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Vidéosurveillance : 4 mai 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 22/00996

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Vidéosurveillance : 4 mai 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 22/00996

N° RG 22/00996 – N° Portalis DBVM-V-B7G-LISI

C4

Minute :

Copie exécutoire

délivrée le :

Me Marie-Catherine CALDARA-BATTINI

la SELARL AVOCATS CHAPUIS ASSOCIES (ACA)

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU JEUDI 04 MAI 2023

Appel d’une décision (N° RG 2020J34)

rendue par le Tribunal de Commerce de VIENNE

en date du 08 février 2022

suivant déclaration d’appel du 08 mars 2022

APPELANTE :

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL SUD RHONE ALPES inscrite au RCS de GRENOBLE sous le numéro 402 121 958, représentée par son représentant légal en exercice domicilié es qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 7]

représentée et plaidant par Me Marie-Catherine CALDARA-BATTINI, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMÉS :

M. [Z] [F]

né le [Date naissance 5] 1960 à [Localité 13]

de nationalité Française

[Adresse 10]

[Localité 1]

Mme [X] [U] épouse [F]

née le [Date naissance 4] 1960 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 10]

[Localité 1]

S.A.S. MINIPRICE inscrite au RCS de VIENNE sous le n° 839 712 627, représentée par ses dirigeants légaux demeurant es qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 9]

S.E.L.A.R.L. ALLIANCE MJ représentée par Maître Cédric CUINET, immatriculée au RCS de LYON sous le n° 793 239 211, désignée en qualité de liquidateur judiciaire par décision du Tribunal de Commerce de VIENNE du 10 octobre 2020 de la Société MINIPRICE

[Adresse 2]

[Localité 8]

représentées par Me Josselin CHAPUIS de la SELARL AVOCATS CHAPUIS ASSOCIES (ACA), avocat au barreau de VIENNE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente de Chambre,

Mme Marie Pascale BLANCHARD, Conseillère,

M. Lionel BRUNO, Conseiller,

DÉBATS :

A l’audience publique du 19 janvier 2023, M. Lionel BRUNO, Conseiller, qui a fait rapport assisté de Alice RICHET, Greffière, a entendu les avocats en leurs conclusions et Me CALDARA-BATTINI en sa plaidoirie, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile. Il en a été rendu compte à la Cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu ce jour, après prorogation du délibéré.

Faits et procédure :

1. La société Miniprice, créée le 22 mai 2018, exerce une activité de déstockage, négoce, commerce de détail de produits alimentaires et autres biens de consommation. Lors de la création de cette société, monsieur et madame [F] ont apporté 20.000 euros, outre un apport de 20.000 euros accordé par l’association Initiative Nord Isère. Leur magasin implanté au sein d’une nouvelle zone commerciale a ouvert au public le 31 août 2018.

2. Dans le cadre de cette activité, monsieur et madame [F] ont souscrit auprès du Crédit Agricole un prêt d’un montant de 65.000 euros le 27 juillet 2018, d’une durée de 60 mois, avec le cautionnement de la Banque Publique d’Investissement, et leur cautionnement solidaire, limité à 20.000 euros chacun, outre un nantissement sur le fonds de commerce.

3. Un prêt a également été accordé le 28 juin 2018 à la société Miniprice par le Crédit Agricole, d’un montant de 12.000 euros, pour une durée de 4 mois, destiné à préfinancer la TVA. Ce prêt de trésorerie n’a pas été soumis au cautionnement des dirigeants.

4. Face à des difficultés financières liées aux conditions d’ouverture de la zone commerciale, la société Miniprice a sollicité de nouveau le Crédit Agricole pour se voir accorder une autorisation de découvert plafonnée à 5.000 euros. Elle a en outre obtenu un nouveau prêt de 12.000 euros au mois de janvier 2019.

5. Toujours confrontée à une situation financière précaire, faute de chiffre d’affaires suffisant, en raison de la persistance de travaux sur la zone commerciale, la société Miniprice a sollicité sa banque pour obtenir une restructuration de ses échéances de prêts. Le 4 avril 2019, madame [Y], représentant la banque, s’est déplacée au siège de la société Miniprice afin de régulariser le dossier relatif au contrat de prêt des 12.000 euros, assorti d’un cautionnement à hauteur de 12.000 euros pour chacun des associés.

6. Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 mai 2019, eu égard à la situation de la société Miniprice ne parvenant pas à assumer ses engagements, le Crédit Agricole a dénoncé l’ouverture de crédit de 5.000 euros moyennant le respect d’un préavis de 60 jours. Par courrier recommandé avec accusé de réception du même jour, la banque a mis en demeure la société Miniprice de régulariser sa situation concernant le découvert sur ses comptes bancaires et de maintenir le compte courant en position exclusivement créditrice.

7. Parallèlement, par courrier du 3 juin 2019, monsieur et madame [F] ont sollicité le médiateur du Crédit Agricole pour obtenir l’échelonnement de l’ensemble de leur dette, dénonçant à cette occasion le non-respect du contrat de prêt signé le 4 avril 2019.

8. Face à cette situation et faute de trésorerie suffisante, la société Miniprice a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Vienne du 16 juillet 2019. Par jugement du 23 juin 2020, le tribunal de commerce de Vienne a prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire en procédure de liquidation judiciaire. Maître Blanchard a été désigné en qualité de liquidateur judiciaire de la société Miniprice, remplacé le 10 octobre 2020 par la société Alliance MJ représentée par maître Cuinet.

9. La société Miniprice, monsieur et madame [F], considérant que le Crédit Agricole a commis une faute dans la rupture des relations de crédit, ont assigné ce dernier devant le tribunal de commerce de Vienne, sollicitant la condamnation de la banque à payer à la société Miniprice les sommes de 3.748,13 euros au titre des frais bancaires, de 84.397,34 euros au titre de la perte de chance de redressement de la société Miniprice, de 10.000 euros au titre du préjudice porté à l’image de la société. Ils ont également demandé de condamner la banque à payer à monsieur et madame [F], chacun, la somme de 10.000 euros au titre du préjudice financier ainsi que celle de 5.000 euros au titre du préjudice moral. Subsidiairement, ils ont demandé de constater que les engagements de caution des époux [F] sont disproportionnés par rapport à la dette principale et de réduire ceux-ci à la mesure de l’obligation principale.

10. Par jugement du 8 février 2022, le tribunal de commerce de Vienne a’:

– jugé recevable l’intervention volontaire de la société Alliance MJ représentée par maître Cuinet ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Miniprice’;

– jugé que le Crédit Agricole Sud Rhône-Alpes a commis une faute dans la rupture des relations de crédits avec la société Miniprice et dans la gestion du compte bancaire de cette société’;

– jugé les cautionnements consentis par monsieur et madame [F] en garantie des 12.000 euros du prêt à court terme aux professionnels comme nuls’;

– jugé que monsieur et madame [F] ont subi un préjudice moral certain’;

– condamné le Crédit Agricole Sud Rhône-Alpes à payer à monsieur et madame [F] la somme globale de 10.000 euros au titre du préjudice moral’;

– débouté la société Miniprice, monsieur et madame [F] et la société Alliance MJ, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Miniprice de l’ensemble de ses demandes indemnitaires au bénéfice de la société Miniprice car mal fondées et mal dirigées’;

– débouté monsieur et madame [F] de l’ensemble de leurs demandes au titre des autres préjudices car mal fondées’;

– dit qu’il n’y a plus lieu de statuer sur la demande de communication des parties demanderesses’;

– dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur les autres demandes compte tenu du caractère subsidiaire de celles-ci’;

– condamné le Crédit Agricole Sud Rhône-Alpes à payer à monsieur et à madame [F] la somme globale de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;

– dit qu’il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de droit’;

– condamné le Crédit Agricole Sud Rhône-Alpes aux entiers dépens, dont distraction au profit du cabinet Avocats Chapuis Associés du Barreau du Vienne, prévus à l’article 695 du code de procédure civile.

11. La Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes a interjeté appel de cette décision le 8 mars 2022, en ce qu’elle a’:

– jugé que la banque a commis une faute dans la rupture des relations de crédits avec la société Miniprice et dans la gestion du compte bancaire de la société Miniprice’;

– jugé les cautionnements consentis par monsieur [F] et par madame [F] en garantie des 12.000 euros du prêt à court terme aux professionnels comme nuls’;

– jugé que monsieur et madame [F] ont subi un préjudice moral certain’;

– condamné l’appelante à payer à monsieur et madame [F] la somme globale de 10.000 euros au titre du préjudice moral’;

– condamné l’appelante à payer à monsieur et à madame [F] la somme globale de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;

– dit qu’il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de droit’;

– condamné l’appelante aux entiers dépens, dont distraction au profit du cabinet Avocats Chapuis Associés du Barreau de Vienne, prévus à l’article 695 du code de procédure civile.

L’instruction de cette procédure a été clôturée le 5 janvier 2023.

Prétentions et moyens de la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes’:

12. Selon ses conclusions remises le 6 décembre 2022, elle demande à la cour, au visa des articles 1103, 1104, 1231-1, 1240, 2290 et 2298 du code civil, des articles L 313-12 et D 313-14-1 du code monétaire et financier’:

– de réformer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que la concluante a commis une faute dans la rupture des relations de crédit avec la société Miniprice et dans la gestion du compte bancaire de la société Miniprice’;

– de réformer le jugement en ce qu’il a jugé nuls les cautionnements consentis par monsieur et madame [F] en garantie du prêt à court terme de 12.000 euros’;

– de réformer le jugement en ce qu’il a jugé que les époux [F] ont subi un préjudice moral certain et condamné la concluante à payer aux époux [F] la somme globale de 10.000 euros en réparation de ce préjudice’;

– de réformer le jugement en ce qu’il a condamné la concluante à payer la somme de 2.000 euros aux époux [F] au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;

– de le réformer en ce qu’il a rejeté la demande formulée par la concluante sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à l’encontre des demandeurs’;

– de le confirmer en ce qu’il a débouté la société Miniprice, monsieur et madame [F] et la société Alliance MJ ès-qualités de liquidateur de l’ensemble de leurs demandes indemnitaires et autres préjudices’;

– statuant à nouveau, de juger que la concluante n’a commis aucune faute dans ses relations avec la société Miniprice, tant durant la gestion du compte bancaire que dans la rupture de la relation de contractuelle et de crédit’;

– de juger que la concluante n’a commis aucune faute à l’encontre des époux [F]’;

– de juger que les préjudices avancés par la société Miniprice et maître Cuinet n’ont aucun lien de causalité avec un prétendu comportement fautif de la concluante, puisque la société Miniprice invoque elle-même avoir rencontré des difficultés financières liées à un développement en deçà de celui escompté’;

– de juger qu’ils ne sont pas justifiés car calculés arbitrairement’;

– de juger que les époux [F] n’ont subi aucun préjudice en lien avec une faute de la concluante’;

– de juger que les préjudices avancés par les époux [F] ne sont pas, en tout état de cause, fondés, car parfaitement hypothétiques’;

– de juger que les cautionnements souscrits sont valables et non réductibles’;

– en conséquence, de les débouter de l’intégralité de leurs demandes’;

– de condamner les époux [F] à payer à la concluante une somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens de première instance’;

– de condamner les époux [F] à payer à la concluante une somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens d’appel.

L’appelante expose’:

13. – que les prêts accordés à la société Miniprice n’ont pas été souscrits pour faire face à ses difficultés, mais pour financer le projet initié en mai 2018, puisque le prêt de 12.000 euros consenti le 28 juin 2018 a concerné un crédit de trésorerie, d’une durée de quatre mois, afin de préfinancer la TVA, alors que le prêt de 65.000 euros consenti le 27 juillet 2018 était destiné à financer l’agencement, le matériel et les stocks du fonds de commerce, le magasin ouvrant ses portes le 31 août 2018′; que les époux [F] ont reconnu que les difficultés ont résulté des retards dans les travaux concernant la zone commerciale, de sorte que l’activité a démarré moins bien que prévu, cette zone étant désertée ainsi que le confirme le bilan économique et social; que les difficultés sont également survenues du fait du mouvement des «’gilets jaunes’», en raison du blocage du carrefour donnant accès à cette zone’;

14. – que suite à ces difficultés, la concluante a accepté de consentir à la société une autorisation de découvert de 5.000 euros en novembre 2018, puis un prêt de trésorerie de 12.000 euros le 10 janvier 2019, devant être remboursé le 1er avril 2019′; que l’activité de la société ne décollant pas, la concluante a refusé de rééchelonner le remboursement de ce prêt’;

15. – que la concluante n’a commis aucune faute dans la gestion du compte de la société Miniprice et dans la rupture de la relation de crédit, les difficultés alléguées n’ayant aucun lien avec le prétendu comportement fautif allégué’; que le tribunal n’a ainsi pu retenir que la concluante, par son absence de réponse claire et adaptée aux sollicitations de la société Miniprice, et en ne respectant pas le délai de 60 jours prévu par le code monétaire et financier, a commis une faute dans la rupture des relations de crédits’; qu’il n’a pu en même temps débouter cette société au motif que ses demandes indemnitaires ne sont pas justifiées, pour condamner la concluante à payer aux époux [F] 10.000 euros en réparation de leur prétendu préjudice moral’;

16. – concernant une rupture abusive de crédit, qu’il ne résulte pas de l’article L313-12 du code monétaire et financier qu’il concerne le refus de consentir un crédit ou de le rééchelonner, mais qu’il ne concerne que la résiliation d’une ouverture de crédit à durée indéterminée, révoquée sans respect du préavis de 60 jours’;

17. – concernant l’absence de réponse rapide et adaptée aux sollicitations de la société Miniprice, que l’absence de réponse aux sollicitations de cette société ne peut être considérée comme une rupture fautive de crédit, puisqu’il n’existe pas de droit à l’octroi d’un prêt’; qu’à l’inverse, le banquier peut être poursuivi pour soutien abusif’; que le tribunal n’a pu ainsi retenir que la concluant n’a pas offert à sa cliente la possibilité d’anticiper ses besoins de trésorerie faute de réponse rapide et adaptée, aggravant ainsi inévitablement la situation déjà précaire’; qu’ainsi, l’absence de réponse positive à une demande de financement ou de rééchelonnement ne peut être constitutive d’une faute’; qu’un crédit à court terme n’a pas vocation à être renouvelé’;

18. que la concluante a initialement accepté, après le financement du fonds de commerce, d’accorder une autorisation de découvert et un prêt de trésorerie’; qu’elle n’avait pas à accepter la demande de rééchelonnement de ce dernier prêt dans la mesure où le crédit initial de 65.000 euros accusait un

retard dans les remboursements depuis février 2019, alors que le crédit à

court terme arrivant à échéance en avril 2019 ne pouvait être remboursé’; qu’un nouveau financement aurait engagé la responsabilité de la concluante pour soutien abusif’;

19. – que les difficultés rencontrées par la société Miniprice ne résultent pas de l’attitude de la concluante, ainsi qu’il a été dit plus haut, outre le fait que le gel du passif pendant la période d’observation aurait dû permettre le redressement de l’entreprise, alors que la procédure a été convertie en liquidation, ce qui indique que la chute de la société résulte d’une absence de chiffre d’affaires suffisant, ce que confirme le bilan économique et social’;

20. – concernant l’absence de respect du préavis de 60 jours, que la concluante a dénoncé le découvert de 5.000 euros dont la société Miniprice disposait sur son compte courant, par écrit, et en respectant ce délai’; qu’aucune pièce ne permet de justifier l’absence de respect de ce préavis, alors que par courrier du 28 mai 2019, monsieur et madame [F] ont indiqué ne pas souhaiter bénéficier de ce délai’;

21. – que le tribunal n’a pu retenir que la concluante n’a que partiellement débloqué le prêt de 12.000 euros consenti en janvier 2019, alors que les intimés n’ont pas soutenu de faute sur ce point, reprochant seulement à la concluante d’avoir commencer à prélever les échéances de remboursement en dehors de tout accord’; que le prélèvement de l’échéance le 10 février 2019 pour 1.308,80 euros et 48,92 euros d’intérêts résulte d’une erreur informatique’; qu’en réalité, alors que la somme de 12.000 euros a été débloquée le 10 janvier 2019, la société Miniprice a souhaité rembourser par avance 6.000 euros’; que les époux [F] sont ensuite revenus sur cette décision le 30 janvier 2019, de sorte que la concluante a crédité le compte’; que la seule erreur résulte du prélèvement effectué le 10 janvier 2019, mais qui n’a eu aucune conséquence sur la situation de la société’;

22. – concernant les cautionnements souscrits par les époux [F], que le tribunal a dépassé l’objet du litige en prononçant leur annulation, puisque les époux sollicitaient seulement le paiement de 20.000 euros en réparation de leur préjudice et la réduction de leur engagement à hauteur de l’obligation principale’;

23. – que la preuve de man’uvres dolosives n’est pas rapportée, alors que la plainte des époux [F] a été classée sans suite’; que le tribunal ne s’est fondé que sur des courriels adressés par les époux [F]’; que rien n’établit que la concluante aurait promis un nouveau financement de 12.000 euros amortissable sur deux ans’; que le seul prêt de 12.000 euros a été signé en janvier 2019, alors qu’aucun prêt d’un même montant n’a été signé en avril’;

24. – que les époux [F] ne justifient d’aucun préjudice en leur qualité de cautions, puisqu’ils n’ont pas fait l’objet d’une procédure en paiement’; que leur engagement à hauteur de 12.000 euros n’est pas excessif au regard de la dette principale’;

25. – que les époux [F] ne justifient d’aucun préjudice moral résultant d’une attitude blâmable de la concluante comme retenu par le tribunal, lequel n’a pas motivé sa décision en leur accordant 10.000 euros d’indemnités’; que la concluante n’a commis aucune faute dans les tracas qu’ils auraient subis en raison des difficultés de leur entreprise ; que les tracas invoqués par les époux [F] sont inhérents à leurs fonctions et trouvent leur origine dans les difficultés de leur société.

Prétentions et moyens de la société Miniprice, de la Selarl Alliance MJ ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Miniprice prise en la personne de maître Cuinet, de monsieur et madame [F]’:

26. Selon leurs conclusions remises le 7 septembre 2022, ils demandent à la cour, au visa des articles 1103, 1104,1231-1 et 1240 du code civil, des articles 325 et 327 alinéa 1 du code de procédure civile, de l’article L 641-9 I du code de commerce’:

– de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a jugé recevable l’intervention volontaire de la société Alliance MJ représentée par maître Cuinet ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Miniprice; en ce qu’il a jugé que l’appelante a commis une faute dans la rupture des relations de crédits avec la société Miniprice et dans la gestion du compte bancaire de la société Miniprice ; en ce qu’il a jugé que les cautionnements consentis par monsieur [F] et par madame [F] en garantie des 12.000 euros du prêt à court terme aux professionnels comme nuls; en ce qu’il a jugé que monsieur et madame [F] ont subi un préjudice moral certain; en ce qu’il a condamné l’appelante à payer à monsieur et madame [F] la somme globale de 10.000 euros au titre du préjudice moral; en ce qu’il a condamné l’appelante à payer à monsieur et madame [F] la somme globale de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

– d’infirmer ce jugement en ce qu’il a débouté les concluants de l’ensemble des demandes indemnitaires au bénéfice de la société Miniprice car mal fondées et mal dirigées; en ce qu’il a débouté monsieur et madame [F] de l’ensemble de leurs demandes au titre des autres préjudices car mal fondées ; en ce qu’il a dit qu’il n’y a plus lieu de statuer sur la demande de communication des parties demanderesses’;

– statuant à nouveau, de déclarer recevable l’intervention volontaire de la Selarl Alliance MJ, représentée par maître Cuinet en qualité de mandataire judiciaire liquidateur de la société Miniprice, au sein de l’instance initiée par la société Miniprice’;

– de déclarer l’action de la société Miniprice, de monsieur et madame [F] recevable et bien fondée;

– de juger que l’appelante a commis une faute dans la rupture des relations de crédit avec la société Miniprice’;

– d’ordonner à l’appelante de transmettre les contrats de prêts originaux’;

– de condamner l’appelante à payer à la société Miniprice les sommes de:

‘ 3.748,13 euros au titre des frais bancaires,

‘ 84.397,34 euros au titre de la perte de chance de redressement de la société Miniprice,

‘ 10.000 euros au titre du préjudice à l’image de la société Miniprice’;

– de condamner l’appelante à payer à madame [F] la somme de 10.000 euros au titre du préjudice financier et celle de 5.000 euros au titre du préjudice moral’;

– de condamner l’appelante à payer à monsieur [F] la somme de 10.000 euros au titre du préjudice financier et celle de 5.000 euros au titre du préjudice moral’;

– subsidiairement, concernant les cautionnements, de considérer que les engagements de caution des époux [F] sont disproportionnés par rapport à la dette principale et de réduire ceux-ci à la mesure de l’obligation principale’;

– de condamner l’appelante à payer à la société Miniprice la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;

– de condamner l’appelante à payer à monsieur et madame [F] la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel’;

– de condamner l’appelante aux entiers dépens de l’instance y compris ceux découlant de l’article A444-32 du code de commerce en cas d’exécution forcée, dont distraction au profit du cabinet Avocats Chapuis Associés du Barreau de Vienne ;

– de débouter l’appelante de ses demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens de première instance et d’appel.

Les intimés exposent’:

27. – concernant le crédit de moyen long terme de 65.000 euros, que le prêt devait initialement être de 85.000 euros, mais que l’appelante a unilatéralement abaissé son montant’; que les époux [F] n’ont pas signé ce contrat, ni donné leur accord pour être cautions’;

28. – que le prêt à court terme de 12.000 euros remboursable sous quatre mois n’a pas été soumis au cautionnement des dirigeants’; que s’il devait être amorti au 30 novembre 2018, la société Miniprice a sollicité une prorogation le 4 janvier 2019′;

29. – que la banque a accordé un crédit à court terme de 6.000 euros remboursable le 10 janvier 2019, sans solliciter de cautionnement’; qu’elle a ensuite porté ce montant à 12.000 euros’; que le 6 février 2019, le prêt arrivant à échéance, la société Miniprice a demandé un échelonnement’; que la banque, sans apporter de réponse, a prélevé une échéance’; que madame [O], préposée de l’appelante, s’est déplacée au siège de la société le 4 avril 2019, conditionnant l’octroi d’un prêt de 12.000 euros au cautionnement des époux [F], lesquels ont signé les actes de cautionnement, en espérant obtenir ce prêt’; que cependant, ces derniers ont été informés que ce prêt ne serait pas accordé’; qu’il existe ainsi deux prêts pour 12.000 euros chacun, le second étant relatif à la restructuration du prêt de 12.000 euros sur 24 mois, pour lequel les époux [F] se sont portés cautions’;

30. – que si l’appelante a dénoncé l’autorisation de découvert le 10 mai 2019, avec un préavis de 60 jours, elle n’a pas respecté ce préavis en refusant de payer le loyer commercial Locam alors que le plafond de découvert n’était pas atteint’;

31. – que l’appelante a entraîné la chute de la société Miniprice en ne répondant pas aux demandes de refinancement, puisque entre février et avril 2019, elle n’a pas fourni des informations fiables sur le concours qu’elle lui apportait’; que la difficulté a concerné principalement le prêt de 12.000 euros accordé une première fois en 2018, puisque la société Miniprice a demandé à cinq reprises la possibilité de le rééchelonner, sans réponse’; que cette incertitude a eu pour effet de ne pas permettre à la société de résoudre ses problèmes de trésorerie en faisant notamment appel à d’autres partenaires, ce qu’a relevé le tribunal de commerce’;

32. – que l’appelante a commencé à prélever des échéances, en dehors de tout accord contractuel et sans en aviser la société Miniprice, par le prélèvement de 1.308,80 euros outre les intérêts, ce qui a aggravé la crise de la trésorerie ;

33. – que la banque n’a pas tenu sa promesse d’accorder un prêt de 12.000 euros remboursable en deux ans, ce qui avait donné lieu à la visite de madame [Y] le 4 avril 2019′; que cette personne a indiqué qu’un délai supplémentaire de deux ans était accordé pour rembourser la somme de 12.000 euros, et a fait signer aux époux [F] un contrat non daté, avec leurs engagements de caution’; qu’elle s’est gardée de préciser que le contrat n’était en fait établi qu’afin de régulariser le prêt accordé le 10 janvier 2019′; qu’il s’est avéré que le contrat signé était un prêt de 12.000 euros mais remboursable en une échéance au 1er avril 2019′; que les actes ont ensuite été antidatés au 10 janvier 2019′; que cet agissement a été réalisé afin de régulariser la situation créée en janvier et février 2019, ce qui a amené les époux [F] à déposer une plainte pour faux en écriture’; que le tribunal de

commerce a ainsi relevé que ces man’uvres avaient été orchestrées afin d’obtenir des garanties supplémentaires et qu’elles sont dolosives’;

34. – que c’est ainsi la banque qui a organisé l’insolvabilité de la société Miniprice, ayant abouti à la dénonciation de son concours’; que cette attitude fautive a empêché la société d’anticiper ses besoins de trésorerie, avec la génération de surcoûts en raison de frais de rejet de prélèvements, de frais de tenue de compte et d’agios, pour un total de 3.748,13 euros; qu’il en est résulté une perte de chance de redresser la société, de sorte qu’elle a été placée en redressement, puis en liquidation judiciaire’; qu’on peut estimer à 25’% du chiffre d’affaires par an, pendant cinq ans, la perte économique subie par la société, soit 84.897,34 euros’; que la société n’a pu mener à bien ses actions commerciales et a subi une perte d’image en raison de l’ouverture de la procédure collective’; qu’elle a perdu trois fournisseurs en raison de rejet de paiements par la banque, et le référencement pour de nombreux produits, ce qui a abouti à une perte de la clientèle’;

35. – que les dirigeants ont subi un préjudice personnel, puisqu’ils ont dû négocier avec leur bailleur et licencier leur salarié’; qu’ils ont décidé de ne plus percevoir de salaires et ont dû solliciter le versement du RSA’; qu’ils ont dû mobiliser leur assurance-vie et se faire prêter 8.000 euros par un tiers pour approvisionner la trésorerie’; qu’en leur qualité de cautions, les époux [F] devront in fine subir les conséquences du défaut de paiement de la société’;

36. – que s’il doit être jugé que leurs cautionnements sont valables, il convient de faire application de l’article 2290 du code civil, puisque la dette de la société est de 12.000 euros, alors que les époux se sont engagés chacun pour la même somme, soit un total de 24.000 euros.

*****

37. Il convient en application de l’article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

MOTIFS DE LA DECISION’:

1) Concernant les demandes de la société Miniprice et de la société Alliance MJ, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Miniprice’:

38. Le tribunal a relevé que la société Miniprice a été constituée le 22 mai 2018′; que le 29 novembre 2017, la banque a attesté que Monsieur [F] avait, dès le début, sollicité l’obtention d’un prêt professionnel d’un montant de 85.000 euros, garanti en partie par la BPI, par un nantissement et un cautionnement solidaire des gérants de la société en cours de constitution; que les différents contrats de prêt accordés par la suite par la banque ont été limités à 65.000 euros et 12.000 euros, soit le prêt d’un montant de 65.000 euros d’une durée de 60 mois, garanti par un nantissement et une caution solidaire d’un montant global de 40.000 euros, et le prêt de 12.000 euros d’une durée de 4 mois, signé le 28 juin 2018. Le tribunal a indiqué que selon la pièce n°3 de la banque, ce deuxième prêt court terme de 4 mois n’avait ni nantissement ni acte de cautionnement en garantie, lors de sa mise en place par la banque.

39. Les premiers juges ont indiqué que dès sa création, la société Miniprice a éprouvé des difficultés à faire face à ses remboursements de prêts et a sollicité sa banque afin d’obtenir une possibilité de restructurer lesdits prêts déjà garantis par la BPI (65.000 euros) et de rééchelonner au moins le remboursement du prêt à court terme de 12.000 euros’; que la collaboratrice de la banque en charge du dossier, madame [D], n’a jamais répondu, et ce malgré l’urgence de la situation, aux différentes questions posées par la société Miniprice, relatives aux différentes échéances de prêts et à la volonté de la société de voir rééchelonner les différentes mensualités des prêts en cours, ceci afin de lui permettre éventuellement d’adapter sa capacité financière fragilisée, en raison de l’absence de chiffre d’affaires suffisant, suite au retard des travaux constatés sur la zone commerciale en cours de création.

40. Le tribunal a déduit de l’analyse de la chronologie des faits que la banque, faute d’apporter une réponse rapide et concrète à sa cliente, a certainement paralysé cette dernière quant à sa volonté à trouver une solution urgente et adaptée; que par son attitude et son silence, la banque, faute de réponse rapide et appropriée à la situation de sa cliente, n’a pas permis à la société Miniprice d’adapter au mieux, dans cette phase de démarrage, ses échéanciers de remboursements des prêts à ses réelles capacités financières’; que cette absence de réponse et de solution est dès lors fautive.

41. Le tribunal a, en outre, observé que si un nouveau prêt court terme de 12.000 euros n°00001904334 a été accordé à la société Miniprice, cette facilité de caisse, normalement amortissable in fine, a été, dès son versement amortie de 50%, alors que son remboursement partiel ne devait intervenir qu’un mois plus tard, le 10 février 2019; que ce crédit aux professionnels à court terme de 12.000 euros n’a été en définitif débloqué que de moitié le 10 janvier 2019′; qu’en raison des opérations effectuées par la banque au débit du compte courant, dès le 10 janvier 2019, la société n’a, au final, bénéficié que d’une avance partielle de 6.000 euros au lieu des 12.000 euros prévus initialement; que cette opération d’amortissement anticipé, dès le 10 janvier 2019, de 6.000 euros portée au débit du compte courant, opérée par la banque, a positionné le compte de la société Miniprice en position débitrice dès la fin du mois de janvier 2019 ; que la société Miniprice, constatant l’erreur de la banque, a demandé en vain l’annulation de cette opération’; qu’en conséquence, la banque a ainsi aggravé la situation financière de la société Miniprice en créant la confusion sur l’octroi ou non de crédits supplémentaires.

42. Concernant la dénonciation du découvert le 10 mai 2019, le tribunal a indiqué que malgré l’engagement de la banque de maintenir le découvert autorisé sur une durée de 60 jours, elle a, dès le 20 mai 2019 rejeté des prélèvements.

43. Les premiers juges ont enfin retenu qu’il est patent que par son attitude dans la gestion de ce dossier, la banque n’a pas offert à sa cliente, la société Miniprice, la possibilité d’anticiper ses besoins de trésorerie faute de réponse rapide et adaptée, aggravant ainsi inévitablement la situation déjà précaire de celle-ci; qu’elle a commis une faute dans la rupture des relations de crédits avec la société Miniprice et dans la gestion du compte bancaire de cette société.

44. Le tribunal a cependant, sur les préjudices invoqués par la société Miniprice, observé qu’elle a fait état d’une perte de chiffre d’affaires future sur 5 ans estimée à 84.897.34 euros’; qu’elle ne chiffre pas, et n’indique aucun pourcentage de marge dégagée par son activité afin d’estimer la perte réelle induite par la perte future de chiffre d’affaires; que dans ces conditions, faute pour la société Miniprice de chiffrer correctement le montant de sa perte de marge potentielle, le tribunal ne peut entrer en condamnation. Il a ainsi débouté la société Miniprice de sa demande indemnitaire au titre de sa perte de chance de redressement, car mal fondée. S’agissant des frais bancaires, il a énoncé que si la société Miniprice produit un extrait de grand livre faisant

état d’un montant de frais bancaire de 3.187.67 euros constaté sur la période d’août 2018 à décembre 2019, l’ensemble des frais comptabilisés ne peut à lui seul constituer un préjudice certain résultant de la gestion hasardeuse du compte bancaire par la banque.

45. Concernant le préjudice d’image évoqué par la société Miniprice, le tribunal a dit que les demandeurs ne produisent pas d’éléments probants et qu’il conviendra donc de les débouter de la demande formulée à ce titre.

46. La cour relève, concernant les concours accordés à la société Miniprice, qu’il est établi qu’initialement, le prêt devant être débloqué pour la création du fonds de commerce devait être de 85.000 euros. A ce titre, la banque a attesté, le 29 novembre 2017, de l’octroi de ce prêt pour ce montant de 85.000 euros. Cependant, in fine, le contrat de prêt du 27 juillet 2018 relatif à la création du fonds de commerce a porté sur seulement 65.000 euros, avec la garantie de Bpifrance et le cautionnement solidaire des époux [F], dans la limite de 20.000 euros chacun. La cour constate que cette différence de 20.000 euros dans l’octroi de ce concours n’est pas retenue comme fautive par les intimés. Il ne s’agissait en outre que du financement de la création du fonds, et non de la constitution d’une trésorerie. Aucune pièce n’indique que la société Miniprice ait contesté la réduction du montant des fonds effectivement alloués.

47. Dès le 28 juin 2018, la société Miniprice a bénéficié d’un prêt de 12.000 euros, sur une durée de 4 mois, à titre de crédit de trésorerie concernant la TVA. Il a été prévu que le capital et les intérêts soient remboursés à la fin du prêt le 30 novembre 2018 selon courrier du 30 août 2018. Il n’a pas été prévu de garantie. Ce prêt a été soldé sans qu’aucune difficulté ne soit évoquée. Aucun élément n’est produit concernant une prorogation ou une reconduction de ce prêt.

48. Le prêt global de trésorerie a été accordé le 22 novembre 2018 pour 5.000 euros. Il s’agit d’une autorisation de découvert rattachée au compte courant de la société Miniprice. Celle-ci n’a jamais demandé l’augmentation du montant de cette autorisation.

49. Concernant le second prêt de 12.000 euros, le Crédit Agricole produit le document original concernant ce prêt portant pour date le 10 janvier 2019, avec la caution des époux [F]. Son objet est de combler un besoin de trésorerie, et la première mise à disposition des fonds doit intervenir au plus tard le 10 avril 2019. Le prêt doit être remboursé en une échéance le 1er avril 2019, intégrant le capital et les intérêts. Il est assorti du cautionnement solidaire de chacun des époux [F], dans la limite de 12.000 euros chacun, couvrant le principal, les intérêts et les frais, pour une durée de 26 mois. La cour constate que par courrier du 30 janvier 2019, la société Miniprice a sollicité «’l’annulation du remboursement anticipé de 6.000 euros du prêt en date du 10 janvier 2019’», ce qui confirme qu’à la demande de cette société, l’intégralité du prêt n’a pas été débloquée après sa conclusion. Le même jour, la banque a annulé ce remboursement anticipé et a crédité le compte de la société Miniprice de la somme de 6.000 euros.

50. Les intimés produisent une autre version de ce prêt, également en original, et il en ressort que la date des signatures a été laissée en blanc. La date d’émission du contrat est le 10 janvier 2019. Le remboursement est prévu en une échéance unique le 1er avril 2019.

51. La comparaison des deux exemplaires originaux produits par les parties concernant le prêt de 12.000 euros’confirme qu’il s’agit cependant du même prêt, devant être amorti au plus tard au mois d’avril 2019. Il ne s’agit pas, comme soutenu par les intimés, d’un prêt amortissable sur 24 mois.

52. Il résulte de l’audition de madame [Y] devant la gendarmerie de [Localité 12] que ce prêt de 12.000 euros a bien été conclu en janvier 2019, avec déblocage des fonds, mais que le contrat n’a pas été signé immédiatement. En raison de problèmes familiaux, cette personne a subi un arrêt de travail de plusieurs semaines, puis est venue faire régulariser le contrat, dont la date apposée sur l’acte sous seing privé correspond bien à celle de sa conclusion le 10 janvier 2019. Elle précise qu’il n’y a pas eu ainsi de nouveau contrat de prêt. Elle indique que si par la suite un étalement du prêt sur 24 mois a été demandé par la société Miniprice, la banque n’y a pas fait suite en raison de sa situation financière.

53. Cette audition est confirmée par la lettre de la banque du 10 janvier 2019 concernant le prêt de 12.000 euros réalisé le même jour, faisant mention d’un amortissement anticipé de 6.000 euros’; par le courriel de la société Miniprice du 29 janvier 2019 demandant s’il est possible de débloquer les 6.000 euros’; par les mails adressés en février 2019 par la société Miniprice demandant des solutions concernant le remboursement du prêt de 12.000 euros, afin de ne pas impacter sa trésorerie’; par le courriel du 19 février 2019 de la société Miniprice concernant le prélèvement de 1.308,80 euros avec demande d’explication’; par son mail du 19 mars 2019 afin de rééchelonner le prêt de 65.000 euros et celui de 12.000 euros en raison des difficultés financières’; par le courriel du 2 mai 2019 de la société Miniprice adressé à madame [Y], faisant fait état du remboursement de 1.308,80 euros du mois de février 2019.

54. L’ensemble de ces éléments indique qu’il s’est agi d’un prêt unique pour 12.000 euros, devant être amorti en avril 2019, et qu’aucun nouveau prêt n’a été signé le 4 avril 2019 pour le même montant, avec un amortissement sur deux ans. Si les intimés produisent un constat d’huissier concernant l’exploitation de la vidéosurveillance réalisée dans le magasin de la société Miniprice le 4 avril 2019, ce constat ne confirme que la venue de madame [Y] dans le magasin, et non la conclusion d’un second contrat de prêt portant sur 12.000 euros. L’essentiel de ce constat consiste en effet à rapporter les propos de monsieur et madame [F]. Il en résulte qu’un seul prêt a été conclu, en janvier 2019, dont la conclusion a été simplement régularisée en avril 2019. La preuve qu’un autre concours aurait été accordé en avril 2019 n’est pas rapportée.

55. En conséquence, les intimés ne peuvent soutenir que l’appelante a commis une faute lors de l’octroi de ces concours, dont rien n’indique qu’ils n’ont pas été librement négociés par la société Miniprice et monsieur et madame [F]. La cour note à cet égard que l’absence de signature du prêt de 12.000 euros en janvier 2019 aurait pu dispenser la banque de débloquer les fonds correspondants. En outre, suite à l’amortissement initial de la moitié du prêt ab initio, la banque a, suite à la demande de la société Miniprice, débloqué l’intégralité des fonds le lendemain du courriel adressé par cette intimée le 29 janvier 2019, ainsi qu’il résulte du relevé du compte professionnel du mois de janvier. Le tribunal n’a pu ainsi indiquer que la banque a aggravé la situation de la société Miniprice en créant une confusion sur l’octroi ou non de crédits supplémentaires.

56. S’agissant d’une faute de la banque dans le suivi de la situation de la société Miniprice, la cour rappelle que concernant le déblocage intégral du prêt de 12.000 euros accordé en janvier 2019, la banque a fait droit à cette demande de la société Miniprice le lendemain de la réception de son courriel. Concernant le prélèvement, par erreur, de la somme de 1.308,80 euros au titre du prêt de 12.000 euros en février 2019, il ne résulte pas de ce fait qu’il ait entraîné la déconfiture de la société, puisque le relevé du compte du mois de février 2019 mentionne une position débitrice de 8.267,46 euros au 28 février, de sorte que même sans ce prélèvement erroné, le maximum de

l’autorisation de découvert était dépassé. Si la société Miniprice justifie avoir adressé de nombreux mails en février et mars 2019 concernant ce prélèvement, sa situation, la nécessité de rééchelonner les deux prêts en cours, il ne résulte pas de l’absence de réponse de la banque une attitude fautive. La cour constate d’ailleurs que suite à la demande de la société Miniprice formée par courrier, et non par mails, le 28 mai 2019, dans lequel elle sollicite un regroupement des prêts avec un apurement mensuel de 300 euros, la banque a apporté une réponse dès le 3 juin 2019, refusant cette proposition, mais acceptant un délai de trois mois pour rétablir la situation, avec reprise du paiement des échéances principales, outre 300 euros au titre de l’arriéré. La banque a ainsi apporté une réponse rapidement, alors qu’elle n’était pas tenue d’accéder à la demande de rééchelonnement des prêts, en raison des sommes dues. Il résulte en effet de son courrier de mise en demeure du 10 mai 2019 que la société Miniprice était alors débitrice d’un total de 14.287,29 euros. Le tribunal de commerce n’a pu ainsi constater l’existence d’une attitude fautive de la banque.

57. S’agissant du rejet de prélèvements, la banque a, par courrier du 10 mai 2019, résilié l’ouverture de crédit de 5.000 euros en raison du dépassement de cet encours, avec préavis de 60 jours. Il est indiqué qu’à la fin du préavis, le compte courant devra fonctionner en position créditrice uniquement. Elle a en outre adressé à la société Miniprice une lettre de mise en demeure le 10 mai 2019, pour un total de 14.287,29 euros. Si dans son mail du 20 mai 2019 la société Miniprice s’est plainte du rejet du prélèvement Locam de 260 euros, alors que l’encours de l’ouverture de crédit n’est pas atteint, et que l’autorisation de découvert est toujours valable en raison du préavis en cours, elle ne produit cependant pas de relevé de compte concernant le mois de mai 2019 justifiant du rejet de ce prélèvement, ni du fait que l’encours de 5.000 euros n’était pas alors atteint. Le tribunal n’a pu ainsi dire que malgré l’engagement de la banque de maintenir ce découvert pendant la durée du préavis, cette dernière a rejeté des prélèvements, la preuve de ce fait n’étant pas rapportée devant la cour.

58. Il en résulte que les premiers juges n’ont pu retenir qu’il est patent que par son attitude dans la gestion de ce dossier, la banque n’a pas offert à sa cliente la possibilité d’anticiper ses besoins de trésorerie faute de réponse rapide et adaptée, aggravant ainsi inévitablement la situation déjà précaire de celle-ci et qu’elle a commis une faute dans la rupture des relations de crédits avec la société Miniprice et dans la gestion du compte bancaire de cette société.

59. La cour observe que l’existence de sommes dues pour plus de 14.000 euros, alors que les deux prêts en cours n’étaient pas amortis conformément aux contrats, outre le dépassement de l’autorisation de découvert, fondaient l’appelante à mettre fin à ses concours, se trouvant sinon exposée au risque d’être ensuite poursuivie pour concours abusif en raison de la situation de la société Miniprice.

60. En outre, il résulte du bilan économique, social et environnemental établi par l’administrateur judiciaire de la société Miniprice, dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire, que les difficultés, selon les époux [F], sont apparues dès l’origine de l’exploitation du magasin exploitant un bazar discount avec un rayon d’alimentation sèche sur une surface de 300 m², puisque la nouvelle zone commerciale dans lequel il a été implanté s’est en réalité transformée en lieu dépeuplé, la majorité des projets commerciaux alentour ayant pris du retard, avec des parties communes non terminées, de sorte que certains samedis, seul ce magasin était ouvert, ce qui a limité son attrait pour les consommateurs. En outre, quelques mois après son ouverture, le mouvement des «’gilets jaunes’» a bloqué directement l’accès à la zone commerciale. Ce rapport précise que sur la période du 2 mai 2018 au 28 février 2019, soit avant l’ouverture du redressement

judiciaire, le résultat net de la société Miniprice a été négatif pour 58.421 euros, en raison d’un chiffre d’affaire limité à 34.271 euros. Pendant la période d’observation, le résultat d’exploitation est resté négatif, sur la période du 17 mai 2019 au 31 janvier 2020 (7 mois), de 17.610 euros.’Le chiffre d’affaire hors taxe n’a été, sur cette période, que de 28.409 euros (soit 4.058,42 euros par mois sur 7 mois). Il ressort de ces constatations que l’attitude de l’appelante a été étrangère aux difficultés rencontrées par la société Miniprice.

61. En conséquence, la cour infirmera le jugement déféré en ce qu’il a jugé que la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes a commis une faute dans la rupture des relations de crédits avec la société Miniprice et dans la gestion du compte bancaire de cette société.

Par ces motifs substitués, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a débouté les intimés de leurs demandes indemnitaires formées au bénéfice de la société Miniprice. Il sera également confirmé en ce qu’il a dit n’y avoir plus lieu de statuer sur les demandes de communication de pièces, le contrat concernant le prêt de 12.000 euros ayant été produit en original par l’appelante.

2) Concernant les demandes des époux [F]’:

62. Concernant la signature des engagements de caution supplémentaires de 12.000 euros, le tribunal a noté que le rendez-vous du 4 avril 2019, à l’initiative de madame [Y], chargée de clientèle de la banque, avait comme unique dessein d’obtenir un cautionnement supplémentaire des sommes déjà engagées et partiellement remboursées, à une époque où la trésorerie de la société Miniprice était précaire, voire obérée’; que la simple comparaison des pièces numéro 2 et 16 conforte le fait que l’action de cette personne, lors de sa venue dans les locaux de la société Miniprice le 4 avril 2019, avait pour but d’obtenir une garantie supplémentaire en raison de la situation financière obérée de la société Miniprice, alors que les consorts [F] étaient persuadés avoir obtenu de leur banque un étalement du remboursement du prêt court terme sur 24 mois’; que selon la pièce numéro 25 de la société Miniprice, madame [Y] aurait demandé expressément à ses clients de ne pas dater les actes de caution; qu’ainsi cette attitude de la banque est fautive, les man’uvres orchestrées devant être qualifiées de dolosives, ce qui a vicié le consentement des cautions. Le tribunal a ainsi jugé que les cautionnements de 12.000 euros souscrits par monsieur et madame [F] relatifs au prêt à court terme aux professionnels comme nuls.

63. La cour constate que selon les demandes et les moyens énumérés dans le jugement déféré, le tribunal de commerce n’a pas été saisi d’une demande de nullité des cautionnements, mais seulement d’une demande tendant à constater qu’ils sont disproportionnés par rapport à la dette principale, et qu’il convient ainsi de les réduire. La demande de dommages et intérêts des époux [F] ne repose pas sur les cautionnements, mais sur l’attitude de la banque dans la gestion de ses relations avec la société Miniprice. Le jugement déféré ne peut ainsi qu’être infirmé en ce qu’il a jugé que les cautionnements sont nuls, le tribunal ayant dépassé l’objet du litige dont il a été saisi ainsi que soutenu par l’appelante.

64. Concernant la réduction des cautionnements, la dette garantie est de 12.000 euros à titre principal. Chacun des cautionnements a été donné solidairement à hauteur de ce montant. Il en résulte que chaque caution peut être actionnée à hauteur de cette somme. Cependant, le créancier ne peut obtenir plus que la totalité de sa créance, même en poursuivant les deux cautions simultanément. Il en résulte qu’il n’y a pas lieu de réduire ces cautionnements solidaires. Les époux [F] seront donc déboutés de cette prétention.

65. Sur les préjudices invoqués par monsieur et madame [F], le tribunal a considéré qu’ils ont, par l’attitude blâmable et les agissements de la banque, subi un préjudice moral certain; qu’à la lumière des faits, le montant du préjudice moral des époux [F] s’élève à la somme de 10.000 euros. Concernant les autres demandes d’indemnisation des préjudices subis par les dirigeants, le tribunal a constaté que les demandeurs ne rapportent pas la preuve de l’existence de ces préjudices.

66. La cour ne peut que se référer aux motifs développés plus haut concernant la société Miniprice, et les raisons de son placement en redressement judiciaire. Elle ne peut également que rappeler les motifs énoncés concernant les conditions de la ratification du prêt de 12.000 euros conclu en janvier 2019, ratification intervenue en avril 2019. La preuve du dol retenu par le tribunal n’est pas rapportée, concernant des man’uvres de madame [Y] afin d’obtenir une garantie qui n’aurait pas été prévue initialement, en laissant espérer un amortissement de ce prêt sur deux ans. Le jugement déféré sera ainsi infirmé en ce qu’il a condamné l’appelante à payer aux époux [F] la somme de 10.000 euros au titre de leur préjudice moral, dont l’existence en outre n’est pas démontrée.

67. En conséquence, le jugement déféré sera également infirmé en ce qu’il a condamné l’appelante à payer à ces intimés la somme globale de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

*****

68. Succombant devant cet appel, les époux [F] seront condamnés à payer à l’appelante la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, concernant les frais irrépétibles exposés en première instance. Ils seront également condamnés à lui payer la même somme au titre des frais exposés en cause d’appel. Ils seront enfin condamnés aux entiers dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu les articles articles 1103, 1104, 1231-1, 1240, 2290 et 2298 du code civil, des articles L 313-12 et D 313-14-1 du code monétaire et financier’:

Infirme le jugement déféré en ce qu’il a’:

– jugé que le Crédit Agricole Sud Rhône-Alpes a commis une faute dans la rupture des relations de crédits avec la société Miniprice et dans la gestion du compte bancaire de cette société’;

– jugé les cautionnements consentis par monsieur et madame [F] en garantie des 12.000 euros du prêt à court terme aux professionnels comme nuls’;

– jugé que monsieur et madame [F] ont subi un préjudice moral certain’;

– condamné le Crédit Agricole Sud Rhône-Alpes à payer à monsieur et madame [F] la somme globale de 10.000 euros au titre du préjudice moral’;

– condamné le Crédit Agricole Sud Rhône-Alpes à payer à monsieur et à madame [F] la somme globale de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;

– condamné le Crédit Agricole Sud Rhône-Alpes aux entiers dépens, dont distraction au profit du cabinet Avocats Chapuis Associés du Barreau du Vienne, prévus à l’article 695 du code de procédure civile’;

Confirme le jugement déféré en ses autres dispositions soumises à la cour;

statuant à nouveau’;

Déboute la société Miniprice, la Selarl Alliance MJ ès-qualités de liquidateur de la société Miniprice prise en la personne de maître Cuinet, ainsi que monsieur et madame [F], de l’intégralité de leurs prétentions’;

Condamne les époux [F] à payer à la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, concernant les frais irrépétibles exposés en première instance’;

Condamne les époux [F] à payer à la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Sud Rhône Alpes la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, concernant les frais irrépétibles exposés en cause d’appel;

Condamne les époux [F] aux entiers dépens de l’instance, exposés tant en première instance qu’en cause d’appel’;

Signé par Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente et par Mme Alice RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente

 


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