Vidéosurveillance du salarié : un régime a degrès multiples
Vidéosurveillance du salarié : un régime a degrès multiples
Ce point juridique est utile ?

Seuls sont soumis aux obligations de déclaration préalables les dispositifs de surveillance mis en place spécialement pour contrôler l’activité professionnelle des salariés et tel n’est pas le cas d’un système de vidéo-surveillance qui n’est pas destiné à contrôler l’activité de salariés affectés à un poste déterminé mais à assurer la sécurité d’un entrepôt.

En l’occurrence, le système de vidéo-surveillance étant installé dans un entrepôt de marchandises pour en assurer la sécurité, il n’y a pas lieu de subordonner la recevabilité des preuves en résultant à la vérification de l’information préalable du salarié et du comité d’entreprise.

Le moyen tenant à l’illicéité de ce mode de preuve a donc été écarté.

Pour rappel, aux termes de l’article L.1222-4 du code du travail, aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été portée préalablement à sa connaissance.

Ainsi, si dans le cadre de son pouvoir de direction, l’employeur a le droit de contrôler et de surveiller ses salariés, ce droit n’est pas absolu ; tout enregistrement, quels qu’en soient les motifs, d’images ou de paroles à l’insu des salariés, constitue un mode de preuve illicite dès lors que le système de vidéo-surveillance est utilisé par l’employeur pour contrôler ses salariés sans information du salarié concerné ni information et consultation préalables du comité d’entreprise.

Résumé de l’affaire

M. [P] a été embauché par la société Pomona Episaveurs en 2008 en tant que préparateur de commande, puis a été promu au poste de cariste de nuit en 2014. En janvier 2019, la société lui a proposé une rétrogradation qu’il a refusée, entraînant son licenciement pour cause réelle et sérieuse. M. [P] a contesté ce licenciement devant le conseil de prud’hommes de Longjumeau, qui a confirmé la décision de l’employeur. M. [P] a interjeté appel de cette décision, demandant des dommages-intérêts pour licenciement abusif. La société Pomona Episaveurs demande quant à elle la confirmation du jugement initial.

Les points essentiels

Sur la recevabilité des extraits de la vidéo-surveillance

La Cour a jugé que le système de vidéo-surveillance mis en place par la société Pomona Episaveurs était justifié par la nature de la tâche à accomplir, à savoir le contrôle des zones de chargement et de déchargement des palettes. De plus, la société avait informé le salarié de l’existence du système de surveillance, consulté le CHSCT et le comité d’entreprise, et déposé une déclaration à la CNIL. Par conséquent, les preuves obtenues par ce système étaient recevables.

Sur le bien-fondé du licenciement

La lettre de licenciement reprochait au salarié d’avoir mis en danger sa propre sécurité et celle de son collègue en effectuant une manoeuvre dangereuse avec un chariot élévateur. Les extraits de la vidéo-surveillance confirmaient ces faits, et le salarié ne contestait pas les accusations. Malgré ses années d’expérience et sa formation, il n’avait pas respecté les règles de sécurité, ce qui justifiait son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes accessoires

La Cour a décidé que le salarié devrait supporter les dépens d’appel, étant donné qu’il avait été débouté de ses demandes principales. Il a également été jugé équitable de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles.

Les montants alloués dans cette affaire: – La cour confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions
– La cour dit qu’il n’y a pas lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
– La cour condamne M. [R] [P] aux dépens d’appel

Réglementation applicable

– Article L.1222-4 du code du travail
– Article L.1235-1 du code du travail

Article L.1222-4 du code du travail:
“Aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été portée préalablement à sa connaissance.”

Article L.1235-1 du code du travail:
“En cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.”

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Amandine RAVEL, avocat au barreau de CHARTRES
– Me William TROUVE, avocat au barreau de PARIS

Mots clefs associés & définitions

– vidéo-surveillance
– recevabilité
– contrôle des salariés
– information préalable
– comité d’entreprise
– sécurité
– licenciement
– régularité de la procédure
– caractère réel et sérieux des motifs
– faute de sécurité
– Vidéo-surveillance : système de surveillance visuelle utilisant des caméras pour surveiller un espace ou une activité
– Recevabilité : qualité de ce qui est recevable, c’est-à-dire conforme aux règles ou critères établis
– Contrôle des salariés : surveillance et vérification de l’activité des salariés par l’employeur
– Information préalable : communication d’informations avant une décision ou une action
– Comité d’entreprise : instance représentative du personnel au sein de l’entreprise chargée de défendre les intérêts des salariés
– Sécurité : état de protection contre les risques et les dangers
– Licenciement : rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur
– Régularité de la procédure : respect des règles et des étapes prévues par la loi lors d’une procédure
– Caractère réel et sérieux des motifs : existence de motifs concrets et légitimes justifiant une décision
– Faute de sécurité : manquement à des règles de sécurité entraînant un risque pour la santé ou la sécurité des salariés

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

7 mars 2024
Cour d’appel de Paris
RG n°
21/01065
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 7

ARRÊT DU 07 MARS 2024

(n° 96, 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/01065 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDBWN

Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 décembre 2020 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LONGJUMEAU – RG n° 19/00425

APPELANT

Monsieur [R] [P]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Amandine RAVEL, avocat au barreau de CHARTRES, toque : 000049

INTIMÉE

S.A.S. POMONA EPISAVEURS

Immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 476 980 321

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me William TROUVE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0138

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Bérénice HUMBOURG, présidente de chambre

Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre

Monsieur Laurent ROULAUD, conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Alisson POISSON

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre, et par Madame Alisson POISSON, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Pomona Episaveurs est un réseau d’experts en épicerie, boissons, hygiène et entretien pour les professionnels de la restauration. Elle emploie plus de onze salariés et applique la convention collective du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire.

M. [R] [P] a été embauché par la société Pomona Episaveurs par contrat à durée indéterminée du 19 mai 2008, en qualité de préparateur de commande.

A compter du 1er décembre 2012, il a fait l’objet d’une mutation en Ile de France.

Par avenant à son contrat de travail du 21 novembre 2014, à effet du 1er décembre 2014, il a été promu au poste de cariste de nuit, employé de niveau II-B moyennant une rémunération brute de base de 2.000,72 euros pour un horaire mensuel de 151h 67.

Par courrier remis en main propre du 18 décembre 2018, M. [P] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 04 janvier 2019.

Par courrier du 11 janvier 2019, la société Pomona Episaveurs lui a proposé une rétrogradation au poste de préparateur de commandes à titre de sanction disciplinaire, le courrier précisant ‘qu’en cas de refus de cette rétrogradation, nous serons contraints d’envisager votre licenciement’.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 14 janvier 2019, M. [P] a refusé la rétrogradation.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 22 janvier 2019, M. [P] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 31 janvier 2019.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 08 février 2019, la société Pomona Episaveurs a notifié à M. [P] son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 11 février 2019, M. [P] a contesté le licenciement.

Par lettre recommandée du 14 mars 2019, la société Pomona Episaveurs a répondu en confirmant le motif de licenciement.

M. [P] a alors saisi le conseil de prud’hommes de Longjumeau par requête en date du 09 juillet 2019.

Par jugement contradictoire du 16 décembre 2020, le conseil de prud’hommes a :

– fixé la moyenne de salaire de M. [P] à 2.997,59 euros ;

– confirmé le motif de licenciement pour cause réelle et sérieuse de M. [P] ;

– débouté M. [P] de l’intégralité de ses demandes ;

– dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens.

Par déclaration notifiée par le RPVA le 15 janvier 2021, M. [P] a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par la voie électronique le 16 mars 2021, M. [P] demande à la cour de :

– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Longjumeau du 16 décembre 2020 en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :

– condamner la société Pomona Episaveurs à lui verser 30.300 euros à titre de dommages-et-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– condamner la société Pomona Episaveurs à lui verser 4.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile au titre des frais exposés tant en première instance qu’en appel ;

– condamner la Société Pomona Episaveurs aux entiers dépens de l’instance, en ce compris l’éventuelle exécution.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par la voie électronique le 20 décembre 2021, la société Pomona Episaveurs demande à la cour de :

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 16 décembre 2020 par le Conseil de prud’hommes de Longjumeau en ce qu’il a débouté M. [P] de l’ensemble de ses demandes ;

– débouter M. [P] de toutes ses demandes à toutes fins qu’elles comportent.

La Cour se réfère pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties à leurs conclusions conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’instruction a été déclarée close le 15 novembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité des extraits de la vidéo -surveillance

Aux termes de l’article L.1222-4 du code du travail, aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été portée préalablement à sa connaissance.

Ainsi, si dans le cadre de son pouvoir de direction, l’employeur a le droit de contrôler et de surveiller ses salariés, ce droit n’est pas absolu ; tout enregistrement, quels qu’en soient les motifs, d’images ou de paroles à l’insu des salariés, constitue un mode de preuve illicite dès lors que le système de vidéo-surveillance est utilisé par l’employeur pour contrôler ses salariés sans information du salarié concerné ni information et consultation préalables du comité d’entreprise.

Cependant, il est constant que seuls sont soumis à ces obligations les dispositifs de surveillance mis en place spécialement pour contrôler l’activité professionnelle des salariés et que tel n’est pas le cas d’un système de vidéo-surveillance qui n’est pas destiné à contrôler l’activité de salariés affectés à un poste déterminé mais à assurer la sécurité d’un entrepôt.

En l’espèce, le système de vidéo surveillance mis en place par la société Pomona Episaveurs était justifié par la nature de la tâche à accomplir, à savoir le contrôle des zones sur lesquelles étaient effectuées les opérations de chargement et de déchargement des palettes ; que le salarié avait déjà été informé sur l’ancien site par l’émargement de la note interne émise à cet effet de la présence d’un système de vidéo surveillance encore signalée par un signe distinctif sur les panneaux d’information de l’entreprise. La société justifie également que le CHSCT avait été consulté le 27 juin 2017, que la CNIL a reçu selon récépissé en date du 11 avril 2017 un dossier de déclaration complet et qu’enfin le comité d’entreprise avait été consulté le 26 juin 2017.

Par ailleurs, le système de vidéo-surveillance étant installé dans un entrepôt de marchandises pour en assurer la sécurité, il n’y a pas lieu de subordonner la recevabilité des preuves en résultant à la vérification de l’information préalable du salarié et du comité d’entreprise.

Le moyen tenant à l’illicéité de ce mode de preuve sera donc écarté.

Sur le bien fondé du licenciement

Aux termes de l’article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié. Ainsi, l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

En l’espèce, la lettre de licenciement est libellée de la façon suivante :

‘Nous faisons suite à l’entretien préalable du 31 janvier dernier.

Vous étiez présent et assisté de Monsieur [O], Membre du CHSCT.

Monsieur [T] (Responsable Transport) et Madame [L] (Responsable Ressources Humaines) étaient présents.

Ainsi qu’indiqué lors de cet entretien, nous regrettons votre refus de la rétrogradation emportant modification de votre contrat de travail qui vous a été notifiée par courrier daté du 11 janvier dernier.

Cette proposition s’inscrivait dans un souci de vous maintenir dans l’emploi malgré la gravité de votre comportement.

Bien que déjà précisé lors de l’entretien du 4 janvier 2019 et mentionné dans notre courrier daté du 11 janvier 2019, nous avons néanmoins pris soin lors de l’entretien du 31 janvier dernier de vous rappeler les faits reprochés, repris à nouveau in extenso ci-dessous :

Dans la nuit du 6 au 7 décembre 2018, vous n’avez pas respecté des règles élémentaires de sécurité et avez eu un comportement extrêmement dangereux en dépit de tout bon sens.

A la suite d’une erreur de manipulation de votre part, une palette de boites de conserves de 15 kg est restée penchée au 3ème niveau (à environ 6 mètres) de l’un de nos racks.

Or, au lieu de prévenir le chef d’équipe et d’utiliser la nacelle prévue à cet effet pour effectuer les manipulations nécessaires sur la palette en toute sécurité, vous avez tenté, en montant les fourches de votre chariot, de redresser la palette, pendant de longues minutes et à plusieurs reprises.

Etant précisé que l’un de vos collègues s’était lui-même positionné physiquement juste au-dessus de la palette, après être monté sur les fourches de votre chariot pour tenter de la redresser également et ce, afin d’éviter qu’elle ne s’effondre.

Vous avez donc pris de grands risques pour votre propre sécurité car vous êtes resté en dessous pendant que votre collègue effectuait des manipulations dangereuses, et vous avez de plus exposé votre collègue à un risque de blessure avec les fourches de votre chariot, ce qui est très grave et inacceptable, et de surcroît contraire aux règles de sécurité enseignées lors de vos formations CACES.

Compte tenu de nos obligations, notamment en matière de sécurité, tant vis-à-vis de vous que de votre collègue, nous ne saurions tolérer le moindre manquement sur les aspects relevant de la sécurité des personnes.

Soucieux de vous maintenir dans l’emploi malgré la gravité de votre comportement, nous vous avions notifié une rétrogradation emportant modification de votre contrat de travail.

Nous vous avions précisé qu’en cas de refus, nous serions contraints d’envisager votre licenciement.

Par courrier daté du 14 janvier 2019, vous avez refusé ladite rétrogradation.

Lors de l’entretien, vous avez reconnu les faits reprochés. Vous avez exprimé vos regrets. Vous avez assuré que cela ne se reproduirait pas. Vous avez en revanche indiqué avoir prévenu votre responsable, lequel n’a pas corroboré vos dires. Vous avez confirmé votre refus de la rétrogradation qui vous a été signifiée, car vous avez indiqué préférer exercer votre fonction ailleurs plutôt que de ne plus l’exercer au sein de notre société.

Compte tenu de votre refus de la rétrogradation qui vous a été notifiée et de l’impossibilité de maintenir notre collaboration sur votre poste de cariste en raison de vos manquements en matière de sécurité, notamment des personnes, nous sommes contraints de vous notifier par la présente votre licenciement”.

Il résulte en conséquence de la lettre de licenciement que les motifs y énoncés sont l’exécution par le salarié d’une manoeuvre dangereuse avec le chariot élévateur ayant mis en danger sa sécurité et celle de son collègue.

Les extraits communiqués de l’enregistrement réalisé au moyen du système de vidéo-surveillance confirment les griefs reprochés.

Force est de constater que M. [P] ne contestait pas avoir effectué la manoeuvre dangereuse qui lui était reprochée.

Ainsi, le salarié n’a pas pris toutes les précautions requises, faisant courir un danger pour lui même mais également à son collègue, étant rappelé que l’employeur est tenu d’une obligation de sécurité à l’égard du personnel.

Il sera également relevé que M. [P] exerçait la fonction de cariste depuis le 1er décembre 2014, soit depuis 4 ans au moment de l’incident. La société justifie qu’il disposait du permis CACES (certificat d’aptitude à la conduite en sécurité) mentionnant l’autorisation de conduire les chariots automoteurs à conducteur porté de type 1 et 5. Ainsi le jour de l’incident, le salarié détenait une autorisation de conduite valable et était formé aux consignes de sécurité pour la conduite des chariots élévateurs.

Eu égard aux formations qu’il avait suivies et dont l’employeur justifie, le manquement de M. [P] aux règles de sécurité mettant en danger tant sa sécurité que celle de son collègue – lequel a été également licencié à raison du même incident ainsi qu’en justifie l’employeur – est établi.

M. [P] discute cependant l’imputabilité de la faute ainsi reprochée en soulignant qu’en l’absence du chef d’équipe en période de travail de nuit, son collègue, M. [N], vers lequel il s’est tourné, a pris l’initiative de la manoeuvre reprochée.

Il produit à cette fin l’attestation dactylographiée établie par M. [N] qui relate les faits en ces termes : ‘ Je certifie être monté de mon plein gré sur les racks en hauteur pour essayer de remettre une palette en place ceci étant mon idée et non celle de M. [P], culpabilisant d’avoir fait glisser cette palette il a voulu en m’aidant réparer sa maladresse. Cela dit sa sanction est vraiment très disproportionné par rapport à la faute reprochée, il ne mérite vraiment pas un tel sort surtout avec toutes ces années d’ancienneté et une telle régularité’.

M. [N] atteste que le chef d’équipe était bien présent cette nuit là et que M. [P] l’avait bien prévenu qu’ils agissaient sur une palette mal replacée. Toutefois, bien que M. [M] [K] se soit vu confier par courrier du 23 mai 2018 la responsabilité du management de l’équipe de nuit, la feuille de présence de nuit du 5 au 6 décembre 2018 produite par l’employeur ne fait pas état de sa présence.

Cependant, l’employeur justifie qu’était présent sur site un salarié disposant du CACES pour ‘ l’utilisation des plate formes élévatrices mobiles de personnes’ et auquel le salarié pouvait faire appel pour éviter cette manoeuvre contraire aux règles de sécurité dont la mise à jour dans le cadre du document unique d’évaluation des risques est démontrée.

Enfin, au regard des pièces versées aux débats, même si son collègue a pris l’initiative de monter sur les ‘racks’ pour tenter de replacer une palette en déséquilibre, M. [P] n’a pas en tout état de cause pris les mesures élémentaires qui s’imposaient pour accomplir sa manoeuvre dans des conditions de sécurité, alors qu’il dispose de la formation idoine pour ce faire.

Il ressort de l’ensemble de ces éléments que la faute portant sur les règles de sécurité reprochée à M. [P], salarié expérimenté et formé à la conduite d’engins de manutention, est établie et caractérise au regard des obligations imposées à l’entreprise et les consignes de sécurité une cause réelle et sérieuse de licenciement, peu important l’absence de sanction antérieure et ce suite à son refus de la sanction de rétrogradation présentée initialement par l’employeur.

Le jugement sera en conséquence confirmé.

Sur les demandes accessoires

M. [P], qui succombe, devra supporter les dépens d’appel.

Il n’est pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y AJOUTANT,

DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [R] [P] aux dépens d’appel.

La greffière, La présidente.


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