Violation de clause d’exclusivité : 15 décembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 20/03263

Violation de clause d’exclusivité : 15 décembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 20/03263

15 décembre 2022
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
20/03263

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-5

ARRÊT AU FOND

DU 15 DECEMBRE 2022

N° 2022/

GM

Rôle N° RG 20/03263 – N° Portalis DBVB-V-B7E-BFWDJ

S.A.S. EASY TRANSFER RIVIERA

C/

[K] [G]

Copie exécutoire délivrée

le : 15/12/22

à :

– Me Bruno ZACARIAS, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

– Me Stéphanie JOURQUIN, avocat au barreau de NICE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de GRASSE en date du 10 Février 2020 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 18/00620.

APPELANTE

S.A.S. EASY TRANSFER RIVIERA, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Bruno ZACARIAS, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIMEE

Madame [K] [G], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Stéphanie JOURQUIN, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre

Monsieur Antoine LEPERCHEY, Conseiller

Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Karen VANNUCCI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Décembre 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Décembre 2022.

Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Mme Pascale ROCK, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE 

Mme [K] [G] a été engagée par la société Easy Transfer Riviera à compter du 19 septembre 2016 par contrat de travail à durée indéterminée à temps complet en qualité principale d’employée du service administratif, commercial, contentieux, technique, d’exploitation, coordination terrain, du personnel (voyageurs).

Le contrat stipule que Mme [K] [G] a pour fonction accessoire celle de conducteur de voitures particulières.

Les relations entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires du transport.

La société Easy Transfer Riviera employait habituellement au moins onze salariés au moment du licenciement.

En contrepartie de ses attributions, Mme [K] [G] devait percevoir une rémunération brute lissée sur l’année, correspondant à un salaire mensuel brut de 2.000,07 euros pour 151h67 de travail effectif.

Le contrat de travail de Mme [K] [G] contenait une clause de non-concurrence ainsi qu’une clause d’exclusivité.

[K] [G] a été placée en arrêt maladie du 25 août 2017 au 15 novembre 2017.

Les parties ont conclu une convention de rupture conventionnelle le 21septembre 2017.

La DIRECCTE a homologué la rupture conventionnelle le 25 octobre 2017 pour une fin de relation contractuelle de travail effective fixée au 31 octobre 2017.

Mme [K] [G] a saisi le conseil de prud’hommes de Grasse le 24 septembre 2018.

Par jugement rendu le 10 février 2020, le conseil de prud’hommes de Grasse a :

– dit Mme [K] [G] recevable et bien fondée en ses demandes,

– condamné la société Easy Transfer Riviera à payer à Mme [K] [G] :

648,72 euros brut de rappels de salaires au titre des heures supplémentaires

64, 87 euros au titre des congés payés sur heures supplémentaires

500 euros à titre d dommages intérêts pour résiliation unilatérale et brutale de la portabilité des droits à la prévoyance

1650 euros brut à titre de rappel de salaires pour non paiement total des astreintes

165 euros brut au titre des congés payés afférents aux astreintes

6999 euros nets à titre de rappels de salaire afférent au paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence pour la période du 31 octobre 2017 au 31 octobre 2018

200 euros net de dommages intérêts pour manquement à l’obligation de résultats

100 euros nets de dommages intérêts pour résistance abusive

1200 euros net au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– débouté la société Easy Transfer Riviera de ses demandes reconventionnelles,

– condamné la société Easy Transfer Riviera aux entiers dépens.

La société Easy Transfer Riviera a interjeté appel de cette décision dans des formes et délais qui ne sont pas critiqués.

L’ordonnance de clôture est rendue le 6 octobre 2022.

PRETENTIONS ET MOYENS 

Par conclusions notifiées par voie électronique le 18 novembre 2020, l’employeur demande à la cour de :

à titre principal,

– déclarer son appel recevable et bien fondé.

– réformer le jugement en ce qu’il l’a condamné à payer Mme [K] [G] les sommes suivantes :

– 648,72 euros brut de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires

– 64,87 euros brut au titre des congés payés sur les heures supplémentaires

– 500 euros net de dommages et intérêts pour résiliation unilatérale et brutale de la

portabilité des droits à la prévoyance.

– 1.650 euros brut à titre de rappel de salaire pour non-paiement des astreintes.

– 165 euros brut au titre des congés payés afférents aux astreintes

– 6.999 euros net à titre de rappel de salaire afférents au paiement de la contrepartie

financière de la clause de non-concurrence pour la période du 31 octobre 2017 au 31

octobre 2018.

– 200 euros net de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de

résultats

– 100 euros net à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive

1.200 euros net au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– réformer le jugement en ce qu’il a :

– débouté Mme [K] [G] du surplus de ces demandes

– débouté l’appelante de sa demande reconventionnelle

– condamné l’appelante aux entiers dépens.

Statuant de nouveau,

– débouter Mme [K] [G] de ses demandes tendant à faire condamner l’appelante à lui payer les sommes suivantes :

– 648,72 euros brut de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires

– 64,87 euros brut au titre des congés payés sur les heures supplémentaires

– 500 euros net de dommages et intérêts pour résiliation unilatérale et brutale de la

portabilité des droits à la prévoyance.

– 1.650 euros brut à titre de rappel de salaire pour non-paiement des astreintes.

– 165 euros brut au titre des congés payés afférents aux astreintes

– 6.999 euros net à titre de rappel de salaire afférents au paiement de la contrepartie

financière de la clause de non-concurrence pour la période du 31 octobre 2017 au 31

octobre 2018.

– 5.000 euros au titre des dommages et intérêts pour manquements à l’obligation de

sécurité de résultat.

– 2.000 euros au titre de dommages et intérêts pour résistance abusive

– 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– débouter Mme [K] [G] de ses demandes d’intérêts au taux légal à compter de la saisine pour les indemnités à caractère salarial et à compter du jour du jugement pour les demandes à caractère indemnitaire, de sa demande de capitalisation des intérêts,

à titre subsidiaire

– condamner Mme [K] [G] à lui payer 6 999 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et violation de l’obligation de loyauté en lien avec la clause de non-concurrence, ou toute autre somme qu’il plaira à la cour de déterminer, sans qu’elle ne puisse être inférieure à celle qu’elle serait amenée à la condamner sur le même fondement

en tout état de cause,

– condamner Mme [K] [G] à lui payer 3000 euros sur le fondement l’article 700 du code de procédure civile.

la condamner aux entiers dépens.

Sur la demande de rappels d’heures supplémentaires de la salariée, l’employeur fait valoir qu’aucun relevé auto-déclaratif mensuel signé par cette dernière, remis contre émargement à la direction n’a été versé aux débats, sans que cela n’interpelle les premiers juges, pas plus que l’obligation de présenter un accord exprès écrit ne pouvant être autorisé que par le gérant.

Mme [K] [G] ne rapporte toujours pas l’existence :

– ni d’un accord exprès et écrit du gérant l’autorisant à accomplir des heures supplémentaires.

– ni de l’impérieuse nécessité d’accomplir une tâche urgente ne pouvant être reportée et qui serait à l’origine de l’accomplissement d’heures supplémentaires sans avoir recueilli l’accord écrit, expresse contractuellement convenu.

– ni de la remise contre émargement de déclarations mensuelles établies par ses soins et signées de l’accomplissement d’heures supplémentaires.

S’agissant de la mutuelle, lors de la rupture de la relation contractuelle de travail, Mme [K] [G] a bien été destinataire des documents d’information pour faire valoir ses droits à la portabilité auprès de la mutuelle. Au cas de l’espèce, et tout comme en première instance, l’employeur verse à nouveau aux débats la déclaration de portabilité des droits auprès de la compagnie d’assurance Cipres gestionnaire de cette portabilité. Cette déclaration dont une copie a été remise à Mme [K] [G] comporte sa signature en date du 09 décembre 2017, signature qu’elle a faite à son domicile comme cela ressort du document.

Non seulement l’employeur n’a pas résilié la garantie mutuelle de Mme [K] [G], lors de la rupture conventionnelle, comme le retient à tort le jugement déféré, mais la preuve a bien été rapportée devant les premiers juges, que Mme [K] [G] a bien été informée lors de son départ de l’étendue de ses droits, ainsi que des conditions de mise en ‘uvre de la portabilité, puisqu’elle a reçu les documents nécessaires pour faire valoir ses droits. Le fait que Mme [K] [G] ait fait le choix de souscrire à compter du 01 mai 2018, une nouvelle complémentaire santé à ses frais, pour un montant de 648,33 par année, pour elle et sa fille, n’est absolument pas opposable à l’appelante.

Sur la clause contractuelle de non-concurrence, l’appelante fait valoir que le contrat de travail stipule une clause au terme de laquelle, Mme [K] [G] s’est expressément engagée à travailler exclusivement pour elle. Mme [K] [G] n’a jamais exécuté de bonne foi, le contrat de travail. En effet, à l’occasion des réclamations portées par Mme [K] [G], au titre du prétendu respect par cette dernière de ladite clause, il s’est révélé que dès l’embauche, Mme [K] [G] s’est livrée à une véritable concurrence envers son employeur, avec une particulière mauvaise foi.

Il résulte des recherches effectuées à l’occasion de ce contentieux, que Mme [K] [G] est inscrite au registre du commerce et des sociétés depuis le 01 janvier 2012. L’activité exercée en parallèle par Mme [K] [G] est celle déclarée des activités de voyagistes. Du 01 janvier 2012 au 25 octobre 2018 (date de la mise à jour des données), Mme [K] [G] a bien exercé cette activité. D’ailleurs, Mme [K] [G] reconnaît avoir exercé sous son statut d’auto-entrepreneur d’activité de voyagistes, un emploi d’assistant de chef de projet pour le compte de la Société GTS et cela dès le 01 février au 06 avril 2018.

Au cas de l’espèce, la société Easy Transfer Riviera a bien rapporté la preuve que sur le parc de véhicule offert par la Société GTS, a sa clientèle, il y a des autocars, mais également des minibus, comme la Société Easy Transfer Riviera, ou des voitures particulières de grande remise. En outre les clients sont exactement les mêmes, seule la taille des groupes à transporter détermine le type de matériel de transport a utilisé, pour le reste, tout est pareil.

Mme [K] [G], non seulement n’a pas exécuté de bonne foi, les termes du contrat de travail dans sa clause d’exclusivité pendant l’exécution du contrat de travail, mais après avoir perçu la prime de non-concurrence, elle s’est bien livrée à une concurrence déloyale, d’une part en changeant l’activité de son statut d’auto-entrepreneur, pour devenir voyagiste, et d’autre part, en apportant son concours au sein d’une société concurrente par ces activités à celles de l’appelante, et pour accomplir exactement les même tâches que celles confiées pendant l’exécution du contrat de travail.

Sur la demande indemnitaire de la salariée pour manquement de l’employeur à son obligation de résultat, ce dernier affirme que Mme [K] [G] tente a posteriori d’établir un lien entre les différents arrêts de travail qu’elle a fait valoir et une prétendue violation d’une obligation de sécurité de résultat pesant sur la concluante. L’intimée ne rapporte pas la preuve qu’elle aurait exposé à son employeur, une situation tendant à la dégradation de son état de santé.

Sur sa demande reconventionnelle en dommages intérêts, l’employeur invoque les articles 1240 et 1241 du code civil. La salariée a commis des manquements à l’obligation de loyauté dans l’exécution de bonne foi de son contrat de travail. Elle a violé les clauses contractuelles du contrat de travail notamment celle d’exclusivité rendant impossible l’exercice d’une autre activité. Elle a exercé une activité concurrente au sein d’une entreprise concurrente en pleine conscience.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 22 juillet 2022, Mme [K] [G] demande à la cour d’appel de :

-débouter la société de toutes ses demandes,

– confirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes de dommages-intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité de résultat et pour résistance abusive,

statuant à nouveau,

-condamner l’employeur à lui payer :

‘ 5.000 euros au titre des dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité de résultat,

‘ 2.000 euros au titre des dommages et intérêts pour résistance abusive,

‘ 6.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud’hommes pour les sommes à caractère salarial et à compter de la décision à intervenir pour les sommes à caractère indemnitaires et capitalisation des intérêts,

– condamner l’appelante à lui remettre un bulletin de paie conforme à la décision à intervenir,

– condamner la l’appelante aux dépens.

Sur sa demande en paiement d’heures supplémentaires impayées, l’intimée fait valoir que la société ne conteste pas les heures supplémentaires d’un total de 19 heures 50 effectuées au cours de l’exécution du contrat de travail.

En vertu de l’avenant n° 3 du 18 mai 2009 à l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail et de l’article L. 911-8 du code de la sécurité sociale, les salariés garantis collectivement, bénéficient du maintien à titre gratuit de cette couverture en cas de cessation du contrat de travail. En l’espèce, l’appelante a décidé de résilier unilatéralement les droits de prévoyance de [K] [G], le 31 décembre 2017, sans même l’en informer. De plus, Mme [K] [G] a été contrainte de payer la somme de 96,75 €, correspondant aux frais exposés par son ancienne mutuelle en raison de la résiliation brutale de la société.

Sur sa demande en paiement d’astreintes, la salariée fait valoir que selon l’article L. 3121-9 du code du travail : « Une période d’astreinte s’entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, doit être en mesure d’intervenir pour accomplir un travail au service de l’entreprise. La durée de cette intervention est considérée comme un temps de travail effectif. »

Du 19 septembre 2016, date de son embauche et jusqu’au 31 octobre 2017 date de la rupture de son contrat de travail, elle a réalisé de nombreuses astreintes passives. L’employeur n’a pas jugé utile de lui payer comme convenu des astreintes qu’elle a effectuées et l’a sollicitée pour effectuer des astreintes bien au-delà des deux permanences week-end par mois, allant jusqu’à lui confier des astreintes aussi bien la semaine que le week-end.

Sur sa demande en paiement de la contrepartie de la clause de non-concurrence, la salariée soutient qu’elle aurait dû percevoir, à la date de la rupture effective de son contrat de travail, sa contrepartie financière prévue contractuellement. A ce jour, alors même que la rupture du contrat de travail a pris effet au 31 octobre 2017, elle n’a pas perçu cette contrepartie financière pourtant prévue contractuellement.

Sur la prétendue nécessité de respecter la clause de non concurrence pendant une période de 12 mois avant d’en percevoir la contrepartie financière, cette condition n’est nullement prévue dans le contrat de travail. De plus, toute clause de non-concurrence nécessite une contrepartie financière versée mensuellement et soumise à cotisation dès la rupture du contrat de travail et non pas à l’issue une durée de 12 mois.

Sur la prétendue violation par la salariée de la clause de non concurrence, la société ne justifie pas de ce fait.

Bien que le lien entre la prétendue activité de la salariée corrélativement à l’exécution de son contrat de travail et le non-paiement de la contrepartie inhérente à la clause de non concurrence soit inexistant, il convient de souligner qu’elle n’a jamais exercé d’activité concurrente à celle de son employeur. En effet, à compter du mois de janvier 2012, alors qu’elle ne travaillait pas encore pour la société, elle a débuté une activité dans le secteur de la santé humaine pour exercer en réflexologie et aromathérapie

Enfin, l’argument selon lequel elle aurait manqué à la clause d’exclusivité stipulée dans son contrat de travail ne tient pas, dans la mesure où cette clause est illicite, puisqu’elle est rédigée en termes généraux et imprécis, ne spécifiant pas les contours de l’activité complémentaire interdite (bénévole ou lucrative, professionnelle ou de loisirs) et ne permettant pas de limiter son champ d’application. L’employeur ne démontre pas davantage que cette clause était indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché.

Sur la prétendue activité concurrente postérieurement à la rupture du contrat de travail, Il convient de préciser qu’après la rupture conventionnelle de son contrat de travail le 31 octobre 2017, elle a travaillé pour la société La Maison By GTS, agence réceptive sous son statut d’auto entrepreneur, du 1 er février au 6 avril 2018. Aussi, elle a modifié l’activité de sa société sous le terme générique « d’activité de voyagiste ». Pour autant, contrairement aux propos de l’employeur, elle n’a jamais exercé d’activité concurrente à celle de ce dernier pour diverses raisons ci-après exposées.

En effet, d’une part, la société La Maison By GTS n’exerce pas dans le même secteur d’activité, n’a pas le même code ape, et n’applique pas la même convention collective nationale.

D’autre part, peu importe l’activité de cette société, elle n’était pas salariée de la cette dernière. Elle n’exerçait pas les mêmes fonctions en tant qu’auto entrepreneur qu’au sein de la société Easy Transfer Riviera puisqu’elle occupait le poste d’assistante chef de projet.

A contrario, le défaut de perception injustifié de la contrepartie inhérente à sa clause de non-concurrence a causé un préjudice à Mme [K] [G] qui n’a pas pu exercer, comme son expérience lui aurait pourtant permis, notamment, en qualité de chauffeur privé. Son préjudice découle du fait qu’elle a rencontré de grandes difficultés pour rechercher et obtenir un nouvel emploi stable, dans la mesure où sa clause de non-concurrence s’étend sur les Alpes-Maritimes et le Var.

Sur la demande reconventionnelle indemnitaire de l’employeur fondée sur une prétendue violation de la clause de non-concurrence, Mme [K] [G] répond :

– qu’il ne démontre pas avoir subi le moindre préjudice,

– que le contrat de travail ne stipule aucune clause pénale en cas de violation de ladite clause par la salariée,

– qu’il ne justifie d’aucun préjudice à hauteur du montant qu’il invoque.

C’est la raison pour laquelle il est demandé à la cour de confirmer la décision rendue par les premiers juges en ce qu’ils ont condamné la société au paiement de la somme de 6.999 € à titre de rappels de salaire afférents au paiement de la contrepartie financière de la clause de non concurrence pour la période du 31 octobre 2017 au 31 octobre 2018, outre la somme de 699€ à titre de congés payés y afférents selon le calcul suivant : 2.333 euros (salaire moyen brut perçu) x 25 % = 583,25 x 12 mois = 6.999 euros.

Sur les manquements de son employeur à l’obligation de sécurité résultat, la salariée fait valoir qu’en raison d’un manque de personnel et pour satisfaire les besoins de son employeur, elle a été contrainte d’assumer de multiples tâches, dans l’urgence et sans compter ses heures de travail. Aucune mesure n’a été prise par l’employeur pour protéger et éviter la dégradation de l’état de santé de la salariée comme il l’a été démontré précédemment, contrevenant aux dispositions de l’audit prévoyant sa restructuration de poste. L’employeur a ainsi gravement porté atteinte à l’état de santé de sa salariée qui n’a cessé de se dégrader.

MOTIFS 

Sur les demandes relatives à l’exécution du contrat de travail 

1-Sur la demande en paiement d’heures supplémentaires

Aux termes de l’article L. 3171-4 du code du travail : En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Le salarié doit apporter des éléments précis à l’appui de sa demande.

La salariée verse aux débats un tableau récapitulatif très précis comportant le nombre d’heures supplémentaires effectuées chaque jour de chaque mois de septembre 2016 compris à octobre 2017 compris. Ce tableau est très clair et comporte les majorations de salaires appropriées. Il est indiqué, pour chaque jour concerné, l’heure d’arrivée au travail et l’heure de départ. La pause déjeuner est déduite.

Il en ressort que Mme [K] [G] a effectué 19 heures 50 minutes d’heures supplémentaires lui donnant droit à un rappel de salaires d’un montant de 648, 71 euros.

Le contrat de travail prévoit qu’un relevé auto-déclaratif signé par Mme [K] [G] sera établi chaque mois et remis à la direction contre émargement et conservé pendant trois ans par l’entreprise.

L’employeur ne saurait reprocher à la salariée de ne pas avoir produit, dans le cadre de la procédure, les relevés auto-déclaratif mensuels prévus par le contrat de travail, dès lors que, comme le fait observer cette dernière, il est stipulé c’est à l’employeur de conserver de telles pièces. Celui-ci aurait pu dès lors verser aux débats ces pièces.

De plus, si, comme le soutient la société Easy Transfer Riviera, il est exact que la salariée n’a établi aucun relevé auto-déclaratif pendant la relation de travail, l’employeur ne démontre pas pour autant qu’il aurait rappelé à l’ordre la salariée pour ce fait.

Le contrat de travail stipule encore que : « l’accomplissement d’heures supplémentaires éventuelles devra faire l’objet d’un accord exprès et écrit ne pouvant être autorisé que par le gérant de l’entreprise ».

Si Mme [K] [G] ne démontre pas que les heures supplémentaires qu’elle aurait effectuées sans être payées ont fait l’objet d’un accord exprès et écrit de la part de l’employeur, cet argument ne saurait non plus faire obstacle à sa demande en paiement.

En effet, Mme [K] [G] a effectué d’autres heures supplémentaires qui lui ont bien été réglées par l’employeur, alors même que ce dernier ne verse aucun élément établissant qu’il avait donné son accord exprès et écrit pour ces heures rémunérées. En outre, l’absence d’autorisation préalable n’exclut pas la réalité de l’accord implicite de l’employeur à la réalisation d’heures supplémentaires.

Enfin, l’employeur ne produit aux débats aucune pièce justifiant qu’il aurait contrôlé et décompté les heures de travail de l’intimée.

Mme [K] [G] a droit au paiement des 19 h 50 d’heures supplémentaires effectuées non payées et ce à hauteur de 648, 71 euros.

Le jugement est confirmé en ce qu’il condamné la société Easy Transfer Riviera à lui payer : 648,72 euros bruts de rappels de salaires au titre des heures supplémentaires 64, 87 euros bruts au titre des congés payés sur heures supplémentaires

2-Sur la demande en paiement d’astreintes

L’article L. 3121-9 du Code du travail dispose que : « une période d’astreinte s’entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, doit être en mesure d’intervenir pour accomplir un travail au service de l’entreprise. »

Une période d’astreinte est donc une période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, doit être en mesure d’intervenir pour accomplir un travail au service de l’entreprise.

Le contrat de travail de l’intimée prévoit que celle-ci doit accomplir des : « permanences » de : « manière effective ». Il stipule encore que : « ces permanences sont par principe passives, elles ne nécessitent donc pas une présence physique sur le lieu de travail mais peuvent devenir actives selon les événements qui se produisent au cours de cette astreinte. Dès lors, Mme [K] [G] devra rester dans un périmètre géographique permettant, le cas échéant, d’assurer ces permanences actives dans les plus brefs délais. »

Il prévoit également que la rémunération des astreintes passives s’élève à 50 euros bruts par jour. Pour l’astreinte dite active, le temps de travail effectif est pris en compte et traité, le cas échéant, au titre des heures supplémentaires.

Enfin, le contrat de travail précise que la salariée doit assurer un minimum de deux permanences de week-end par mois du vendredi soir au lundi matin, première prise de service conducteur.

En cas de litige sur l’exécution des astreintes ou des heures d’intervention, il appartient au salarié de soumettre à la juridiction saisie les éléments suffisamment précis et sérieux étayant sa demande.

Mme [K] [G] produit aux débats plusieurs tableaux détaillant les permanences réalisées du mois de septembre 2016 au mois de décembre 2017.

L’article R 3121-2 du code du travail dispose : En fin de mois, l’employeur remet à chaque salarié intéressé un document récapitulant le nombre d’heures d’astreinte accomplies par celui-ci au cours du mois écoulé ainsi que la compensation correspondante.

De son côté, l’employeur ne produit pas aux débats le document récapitulant le nombre d’heures d’astreintes accomplies par le salarié au cours du mois écoulé, ainsi que la compensation correspondante, contrairement à ce qu’exige l’article R 3121-2 du code du travail.

L’article L3121-12 du code du travail énonce que :

« A défaut d’accord prévu à l’article L. 3121-11 :

1° Le mode d’organisation des astreintes et leur compensation sont fixés par l’employeur, après avis du comité social et économique, et après information de l’agent de contrôle de l’inspection du travail,

2° Les modalités d’information des salariés concernés sont fixées par décret en Conseil d’état et la programmation individuelle des périodes d’astreinte est portée à leur connaissance quinze jours à l’avance, sauf circonstances exceptionnelles et sous réserve qu’ils en soient avertis au moins un jour franc à l’avance. »

L’employeur ne démontre pas davantage avoir porté à la connaissance de Mme [K] [G] la programmation individuelle de ses périodes d’astreinte quinze jours à l’avance. Par ailleurs, la salariée produit une capture d’écran du site internet de la société Easy Transfer Riviera qui indique que la société a : « un planning ouvert 24/7 ». Comme Mme [K] [G] le soutient, cette pièce témoigne de l’amplitude possible des astreintes sur la journée de travail et sur la semaine.

Alors que Mme [K] [G] soumet à cette juridiction des éléments suffisamment précis et sérieux étayant sa demande, l’employeur ne produit pas de pièces démontrant qu’il a contrôlé et compté les astreintes actives et passives effectuées par la salariée.

La salariée a droit au paiement des astreintes réalisées et non rémunérées par l’employeur, de sorte que le jugement est confirmé en ce qu’il a condamné la société Easy Transfer Riviera à payer à Mme [K] [G] :

– 1.650,00 euros bruts à titre de rappel de salaire pour non-paiement des astreintes.

– 165,00 euros brut au titre des congés payés afférents aux astreintes

3.-Sur la demande de dommages intérêts pour résiliation unilatérale et brutale des droits de prévoyance

Selon l’article 1 de l’avenant n°3 du 18 mai 2009 à l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail, « Le premier point du 2ème paragraphe de l’article 14 de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 est remplacé par les dispositions suivantes : « ‘ que les intéressés garderont le bénéfice des garanties des couvertures complémentaires santé et prévoyance appliquées dans leur ancienne entreprise pendant leur période de chômage et pour des durées égales à la durée de leur dernier contrat de travail, appréciée » en mois entiers, dans la limite de 9 mois (1) de couverture.

L’article L 911-8 du code de la sécurité sociale ajoute : « Les salariés garantis collectivement, dans les conditions prévues à l’article L. 911-1, contre le risque décès, les risques portant atteinte à l’intégrité physique de la personne ou liés à la maternité ou les risques d’incapacité de travail ou d’invalidité bénéficient du maintien à titre gratuit de cette couverture en cas de cessation du contrat de travail, non consécutive à une faute lourde, ouvrant droit à prise en charge par le régime d’assurance chômage, selon les conditions suivantes :

1° Le maintien des garanties est applicable à compter de la date de cessation du contrat de travail et pendant une durée égale à la période d’indemnisation du chômage, dans la limite de la durée du dernier contrat de travail ou, le cas échéant, des derniers contrats de travail lorsqu’ils sont consécutifs chez le même employeur. Cette durée est appréciée en mois, le cas échéant arrondie au nombre supérieur, sans pouvoir excéder douze mois,

2° Le bénéfice du maintien des garanties est subordonné à la condition que les droits à remboursements complémentaires aient été ouverts chez le dernier employeur,

3° Les garanties maintenues au bénéfice de l’ancien salarié sont celles en vigueur dans l’entreprise ,

4° Le maintien des garanties ne peut conduire l’ancien salarié à percevoir des indemnités d’un montant supérieur à celui des allocations chômage qu’il aurait perçues au titre de la même période,

5° L’ancien salarié justifie auprès de son organisme assureur, à l’ouverture et au cours de la période de maintien des garanties, des conditions prévues au présent article,

6° L’employeur signale le maintien de ces garanties dans le certificat de travail et informe l’organisme assureur de la cessation du contrat de travail mentionnée au premier alinéa.

Le présent article est applicable dans les mêmes conditions aux ayants droit du salarié qui bénéficient effectivement des garanties mentionnées au premier alinéa à la date de la cessation du contrat de travail. »

Il résulte de ces textes légaux qu’il existe un maintien, au profit des anciens salariés qui perçoivent des allocations de chômage, de toutes les garanties santé et prévoyance applicables dans leurs anciennes entreprises. Les salariés concernés sont ceux dont le contrat de travail a été rompu et qui sont pris en charge par le régime de l’assurance chômage.

Mme [K] [G] démontre qu’elle a perçu les allocations du pôle emploi du 31 décembre 2017 au 30 septembre 2018 après la rupture de son contrat de travail le 31 octobre 2017 de sorte qu’elle était éligible, durant cette période, au maintien des garanties santé et prévoyance applicable dans l’entreprise Easy Transfer Riviera.

Or, la salariée produit aux débats un courrier du 20 avril 2018 de l’ancien assureur de son employeur l’informant que la résiliation de la portabilité de ses droits le 31 décembre 2017 fait suite à la résiliation des contrats de la société Easy Transfer Riviera.

Ainsi, la salariée démontre n’avoir pas pu bénéficier de la portabilité de ses droits à compter du 31 décembre 2017 alors qu’elle y avait droit.

Il importe peu de savoir qui de l’assureur ou de l’employeur est à l’origine de la résiliation des contrats de garantie. En effet, la société Easy Transfer Riviera ne s’est pas assurée du fait que les anciens salariés bénéficiaires de la portabilité ne subissaient pas une rupture de leurs droits par le changement d’assureur et qu’il n’a pas vérifié s’ils restaient couverts par l’ancien assureur ou devaient être repris par le nouveau.

Il existe un manquement de la société Easy Transfer Riviera à son obligation de faire bénéficier Mme [K] [G] du maintien à titre gratuit de la couverture prévoyance suite à la cessation du contrat de travail, non consécutive à une faute lourde.

Cette faute est à l’origine d’un préjudice financier pour Mme [K] [G], qui démontre avoir dû souscrire le 1er mai 2018, une nouvelle complémentaire santé pour elle-même et pour sa fille, ce qui a représenté un coût à sa charge de 648,33 euros.

Le jugement est confirmé en ce qu’il a condamné la société Easy Transfer Riviera à payer à Mme [K] [G] la somme de 500 euros nets de dommages intérêts au titre de résiliation de la portabilité des droits à la prévoyance.

4-Sur la demande de dommage intérêts pour manquement à l’obligation d’information quant à la rupture du contrat de prévoyance

Il a déjà été accordé les dommages intérêts demandès par la salariée relativement à la résiliation de la portabilité des droits à la prévoyance, lesquels couvrent entièrement le préjudice mis en avant par cette dernière. Mme [K] [G] est donc déboutée sa demande indemnitaire au titre d’un manquement de l’employeur à son obligation d’information.

5-Sur les manquements à l’obligation de sécurité

Selon l’article L 4121-1 du code du travail :

L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l’article L. 4161-1,

2° Des actions d’information et de formation ,

3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.

Ne méconnaît pas l’obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail.

Il appartient à l’intimée de démontrer les manquements de l’employeur, à son obligation de sécurité, dont elle se prévaut.

Mme [K] [G] produit les conclusions de l’audit interne de l’entreprise du 29 août 2018, lequel constate que, au sein de l’entreprise Easy Transfer Riviera, il n’y a aucun outil en faveur du management et des ressources humaines. Ni entretien, ni réunion ne sont menées. Les missions des salariés sont floues.

Dans son attestation du 12 juillet 2018, Mme [H] [L], chef de projet événementiel qui a exercé des missions pour la société Easy Transfer Riviera indique qu’elle pu constater que la santé de la salariée se dégradait au fil du temps. Elle précise : « en raison de la surcharge de travail, des horaires tardifs lors de coordinations de soirée » et de : « la pression liée à tout cela ». Elle indique enfin : « la quantité de travail demandé à Mme [G] aux différents postes à responsabilités comme assistance commerciale et coordinatrice du terrain ont entraîné une dégradation de ses conditions au travail et de ses relations avec sa hiérarchie. »

Mme [U] [T], médecin généraliste de la salariée, relève, dans son certificat médical du 9 juillet 2018, que la patiente présente : « depuis l’été dernier, une altération de son état de santé psychologique. Nous avons dû avec mon associé qu’elle a pu rencontrer lors de mes congés, lui prescrire des arrêts de travail pour isolement par rapport à son environnement professionnel, j’ai reçu à plusieurs reprises cette patiente en pleurs et épuisée moralement et psychologiquement, suite aux relations avec son employeur de l’époque et la pression exercée sur elle. J’ai également dû lui prescrire un traitement médicamenteux anxiolytique et l’adresser à un confrère psychiatre. »

L’article R4127-28 du code de la santé publique dispose : La délivrance d’un rapport tendancieux ou d’un certificat de complaisance est interdite.

Contrairement à ce que soutient l’employeur, les termes du certificat médical rédigé par Mme [U] [T] ne permettent pas de le qualifier de certificat de complaisance. En effet, si ce médecin a diagnostiqué chez la salariée un épuisement moral et psychologique, il n’a fait que reprendre les explications de sa patiente, sans certifier lui-même la véracité dudit lien.

En revanche, le certificat de M. [C] [J], masseur kinésithérapeute, ne peut emporter la conviction de la cour. En effet, si celui-ci affirme que les éléments de son diagnostic de lombo sciatalgie et le contexte professionnel difficile subi par la salariée sont liés, il n’a pour autant pas été le témoin direct dudit contexte. C’est à tort qu’il s’avance sur l’existence de ce prétendu lien.

Le compte rendu de visite médicale du 9 novembre 2016 rédigé par le médecin du travail relève que la salariée souffre de dorsopathies : « liées à contrariétés et conflit, actuellement difficultés avec organisation du travail du 9 novembre 2016. »

Dans son attestation du 19 septembre 2018, M. [Y] [V], qui partageait le même espace ouvert que Mme [K] [G], relate que cette dernière, à la fin de leurs journées de travail partait : « en larmes, ou dans des états d’anxiété ou de nervosité avancés. » Selon lui, ces états étaient dues : « à une charge de travail pas en adéquation avec ce qu’il était possible de réaliser de manière efficace et concluante sur une journée de travail classique. » Il précisait : « la faute à son responsable M. [A] [B], qui lui intimait de nombreux ordres dans la journée, et fréquemment liés à ses mouvements d’humeur de nature à mettre [K] dans une position psychologique difficile. »

Ces éléments de preuve nombreux et précis établissent un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité au détriment de l’état de santé de Mme [K] [G]. Des dommages intérêts à hauteur de 2000 euros répareront intégralement le préjudice.

Il y a lieu de condamner la société Easy Transfer Riviera à payer à Mme [K] [G] la somme de 2000 euros de dommages-intérêts en réparation du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.

Le jugement est infirmé de ce chef.

6-Sur la demande reconventionnelle de dommages-intérêts de l’employeur fondée sur la violation de l’obligation de loyauté de la salariée en lien avec la clause de non-concurrence :

-sur le caractère dérisoire de la contrepartie financière 

La clause de non-concurrence stipulée au contrat de travail de la salariée prévoit que l’interdiction de concurrence est applicable pendant une durée de douze mois, et limitée aux départements des Alpes-Maritimes et Var, périmètre correspondant à la zone d’influence et d’intervention de la société.

La clause ajoute qu’elle s’appliquera à compter du jour de départ effectif de Mme [K] [G] de la société et que, en contrepartie, et dans l’hypothèse où elle ne serait pas levée, une indemnité unique, forfaitaire et transactionnelle fixée à la somme de 1500 euros serait versée à Mme [K] [G].

Mme [K] [G] soutient que la contrepartie financière prévue à sa clause de non-concurrence est dérisoire. Effectivement, la clause de non-concurrence est nulle si le montant de la contrepartie est dérisoire car cela équivaut à une absence de contrepartie.

En l’espèce, le contrat de travail prévoit que la contrepartie financière à la clause de non-concurrence est de 1500 euros pour une durée d’exécution de douze mois.

S’agissant du montant de la rémunération perçue par la salariée, si son contrat de travail stipule un salaire mensuel brut de 2000,07 euros lors de son engagement, il résulte de l’acte de rupture conventionnelle du 21 septembre 2017 que son salaire mensuel moyen était en réalité de 2333,40 euros brut.

Ainsi, la contrepartie financière prévue correspond donc à 64 % du salaire mensuel brut moyen de l’intimée pour une durée d’exécution de douze mois et ce sur deux départements. Cette contrepartie apparaît dérisoire, comme le souligne l’intimée.

– sur la violation de la clause de non-concurrence

C’est à l’employeur qu’il appartient d’apporter la preuve d’une éventuelle violation de la clause de non-concurrence par la salariée.

Le contrat de travail de [K] [G] contenait une clause de non-concurrence rédigée en ces termes : « Compte tenu de la nature de ses fonctions et des informations confidentielles dont elle dispose, Mme [K] [G] s’engage, en cas de rupture du contrat de travail, pour quelque motif que ce soit :

– à ne pas entrer au service d’une société concurrente,

– à ne pas s’intéresser directement ou indirectement à tout emploi pouvant concurrencer l’activité de la société.

Cette interdiction de concurrence est applicable pendant une durée de douze mois, et limitée aux départements des Alpes-Maritimes et Var, périmètre correspondant à la zone d’influence et d’intervention de la société. Elle s’appliquera à compter du jour de départ effectif de Mme [K] [G] de la société. En contrepartie, et dans l’hypothèse où elle ne serait pas levée, au profit de la demande de Mme [K] [G], une indemnité unique, forfaitaire et transactionnelle fixée à la somme de 1500 euros serait versée à Mme [K] [G], conformément aux dispositions de l’article 2044 et suivants du nouveau code de procédure civile ».

Selon cette clause de non-concurrence, l’intimée s’était engagée à ne pas entrer au service d’une société concurrente et à ne pas s’intéresser directement ou indirectement à tout emploi pouvant concurrencer l’activité de la société et ce pendant douze mois à compter de la rupture du contrat de travail (soit à compter du 31 octobre 2017) sur les départements des Alpes-Maritimes et du Var.

L’extrait kbis à jour au 11 novembre 2020 de la société Easy Transfer Riviera démontre que celle-ci exerce, pour activité, le transport de personnes en voiture vtc, la mise à disposition de véhicules voitures et autocars avec chauffeurs. Les statuts de la société, au 9 juillet 2015, indiquent que l’objet de la société est le transport de personnes en voiture vtc, la mise à disposition de véhicules voiture et autocars avec chauffeurs.

Au sein de la société Easy Transfer Riviera, Mme [K] [G] avait été engagée en qualité principale d’employée du service administratif, commercial, contentieux, technique, d’exploitation, coordination terrain, du personnel (voyageurs). Elle avait aussi pour fonction accessoire celle de conducteur de voitures particulières.

L’employeur produit aux débats des éléments recueillis sur le site infogreffe qui démontrent, que durant la période d’exécution de sa clause de non-concurrence (du 31 octobre 2017 au 31 octobre 2018), l’intimée exerçait une activité professionnelle indépendante dans le cadre de ses activités de voyagiste. D’ailleurs Mme [K] [G] reconnaît avoir exercé sous le statut d’autoentrepreneur d’activités de voyagiste des missions pour le compte de la société GTS du 1er février 2018 au 6 avril 2018.

L’employeur produit encore aux débats une capture d’écran du site internet de la société la Maison by GTS (pour le compte de laquelle Mme [K] [G] effectuait des prestations). Or, cette capture d’écran indique que la société est reconnue dans l’industrie du tourisme et qu’elle assure notamment du transport et de la logistique. Cette capture d’écran présente une photographie de cars, de petits bus et de voitures.

En outre, l’employeur verse un courriel de description du poste occupé par Mme [K] [G] pour le compte de la société La Maison By Gts. La société est une : « agence réceptive de tourisme d’affaires (meeting, incentives, congés, événéments) et de groupes loisirs. Le poste occupé est celui d’assistant de chef de projet, ce qui implique l’élaboration de programmes de séjours sur la région [Localité 4]/[Localité 3]/[Localité 5] ainsi que la présentation et le budget en anglais. Le poste concerne également l’assistance à la mise à jour de données fournisseurs (hôtels, restaurants, activités, événementiels).

Ces pièces versées aux débats par la société Easy Transfer Riviera n’établissent pas suffisamment que la société la Maison By Gts pour le compte de laquelle l’intimée a travaillé, étaient concurrentes. En effet, il est tout au plus acquis que la société la Maison By GTS assurait du transport et de la logistique dans l’industrie du tourisme tandis que la société Easy Transfer Riviera effectuait du transport de personnes en voiture vtc, la mise à disposition de véhicules voiture et autocars avec chauffeurs.

Il y a lieu de débouter la société Easy Transfer Riviera de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de 6999 euros fondée sur une violation de l’obligation de loyauté de la salariée en lien avec la clause de non-concurrence.

Le jugement est confirmé à ce titre.

7-Sur la demande reconventionnelle de dommages-intérêts l’employeur fondée sur la violation de la clause d’exclusivité

L’article L 1222-1 du code du travail dispose : « Le contrat de travail est exécuté de bonne foi. »

Le contrat comportait une clause d’exclusivité rédigée ainsi : «  Mme [K] [G] s’engage à travailler exclusivement pour le compte de la société Easy Transfer Riviera et à y consacrer tout son temps. Pendant la durée du présent contrat, elle s’interdit de s’intéresser directement ou indirectement, de quelque manière que ce soit, à toute affaire susceptible de concurrencer par son activité celle de l’employeur et ce sur l’ensemble de sa zone d’activité. Vous êtes informé que lors des périodes de repos hebdomadaire et les congés payés, vous ne pouvez exercer aucune activité à titre onéreux ou gracieux pour le compte de tierces personnes physiques ou morales. »

Cette clause d’exclusivité prévoit que :

– la salariée doit travailler exclusivement pour le compte de la société Easy Transfer Riviera,

– pendant la durée du contrat, elle s’interdit de s’intéresser directement ou indirectement, de quelque manière que ce soit, à toute affaire susceptible de concurrencer par son activité celle de l’employeur et ce sur l’ensemble de sa zone d’activité,

– lors des périodes de repos hebdomadaire et des congés payés, elle ne peut exercer aucune activité à titre onéreux ou gracieux pour le compte de tierces personnes physiques ou morales.

La clause d’exclusivité n’est pas licite si elle est rédigée en termes généraux et imprécis ne spécifiant pas les contours de l’activité complémentaire qui serait envisagée par le salarié, activité bénévole ou lucrative, professionnelle ou de loisirs et qu’ils ne permettent pas dès lors de limiter son champ d’application ni de vérifier si la restriction à la liberté du travail est justifiée et proportionnée.

En l’espèce, la clause d’exclusivité prévue au contrat de travail est rédigée en termes généraux et imprécis dans la mesure où elle indique en premier lieu que : « Mme [K] [G] s’engage à travailler exclusivement pour le compte de la société Easy Transfer Riviera et à y consacrer tout son temps ». En dernier lieu, cette clause est rédigée ainsi : «  Vous êtes informé que lors des périodes de repos hebdomadaire et les congés payés, vous ne pouvez exercer aucune activité à titre onéreux ou gracieux pour le compte de tierces personnes physiques ou morales. »

L’activité complémentaire à laquelle [K] [G] pourrait se livrer n’est pas limitée dans son champs d’application par la clause. En particulier, la clause d’exclusivité ne précise pas si elle concerne les activités bénévoles, lucratives professionnelles ou de loisirs de la salarié.

L’employeur ne peut en conséquence se fonder sur cette clause illicite pour tenter d’obtenir la condamnation de la salariée à lui payer des dommages-intérêts au motif de la prétendue violation de la clause d’exclusivité.

Il y a lieu de débouter la société Easy Transfer Riviera de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de 6999 euros fondée sur une violation de l’obligation de loyauté de la salariée en lien avec la clause d’exclusivité (ou toute autre somme qu’il plaira à la cour de déterminer).

Le jugement est confirmé à ce titre.

8-Sur la demande de rappels de salaires de la salariée en raison du défaut de perception de la contrepartie financière à la clause de non-concurrence

Si le salarié manque dès la rupture de son contrat de travail, même momentanément, à son obligation de non-concurrence, il perd son droit à indemnité, celle-ci étant la contrepartie d’une obligation à laquelle il s’est soustrait.

La résistance de l’employeur à exécuter son obligation de payer la contrepartie pécuniaire de la clause de non-concurrence peut occasionner au salarié un préjudice dont il y a lieu d’évaluer l’étendue.

Le salarié peut prétendre à des dommages et intérêts en réparation du préjudice que lui a causé l’inexécution par l’employeur de son obligation de verser la contrepartie financière, à condition de démontrer l’existence de son préjudice

En l’espèce, la clause de non-concurrence litigieuse ne prévoit pas que la contrepartie financière prévue de 1500 euros sera versée au cours du délai d’exécution la clause. La clause stipule que cette contrepartie financière est une indemnité unique, forfaitaire, transactionnelle.

Compte tenu de la rédaction de ladite clause, cette contrepartie financière de 1500 euros prenait donc la forme d’une indemnité forfaitaire qui aurait dû être versée par l’employeur à la salariée, à l’expiration du contrat de travail.

Tel n’a pas été le cas puisque cette contrepartie financière n’a toujours pas été réglée à Mme [K] [G] par la société Easy Transfer Riviera.

Or, si l’employeur ne verse pas l’indemnité à laquelle il est pourtant tenu en application de la clause de non-concurrence, le salarié est libéré de son obligation et peut donc entrer au service d’une société concurrente.

En l’espèce, Mme [K] [G] ne demande pas le paiement de la contrepartie financière de la clause à hauteur de 1500 euros, que l’employeur ne lui a jamais versé.

L’intimée ne sollicite pas non plus de dommages-intérêts en lien avec la réparation du préjudice éventuel que lui a causé l’inexécution par l’employeur de son obligation de verser la contrepartie financière de 1500 euros.

En effet, celle-ci se limite à demander la confirmation du jugement en ce qu’il a condamné la société Easy Transfer Riviera à lui payer la somme de 6 999 euros à titre de rappels de salaires afférents au paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, ce qui ne saurait s’analyser en une demande indemnitaire.

Cependant, la contrepartie financière de la clause de non-concurrence ayant la nature d’une indemnité compensatrice de salaire stipulée en conséquence de l’engagement du salarié de ne pas exercer, après la cessation du contrat de travail, d’activité concurrente à celle de son ancien employeur, et ne constituant pas une indemnité forfaitaire prévue en cas d’inexécution d’une obligation contractuelle, il ne s’agit pas d’une clause pénale.

La contrepartie financière n’étant pas une clause pénale, la juridiction ne peut donc pas substituer au montant contractuellement prévu, sa propre réévaluation dudit montant et l’augmenter en faveur de la salariée à hauteur de ce que cette dernière demande (6999 euros).

En demandant à la cour de condamner l’employeur à lui payer la somme de 6 999 euros à titre de rappels de salaires afférents au paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, la salariée sollicite en réalité de la cour qu’elle réévalue en l’augmentant le montant de ladite contrepartie.

Une telle demande est infondée en droit.

Il y a donc lieu de :

– rejeter la demande de la salariée tendant à la condamnation de la société Easy Transfer Riviera à lui payer la somme de 6 999 euros à titre de rappels de salaires afférents au paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence,

– infirmer le jugement de ce chef.

Sur les autres demandes

1-Sur les intérêts

Les créances salariales ainsi que la somme allouée à titre d’indemnité de licenciement sont productives d’intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l’employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation.

Les créances indemnitaires sont productives d’intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

La capitalisation des intérêts sera ordonnée dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.

2-Sur la remise de documents

La cour ordonne à la société Easy Transfer Riviera de remettre à [K] [G] un bulletin de paie conforme à l’arrêt.

Il n’est pas nécessaire d’assortir cette obligation d’une astreinte. La demande en ce sens de la salariée est rejetée.

Sur les frais du procès

La société Easy Transfer Riviera est déboutée de sa demande d’indemnité de procédure.

En application des dispositions des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la société Easy Transfer Riviera est condamnée aux dépens ainsi qu’au paiement d’une indemnité de 2.500 euros.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud’homale,

– Infirme le jugement en ce qu’il :

– condamne la société Easy Transfer Riviera à payer à Mme [K] [G] la somme de 200 euros nets de dommages-intérêts en réparation du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité,

– condamne la société Easy Transfer Riviera à payer à Mme [K] [G] la somme de 6 999 euros net à titre de rappels de salaire afférents au paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence pour la période du 31 octobre 2017 au 31 octobre 2018,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

– Condamne la société Easy Transfer Riviera à payer à Mme [K] [G] la somme de 2000 euros de dommages-intérêts en réparation du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité,

– Rejette la demande de Mme [K] [G] de condamnation de la société Easy Transfer Riviera à lu payer 6999 euros de dommages-intérêts en raison de l’absence de paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence outre celle de 699 euros au titre des congés payés afférents,

– Confirme le jugement en toutes ses autres dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Déboute Mme [K] [G] de sa demande indemnitaire au titre d’un manquement de l’employeur à son obligation d’information,

Dit que les créances indemnitaires sont productives d’intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Dit que les créances salariales ainsi que la somme allouée à titre d’indemnité de licenciement sont productives d’intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l’employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation,

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,

Ordonne à la société Easy Transfer Riviera de remettre à Mme [K] [G] un bulletin de paie conforme à l’arrêt,

Rejette la demande tendant à voir prononcer une astreinte,

Condamne la société Easy Transfer Riviera aux dépens de la procédure d’appel,

Condamne la société Easy Transfer Riviera à payer à Mme [K] [G] une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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