie a été prise.
Il ressort de l’ensemble de ces explications que Mme [R] ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la présence au moment du cambriolage des biens mobiliers dont elle a déclaré la disparition et qu’en conséquence la MACIF est bien fondée à refuser de procéder à l’indemnisation réclamée au titre de la garantie souscrite pour le vol, ce refus n’étant pas constitutif d’une faute.
Mme [R] soutient que la compagnie d’assurances est de mauvaise foi alors qu’elle devait selon elle « nécessairement être en possession des images du vol » dès lors que le domicile était placé sous surveillance et qu’un détecteur d’images se trouvait dans la pièce dans laquelle les objets auraient été volés.
Toutefois, il apparaît qu’aucune disposition du contrat liant Mme [R] à la MACIF ne fait obligation à cette dernière d’obtenir la transmission des images prises lors d’une intrusion au domicile de son assurée. Par ailleurs, les dispositions du contrat liant Mme [R] à la société Ima Protect prévoient seulement, à l’article 22.2 , s’agissant des rapports entre la compagnie d’assurances et la société de surveillance, que « Ima Protect transmet à votre « prescripteur » les informations recueillies à l’occasion de l’exécution du présent contrat », les mesures concernant la transmission des images étant quant à elles envisagées spécifiquement à l’article 22.4 qui stipule que les images prises lors d’une intrusion sont tenues à la disposition de l’assuré pour consultation au siège de la société pour une durée de conservation conforme à la législation en vigueur, délai au-delà duquel elles sont automatiquement détruites.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté Mme [R] de toutes les demandes formulées à l’encontre de la MACIF au titre des objets déclarés volés, s’agissant tant de l’application de la garantie que de la demande indemnitaire.
-Sur la garantie au titre du remplacement du vitrage brisé :
Le premier juge a rejeté la réclamation présentée au titre du remplacement du vitrage brisé lors du cambriolage, sans motiver particulièrement la décision sur ce point, étant précisé que la MACIF n’oppose aucune contestation expresse sur cette demande.
Il ressort d’une part du contrat que les dégâts causés à l’occasion de l’effraction sont couverts par l’assureur, d’autre part du rapport de l’expertise diligentée par ce dernier que le vitrage de la porte-fenêtre a bien été brisé au cours du cambriolage. Mme [R] produit une facture d’un montant de 321,60 euros en date du 17 septembre 2018 pour la dépose du vitrage existant et la fourniture et la pose du nouveau vitrage.
Compte tenu de ces éléments, il convient d’infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté cette demande et de condamner la MACIF au paiement de la somme réclamée à ce titre.
-Sur la responsabilité de la SAS Ima Protect :
Mme [R] considère que la société Ima Protect a commis une faute à son égard en s’abstenant de prévenir les enquêteurs de la présence de détecteurs d’images et de la possibilité d’exploiter les images prises au moment du cambriolage, en procédant à leur destruction et encore en ne transmettant pas ces mêmes images à la MACIF.
Contrairement à ce que soutient Mme [R], l’article 22.2 des conditions générales du contrat conclu le 23 mars 2017 avec la société Ima Protect, qui prévoit que celle-ci, dans le cadre des relations avec l’assureur, « transmet ‘au prescripteur’ les informations recueillies à l’occasion de l’exécution du contrat », ne concerne pas le recueil et la transmission des images, dont les modalités sont spécifiquement prévues par l’article 22. 4 des conditions générales.
Cet article stipule ainsi, s’agissant de l’enregistrement et de la conservation des images :
« Les images prises lors d’une intrusion sont tenues à votre disposition pour consultation au siège d’Ima Protect. La durée de conservation des images est conforme à la législation en vigueur. Au-delà de ce délai, elles sont automatiquement détruites.
Ces images constituent un moyen de preuve et sont susceptibles d’être mises à la disposition de la justice dans le cadre d’une enquête en vue de confondre les auteurs des vols ou tentatives de vol. (‘) ».
Il résulte de cette clause que la société Ima Protect n’avait aucunement l’obligation, suite à l’intrusion, de transmettre spontanément les images à Mme [R] ou aux enquêteurs et qu’il appartenait au contraire à Mme [R] elle-même de prendre l’initiative d’une consultation et d’avertir les services chargés de l’enquête de la possibilité d’obtenir les images, sur réquisition.
La société Ima Protect souligne en outre, sans être contredite, que les abonnés de la société disposent d’un espace client en ligne et d’une application mobile leur permettant de consulter les images capturées et de les sauvegarder, ce que Mme [R] pouvait donc faire jusqu’au 21 septembre 2018.
Il ressort des mêmes dispositions qu’il ne peut être reproché à la société Ima Protect d’avoir procédé à la destruction des images à l’issue d’un délai d’un mois, en l’absence de réquisition, le contrat renvoyant expressément à une durée de conservation des images « conforme à la législation en vigueur », cette durée étant définie à un mois selon les recommandations de la CNIL et par les dispositions de l’article L. 252 -3 du code de la sécurité intérieure.
Il est par ailleurs établi que la société Ima Protect a parfaitement rempli ses obligations au regard des termes du contrat en envoyant sur les lieux un agent de sécurité après le signal d’intrusion dans le cadre de la procédure de levée de doute et en avisant les forces de l’ordre compte tenu de l’effraction constatée.
En considération de l’ensemble de ces explications, Mme [R] sera déboutée des demandes présentées à l’encontre de la SAS Ima Protect.
– Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Le jugement sera confirmé sur la condamnation aux dépens et l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Mme [R], qui succombe pour l’essentiel de ses prétentions, sera condamnée aux dépens d’appel ainsi qu’à payer, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 3000 euros à la MACIF et la même somme à la société Ima Protect.
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement en ce qu’il a débouté Mme [T] [R] de sa demande de condamnation de la société d’assurance mutuelle à cotisations variables MACIF au paiement de la somme de 321,60 euros au titre de la garantie contractuelle due pour le coût du remplacement du vitrage brisé ;
Statuant à nouveau,
Condamne la société d’assurance mutuelle à cotisations variables MACIF à payer à Mme [R] la somme de 321,60 euros au titre de la garantie contractuelle due pour le coût du remplacement du vitrage brisé ;
Confirme pour le surplus le jugement entrepris,
Condamne Mme [T] [R] aux dépens d’appel, cette condamnation étant assortie au profit de la SCP Southon-Amet-Dussap du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision, en application de l’article 699 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [T] [R] à payer, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 3000 euros à la société d’assurance mutuelle à cotisations variables MACIF et la somme de 3000 euros à la SAS Ima Protect.
Le greffier Le président