Violation de clause d’exclusivité : 9 juillet 1996 Cour de cassation Pourvoi n° 94-16.655
Violation de clause d’exclusivité : 9 juillet 1996 Cour de cassation Pourvoi n° 94-16.655
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9 juillet 1996
Cour de cassation
Pourvoi n°
94-16.655

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Ford New Hollande France, société anonyme, dont le siège était anciennement …, et actuellement …,

en cassation d’un arrêt rendu le 9 mai 1994 par la cour d’appel d’Agen (1e chambre), au profit de :

1°/ M. Michel X…, en redressement judiciaire, faisant l’objet d’un plan de redressement, demeurant : 47350 Agme,

2°/ M. Guguen, commissaire à l’exécution du plan, domicilié …,

défendeur à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt;

LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 28 mai 1996, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Grimaldi, conseiller rapporteur, Mme Pasturel, conseiller, M. Mourier, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre;

Sur le rapport de M. le conseiller Grimaldi, les observations de la SCP Defrenois et Levis, avocat de la société Ford New Hollande France, de la SCP Urtin-Petit et Rousseau Van-Troeyen, avocat de M. X… et de M. Guguen, ès qualités, les conclusions de M. Mourier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu, selon l’arrêt confirmatif déféré (Agen, 9 mai 1994), que M. X… était concessionnaire exclusif, dans un secteur géographique déterminé, de la société Ford New Holland France (société NHF); qu’en cas de violation de la clause d’exclusivité par un autre concessionnaire du réseau, l’article 3 du contrat stipulait que la société NHF “se réserve le droit d’apporter une solution au litige ainsi intervenu entre les concessionnaires par toutes mesures pécuniaires ou autres qu’elle jugera utile et sa décision sera sans appel”; que M. X…, se disant victime de violations à son exclusivité, a poursuivi la société NHF en paiement de dommages-intérêts, en lui reprochant de n’avoir pris aucune mesure contre le concessionnaire fautif;

Attendu que la société NHF fait grief à l’arrêt d’avoir accueilli la demande de M. X… “pour concurrence déloyale” et d’avoir évalué à un million de francs le montant de la réparation due par le concédant au concessionnaire, alors, selon le pourvoi, d’une part, qu’une clause limitative ou exonératoire de responsabilité est a priori licite et ne peut être écartée qu’en cas de faute lourde ou dolosive, non démontrée en l’espèce, l’abstention reprochée au concessionnaire ne correspondant à la violation d’aucune obligation positive essentielle; qu’en ne tenant aucun compte de la clause exonératoire, et en transformant en obligation impérative ce qui n’était qu’une simple faculté pour le concédant, la cour d’appel a violé les articles 1134 et 1150 du Code civil; et alors, d’autre part, que le préjudice ainsi évalué est celui qui résulte des actes de concurrence commis par la société ASA et non directement de l’inaction reprochée à la société NHF, cette inaction ayant-elle tout au plus fait perdre une chance d’éviter ou de limiter la concurrence préjudiciable à M. X…; qu’en s’abstenant d’établir un lien direct de causalité entre l’omission du concédant et le préjudice subi, la cour d’appel a violé l’article 1147 du Code civil;

Mais attendu, en premier lieu, que l’arrêt, qui, contrairement aux allégations du moyen, ne condamne pas la société NHF pour concurrence déloyale, retient que le contrat, s’il prévoit que le concédant n’est pas responsable des violations de l’exclusivité, commises par ses concessionnaires – une telle stipulation constituant effectivement une clause exonératoire de responsabilité – n’empêche pas le concessionnaire, victime de ces violations, de rechercher la responsabilité du concédant qui a omis, contrairement à son engagement, de prendre des mesures pécuniaires contre le concessionnaire fautif; qu’il relève par motifs propres et adoptés, que la société NHF avait antérieurement sanctionné pécuniairement M. X… du montant intégral de sa commission pour la vente d’un engin sur le secteur d’un autre concessionnaire, “somme reversée au concessionnaire pénalisé par la vente X…”; qu’il retient encore que la société NHF a manqué à son engagement, faisant ainsi exactement ressorti que celui-ci ne constituait pas une simple faculté, puisqu’en présence des violations répétées commises au préjudice de M. X…, la société NHF s’est bornée à demander au concessionnaire fautif de ne pas agir hors de son secteur, sans prendre aucune autre mesure;

Attendu, en second lieu, que l’arrêt, établissant un lien de causalité directe entre l’inaction de la société NHF et le préjudice subi par M. X…, a évalué souverainement la réparation de ce préjudice;

D’où il suit que la cour d’appel a légalement justifié sa décision; que le moyen n’est fondé en aucune de ses deux branches;

 


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