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Vidéosurveillance : 22 juin 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01855

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Vidéosurveillance : 22 juin 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01855

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

21e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 22 JUIN 2023

N° RG 21/01855 – N° Portalis DBV3-V-B7F-USGD

AFFAIRE :

S.A.S.U. NATH’URE ET BEAUTE

C/

[K] [Y]

Décision déférée à la cour : Arrêt rendu le 16 Avril 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section : AD

N° RG : 19/00145

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Karine HISEL

Me Marie-laure ABELLA

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT DEUX JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A.S.U. NATH’URE ET BEAUTE

N° SIRET : 801 050 436

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par : Me Karine HISEL, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2408 –

APPELANTE

****************

Madame [K] [Y]

née le 03 Mars 1994 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par : Me Marie-laure ABELLA, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 443 –

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/010336 du 25/10/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de VERSAILLES)

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 09 Mai 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Véronique PITE, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président,,

Madame Véronique PITE, Conseiller,

Madame Odile CRIQ, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Isabelle FIORE,

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [K] [Y] a été engagée par contrat d’apprentissage, en qualité de conseillère esthéticienne, à compter du 17 août 2015, par la société par actions simplifiée à associé unique sous l’enseigne Yves Rocher, Nath’ure et Beauté, qui a une activité de commerce de détail de parfumerie et de produits de beauté en magasin, et emploie moins de onze salariés.

A compter du 28 août 2017, Mme [Y] a été engagée en contrat à durée indéterminée en qualité de conseillère esthéticienne.

Convoquée le 1er juillet 2018 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 10 juillet suivant, Mme [Y] a été licenciée par lettre datée du 13 juillet 2018 énonçant une cause réelle et sérieuse.

Invoquant un harcèlement moral, Mme [Y] a saisi, le 29 janvier 2019, le conseil de prud’hommes de Nanterre aux fins de demander la nullité de son licenciement à titre principal, de voir reconnaître le caractère abusif de son licenciement à titre subsidiaire, et de condamner la société au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire, ce à quoi l’employeur s’opposait.

Par jugement rendu le 16 avril 2021, notifié le 7 juin suivant, le conseil a statué comme suit :

Dit le licenciement considéré comme étant nul, et emportera les effets de la nullité,

En conséquence,

Condamne la société Nath’ure et Beauté à payer à Mme [Y] la somme de 9.252,66 euros à titre d’indemnité pour licenciement nul;

Déboute Mme [Y] du surplus des demandes;

Condamne la société Nath’ure et Beauté aux entiers dépens de l’instance.

Le 14 juin 2021, la société Nath’ure et Beauté a relevé appel de cette décision par voie électronique.

Mme [Y] a déposé le 1er juillet 2021 une demande d’aide juridictionnelle, qui lui a été accordée par le tribunal judiciaire de Versailles par décision du 25 octobre 2021.

Selon ses dernières conclusions remises au greffe le 15 novembre 2022, la société Nath’ure et Beauté demande à la cour de :

Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Nanterre en ce qu’il a retenu la nullité du licenciement ;

Puis statuant de nouveau :

Dire et juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse ;

En conséquence :

Débouter intégralement Mme [Y] de ses fins, demandes et conclusions.

Condamner Mme [Y] à lui verser la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamner Mme [Y] aux dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 20 janvier 2022, Mme [Y] demande à la cour de :

A titre principal :

Confirmer le jugement en ce qu’il a jugé son licenciement nul du fait du harcèlement subi

Confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Nath’ure et Beauté à lui verser la somme de 9.252,66 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi avec intérêt au taux légal à compter du jugement dont appel

A titre subsidiaire :

Si la cour infirmait le jugement en ce qu’il a déclaré le licenciement nul, il lui est demandé de, statuant à nouveau,

Déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En conséquence, condamner la société Nath’ure et Beauté à lui verser la somme de 6.168,44 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et 3.084,22 euros pour le préjudice moral subi du fait du harcèlement, des humiliations et agressions

En tout état de cause, y ajoutant,

Condamner la société Nath’ure et Beauté à lui verser les sommes suivantes :

-1.542 euros brut à titre de rappel de salaire pour la période du 17 août au 17 septembre 2018 outre les congés payés afférents ” 15,42 ” euros avec intérêt au taux légal à compter de la saisine,

– 1.187,34 euros à titre d’indemnité de licenciement avec intérêt au taux légal à compter de la saisine ,

Ordonner la remise des bulletins de paie, solde de tout compte, certificat de travail et attestation Pôle Emploi conformes à l’arrêt

Condamner la société Nath’ure et Beauté à verser à Maître Marie-Laure Abella, avocat au barreau de Versailles, la somme de 2.500 euros par application des dispositions de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridictionnelle

Condamner la société Nath’ure et Beauté aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.

Par ordonnance rendue le 19 avril 2023, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 9 mai 2023.

MOTIFS

I – Sur le harcèlement moral

Mme [Y] fait valoir la pression permanente de l’employeur, qui l’occupait à des tâches ne relevant pas de sa classification, ses heures supplémentaires même durant ses congés ne donnant pas lieu à rémunération, sa surveillance continue y compris dans les lieux de repos, le dénigrement dont elle était l’objet devant ses collègues et les clients, qu’elle finit par dénoncer à l’inspection du travail et qui conduisit à son agression physique le 31 mai 2018, la gérante lui ayant tiré les cheveux et l’ayant secouée alors qu’elle était en train de servir une cliente, suite à quoi elle déposa une plainte auprès des services de police. Elle déplore la dégradation de sa santé en raison du stress continu subi.

Aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En vertu de l’article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le salarié présente des éléments de faits laissant supposer l’existence d’un harcèlement, et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L.1152-1 du code du travail.

Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Sur l’attribution de tâches ne rentrant pas dans les fonctions de conseillère

La feuille sur les conseillers de vente formatrice dont se prévaut Mme [Y], qui ne spécifie aucun nom sinon qu’il y apparait ” [K] est son binôme, responsable des stagiaires “, ne démontre pas qu’elle aurait pris, de manière générale, en charge la formation des stagiaires dans le magasin. Pas plus, elle n’établit que l’inventaire ne ressortirait pas de ses tâches alors que son contrat de travail y prévoit sa participation (article 7). Au demeurant, l’avertissement du 8 novembre 2016, non contesté, et que l’employeur prétend, sans être contredit, avoir adressé à l’ensemble du personnel, lui faisait grief de n’avoir pas contrôlé les marchandises en rayon, ce que prévoit explicitement son contrat de travail.

Mme [Y] n’établit pas, comme elle prétend, qu’elle aurait géré le magasin et en subirait la pression, ainsi que le relève à juste titre l’employeur.

Sur les heures supplémentaires

De même, la fiche non nominale sur les conseillers de vente formatrice dont se prévaut Mme [Y] ne permet de déduire qu’elle aurait fait des heures supplémentaires ou travaillé durant ses jours de congé sans être réglée, faute d’aucune valeur probante.

La circonstance qu’elle ait travaillé, comme le suggère la lettre de licenciement jusqu’à 20h15 un jour, contre l’avis au reste de son employeur, ne dit pas qu’elle faisait régulièrement des heures supplémentaires non payées, sur lesquelles l’intéressée n’apporte de précision suffisante en disant qu’elle finissait rarement aux heures fixées et arrivait souvent pour la livraison à 8 heures et ne repartait que vers 18h ou 19h, et dont elle ne réclame pas au demeurant paiement.

Sur la surveillance permanente

Comme le relève l’employeur, Mme [Y] ne démontre nullement la surveillance dont elle aurait été l’objet et qu’elle ne précise pas dans son détail.

Sur le dénigrement public

Mme [O], sa collègue, étant revenue sur son témoignage écrit sous l’influence, selon elle, de la salariée comme celui de Mme [I], qui est une autre collègue, sa première attestation dont se prévaut l’intimée n’a aucune valeur probante. Par ailleurs, Mme [I] ne parle que d’elle dans sa déposition, qui ne saurait éclairer les relations entre la salariée et la gérante du salon sauf à dire, sans détail d’aucun fait constaté, que Mme [Y] aurait subi le même ” acharnement psychologique “.

Cet élément n’est pas établi.

Sur l’agression physique

Il résulte du procès-verbal de constat d’huissier du 17 novembre 2020 établi sur la base non querellée de la vidéosurveillance du magasin, que durant l’encaissement par Mme [Y] des achats d’une cliente, la gérante se mit ” tout contre ” elle, et a priori ” vindicative “, lui saisit le bras et ses cheveux attachés qu’elle tirait, sans meilleure précision, ce pourquoi l’intéressée justifie avoir déposé plainte le 2 juillet 2018 pour violence légère, l’employeur y voyant une ” taquinerie ” s’inscrivant dans la familiarité de leurs relations, dont attestent Mme [J], responsable adjointe (” sa chouchoute “), et Mme [L] [W], esthéticienne en alternance (” elle [la] considérait comme sa fille “) comme les échanges non contestés de SMS parsemés de c’urs.

Même si l’intéressée justifie avoir consulté son médecin de ville pour ” stress professionnel “, il n’en reste pas moins que, comme l’observe l’employeur, manque au harcèlement allégué la récurrence de faits, qui aurait conduit à la dégradation de son état de santé. Le jugement sera infirmé dans son expression contraire.

II – Sur le licenciement

La lettre de licenciement est ainsi libellée :

” (‘) Nous faisons suite à l’entretien préalable qui s’est tenu le 10 juillet dernier au cours duquel vous vous êtes présentée assistée d’un Conseiller Extérieur du salarié. Au cours de cet entretien, je vous ai rappelé que vous aviez été embauchée par contrat à durée indéterminée écrit du 3 août 2017 avec effet au 28 août, en qualité de Conseillère Esthéticienne Vendeuse et qu’à ce titre, vous étiez tenue à un certain nombre d’obligations professionnelles et contractuelles. Ainsi, l’article 9 de votre contrat de travail intitulé ” Port de la tenue ” vous oblige-t-il à porter quotidiennement la tenue Yves Rocher mise à votre disposition.

” Or, le jeudi 28 juin 2018, outre le fait que vous êtes arrivée avec 5 minutes de retard, vous ne portiez pas votre tenue, ce qui n’a pas manqué d’attirer l’attention de vos collègues de travail. Quand je suis arrivée au magasin, je vous en ai fait la remarque et vous ai demandé de rentrer chez vous chercher votre tenue mais vous m’avez alors indiqué que vous ne préfèreriez pas rentrer en raison d’une défaillance de votre véhicule. À titre exceptionnel et pour être conciliante, je vous ai alors permis d’aller vous acheter une tenue équivalente au sein du centre commercial.

” Pour autant, vous n’avez apparemment pas tenu compte de ma mansuétude puisque le même soir, alors que vous étiez en cabine, vous n’avez pas respecté les procédures et usages en vigueur au sein du magasin. En effet, alors qu’une cliente avait rendez-vous à 19h15 pour une épilation avec une autre de vos collègues, vous avez insisté pour vous en occuper. L’intervention aurait dû être normalement réalisée en 30 minutes mais 1 heure plus tard, vous n’étiez toujours pas sortie de la cabine. Inquiète, je suis donc allée frapper à la porte pour voir si tout se passait bien, ce qui a dû déranger la cliente. Or, si vous aviez respecté les procédures internes stipulant que tout retard en soins cabine doit faire l’objet d’une information par l’esthéticienne qui doit sortir de sa cabine quelques minutes, cela ne serait pas arrivé.

” Puis, le samedi 30 juin ” 218 “, alors que vous deviez prendre votre poste de travail à 12h30, j’apprends par une de vos collègues de travail que vous êtes en contact par sms avec elle et que vous lui avez indiqué que vous ne viendriez pas, je la cite ” J’ai [K] par message et elle me dit qu’elle est fatiguée et qu’elle ne sait pas si elle va venir parce qu’elle est au bout de sa vie.” Vous n’êtes pas sans savoir qu’en tant qu’employeur, c’est moi seule que vous devez informer et avertir de vos absences et votre réponse à ce sujet est édifiante, je vous cite : ” J’avais pas envie de vous parler et de vous entendre. Néanmoins, vous avez fini par m’adresser un sms m’indiquant que vous ne viendriez pas compte tenu de votre état de fatigue, et je vous ai alors répondu que j’en prenais note, que je vous dispensais de venir travailler le lendemain dimanche 1er juillet pour que vous puissiez vous reposer. Je vous ai également demandé de m’avertir à l’avance d’une éventuelle absence la semaine suivante. C’est alors que de façon insolente vous m’avez répondu : ” non je serai là demain, je viens demain, c’est pas vous qui décidez à ma place ” ! Contre toute attente, le dimanche 1er juillet, alors que vous étiez censée prendre votre poste à 11 heures 30 et que vous m’aviez indiqué la veille de façon peu élégante que vous seriez bien présente, vous ne vous présentiez pas et je vous adressais alors un sms pour savoir ce qu’il en était. C’est alors que vous n’avez pas hésité à me répondre de manière impertinente : ” c’est vous qui m’avez dit de ne pas venir ” !

” Votre attitude récurrente de ces dernières semaines, laquelle m’a déjà par ailleurs contrainte à vous adresser 2 courriers de recadrage le 17 juillet 2017 et le 4 mai 2018 démontre à l’évidence un laxisme et une négligence portant atteinte à l’image du magasin, entraînant un climat délétère puisque votre comportement perturbe son bon fonctionnement, ce qui a inévitablement un retentissement sur vos collègues de travail. Surtout, vous faites preuve d’insolence, de désinvolture voire d’insubordination à mon encontre, ce qui n’est pas acceptable. Dans ces conditions, je me vois contrainte par la présente de vous notifier votre licenciement pour cause réelle et sérieuse. La date de première présentation de cette lettre fixera le point de départ du préavis d’1 mois à l’issue duquel votre contrat de travail sera définitivement rompu. Nous vous précisons cependant que nous vous dispensons de l’exécution de ce préavis et que vous percevrez l’indemnité compensatrice correspondante. (‘) ”

En vertu de l’article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par un motif réel et sérieux, et l’article L.1235-1 du même code impartit au juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs fondés sur des faits précis et matériellement vérifiables invoqués par l’employeur, de former sa conviction en regard des éléments produits par l’une et l’autre partie. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Sur la cause

Mme [Y] plaide la nullité du licenciement qui suivit le harcèlement moral.

Cela étant, le harcèlement moral n’ayant pas été retenu, le licenciement ne pourrait trouver sa cause dans celui-ci et le jugement sera infirmé dans son expression contraire.

A titre subsidiaire, Mme [Y] fait valoir son oubli une seule fois de la tenue rachetée le jour même, le profil de la cliente obligeant au temps passé, l’avis donné de son absence, le défaut de planification de son travail ce dimanche 1er juillet, et relève le flou du surplus.

La société se prévaut des griefs exposés dans sa lettre, lui reprochant de manquer aux bonnes pratiques internes, globalement son insubordination et le non-respect des règles, notamment en cas d’absence, perturbant le bon fonctionnement du magasin, et considère le licenciement justifié.

Il est acquis aux débats que Mme [Y] arriva sans sa tenue de travail le 28 juin 2018 dont le port obligatoire est institué par l’article 9 du contrat, qu’elle racheta en équivalence durant la pause avec l’autorisation de l’employeur, et que le soir, elle s’occupa d’un soin prévu une demi-heure durant une heure, ce qui conduisit la gérante à s’immiscer dans la cabine pour s’enquérir. Si la salariée, qui dément par ailleurs la règle obligeant à prévenir quiconque qui toutefois s’impose d’évidence d’autant que le salon allait fermer, estime avoir prévenu de ce dépassement, elle n’en administre pas la preuve.

Il est ensuite constant que l’intéressée avisa d’abord sa collègue au lieu de la gérante de son absence le 30 juin suivant, et qu’ayant ensuite pris contact avec celle-ci peu après le début de son service, elle fut dispensée de venir ce jour et le lendemain, ce qu’elle fit.

Si l’employeur, dans sa lettre, précise que Mme [Y] lui aurait révélé après le 30 juin, ne vouloir ni l’entendre, ni lui parler ce jour-là, il n’en administre pas la démonstration.

En revanche, il établit, par la production des SMS, que la salariée exigea de venir travailler le dimanche 1er juillet, date à laquelle elle reconnaissait être planifiée, en dépit de la prévenance de la gérante lui demandant de rester se reposer, en ces termes : ” je viens demain, c’est pas vous qui décidez à ma place ” et ensuite s’en être abstenue en lui rétorquant ” c’est vous qui m’avez dit de ne pas venir “.

Néanmoins, de ces simples mots, le grief d’insolence ne peut être retenu, et le surplus des reproches étant imprécis, ils ne sauraient pas être cause du licenciement.

Enfin, l’employeur justifie de précédents rappels à l’ordre les 22 juin 2016, 13 juillet 2017 et 10 mai 2018, ces deux derniers cités dans sa lettre, les deux premiers pour un non-respect des protocoles de soins et d’hygiène faute d’un nettoyage adapté des cabines d’épilation, l’autre pour énoncer le défaut d’un droit sur un repos hebdomadaire spécifiquement le mercredi.

Cela étant, il suit de ce qui précède que le licenciement, dont la cause est partiellement réelle, n’est pas suffisamment sérieux, l’absence injustifiée du 1er juillet étant finalement isolée parmi des reproches véniels sans s’inscrire dans la continuité de reproches rémanents similaires.

Il sera ajouté au jugement que le licenciement n’est pas fondé sur un motif réel et sérieux.

Sur les conséquences

Mme [Y] sollicite 6.168,44 de dommages-intérêts pour indemnisation de la rupture abusive et 3.084,22 euros en réparation de son préjudice moral du fait du comportement humiliant et agressif subi.

L’article L.1235-3 prévoit une indemnisation équivalente à 1 à 4 mois de salaire.

Compte tenu de l’ancienneté de l’intéressée, de son jeune âge, et de sa reconversion dès le début de l’année 2019 dans les métiers de la petite enfance, son préjudice né de la perte de son emploi sera justement indemnisé par l’allocation de 4.000 euros. Ne faisant pas la preuve du comportement humiliant et agressif subi, elle se verra débouter de ses prétentions afférentes.

Mme [Y] fait valoir que le préavis, d’un mois, aurait dû s’étendre sur deux mois compte tenu de l’ancienneté dévolue par l’apprentissage.

L’article L.1234-1 du code du travail énonce que le salarié justifiant chez le même employeur de services continus d’au moins deux ans, bénéficie d’un préavis de deux mois.

N’étant pas contesté et au reste établi par l’attestation Pôle emploi que le préavis non effectué courut un mois du 17 juillet au 16 août 2018, il reste dû à l’intimée la somme non disputée en son quantum de 1.542 euros brut à titre de rappel de salaire pour la période du 17 août au 16 septembre 2018 outre les congés payés afférents.

Mme [Y] considère, vu son ancienneté, avoir le bénéfice d’une indemnité légale de licenciement qu’elle ne reçut pas.

L’article L.1234-9 du code du travail dit que le salarié comptant une ancienneté de 8 mois interrompus a droit à une indemnité de licenciement.

Etant acquis, comme le montre l’attestation Pôle emploi, que Mme [Y] ne perçut aucune indemnité, il convient de lui allouer la somme non contestée de 1.187,34 euros, de ce chef.

Ces sommes doivent être augmentées des intérêts au taux légal dans les conditions posées aux articles 1231-6 et 1231-7 du code civil.

L’employeur sera tenu de délivrer à Mme [Y] les documents de fin de contrat conformes à la présente décision.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en en ce qu’il a condamné la société par actions simplifiée Nath’ure et Beauté aux dépens ;

Statuant de nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant ;

Dit le licenciement mal fondé ;

Condamne la société par actions simplifiée Nath’ure et Beauté à payer à Mme [K] [Y] :

– 4.000 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– 1.187,34 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement ;

– 1.542 euros brut à titre de rappel de salaire pour la période du 17 août au 16 septembre 2018 outre 15,42 euros de congés payés afférents ;

Dit que les créances de nature contractuelle sont productives d’intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de conciliation pour les créances échues à cette date, et à compter de chaque échéance devenue exigible, s’agissant des échéances postérieures à cette date, et que les créances indemnitaires sont productives d’intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant ;

Ordonne la remise des documents de fin de contrat (attestation Pôle-emploi, solde de tout compte et certificat de travail) conformes à la présente décision dans le délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne la société par actions simplifiée Nath’ure et Beauté à payer à Maître Marie-Laure Abella, avocat au barreau de Versailles, la somme de 2.500 euros par application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridictionnelle et 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société par actions simplifiée Nath’ure et Beauté aux entiers dépens.

– Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– Signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, et par Madame Isabelle FIORE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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