Violation de clause d’exclusivité : 10 mai 2022 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/03266
Violation de clause d’exclusivité : 10 mai 2022 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/03266
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10 mai 2022
Cour d’appel de Toulouse
RG n°
21/03266

10/05/2022

ARRÊT N°348/2022

N° RG 21/03266 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OJK4

CBB/IA

Décision déférée du 30 Juin 2021 – Président du TC de MONTAUBAN ( 2021/10)

[I][Z]

S.A.R.L. AYROLES CAUSSADE

C/

Me [N] [M] – Liquidateur amiable de S.A.R.L. [M] MOTOCULTURE

[N] [M]

[R] [M] épouse [M]

S.A.R.L. [M] MOTOCULTURE

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

3ème chambre

***

ARRÊT DU DIX MAI DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

S.A.R.L. AYROLES CAUSSADE

130, route du Causse

82300 MONTEILS

Représentée par Me Thierry EGEA de la SELARL LEVI – EGEA – LEVI, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

INTIMÉS

Monsieur [N] [M] Pris es-qualité de liquidateuramiable de la SARL [M] MOTOCULTURE, demeurant en cette qualité audit siège

21 Bis Route de TOULOUSE

82100 CASTELSARRASIN

Représenté par Me Jean CAMBRIEL de la SCP CAMBRIEL – DE MALAFOSSE – STREMOOUHOFF – GERBAUD COUTURE-ZOU ANIA, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

Madame [R] [E] épouse [M]

58 Rue de la Provençale

82100 CASTELSARRASIN

Représentée par Me Jean CAMBRIEL de la SCP CAMBRIEL – DE MALAFOSSE – STREMOOUHOFF – GERBAUD COUTURE-ZOU ANIA, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

S.A.R.L. [M] MOTOCULTURE

21 Bis Route de Toulouse

82100 CASTELSARRASIN

Représentée par Me Jean CAMBRIEL de la SCP CAMBRIEL – DE MALAFOSSE – STREMOOUHOFF – GERBAUD COUTURE-ZOU ANIA, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant C. BENEIX-BACHER, Présidente, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. BENEIX-BACHER, président

A. MAFFRE, conseiller

E.VET, conseiller

Greffier, lors des débats : I. ANGER

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par C. BENEIX-BACHER, président, et par I. ANGER, greffier de chambre

FAITS

La SARL Ayroles Caussade qui exploite à Monteils un fonds de commerce de vente de matériels agricoles a, suivant acte du 2 novembre 2020, fait l’acquisition du fonds de commerce de la SARL [M] Motoculture exerçant dans le même secteur d’activités, situé 21 bis avenue de Toulouse à Castelsarrasin, pour un prix de 72.000 € dont 49.875 € pour les éléments incorporels et 22.125 € pour le matériel.

La SARL Ayroles Caussade et la SARL [M] Motoculture sont en affaires depuis plus de 10 ans, la SARL [M] Motoculture étant dépositaire en vue de la vente de matériels de la SARL Ayroles Caussade.

M. [N] [M], et Mme [M] sont intervenus à l’acte en leur qualité de bailleurs de la SARL [M] Motoculture au titre d’un bail commercial du 1er juillet 2007 préalablement résilié avant terme au jour de la cession du fonds.

L’acte précisait que les époux [M] avaient régularisé directement avec la SARL Ayroles Caussade un bail dérogatoire en date du même jour, d’une durée de 12 mois, moyennant un loyer mensuel de 1200 € hors-taxes outre la TVA et la provision sur charges payables d’avance, le premier de chaque mois. In fine, l’acte précisait également et notamment, que ni le propriétaire ni le locataire ne peuvent donner un congé anticipé avant la fin de la période de location prévue au contrat’; et le locataire doit payer son loyer jusqu’à la fin du bail dérogatoire même dans le cas où il décide de quitter le local avant la date de fin du contrat.

En réalité le bail dérogatoire n’a pas été établi.

La SARL Ayroles Caussade a libéré les lieux le 31 janvier 2021 et refusé de s’acquitter des loyers jusqu’au 31 octobre 2021 comme indiqué à l’acte malgré la contestation des bailleurs.

Le 4 mars 2021, à l’issue des deux mois légaux de séquestre, Mme [M] et M. [N] [M] ont mis en demeure la SARL Ayroles Caussade de libérer le prix de vente.

Par lettre du 17 mars 2021, le conseil de la SARL Ayroles Caussade demandait au notaire instrumentaire Me [G] [J] de « conserver les fonds consignés dans la mesure où il n’y a pas d’accord sur le déblocage anticipé de ces fonds confiés à votre étude » . En effet, elle soutient qu’en violation de la clause d’exclusivité des marques Husqvarna et Kubota à laquelle elles étaient tenues, la SARL [M] Motoculture avait exercé une activité occulte concurrente, de vente de matériels de marques tierces de sorte que les chiffres d’affaires déclarés dans l’acte de vente auraient été manifestement erronés.

PROCEDURE

Par acte en date du 24 mars 2021, la SARL Ayroles Caussade a fait assigner la SARL [M] Motoculture devant le juge des référés du Tribunal de Commerce de Montauban pour obtenir sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, une mesure d’expertise.

Reconventionnellement, les époux [M] sollicitaient le paiement des loyers échus.

Par ordonnance en date du 30 juin 2021, le juge a’:

sur la demande initiale de la SARL Ayroles Caussade :

– rejeté la demande d’expertise déposée par la SARL Ayroles Caussade pour absence de motif légitime ;

sur la demande reconventionnelle de la SARL [M] Motoculture :

– dit que la demande reconventionnelle de la SARL [M] Motoculture est recevable ;

– ordonné à la SARL Ayroles Caussade, sous astreinte de 300,00 € par jour de retard au-delà de 3 jours suivants la signification de la présente ordonnance, de :

*lever son opposition,

*adresser à Maître [J], notaire, un ordre de virement des fonds placés sous séquestre,

– condamné la SARL Ayroles Caussade à payer à la SARL [M] Motoculture la somme de 4.000 € au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive’;

– condamné la SARL Ayroles Caussade à payer à la SARL [M] Motoculture la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;

– condamné la SARL Ayroles Caussade aux dépens ;

Sur la demande reconventionnelle de Monsieur et Madame [M], intervenants volontaires :

– s’est déclaré incompétent au profit de Tribunal Judiciaire de Montauban,

– réservé les dépens.

Par acte en date 20 juillet 2021, la SARL Ayroles Caussade a interjeté appel de la décision. L’ensemble des chefs du dispositif de la décision sont critiqués, à l’exception du fait qu’il s’est déclaré incompétent au profit de Tribunal Judiciaire de Montauban en ce qui concerne les demandes de Monsieur et Madame [M] et a réservé les dépens.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

La SARL Ayroles Caussade, dans ses dernières écritures en date du 9 mars 2022 demande à la cour au visa de l’article 145 du code de procédure civile, de’:

– recevoir la SARL Ayroles Caussade en son appel,

sur l’appel incident des consorts [M],

In Limine Litis et à titre principal :

– confirmer l’ordonnance en date du 30 juin 2021 dont appel en ce qu’elle a déclaré incompétent Monsieur le Président du Tribunal de commerce de Montauban au profit du Tribunal Judiciaire de Montauban s’agissant des demandes des consorts [M],

à titre subsidiaire, si par extraordinaire la Cour devait retenir la compétence de la juridiction commerciale, elle ne pourrait que :

*constater l’incompétence de la juridiction des référés au profit du juge du fond,

*renvoyer les parties devant le Tribunal Judiciaire de Montauban statuant au fond,

en toute hypothèse :

– débouter les consorts [M] de leurs demandes au titre des loyers impayés,

– réformer l’ordonnance en date du 30 juin 2021 dont appel en ce qu’elle a :

* rejeté la demande d’expertise déposée par la SARL Ayroles Caussade pour absence de motif légitime.

* dit que la demande reconventionnelle de la SARL [M] Motoculture était recevable,

* ordonné à la SARL Ayroles Caussade sous astreinte de 300 € par jour de retard au-delà de 3 jours suivant la signification de la présente ordonnance de :

– lever son opposition,

– adresser à Maître [J], notaire, un ordre de virement des fonds placés sous séquestre.

*condamné la SARL Ayroles Caussade à payer à la SARL [M] Motoculture la somme de 4000 € à titre de dommage et intérêt pour procédure abusive,

* condamné la SARL Ayroles Caussade à payer à la SARL [M] Motoculture la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

* condamné la SARL Ayroles Caussade aux dépens,

statuant à nouveau’:

– ordonner une mesure d’expertise confiée à tel expert qui plaira avec pour mission de :

*convoquer l’ensemble des parties ;

*se faire remettre par les parties l’ensemble des pièces du dossier, notamment la comptabilité de la SARL [M] Motoculture concernant les trois dernières années qui ont précédé la cession du fonds de commerce, intervenue le 2 novembre 2020 ;

*rechercher le chiffre d’affaires effectué par la SARL [M] Motoculture, avec des marques concurrentes à l’activité de la SARL Ayroles Caussade durant les trois années qui ont précédé la vente ;

*évaluer les frais de préjudice subis par la SARL Ayroles Caussade ;

*proposer une réduction du prix de cession, eu égard aux volumes des chiffres d’affaires réalisés avec les concurrents des marques Husqvarda et Kubota ;

*proposer au Tribunal le prix de cession du fonds de commerce obtenu à partir des éléments recueillis au cours des opérations d’expertise ;

*établir un pré-rapport ;

*recueillir les dires des parties, en application des dispositions de l’article 276 du Code de Procédure Civile,

– déclarer recevable la demande nouvelle de la SARL Ayroles Caussade,

– condamner la SARL [M] Motoculture à consigner le prix de vente du fonds de commerce entre les mains de Maître [J],

– condamner tout succombant au paiement d’une somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

– condamner solidairement la SARL [M] Motoculture et les Consorts [M] aux entiers dépens de première instance et d’appel.

M. [N] [M], Mme [M] et la SARL [M] Motoculture représentée par sont liquidateur amiable M. [N] [M], dans leurs dernières écritures en date du 11 février 2022, formant appel incident, demandent à la cour au visa des articles 74, 564, 568 et 872 du Code de procédure civile et L.145-1 et s. du Code de commerce, de’:

in limine litis’:

– déclarer irrecevable la demande nouvelle formée pour la première fois en cause d’appel de la SARL Ayroles Caussade tendant à « condamner la SARL [M] Motoculture à consigner le prix de vente du fonds de commerce entre les mains de Maître [J]. »

Sur le fond, à titre principal,

– confirmer l’ordonnance de référé du 30/06/2021 en toutes ses dispositions sauf en ce que le Président du Tribunal de commerce de Montauban s’est déclaré incompétent au profit du Tribunal Judiciaire de Montauban sur les demandes de Monsieur et Madame [M],

évoquant l’affaire au fond,

– donner acte à la SARL Ayroles Caussade de ce qu’elle conclut à l’existence d’un bail commercial verbal de droit commun régi par les articles L.145-1 et suivants du Code de commerce,

– condamner la SARL Ayroles Caussade à payer à Monsieur et Madame [N] et [R] [M] la somme de 14.400 euros pour la période du 1er février 2021 au 1er février 2022, somme à parfaire à la date de l’arrêt à intervenir sur la base d’un loyer commercial de 1200 euros par mois,

subsidiairement,

– condamner la SARL Ayroles Caussade à payer à Monsieur et Madame [N] et [R] [M] la somme de 10.800 (dix mille huit cents) euros au titre des loyers dus sur la période du 1er février 2021 jusqu’au 1er novembre 2021, soit 10.800 euros, date de fin du bail commercial dérogatoire,

en cas de refus d’évocation,

– dire et juger que le Président du Tribunal de commerce de Montauban était matériellement compétent pour ordonner le paiement des loyers dus au terme du bail commercial dérogatoire liant les parties,

– renvoyer les parties devant le Président du Tribunal de commerce de Montauban statuant en référé pour qu’il soit statué sur cette demande,

à titre subsidiaire,

– confirmer l’ordonnance du 30/06/2021 en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

– condamner la SARL Ayroles Caussade à payer à la SARL [M] Motoculture une indemnité de 2.000 euros par application de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamner la SARL Ayroles Caussade à payer à Monsieur et Madame [N] et [R] [M], une indemnité de 2.000 euros par application de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamner la SARL Ayroles Caussade aux entiers dépens d’appel,

– débouter la SARL Ayroles Caussade de l’intégralité de ses demandes,

en toutes hypothèses,

– condamner la SARL Ayroles Caussade à payer à la société [M] Motoculture la somme de 72 000 euros en paiement du prix de cession de son fonds de commerce,

– débouter la SARL Ayroles Caussade de l’intégralité de ses demandes,

– condamner la SARL Ayroles Caussade aux entiers dépens d’appel.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 14 mars 2022.

MOTIVATION

La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fera expressément référence au jugement entrepris ainsi qu’aux dernières conclusions déposées.

Sur la demande d’expertise formulée par la SARL Ayroles Caussade

L’article 145 du Code de procédure civile dispose que s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées en référé à la demande de tout intéressé.

En exigeant un motif légitime nécessaire au succès des prétentions formulées, l’article 145 du code de procédure civile, suppose l’existence d’un juste motif à demander une mesure qui soit opérante sur un litige ultérieur crédible .

En l’espèce la SARL Ayroles Caussade soutient la nécessité d’une mesure d’expertise pour vérifier la véracité des chiffres d’affaire déclarés à l’acte de vente, qui auraient été frauduleusement augmentés du montant de l’activité concurrente de vente de matériels de marques tierces en violation de l’exclusivité sur les marques Husqvarna et Kubota à laquelle elles étaient tenues toutes deux, dans le but de valoriser artificiellement le montant de la vente du fonds de commerce.

La SARL Ayroles Caussade reconnaît ne pas être en mesure de justifier d’une telle clause d’exclusivité en l’absence d’écrit, se contentant d’affirmer : « il est de notoriété que la société Ayroles Caussade qui a des établissements à Caussade et Montauban distribue exclusivement les marques Husqvarna et Kubota’».

De la même façon, elle se contente d’affirmer que la SARL [M] Motoculture avait une parfaite connaissance de cette ‘obligation’ (à défaut de preuve d’un engagement écrit) d’exclusivité.

Et, ni l’attestation de M. [C] chef de secteur pour la marque Husqvarna ni celle M. [X], commercial de la SARL Ayroles Caussade, qui tous deux ne témoignent que de l’achalandage de la SARL [M] Motoculture dans les marques qu’ils distribuent et dans une autre marque tierce, ne démontrent ni ne font même état d’une obligation d’exclusivité des marques Husqvarna et Kubota ni ne démontrent la connaissance qu’en aurait eu la SARL [M] Motoculture ni donc son opposabilité. Et les factures de vente de matériels de marques tierces ne démontrent pas non plus cette obligation ni donc sa violation, la SARL [M] Motoculture n’ayant jamais contesté avoir procédé à la commercialisation de marques tierces.

Par ailleurs, d’une part, la SARL Ayroles Caussade qui soutient n’avoir été avisée de la commercialisation soi-disant concurrente, qu’après la vente, n’en rapporte pas la preuve, l’attestation de M. [X] dont elle se prévaut, n’étant absolument pas probante sur ce point’; d’autre part, elle écrit en page 4 de ses conclusions ‘C’est dans ces conditions que, par courrier en date du 1er février 2021, le conseil de la SARL Ayroles Caussade a mis en demeure la SARL [M] Motoculture de proposer une solution amiable, et ce en application des articles 54 et 56 du Code de Procédure Civile’ alors que le seul courrier du 1er février 2021 qui est produit au débat ne concerne que le litige relatif aux loyers et au bail précaire et non pas la question de la valorisation artificielle du prix de la cession en raison d’activité concurrentielle.

Enfin, la SARL Ayroles Caussade ne peut sérieusement opposer l’aveu judiciaire de la SARL [M] Motoculture, M. [N] [M], et Mme [M] qui auraient reconnu la concurrence en violation de l’obligation d’exclusivité alors qu’elle est totalement défaillante dans l’administration de la preuve d’une telle obligation, de la connaissance qu’en aurait eu ses co-contractant et intervanants à l’acte et donc son opposabilité’; ils ne peuvent donc pas avoir avoué un fait qui n’existe pas.

La demande d’expertise a été rejetée à bon droit par le premier juge qui sera confirmé de ce chef.

Dans ces conditions, la demande d’expertise n’ayant été soutenue que pour faire échec au paiement du prix et pour valider l’opposition puis la demande de consignation du prix de vente du fonds de commerce entre les mains de Maître [J], en application de l’article 873 al2 du code de procédure civile, il convient de confirmer la décision qui a ordonné à la SARL Ayroles Caussade de lever son opposition et d’adresser au notaire un ordre de virement des fonds placés sous séquestre dans les trois jours de la notification de la décision sous astreinte de 300€ par jour de retard.

La main levée de l’opposition injustifiée du prix de la vente suffit à la libération des fonds sans qu’il y ait nécessité de prononcer la condamnation de la SARL Ayroles Caussade au paiement de la somme de 72 000 euros.

Sur la demande en paiement des loyers

Il est constant que malgré les mentions de l’acte de cession il n’a pas été établi de bail précaire pour l’occupation des lieux où le fonds cédé était exploité. Et il ne peut valablement être soutenu l’existence d’un bail commercial au seul motif du paiement de quelques échéances, en l’absence d’écrit et de volonté manifeste des parties de soumettre l’occupation des lieux au statut des baux commerciaux, les mentions de l’acte authentique qui évoquent un «’bail dérogatoire’» démontrant le contraire.

Seuls les litiges portant sur des baux soumis au statut des baux commerciaux relèvent de la compétence du tribunal judiciaire. Dès lors et en l’espèce, en l’absence d’un tel bail, le litige portant sur l’occupation des locaux relève de la compétence du tribunal de commerce et donc du juge des référés du tribunal de commerce de Montauban en application de l’article 873 du code de procédure civile. La décision sera infirmée de ce chef.

La cour étant juge d’appel des décisions du juge des référés du tribunal de commerce et considérant qu’il est de bonne justice de donner à l’affaire une décision définitive dans la limite des pouvoirs qu’elle tient des articles 872 et 873 du code de procédure civile, il convient conformément à l’article 88 du même code, d’évoquer le fond de l’affaire.

L’article 873 al2 dispose que le président du tribunal de commerce peut dans les limites de la compétence du tribunal et dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.

En l’espèce, en l’absence de bail écrit et donc de clause relative à la durée du bail, de son prix et de l’interdiction faite aux parties de donner congé anticipé, la demande en paiement formée par M. [N] [M], et Mme [M] se heurte à une contestation sérieuse. Le paiement d’une indemnité dénommée «’loyer’» par la SARL Ayroles Caussade elle-même jusqu’en janvier 2021, n’a pas pour effet d’écarter l’existence d’une telle contestation, ce qui conduit à la confirmation de la décision de ce chef.

Dans ces conditions, il est amplement démontré le caractère téméraire de l’action engagée par la SARL Ayroles Caussade sur de simples affirmations de principe sans aucune preuve ni même commencement de preuve d’un litige futur, en dénigrant l’adversaire accusé de tromperie selon ses propres termes, dans le seul but de faire échec au paiement d’un loyer et surtout du prix de la cession et donc de nuire à son co-contractant. La décision qui l’a condamnée à des dommages et intérêts pour procédure abusive sera en conséquence confirmée.

Eu égard aux circonstances de la cause et à la position des parties, il est inéquitable de laisser à la charge de la SARL [M] Motoculture d’une part et de M. [M], et Mme [M] d’autre part, la totalité des frais exposés en cause d’appel et non compris dans les dépens, ce qui commande l’octroi de la somme de 2000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour chacun d’eux.

PAR CES MOTIFS

La cour

– Confirme l’ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de Montauban en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il s’est déclaré incompétent sur la demande reconventionnelle de M. et Mme [M], au profit de Tribunal Judiciaire de Montauban concernant le paiement de loyers et réservé les dépens quant à ce litige précis.

Statuant à nouveau’et y ajoutant,

– Déclare le juge des référés du tribunal de commerce de Montauban compétent pour connaître de la demande en paiement des loyers.

– Evoquant de ce chef, déboute Mme et M.[M] de cette demande.

– Déboute Mme et M.[M] ainsi que la SARL [M] Motoculture représentée par son liquidateur amiable M. [N] [M] de la demande en paiement par la SARL Ayroles Caussade de la somme de 72 000 euros.

– Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la SARL Ayroles Caussade à verser à la SARL [M] Motoculture représentée par son liquidateur amiable M. [N] [M] la somme de 2000€ et à M. et Mme [M] ensemble la somme de 2000€.

– Condamne la SARL Ayroles Caussade aux entiers dépens de première instance et d’appel.

– Autorise, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile, les avocats de la cause qui en ont fait la demande à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils auraient fait l’avance sans avoir reçu provision.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

I.ANGERC. BENEIX-BACHER

 


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