Violation de clause d’exclusivité : 22 juin 2017 Cour d’appel de Montpellier RG n° 15/09606
Violation de clause d’exclusivité : 22 juin 2017 Cour d’appel de Montpellier RG n° 15/09606
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22 juin 2017
Cour d’appel de Montpellier
RG n°
15/09606

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre D

ARRÊT DU 22 JUIN 2017

Numéro d’inscription au répertoire général : 15/09606

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 08 DÉCEMBRE 2015

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BÉZIERS

N° RG 15/00749

APPELANTE :

BÉZIERS LOISIRS SASU prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représenté par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assisté de la SELARL RAMPONNEAU avocat au barreau de GRASSE, avocat plaidant

INTIMÉES :

SAS STELL

[Adresse 3]

[Adresse 2]

Représentée par Me GANDILLON substituant Me Cindy FRIGERIO, avocat au barreau de BEZIERS

SAS POLYGONE BEZIERS, société par actions simplifiée, immatriculée au RCS de BEZIERS sous le 538 132 341 ayant son siège [Adresse 4], agissant poursuite et diligences de son représentant légal domicilié audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 6]

[Adresse 2]

Représentée par Me Alain COHEN BOULAKIA de la SELARL JURIPOLE SELARL, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me BOURDAROT COUSY de la SELARL JURIPOLE avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

SNC POLYGONE BEZIERS représentée par son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 7]

[Adresse 8]

représentée par Me Pascal ADDE de la SCP GRAPPIN – ADDE – SOUBRA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTERVENANTE :

SELARL GAUTHIER SOHM, es qualité de mandataire à la sauvegarde de la SASU BEZIERS LOISIRS

[Adresse 9]

[Adresse 10]

[Adresse 11]

Représentée par Me Fanny LAPORTE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 12 Septembre 2016 suivie d’un arrêt avant dire droit en date du 10 novembre 2016 qui a à nouveau clôturé l’affaire au 18 avril 2017, clôture par une nouvelle clôture au 24 avril 2017.

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 24 AVRIL 2017, en audience publique, Madame Marie CONTE ayant fait le rapport prescrit par l’article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :

Monsieur Daniel MULLER, Président de Chambre

Madame Marie CONTE, Conseiller

Madame Myriam GREGORI, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Ginette DESPLANQUE

ARRÊT :

– Contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ;

– signé par Monsieur Daniel MULLER, Président de Chambre, et par Mme Ginette DESPLANQUE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

—————-

Suivant acte sous seing privé du 27 avril 2007 la SNC Polygone Béziers a donné à bail commercial à la Société LD Finance Conseil aux droits de laquelle se trouve la SASU Béziers Loisirs un local à construire d’une surface de 1795 m2 dont 300 m2 de terrasse au sein du futur centre commercial et de loisirs ‘Béziers Rive Gauche’.

Un avenant du 30 mars 2009 a modifié l’article C1 de la convention initiale relatif à l’activité autorisée, stipulant en son article 6 que:

‘Activité autorisée: Bowling et à titre accessoire à cette activité principale pourront être adjointes les activités suivantes: Bar à thème, billard et restaurant. Etant ici précisé que ces activités accessoires ne pourront être exercées que cumulativement à l’activité bowling et ne pourront en aucun cas s’y substituer, le bail et les locaux étant indivisibles……..

Par dérogation aux dispositions de l’article 8.1.2 du titre 2, le preneur bénéficiera d’une exclusivité, entendue strictement dans le centre commercial Béziers Rive Gauche pour l’activité de Bowling, strictement.

Le bailleur consent également, en ce qui concerne, l’exercice de l’activité accessoire de bar à thème, une exclusivité uniquement pour l’exploitation d’un Pub (c’est à dire de bar, brasserie, café dont le cadre, le décor et la thématique évoquent le Royaume-Uni.)’

La SASU Béziers Loisirs a crée dans les locaux loués un bowling et un pub à l’enseigne ‘Warm.Up.Pub’.

Ayant appris à la suite d’une publicité diffusée par le centre commercial l’ouverture projetée au sein même du centre, d’un établissement à l’enseigne ‘Au Bureau’ présenté comme un ‘pub brasserie… dans un cadre anglo-saxon dépaysant’, la SASU Béziers Loisirs a assigné, au visa de l’article 809 alinéa 1er du code de procédure civile devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Béziers puis la SNC Polygone Béziers puis la SAS Polygone Béziers, propriétaire du local commercial depuis le 25 septembre 2012, la Société Stell intervenant volontairement à l’instance.

Suivant ordonnance du 8 décembre 2015, le juge des référés a:

‘dit que les prétentions de la Société Béziers Loisirs se heurtent à une contestation sérieuse dont l’examen excède la compétence du juge des référés.

-dit que la preuve d’un dommage imminent ou d’un trouble manifestement illicite n’est pas rapportée.’

-débouté la Société Béziers Loisirs de ses demandes

Condamne la Société Beziers Loisirs à payer à chacune des défenderesses la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.’

Par déclaration reçue le 21 décembre 2015, la Société Béziers Loisirs a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions notifiées le 12 septembre 2016, la Société Béziers Loisirs et la SELARL Gauthier Sohm intervenant volontairement en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde de cette société, demandent à la cour de:

-dire que l’ouverture par la Société Stell d’un pub à l’enseigne ‘Au Bureau’ dans le centre commercial contrevient aux obligations du bailleur.

-condamner la SAS Polygone Béziers à faire cesser le trouble causé par l’ouverture de ce Pub sous astreinte de 1.000 euros.

-condamner la Société Stell sous la même astreinte, à faire cesser le trouble.

-condamner la Société Polygone Béziers au paiement d’une provision de 460.000 euros à valoir sur la perte de chiffre d’affaire constatée jusqu’à la fin du bail.

-condamner la Société Polygone Béziers au paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Ils font valoir que:

-l’existence de la clause d’exclusivité est incontestable

-la Société Béziers Loisirs a réalisé de considérables travaux d’aménagement (2.000.000 d’euros) et subit des difficultés financières faisant obstacle au paiement régulier du loyer.

– la violation de la clause d’exclusivité, parfaitement claire, est manifeste, cette clause n’étant pas limitée à 6 ans mais s’appliquant pendant la durée du bail.

-il est justifié par une attestation délivrée par l’expert comptable de l’appelante, d’une perte de chiffre d’affaire de 23.000 euros en 3 mois, et d’une perte de recettes du Pub Restaurant de 1.450 euros par jour.

Par conclusions notifiées le 5 avril 2016, la SNC Polygone Loisirs soulève l’irrecevabilité de toute demande dirigée à son encontre et sollicite la condamnation de l’appelante au paiement de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 31 août 2016, la SAS Polygone Béziers sollicite la confirmation de l’ordonnance et la condamnation de l’appelante au paiement de la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle objecte qu’une contestation sérieuse existe quant à l’interprétation de la clause d’exclusivité dont la durée est nécessairement limitée à 6 ans.

Elle observe que n’est pas valide une telle clause stipulée sans limitation de durée; que la clause d’exclusivité n’est pas opposable à la Société Stell.

Elle soulève l’irrecevabilité au regard des dispositions de l’article 564 du code de procédure civile de la demande nouvelle en paiement d’une provision et relève que le préjudice allégué n’est en toute hypothèse pas établi, le chiffre d’affaires subissant une baisse dés avant l’ouverture du Pub ‘Au bureau’.

Par conclusions notifiées le 20 avril 2016, la Société Stell sollicite la confirmation de l’ordonnance et la condamnation de l’appelante au paiement de la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle relève que la clause d’exclusivité lui est inopposable dès lors qu’elle était tiers au contrat liant l’appelante à la Société Polygone Béziers, et qu’il n’est pas démontré qu’elle ait eu, avant l’introduction de la procédure, connaissance de ladite clause.

Suivant arrêt du 10 novembre 2016, la cour a :

– dit irrecevables les demandes formées à l’encontre de la SNC Polygone Béziers.

– dit n’y avoir lieu à référé relativement aux demandes dirigées contre la société Stell

– dit que la violation par la SAS Polygone Béziers de la clause d’exclusivité caractérisé un trouble manifestement illicite

– ordonné la réouverture des débats à l’audience du 24 avril 2017 en invitant l’appelante à préciser les mesures qu’elle entend voir prescrire en référé en l’état de l’inopposabilité à la société Stell de la clause d’exclusivité et de la demande distincte de provision.

Par conclusions notifiées le 14 avril 2014, la SASU Béziers Loisirs et la SARL Gauthier Sohm mandataires à la sauvegarde de la SASU Béziers Loisirs demandent à la cour de rejeter la demande de sursis à statuer formée par la société Polygone Bézier, à titre principal condamner celle ci à faire cesser le trouble résultant de l’ouverture d’un pub ‘Au bureau’ sous astreinte de 1000€ par jour de retard, à titre subsidiaire condamner la société Polygone Béziers au paiement d’une provision de 275525€ au titre de la perte de chiffre d’affaires constatée, en toute hypothèse condamner la société Polygone Béziers au paiement de la somme de 5000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que le pourvoi en cassation contre l’arrêt du 10 novembre 2016 a été formé par la bailleresse à des fins dilatoires, que le bailleur tenu au respect d’une clause de non concurrence peut être condamné à faire cesser l’activité concurrente d’un autre locataire même si celui ci n’a commis aucune faute dans la violation de cette clause, que subsidiairement peut être de nature à faire cesser le trouble l’allocation d’une provision à valoir que l’indemnisation du préjudice de la SASU Béziers Loisirs dont le chiffre d’affaires au titre de la seule activité ‘ de pub’ a été considérablement réduit à la suite de l’ouverture de l’établissement ‘Au bureau’.

Par conclusions notifiées le 18 avril 2017, la SAS Polygone Béziers sollicite, à titre principal un sursis à statuer dans l’attente de l’issue du pourvoi en cassation formé contre l’arrêt du 10 novembre 2016, à titre subsidiaire le débouté de l’appelante de l’ensemble de ses demandes, plus subsidiairement la compensation entre sa créance et la créance de la SASU Béziers Loisirs à concurrence, tenant leur connexité, en toute hypothèse la condamnation de l’appelante au paiement de la somme de 4000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle objecte que :

– l’éventualité d’une cassation de l’arrêt du 10 novembre 2016 est suffisante pour justifier l’opportunité d’un sursis à statuer.

– la SASU Béziers Loisirs ne peut prétendre à la fermeture de l’établissement ‘Au bureau’.

– il appartient au juge du fond d’évaluer les dommages et intérêts dus au créancier d’une obligation de faire en cas d’inexécution de celle-ci de la part du débiteur

– la SAS Polygone Béziers est créancière envers la SASU Béziers Loisirs d’une somme de 440267,22€ arrêtée par ordonnance du juge commissaire du 10 novembre 2016 et correspondant à des loyers impayés.

– cette créance et la créance éventuellement due à raison de la violation de la clause d’exclusivité sont connexes et susceptibles de compensation.

Par conclusions notifiées le 7 avril 2017, la société Stell sollicite à titre principal un sursis à statuer, subsidiairement la confirmation de l’ordonnance entreprise, en toute hypothèse la condamnation de l’appelante au paiement de la somme de 2500€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE L’ARRÊT

S’agissant de la demande de sursis à statuer formée par la société Polygone Béziers, il sera relevé, pour rejeter cette demande, que le pourvoi en cassation diligenté contre l’arrêt du 10 novembre 2016, tranchant une partie du principal, n’a pas d’effet suspensif, et que la cour estime opportun de vider sa saisine.

S’agissant de la demande formée par la SASU Béziers Loisirs, l’arrêt dont s’agit a dit que la violation par la société Polygone Béziers de la clause d’exclusivité stipulée au contrat de bail commercial la liant à l’appelante caractérise un trouble manifestement illicite.

Or, le locataire bénéficiaire d’une clause d’exclusivité qui lui a été consentie par son bailleur est en droit d’exiger que ce dernier fasse respecter cette clause par ses autres locataires, même si ceux-ci ne sont pas parties au contrat contenant cette stipulation.

Il y a donc lieu de condamner la société Polygone Béziers, pour faire cesser le trouble manifestement illicite subi par l’appelante à faire cesser l’activité concurrentielle de la société Stell dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent arrêt, sous astreinte de 300€ par jour de retard pendant un délai de 4 mois.

S’agissant enfin de la provision sollicitée par la société Béziers Loisirs, il ressort du dispositif des conclusions notifiées le 14 avril 2017 par l’appelante que celle-ci est réclamée ‘ à titre subsidiaire, si la cour de céans devait considérer qu’elle ne peut pas condamner la société Polygone Béziers à une astreinte’, et de ce fait à titre de mesure destinée à faire cesser le trouble manifestement illicite.

Cette demande est dés lors sans objet en l’état de la condamnation de la société Polygone Béziers à faire cesser l’activité concurrentielle de la société Stell.

La société Polygone Béziers tenue aux dépens doit être condamnée à payer à la société Béziers Loisirs la somme de 2500€ au titre des frais non taxables exposés en appel.

L’équité ne commande pas de faire application, au bénéfice de la société Stell des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Vu l’arrêt de cette cour en date du 10 novembre 2016.

Condamne la SAS Polygone Béziers à faire cesser l’activité de la société Stell contraire à la clause d’exclusivité consentie à la société Béziers Loisirs dans les 6 mois de la signification du présent arrêt sous astreinte de 300€ par jour de retard qui courra pendant un délai de 4 mois.

Condamne la SAS Polygone Béziers à payer à la société Béziers Loisirs la somme de 2500€ en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la société Stell.

Condamne la SAS Polygone Béziers aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

MC

 


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