Veuillez activer JavaScript dans votre navigateur pour remplir ce formulaire.
Nom
(*) Vos données sont traitées conformément à notre Déclaration de Protection des Données Vous disposez d’un droit de rectification, de limitation du traitement, d’opposition et de portabilité.

Vidéosurveillance : 16 novembre 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/03088

·

·

Vidéosurveillance : 16 novembre 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/03088

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 16 NOVEMBRE 2023

N° RG 21/03088 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UZMH

AFFAIRE :

[B] [J]

C/

S.A.S. ACP PROTECTION

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 Février 2020 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : AD

N° RG : F18/02665

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me [M] [E]

Me Joseph MUEL

Expédition numérique délivrée à : PÔLE EMPLOI

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEIZE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant , initialement fixé au 19 octobre 2023 puis prorogé au 16 novembre 2023,les paries ayant été avisées ,dans l’affaire entre :

Monsieur [B] [J]

né le 20 Juillet 1970 à [Localité 6] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Manuella METOUDI, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1137

APPELANT

****************

S.A.S. ACP PROTECTION

N° SIRET : 339 094 237

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentant : Me Joseph MUEL, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 166, substitué par Me Maureen POCHET, avocat au barreau de VERSAILLES

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 06 Juin 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Régine CAPRA, Présidente chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Sophie RIVIERE,

Greffier lors du prononcé : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI

EXPOSE DU LITIGE

La société ACP Protection spécialisée dans le secteur des activités de protection et de sécurité privée et de sécurité incendie ayant obtenu le marché du site de la BNP Paribas, sur lequel M. [B] [J] était affecté, le contrat de travail à durée indéterminée de ce dernier lui a été transféré en application des dispositions conventionnelles et un avenant a été conclu entre le nouvel employeur et le salarié le 25 mars 2009 à effet au 1er avril 2009, aux termes duquel ce dernier était engagé, avec une reprise d’ancienneté au 8 novembre 2001, en qualité d’agent d’exploitation, coefficient 140 niveau 3 échelon 2, à temps plein moyennant un salaire brut mensuel de 1 416,41 euros, étant précisé contractuellement, qu’il effectuerait les fonctions et tâches d’agent de sécurité avec la qualification SSIAP1.

Les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité.

M. [J] a été placé en arrêt de travail pour accident du travail du 19 août 2013 au 26 novembre 2014.

Par courrier recommandé avec avis de réception du 15 janvier 2015, la société ACP Protection a informé M. [J] que sa carte professionnelle arrivait à expiration le 3 février 2015, le mettant en conséquence en demeure de lui adresser son nouveau numéro de carte professionnelle au plus tard 48 heures avant la date d’expiration de celle-ci à défaut de quoi son contrat de travail pourrait être suspendu.

M. [J] a sollicité le 17 janvier 2015 le renouvellement de sa carte professionnelle auprès du CNAPS qui a sollicité de nouvelles pièces le 20 janvier 2015 que le salarié a adressé trois jours plus tard.

Le 4 février 2015, il a reçu une seconde réponse du CNAPS concernant la délivrance de sa carte professionnelle avec une liste de pièces manquantes qu’il a envoyé trois jours plus tard à la suite de quoi, il a été informé de la suspension de l’instruction de sa demande le 12 février 2015.

Il lui a par ailleurs été indiqué suite à un appel au CNAPS, confirmé par courriel, que « la sécurité incendie ne rentre pas dans le champ de compétences du CNAPS et est exclu du Livre VI du code de la sécurité intérieure. En conséquence, les agents SSIAPS dans le cadre exclusif de leur mission incendie ne sont pas soumis à la délivrance d’une carte professionnelle d’agent de sécurité. »

Par courrier recommandé avec avis de réception du 3 février 2015, la société a informé le salarié de l’arrivée à expiration le jour-même de son titre unique de séjour et de travail, lui demandant de présenter l’original de son nouveau titre ou à défaut, de sa convocation à la préfecture, dans les plus brefs au service du personnel de la société et précisant que sans réponse sous huitaine, il encourait la suspension de son contrat de travail.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 février 2015, la société ACP Protection a suspendu le contrat de travail du salarié et l’a convoqué à un entretien préalable à licenciement fixé au 10 mars 2015 pour défaut de possession de titre de séjour en cours de validité.

Par courriel du 24 février 2015, M. [J] a adressé à la société son récépissé de demande de renouvellement de carte de séjour. L’entretien préalable fixé au 10 mars 2015 a été maintenu.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 mars 2015, la société ACP Protection a convoqué M. [J] à un entretien préalable à sanction pouvant aller jusqu’à la rupture des relations contractuelles fixé au 23 mars 2015, reporté au 7 avril 2015 sur demande du salarié.

Par courrier du 25 mars 2015, le salarié a dénoncé, entre autres, le harcèlement moral dont il s’estimait victime et qui dégradait son état de santé.

Par courriers recommandés avec avis de réception des 10 et 17 avril 2015, la société APC Protection a informé le salarié qu’elle maintenait la suspension de son contrat de travail jusqu’au renouvellement de sa carte professionnelle, dans l’attente notamment, du récépissé de dépôt lui permettant de reprendre son travail.

Par courrier du 4 juin 2015, la société a maintenu la suspension du contrat du salarié à défaut pour celui-ci de lui avoir fourni à cette date, sa carte professionnelle renouvelée.

M. [J] a été placé en arrêt de travail pour maladie du 30 avril 2015 au 5 mars 2018.

Par avis de la médecine du travail du 7 mars 2018 lors de sa visite de préreprise, M. [J] a été déclaré inapte à son poste, avec dispense de l’obligation de reclassement au motif que « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ».

Par courrier recommandé du 3 avril 2018, M. [J] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 12 avril 2018.

Par courrier recommandé avec demande d’avis de réception du 18 avril 2018, la société ACP Protection a notifié à M. [J] son licenciement pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement.

Par requête reçue au greffe le 17 octobre 2018, M. [J] a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre afin d’obtenir la requalification de son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre le versement de diverses sommes.

Par jugement du 25 février 2020, auquel la cour renvoie pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud’hommes de Nanterre a :

– Dit et jugé le licenciement prononcé par la SAS ACP Protection à l’encontre de M. [B] [J], fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

– Condamné la SAS ACP Protection à verser à M. [B] [J] les sommes suivantes :

* 540,87 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 7 au 18 avril 2018, avec adjonction des intérêts au taux légal à compter du 26 février 2019 ;

* 54,08 euros à titre d’indemnité de congés payés y afférents, avec adjonction des intérêts au taux légal à compter du 26 février 2019 ;

– Condamné la SAS ACP Protection à verser à Maitre [M] [E] la somme de 1 152 euros à titre d’indemnité pour frais irrépétibles de procédure, à charge pour Maitre [M] [E] de renoncer à percevoir la part contributive de l’Etat ;

– Débouté M. [B] [J] de ses demandes plus amples ou contraires ;

– Rappelé l’exécution de droit à titre provisoire des condamnations ordonnant le paiement des sommes accordées au titre du complément de salaire et des congés payés afférents, dans la limite de 13 713,52 euros ;

– Laissé à chaque partie la charge de ses dépens.

Par déclaration au greffe du 18 octobre 2021, M. [J] a interjeté appel de cette décision.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par Rpva le 29 mai 2023, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens, M. [J] demande à la cour de :

– Dire M. [B] [J] recevable et bien fondé en son appel et demandes ;

Y faisant droit :

– Réformer le jugement attaqué en ce qu’il a débouté M. [B] [J] de ses demandes relatives :

* à la requalification de son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* au versement de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents ;

* au versement de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

– Confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a condamné la société ACP Protection à régler à M. [J] la somme de :

* 540,87 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 7 au 18 avril 2018 ;

* 54,08 euros à titre d’indemnité de congés payés y afférents ;

Et statuant à nouveau :

– Dire et juger le licenciement intervenu à l’encontre de M. [B] [J] sans cause réelle et sérieuse ;

– Condamner la société ACP Protection au paiement des sommes suivantes :

* 19 815,64 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 3 048,56 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ;

* 304,85€ au titre des congés payés y afférents ;

* 540,87euros à titre de rappel de salaire pour la période du 7 au 18 avril 2018 ;

* 54,08 € à titre d’indemnité de congés payés y afférents ;

* 5 000€ au titre du préjudice moral sur le fondement de l’article 1240 du code civil avec intérêt de retard au taux légal ;

– Ordonner la remise des documents de fin de contrat, bulletins de paie, attestation Pôle emploi conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

– Condamner la société ACP Protection au paiement de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code du procédure civile ;

– Condamner la société ACP Protection aux entiers dépens ;

– Rejeter l’ensemble des demandes formulées par la société ACP Protection.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par Rpva le 16 mai 2023, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens, la société ACP Protection demande à la cour de :

– Confirmer le jugement rendu en première instance en ce qu’il a :

* Dit et jugé le licenciement prononcé par la société ACP Protection à l’encontre de M. [B] [J] fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

* Débouté M. [B] [J] de ses demandes plus amples ou contraires ;

Et, statuant à nouveau,

– Débouter M. [B] [J] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

– Condamner M. [B] [J] au paiement de la somme de 3 000 euros sur fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 31 mai 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement pour inaptitude physique avec dispense de l’obligation de reclassement notifié le 18 avril 2018 et le manquement à l’obligation de sécurité

La lettre de licenciement est rédigée comme suit :

« Suite à notre entretien qui s’est tenu le 12 avril 2018 nous vous informons de notre décision de vous licencier après avoir consulté les délégués du personnel de la société ACP PROTECTION, en raison de votre inaptitude à occuper votre emploi, constatée par le médecin du travail et en raison de l’impossibilité de vous reclasser compte tenu de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail précisant que votre état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi. Nous ne comprenons pas votre attitude lors de cet entretien préalable. En effet votre seule réponse à nos interrogations sur la situation et l’impossibilité de reclassement a été : « je n’ai rien à vous dire… ».

Votre contrat de travail prend fin à la date d’envoi de cette lettre, soit le 21 avril 2018.Vous n’effectuerez donc pas de préavis.  »

M. [J] invoquant les dispositions de l’article L. 1222-1 du code du travail selon lequel le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi et les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du même code, dont il résulte que l4employeur, tenu d’une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, soutient que les manquements de son employeur caractérisés par la suspension injustifiée de son contrat de travail concernant son titre de séjour et sa carte professionnelle arrivés à expiration et les procédures injustifiées qui s’en sont suivies, sont à l’origine de la dégradation de son état de santé, par conséquent, de son inaptitude à son poste avec dispense de l’obligation de reclassement puis de son licenciement, de sorte que ce dernier est sans cause réelle et sérieuse.

La société réplique qu’elle n’a pas manqué à ses obligations et que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement est fondé.

La loi n°2006-64 du 23 janvier 2006, venue modifier l’article 6 de la loi n°83-629 du 12 juillet 1983, a prévu que nul ne peut être employé pour participer à une activité de surveillance humaine ou surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou gardiennage s’il ne justifie pas de son aptitude professionnelle selon des modalités définies par décret en Conseil d’Etat. Le décret n° 2009-137 du 9 février 2009, pris pour son application, a subordonné l’exercice de la profession d’agent de surveillance humaine ou surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou gardiennage à la délivrance d’une carte professionnelle.

Les dispositions de la loi n°83-629 du 12 juillet 1983 ont été ultérieurement codifiées aux articles L. 611-1, L. 612-20 du code de la sécurité intérieure, entrés en vigueur le 1er mai 2012, et celles du décret n° 2009-137 du 9 février 2009 aux articles R. 612-1 à R. 612-42 du code de la sécurité intérieure, entrés en vigueur le 1er décembre 2014.

Si le salarié concède que la détention d’une carte professionnelle est obligatoire pour l’exercice d’une activité privée de sécurité, il fait valoir qu’il n’avait pas l’obligation de la détenir puisqu’il assurait les seules fonctions d’agent de sécurité incendie SSIAP1 et qu’au surplus, son employeur avait reçu un email dans ce sens du conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) et que malgré tout, son employeur avait maintenu la suspension de son contrat de travail, dès lors, infondée.

La société fait valoir quant à elle, que la détention de ladite carte est obligatoire pour l’exercice d’une activité privée de sécurité tel qu’il ressort des dispositions de l’article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure, que le CNAPS est compétent pour la délivrer, qu’elle est obligatoire pour les activités privées de sécurité énumérées au sein de l’article L. 611-1 du même code aux termes duquel il est spécifié « sont soumises aux dispositions du présent titre, dès lors qu’elles ne sont pas exercées par un service public administratif, les activités qui consistent :

1° A fournir des services ayant pour objet la surveillance humaine ou la surveillance par des systèmes électroniques de sécurité ou le gardiennage de biens meubles ou immeubles ainsi que la sécurité des personnes se trouvant dans ces immeubles ou dans les véhicules de transport public de personnes ».

Elle souligne enfin que le poste du salarié était mixte et consistait d’une part, à exercer de la sécurité incendie SSIAP1, d’autre part, qu’il était amené à assurer des missions de surveillance vidéo et de contrôle d’accès pour lesquelles la carte professionnelle était obligatoire. Elle invoque pour preuve de sa nécessité, la demande initiale de carte professionnelle faite par le salarié lors son embauche en 2010.

Il ressort des éléments portés à l’appréciation de la cour que :

– Concernant le titre de séjour du salarié,

* M. [J] a été informé par son employeur par lettre recommandée avec accusé de réception du 3 février 2015 que son titre de séjour était arrivé à expiration le jour-même et qu’il devait présenter dans les plus brefs délais, l’original de son nouveau titre et en l’absence de réponse sous huitaine, il encourait la suspension de son contrat de travail ;

* Le salarié a informé son employeur de ses démarches par courriels des 9, 11, 23 et 24 février 2015 et qu’à cette dernière date, il lui a adressé le récépissé de sa demande de renouvellement de titre de séjour prolongeant la validité de son titre de 3 mois à compter de son expiration, accompagné d’un document du préfet de Seine et Marne reproduisant l’article L. 311-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile selon lequel « entre la date d’expiration de la carte de résident ou d’un titre de séjour d’une durée supérieure à un an prévu par une stipulation internationale et la décision prise par l’autorité administrative sur la demande tendant à son renouvellement, dans la limite de trois mois à compter de cette date d’expiration, l’étranger peut également justifier de la régularité de son séjour par la présentation de la carte ou d’un titre arrivé à expiration. Pendant cette période, il conserve l’intégralité de ses droits sociaux ainsi que son droit d’exercer une activité professionnelle.

Ainsi, selon les textes en vigueur, l’étranger, dont le titre de séjour valable 10 ans (carte de résident ou certificat de résidence algérien) est expiré, est en situation régulière pendant 3 mois à compter de la date d’expiration du titre »

Dès lors, en tant que détenteur d’un certificat de résidence algérienne, donc en situation régulière le maintien de l’entretien préalable fixé au 10 mars 2015 ne se justifiait plus et son maintien constitue une exécution déloyale du contrat de travail par la société qui a contribué à générer une pression et un stress infondés et délétères pour le salarié.

– Concernant la carte professionnelle du salarié,

* Le salarié a été contractuellement engagé par la société ACP Protection aux fonctions d’agent de sécurité avec la qualification SSIAP1 ;

* La dénomination de l’emploi de M. [J] a été modifié sur son bulletin de salaire d’octobre 2015 passant d’« agent services de sécurité incendie » à « agent prévention sécurité CAPSI-SSIAP1 » sans présentation ni signature d’avenant tel qu’il ressort de la production des dits bulletins ;

* Le planning de M. [J] produit en pièce 13 par la société, précise que le salarié travaille pour le client BNPP BERGERE / contrat SSIAP1 ;

* Suite à sa demande du 24 mars 2009, M. [J] était détenteur d’une carte professionnelle depuis le 11 janvier 2010 à échéance au 10 janvier 2015 et qui l’autorisait à exercer les activités de « surveillance humaine ou surveillance par des systèmes électronique de sécurité ou gardiennage » tel qu’il ressort de la pièce 10 produite par le salarié ;

* A l’issue de l’entretien préalable à licenciement qui s’est tenu le 10 mars 2015 relatif initialement au défaut de renouvellement de titre de séjour par le salarié, la société ACP Protection a adressé un courrier au salarié le 11 mars 2015 l’informant du maintien de la suspension de son contrat de travail et le mettant en demeure sous 48 heures à réception de cette lettre, de lui fournir le document manquant.

* Pour justifier l’obligation de détention de la carte professionnelle litigieuse, la société indique :

>que son activité principale consiste en la prévention et la sécurité des biens et des personnes sur des sites commerciaux et industriels ;

> que l’avenant du salarié indique qu’il était agent de sécurité avec la qualification SSIAP1 ;

> que l’intitulé de poste du salarié a changé en octobre 2015 pour mettre en conformité son titre avec ses missions effectives qui consistaient, outre la sécurité incendie, à pratiquer le contrôle d’accès au bâtiment par vidéosurveillance à partir du PC de sécurité ;

> que le salarié a été amené à travailler sur les sites parisiens de la BNP Paribas du [Adresse 1] et à l’agence située [Adresse 7], lieux sur lesquels la carte professionnelle est obligatoire tel qu’il ressort de l’extrait du plan de prévention conclu entre les deux sociétés, produit, et dont elle se prévaut mais qui n’est pas opposable au salarié même si son nom y figure ;

> que les deux sites n’étaient pas soumis à une réglementation spéciale en matière de sécurité incendie prévoyant que les agents de service ne devaient pas être distraits de leur fonction spécifique de sécurité et de maintenance, par suite que le cumul des fonctions exercées par le service était possible.

– Concernant l’état de santé du salarié, il apparaît que la santé du salarié s’est dégradée concurremment aux difficultés financières rencontrées du fait de la suspension de son contrat de travail, tel qu’il ressort de la production :

* du certificat médical du 27 février 2017 du Docteur [O], médecin psychiatre, qui atteste « suivre très régulièrement Monsieur [J] [B] né le 20/07/1070 au regard d’un trouble thymique récurrent, épisode actuel dépressif, d’intensité moyenne, réactionnel à des difficultés professionnelles, inhérentes selon le recueil anamnestique et ses dires, à l’attitude de son employeur qui lui avait signifié son refus quant à une éventuelle reprise d’activité professionnelle ; non sans rappeler que l’intéressé a cessé son emploi depuis le 1 er février 2015 au motif de ne pas avoir prorogé son titre de séjour (alors qu’il aurait pu l’utiliser à usage administratif pendant 3 mois supplémentaires, selon les textes en vigueur, argument jugé par Monsieur [J] comme abusif (il dit avoir fait le nécessaire auprès des services compétents) ; depuis avril 2015, on avait noté un incontestable fléchissement thymique, compliqué d’une angoisse diffuse avec des ruminations à recrudescence vespérale et insomnies de milieu et fin de nuit ; les tensions familiales sont devenues récurrentes (l’intéressé étant le seul à travailler et père de 2 jeunes enfants âgés de 05 et 04 ans) et sa crainte de s’enfoncer dans la précarité est clairement exprimée. J’ai été amené à réajuster son traitement à 2 reprises (pluri médication associant sérotoninergiques, anxiolytique et benzodiazépine). L’humeur étant ces derniers temps franchement dysphoriques, avec alternance de phases de surexcitation, d’irritabilité et de tristesse pathologique ; la souffrance morale est réelle, la projection demeure anxieuse avec expression d’idéation morbide. Son état de santé (actuel) ne lui permet pas de reprendre son travail (il a été expertisé le 13/01/17 et déclaré en incapacité de reprendre son travail).  »

* des 16 ordonnances de médicaments (antidépresseurs et anxiolytique) prescrits couvrant la période d’avril 2015 à septembre 2018 produites par le salarié en pièce 40 ;

* de l’arrêt maladie du salarié couvrant la période du 30 avril 2015 au 11 mai 2015 mentionnant « suivi psychiatrique (état dépressif) ».

* du courrier du 25 mars 2015 produit, dans lequel M. [J] a indiqué que ce traitement injustifié avait des répercussions néfastes sur son état de santé, vainement puisque la société lui a indiqué par un courrier du 24 avril 2015, qu’elle réfutait son accusation de harcèlement et qu’elle agissait de même pour tous les autres collaborateurs dont les documents administratifs nécessaires à l’exercice de leur métier arrivaient à expiration, ce qu’elle ne démontre toutefois pas.

Compte tenu de ce qui précède, si les missions de sécurité incendies sont matériellement établies, celles de prévention impliquant le contrôle d’accès au bâtiment par vidéosurveillance à partir du PC de sécurité ne le sont pas, de sorte que l’obligation de détention de la carte professionnelle par le salarié ne s’imposait pas. Il s’ensuit que la suspension du contrat de travail du salarié est infondée au même titre que la procédure disciplinaire afférente.

Force est de constater que le salarié a fait l’objet de procédures injustifiées qui, en provoquant une dégradation de son état de santé, sont à l’origine de son inaptitude. Celle-ci est la conséquence d’un manquement préalable de l’employeur à son obligation de sécurité.

Dès lors le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement prononcé le 18 avril 2018 est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera donc infirmé sur ce chef.

Sur les conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuse

M. [J] sollicite la condamnation de la société ACP à lui payer avec intérêts au taux légal, les sommes de :

* 540,87 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 7 au 18 avril 2018 ;

* 54,08 euros de congés payés afférents ;

* 3 048,56 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

* 304,85 euros au titre des congés payés y afférents ;

* 19 815,64 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il est constant que le salarié percevait en toute fin de relation contractuelle, un salaire mensuel brut de 1 524,28 euros et que la société employait habituellement au moins onze salariés au moment de la rupture du contrat de travail.

Sur la demande de rappel de salaire pour la période du 7 au 18 avril 2018

M. [J] a été déclaré en inaptitude physique et impossibilité de reclassement par avis de la médecine du travail du 7 mars 2018, puis licencié sur ce motif par courrier daté du 18 avril 2018, sans reprise de versement de salaire.

Or, selon l’article L. 1226-11 du code du travail, lorsqu’à l’issue d’un délai d’un mois à compter de la date de l’examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n’est pas reclassé dans l’entreprise ou s’il n’est pas licencié, l’employeur lui verse, dès l’expiration de ce délai, le salaire correspondant à l’emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail. Ces dispositions s’appliquent également en cas d’inaptitude à tout emploi dans l’entreprise constatée par le médecin du travail.

Dès lors, c’est à bon droit que M. [J] sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société ACP Protection à lui payer la somme de 540,87 euros brut à titre de rappel de salaire pour la période de 7 au 18 avril 2018, outre 54,08 euros brut de congés payés afférents.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents

En application des articles L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail, le salarié, qui justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus d’au moins deux ans, est fondé à prétendre à un préavis de deux mois. L’indemnité compensatrice de préavis correspond aux salaires et avantages qu’aurait perçus le salarié s’il avait travaillé pendant cette période.

Dès lors, M. [J] est bien fondé à prétendre à une indemnité compensatrice de préavis d’un montant de 3 048,56 euros brut ainsi qu’à la somme de 304,85 euros brut correspondant aux congés payés afférents. Le jugement sera infirmé en ce qu’il a débouté le salarié de ses demandes de ses chefs et la société ACP Protection condamnée à payer lesdites sommes à M. [J].

Sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

En application des dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail, M. [J], qui comptait seize ans d’ancienneté à la date de la rupture du contrat de travail, peut prétendre à une indemnité à la charge de celle-ci d’un montant minimal de trois mois et maximal égal à treize mois et demi de salaire brut.

La perte injustifiée de son emploi a causé au salarié un préjudice que la cour fixe à la somme de 15 000 euros.

Il convient en conséquence d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté l’intéressé de sa demande de ce chef et de condamner la société ACP Protection à payer ladite somme à M. [J] à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la demande au titre du préjudice moral

M. [J] qui se dit particulièrement choqué par l’attitude de son employeur de n’avoir pas voulu entendre ses explications, le laissant en situation de précarité financière alors qu’il était père de famille avec deux enfants à charge, sollicite sur le fondement de l’article 1240 du code civil, la somme de 5 000 euros à titre d’indemnisation pour le préjudice moral subi.

Le salarié a fait l’objet durant plus de trois mois de deux procédures infondées avec suspension de son contrat de travail et de sa rémunération ce qui lui a causé un préjudice moral distinct de celui résultant de la perte de son emploi que la cour fixe à la somme de 3 000 euros. Le jugement entrepris sera donc infirmé de ce chef et la société ACP Protection condamnée à payer ladite somme à M. [J] à titre de dommages-intérêts.

Sur la remise des documents sociaux sous astreinte

Il convient d’ordonner à la société ACP Protection de remettre à M. [J], un bulletin de paie récapitulatif, un certificat de travail, un solde de tout compte et une attestation Pôle emploi conformes au présent arrêt. Il n’est pas nécessaire de prononcer une astreinte.

Sur le remboursement à Pôle Emploi des indemnités de chômage éventuellement perçues par le salarié

En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, s’agissant d’un salarié disposant de plus de deux ans d’ancienneté et d’une société employant habituellement au moins onze salariés, il y a lieu d’ordonner le remboursement par la société ACP Protection à Pôle emploi, partie au litige par l’effet de la loi, des indemnités de chômage qu’il a versées à M. [J] à compter du jour de son licenciement, et ce, à concurrence de six mois d’indemnités.

Sur les intérêts des sommes allouées et leur capitalisation

Les intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature salariale seront dus à compter de la réception de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation et d’orientation.

S’agissant des créances de nature indemnitaire, les intérêts au taux légal seront dus à compter de la décision de justice qui les a prononcées.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

La société ACP Protection, qui succombe dans la présente instance, supportera les dépens de première instance et d’appel. Le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il a laissé à chaque partie la charge de ses dépens.

Il y a lieu de la débouter de sa demande d’indemnité fondée sur l’article 700 du code de procédure civile et de la condamner à payer à M. [J] la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La COUR,

Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE,

Infirme partiellement le jugement du conseil de prud’hommes de Nanterre en date du 25 février 2020 et statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

Dit le licenciement de M. [B] [J] dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société ACP Protection à payer à M. [B] [J] les sommes suivantes :

– 3 048,56 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

– 304,85 euros brut à titre de congés payés afférents ;

– 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

Dit que les créances salariales et l’indemnité de licenciement sont productives d’intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à la société ACP Protection de la lettre la convoquant devant le bureau de conciliation et d’orientation ;

Dit que les autres créances indemnitaires allouées par le présent arrêt sont productives d’intérêts au taux légal à compter du prononcé de celui-ci ;

Ordonne à la société ACP Protection de remettre à M. [B] [J], un bulletin de paie récapitulatif, un certificat de travail, un solde de tout compte et une attestation Pôle emploi conformes au présent arrêt ;

Dit n’y avoir lieu de prononcer une astreinte ;

Ordonne le remboursement par la société ACP Protection à Pôle emploi des indemnités de chômage qu’il a versées à M. [B] [J] à compter du jour de son licenciement à concurrence de six mois d’indemnités ;

Confirme pour le surplus les dispositions non contraires du jugement entrepris ;

Déboute la société ACP Protection de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d’appel ;

Condamne la société ACP Protection à payer à M. [B] [J] la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société ACP Protection aux dépens de première instance et d’appel.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x