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Vidéosurveillance : 16 novembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/08600

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Vidéosurveillance : 16 novembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/08600

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 10

ARRÊT DU 16 NOVEMBRE 2023

(n° , 1 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/08600 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CB7FC

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Mars 2020 – Tribunal judiciaire de MEAUX RG n° 18/03728

APPELANTES

SE CHUBB EUROPEAN GROUP société européenne d’assurance, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 5]

ET

S.A.S. SH FRANCE AUVERGNE exerçant sous l’enseigne ACE HOTEL, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentées par Me Virginie DOMAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : C2440

Assistées de Me Charlotte MACHTOU de l’AARPI Rieuneau Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C0324, substitué à l’audience par Me Salime LOUKILI, avocat au barreau de PARIS, toque : A385

INTIMÉE

S.A.S. DV DESIGN STAND, société de droit Italien, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 7]

[Localité 1] (ITALIE)

Représentée par Me Séverine MEUNIER, avocat au barreau de MEAUX

Assistée à l’audience par Me Maria Margherita VIALE, avocat au barreau de NICE, toque : 534

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été plaidée le 28 Septembre 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Florence PAPIN, Présidente

Mme Valérie MORLET, Conseillère

Madame Anne ZYSMAN, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame [L] [W] dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Ekaterina RAZMAKHNINA

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Florence PAPIN, Présidente et par Ekaterina RAZMAKHNINA, greffier, présent lors de la mise à disposition.

***

EXPOSE DU LITIGE

Les sociétés de droit italien Inexpo et DV Design Stand, dont Mme [Z] [K] est respectivement gérante et associée commanditée, ont pour activités la conception, l’installation, le montage et le démontage de stands pour salons et foires.

Dans le cadre du salon « Silmo » qui s’est tenu à [Localité 9], une chambre au sein de l’hôtel Ace [Localité 6] a été réservée par Mme [Z] [K] pour les nuits du 23 au 28 septembre 2016.

Se plaignant du vol, survenu dans la nuit du 27 septembre 2016, du véhicule appartenant à la société Inexpo, stationné dans le parking de l’hôtel Ace [Localité 6] où séjournait leur collaborateur, M. [V] [I], ainsi que des outils et équipements qu’il contenait, appartenant à la société DV Design Stand, la société Inexpo et la société DV Design Stand ont, par acte du 18 septembre 2018, fait assigner l’hôtel Ace [Localité 6] et son assureur, la société Xylassur, devant le tribunal de grande instance de Meaux aux fins d’obtenir réparation de leur préjudice.

Par jugement du 10 mars 2020, le tribunal judiciaire de Meaux a :

– mis hors cause l’hôtel Ace [Localité 6],

– mis hors de cause la société Xylassur,

– constaté les interventions volontaires de la société SH France Auvergne et de la société Chubb European Group SE,

– dit que la responsabilité de la société SH France Auvergne est entièrement engagée sur le fondement des articles 1952 et suivants du code civil,

– condamné la société SH France Auvergne (exerçant sous l’enseigne Ace Hôtel) in solidum avec la société Chubb European Group SE à payer à la société DV Design Stand SAS la somme de 34.968,92 euros en réparation de son préjudice matériel,

– débouté la société Inexpo de [Z] [K] de sa demande indemnitaire,

– débouté la société Inexpo de [Z] [K] ainsi que la société DV Design Stand SAS du surplus de leurs demandes,

– condamné la société SH France Auvergne (exerçant sous l’enseigne Ace Hôtel) in solidum avec la société Chubb European Group SE à payer la somme de 1. 500 euros à la société DV Design Stand SAS en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société SH France Auvergne (exerçant sous l’enseigne Ace Hôtel) in solidum avec la société Chubb European Groupe SE aux dépens,

– débouté la société Inexpo de [Z] [K] du surplus de ses demandes,

– débouté la société SH France Auvergne du surplus de ses demandes,

– débouté la société Chubb European Groupe SE du surplus de ses demandes,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration du 3 juillet 2020, la société Chubb European Group SE et la société SH France Auvergne ont interjeté appel de cette décision, intimant la société DV Design Stand devant la cour.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 28 juin 2021, la société SH France Auvergne et la société Chubb European Group SE, appelantes, demandent à la cour de :

Vu les articles 1315 et 1952 et suivants du code civil,

Vu l’article 9 du code de procédure civile,

– Déclarer recevables et bien fondées les sociétés Chubb European Group SE et SH France Auvergne en leur appel,

Y faisant droit,

– Infirmer le jugement rendu le 10 mars 2020 par le Tribunal judiciaire de Meaux en ce qu’il a :

o Jugé que la responsabilité de la société SH France Auvergne est engagée sur le fondement des articles 1952 et suivants du code civil à l’égard de la société DV Design Stand,

o Condamné in solidum SH France Auvergne et Chubb European Groupe SE, à payer à DV Design Stand la somme de 34.968,92 euros en réparation de son préjudice matériel, et de 1.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens,

Et statuant à nouveau,

A titre principal :

– Juger que DV Design Stand ne justifie pas de sa qualité de voyageur au sens des articles 1952 et suivants du code civil, ni de la qualité de préposé de M. [I],

– Par suite, juger que DV Design Stand ne dispose pas de la qualité à agir sur le fondement des articles 1952 et suivants du code civil à l’encontre de SH France Auvergne,

– En conséquence, débouter DV Design Stand de toutes ses demandes à l’encontre de SH France Auvergne et Chubb European Group SE, dont la garantie est dès lors sans objet,

A titre subsidiaire :

– Juger que DV Design Stand ne rapporte pas la preuve du dépôt des objets déclarés volés dans le véhicule volé, ni de sa qualité de propriétaire dudit matériel, ni de leur valeur,

– Par suite, juger que DV Design Stand ne justifie pas d’un préjudice matériel,

– En conséquence, débouter DV Design Stand de toutes ses demandes, fins et prétentions à l’encontre de SH France Auvergne et Chubb European Group SE, dont la garantie est dès lors sans objet,

A titre infiniment subsidiaire :

– Juger que SH France Auvergne n’a pas commis de faute à l’égard de DV Design Stand,

– Juger que l’indemnisation de DV Design Stand au titre des objets volés dans le véhicule est limitée à 50 fois le prix de location du logement par journée (65 euros) par application de l’article 1954 du code civil,

– En conséquence, juger que l’indemnisation de DV Design Stand est limitée à la somme de 3.250 euros s’agissant des biens volés se trouvant à l’intérieur du véhicule,

En tout état de cause :

– Débouter DV Design de son appel incident, et déclarer irrecevables et mal fondées toutes autres demandes, plus amples ou contraires,

– Confirmer le jugement rendu le 10 mars 2020 par le tribunal judiciaire de Meaux en ce qu’il a :

o Mis hors de cause Ace Hôtel Roissy et Xylassur et constaté les interventions volontaires de SH France Auvergne et Chubb European Group SE,

o Débouté la société Inexpo de [Z] [K] de sa demande indemnitaire au titre de l’indemnisation du véhicule volé dont elle est propriétaire,

o Débouté la société Inexpo de [Z] [K] et la société DV Design Stand de leurs demandes au titre des frais de transport et de dommages et intérêts,

– Condamner DV Design Stand à payer à SH France Auvergne, et son assureur, Chubb European Group SE, une indemnité de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens, dont distraction faite au profit de Me Virginie Domain, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 8 juillet 2021, la société DV Design Stand, intimée, demande à la cour de :

Vu les articles 1952 et suivants du code civil,

– Déclarer recevable et bien fondé l’appel incident de la société DV Design S.A.S,

– Infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

o Retenu que la responsabilité de SH France Auvergne n’est pas engagée au titre de la faute,

o Condamné la société SH France Auvergne à payer à la société DV Design S.A.S la somme de 34.968,92 euros en réparation de son préjudice matériel,

Et statuant à nouveau :

– Prononcer que la SH France Auvergne a commis une faute à l’égard de la société DV Design S.A.S,

Et en conséquence :

– Déclarer que l’indemnisation de DV Design S.A.S est illimitée du fait de la faute,

– Condamner la société SH France Auvergne exerçant sous l’enseigne Ace Hôtel et la société Chubb European Groupe SE in solidum la somme de 32.072,39 euros HT, soit 39.128,32 euros TTC (sic),

En tout état de cause :

– Confirmer le jugement rendu le 10 mars 2020 par le Tribunal Judiciaire de Meaux en ce qu’il a jugé que la société DV Design S.A.S. justifie de sa qualité de voyageur au sens des articles 1952 et suivants du code civil,

– Débouter la société SH France Auvergne exerçant sous l’enseigne Ace Hôtel et la société Chubb European Group SE de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

– Condamner la société SH France Auvergne exerçant sous l’enseigne Ace Hôtel et la société Chubb European Group SE in solidum à rembourser à la société DV Design S.A.S la valeur des biens volés pour un total de 39.128,32 euros TTC,

– Condamner la société SH France Auvergne exerçant sous l’enseigne Ace Hôtel et la société Chubb European Group SE in solidum à payer à la société Inexpo et à la société DV Design S.A.S. la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamner la société SH France Auvergne exerçant sous l’enseigne Ace Hôtel et la société Chubb European Groupe SE in solidum à payer à la société Inexpo et à la société DV Design S.A.S. aux entiers dépens y compris les frais de traduction.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 juin 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les limites de la saisine de la cour

Le jugement déféré n’étant pas critiqué en ce qu’il a mis hors de cause de l’hôtel Ace [Localité 6] et la société Xylassur, constaté les interventions volontaires des sociétés SH France Auvergne et Chubb European Group SE, débouté la société Inexpo de sa demande indemnitaire et débouté la société Inexpo ainsi que la société DV Design Stand du surplus de leurs demandes, la société Inexpo n’ayant pas, en tout état de cause, été intimée devant la cour, il n’y a pas lieu de statuer sur ces points.

Sur la responsabilité de la société SH France Auvergne au titre du dépôt hôtelier

Le premier juge, après le rappel des textes applicables relatifs au dépôt hôtelier, a considéré que la société DV Design Stand, qui avait acquitté le prix de la location de la chambre à son seul nom et établissait être propriétaire des biens dérobés, avait seule la qualité de voyageur. Il a retenu que la responsabilité de la société SH France Auvergne était entièrement engagée sur le fondement des articles 1952 et suivants du code civil, relevant que l’hôtelier était responsable des biens présents sur son parking dans la mesure où il était mis à la disposition des clients, et ce même si celui-ci était annoncé comme surveillé ou non, précisant que l’affichette avertissant la clientèle que le parking n’était pas gardé ne permettait pas à l’hôtel d’écarter sa responsabilité.

Après avoir rappelé les plafonds d’indemnisation prévus par les articles 1953 et 1954 du code civil et précisé qu’en cas de vol d’une voiture et des objets déposés à l’intérieur, il y avait lieu à application cumulée des plafonds d’indemnisation, le premier juge a évalué le préjudice matériel au titre des objets volés à la somme de 34.968,92 euros.

Il a par ailleurs considéré que le véhicule volé pour lequel il était sollicité réparation appartenait à la société Inexpo et non pas à la société DV Design Stand, laquelle avait procédé à la location de la chambre et a, en conséquence, rejeté la demande de réparation formée par la société Inexpo à ce titre.

La société SH France Auvergne et la société Chubb European Group SE poursuivent l’infirmation du jugement en ce qu’il a retenu que la société DV Design Stand avait la qualité de voyageur. Elles rappellent que le régime spécifique de responsabilité de l’hôtelier régi par les articles 1952 et suivants du code civil ne peut être invoqué que par le voyageur logeant dans l’établissement. Elles en déduisent que le voyageur est nécessairement une personne physique et qu’une personne morale ne peut jamais se prévaloir du régime dérogatoire du dépôt hôtelier. Elles relèvent qu’en l’espèce, la réservation a été effectuée par Mme [Z] [K] pour le compte de la société DV Design Stand et que cette dernière ne justifie pas que M. [I] était son employé, de sorte qu’elle ne justifie pas de sa qualité de voyageur et donc de sa qualité à agir.

A titre subsidiaire, elles font valoir que la société DV Design Stand ne rapporte pas la preuve des objets présents dans le véhicule ni de sa qualité de propriétaire desdits objets et n’explicite pas le chiffrage du préjudice matériel allégué.

A titre infiniment subsidiaire, elles reprochent au premier juge de ne pas avoir appliqué le plafond d’indemnisation légal posé par l’article 1954 du code civil. Elles indiquent que si les articles 1953 et 1954 du code civil n’interdisent pas le cumul des indemnisations prévues par ces textes, il y a lieu de faire une application distributive des textes. Elles précisent qu’en l’espèce, le tribunal ayant exclu toute indemnisation au titre du véhicule volé, propriété de la société Inexpo, l’article 1953, alinéa 3, n’a pas vocation à s’appliquer, seul l’article 1954 et son plafond d’indemnisation fixé à 50 fois le prix de location du logement, soit 3.250 euros, devant être appliqué.

Elle soutiennent enfin qu’aucune faute de l’hôtelier de nature à exclure la limite d’indemnisation posée par l’article 1954 du code civil n’est établie, la société DV Design Stand ne démontrant pas l’existence d’un engagement particulier de surveillance pris par l’hôtelier envers son client ni d’une faute à l’origine des vols allégués.

La société DV Design Stand sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a jugé qu’elle justifiait de sa qualité de voyageur au sens des articles 1952 et suivants du code civil. Formant appel incident, elle poursuit l’infirmation du jugement en ce qu’il a omis de se prononcer sur la faute de la société SH France Auvergne et invoque la responsabilité illimitée de la société SH France Auvergne du fait de l’existence d’une faute imputable à l’hôtelier, lequel, lorsqu’il met à disposition un parking vidéo surveillé, assume une véritable obligation de garde et de surveillance qui sont des obligations de résultat. Elle sollicite en conséquence l’infirmation du jugement concernant le chiffrage du préjudice matériel et la condamnation de la société SH France Auvergne et de la société Chubb European Group SE à l’indemnisation de la totalité du préjudice matériel à hauteur de 32.072,39 euros HT soit 39.128,32 euros TTC.

Sur ce

En application de l’article 1952 du code civil, « Les aubergistes ou hôteliers répondent, comme dépositaires, des vêtements, bagages et objets divers apportés dans leur établissement par le voyageur qui loge chez eux ; le dépôt de ces sortes d’effets doit être regardé comme un dépôt nécessaire. »

Selon l’article 1953 du code civil, « Ils sont responsables du vol ou du dommage de ces effets, soit que le vol ait été commis ou que le dommage ait été causé par leurs préposés, ou par des tiers allant et venant dans l’hôtel.

Cette responsabilité est illimitée, nonobstant toute clause contraire, au cas de vol ou de détérioration des objets de toute nature déposés entre leurs mains ou qu’ils ont refusé de recevoir sans motif légitime.

Dans tous les autres cas, les dommages-intérêts dus aux voyageurs sont, à l’exclusion de toute limitation conventionnelle inférieure, limitée à l’équivalent de cent fois le prix de location du logement par journée, sauf lorsque le voyageur démontre que le préjudice qu’il a subi résulte d’une faute de celui qui l’héberge ou des personnes dont ce dernier doit répondre. »

Enfin, l’article 1954 du code civil précise que « Les aubergistes ou hôteliers ne sont pas responsables des vols ou dommages qui arrivent par force majeure, ni de la perte qui résulte de la nature ou d’un vice de la chose, à charge de démontrer le fait qu’ils allèguent.

Par dérogation aux dispositions de l’article 1953, les aubergistes ou hôteliers sont responsables des objets laissés dans les véhicules stationnés sur les lieux dont ils ont la jouissance privative à concurrence de cinquante fois le prix de location du logement par journée. »

– Sur la qualité de voyageur

Il résulte de la combinaison des dispositions des articles 1952 et ancien 1165 du code civil (article 1199 nouveau du code civil) que les hôteliers sont tenus de répondre comme dépositaires des effets et objets divers apportés dans leur établissement par le voyageur qui loge chez eux et que seul le cocontractant de l’hôtelier victime de la disparition de son bien peut engager la responsabilité de l’hôtelier sur ce fondement.

Le cocontractant peut être une personne physique ou une personne morale.

Il en résulte qu’une société qui établit avoir acquitté le prix de location d’une chambre à son seul nom, à l’exclusion de toute indication du nom de ses préposés, a seule la qualité de voyageur au sens des articles 1952 et suivants du code civil.

En l’espèce, il résulte des pièces versées aux débats que la réservation de cinq nuits à l’Ace Hôtel [Localité 6] du 23 au 28 septembre 2016 pour un montant total de 325 euros, soit 65 euros par nuit, a été effectuée via le site internet Booking.com par Mme [Z] [K] pour le compte de la société DV Design Stand dont elle est associée, la facture n° 16003063 du 23 septembre 2016 étant établie au nom de cette société.

Ainsi, la société DV Design Stand, qui justifie avoir acquitté le paiement de la location d’une chambre faite à son seul nom, sans que le nom de ses préposés ou collaborateurs n’apparaissent sur un quelconque document, a seule la qualité de voyageur au sens de l’article 1952 du code civil et justifie de sa qualité à agir.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

– Sur l’étendue de la responsabilité

Les dispositions de l’article 1953 visant le cas du vol du véhicule, assimilé à un effet apporté par le client et celles de l’article 1954, alinéa 2, visant celui du vol des objets laissés dans le véhicule ne sont pas exclusives l’une de l’autre, car elles tendent à la réparation de préjudices différents et l’expression « par dérogation » n’implique pas que les réparations ne puissent pas être cumulées, mais seulement que le montant prévu à l’article 1954, alinéa 2, est de moitié inférieur à celui de l’article 1953.

Ainsi, en cas de vol d’un véhicule stationné sur le parking de l’hôtel et des objets laissés dans le véhicule, il y a lieu à une application cumulative des dispositions de l’article 1953 du code civil au vol du véhicule et de celles de l’article 1954 du même code aux effets contenus dans ce véhicule.

En l’espèce, les parties ne critiquent pas le jugement en ce qu’il a rejeté la demande d’indemnisation formée par la société Inexpo au titre du véhicule volé lui appartenant et la société DV Design Stand ne sollicite pas l’indemnisation du véhicule volé mais uniquement des objets qu’il contenait, qui relèvent spécifiquement de l’article 1954, alinéa 2, du code civil.

Il résulte du rapprochement des articles 1952, 1953 et 1954 que si la responsabilité de l’hôtelier est limité à cinquante fois le prix journalier de location du logement pour les effets volés dans le véhicule de ses clients stationnés sur les lieux dont il a la jouissance privative, cette disposition ne saurait avoir pour effet de décharger l’hôtelier de l’obligation de réparer l’intégralité du préjudice de la victime d’un tel vol lorsque celle-ci rapporte la preuve qu’il a manqué au devoir de prudence et de surveillance qui lui incombe (1re Civ., 27 janvier 1982).

La responsabilité de l’hôtelier est donc illimitée lorsque le client prouve que son dommage est dû à une faute de celui qui l’héberge ou des personnes dont ce dernier doit répondre.

La preuve d’une faute de l’hôtelier ou de son personnel incombe au voyageur qui entend bénéficier d’un déplafonnement.

L’hôtelier ne saurait engager sa responsabilité de manière illimitée lorsqu’il n’a pas pris d’engagement spécifique de surveillance du véhicule stationnant sur le parking de l’hôtel et le fait pour l’hôtelier de ne pas assurer la surveillance particulière d’un véhicule fermé à clé sur le parking privatif de l’hôtel ne constitue pas une faute.

En l’occurrence, il ressort de la plainte déposée par Mme [H], directrice de l’hôtel Ace Paris Poissy, le 28 septembre 2016, que, dans la nuit du 27 septembre 2016, un vol de véhicule a été commis sur le parking de l’hôtel. Elle précise que « pour pénétrer sur le parking un individu a sectionné le grillage sur toute la hauteur » et que « le parking est équipé de vidéo surveillance ».

Dans sa plainte déposée le 27 septembre 2016, M. [I], occupant de la chambre réservée pour le compte de la société DV Design Stand, indique également que le camion était stationné dans le parking l’hôtel « équipé de vidéosurveillance » et que le grillage du parking de l’hôtel a été découpé.

Ces éléments ne sauraient suffire à démontrer que la société SH France Auvergne s’est effectivement engagée à assurer la surveillance du camion contenant le matériel, un tel engagement ne pouvant qu’être exprès et non implicite, et ne saurait résulter de la mise en place d’un système de surveillance des véhicules sur le parking privatif alors que la réservation faite sur internet par la société DV Design Stand mentionne simplement « parking privé disponible gratuitement sur place et sans réservation », ce qui signifie seulement que le client a l’assurance de trouver une place de stationnement pour son véhicule, mais non que le gardiennage de celui-ci soit assuré. En outre, une affichette située sur la porte d’entrée de l’hôtel, écrite en français et en anglais, indique que le parking n’est pas surveillé et qu’il est recommandé de vérifier le verrouillage du véhicule et de ne laisser aucun objet personnel visible à l’intérieur de celui-ci.

Il y a donc lieu de considérer que la société SH France Auvergne a satisfait à son obligation de moyens en assurant la surveillance du parking par le biais d’un dispositif de vidéosurveillance, étant observé qu’il s’agit d’un établissement économique, le prix de la chambre réservée par la société DV Design Stand s’élevant à 65 euros la nuit pour un parking gratuit et qu’il ne peut donc être exigé une surveillance particulière compte tenu de la catégorie d’un tel établissement et des prestations qu’il fournit qui ne peuvent être celles d’un établissement de standing.

Ainsi, en l’absence d’engagement de la société SH France Auvergne à assurer la sécurité du parking ou la surveillance particulière du véhicule, l’existence d’une faute n’est pas caractérisée à son encontre justifiant une aggravation des obligations légales qui pèsent sur elle.

La limitation fixée à 50 fois le prix de location du logement, prévue par l’article 1954, alinéa 2, du code civil, sera donc appliquée, compte tenu de l’absence de faute prouvée de l’hôtelier.

Le prix journalier de location de la chambre étant de 65 euros, le plafond d’indemnisation s’élève à 3.250 euros.

En conséquence, le jugement déféré, en ce qu’il a écarté la limitation de responsabilité prévue par les dispositions de l’article 1954, alinéa 2, du code civil et condamné les appelantes à indemniser la société DV Design Stand de son entier préjudice, doit être infirmé.

– Sur le montant de l’indemnisation

La société SH France Auvergne et son assureur ne peuvent utilement soutenir qu’il conviendrait de débouter l’intimée de l’intégralité de ses demandes faute pour elle de rapporter la preuve de son préjudice, le vol du matériel étant incontestable au regard des dépôts de plainte effectués par Mme [H] et M. [I] au commissariat de police de [Localité 8] les 27 et 28 septembre 2016 et par Mme [K] à la Questura de Milan le 30 septembre 2016.

Compte tenu des objets volés listés dans les plaintes de M. [I] et de Mme [K] et des factures des objets volés émises au nom de la société DV Design Stand, il est établi que la valeur du matériel dérobé n’est pas inférieure au plafond d’indemnisation ci-dessus mentionné, de sorte que l’indemnité allouée à la société DV Design Stand doit être fixée à la somme de 3.250 euros.

La société SH France Auvergne et son assureur, la société Chubb European Group SE, qui ne conteste pas devoir sa garantie, seront donc condamnés in solidum au paiement de cette somme.

En conséquence, le jugement est infirmé sur le montant de la condamnation prononcée qui est réduite à 3.250 euros.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance, mis à la charge de la société SH France Auvergne in solidum avec son assureur, seront confirmées.

Ajoutant au jugement, il y a lieu de condamner in solidum la société SH France Auvergne et la société Chubb European Group SE, qui succombent principalement en leur recours, aux dépens d’appel, qui ne comprendront pas les frais de traduction, non justifiés, en application des articles 696 et suivants du code de procédure civile.

Tenues aux dépens, la société SH France Auvergne et la société Chubb European Group SE seront condamnées in solidum à payer à la société DV Design Stand la somme de 1.500 euros en indemnisation des frais exposés en cause d’appel et non compris dans les dépens, conformément aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. La demande à ce titre formée au profit de la société Inexpo, qui n’est pas partie au procès d’appel, est irrecevable.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant dans les limites de sa saisine,

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a retenu que la responsabilité la société SH France Auvergne était engagée sur le fondement des articles 1952 et suivants du code civil et en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles,

L’infirme en ce qu’il a écarté la limitation de responsabilité prévue par les dispositions de l’article 1954, alinéa 2, du code civil et condamné la société SH France Auvergne et la société Chubb European Group SE, in solidum, à payer à la société DV Design Stand la somme de 34.968,92 euros en réparation de son préjudice matériel,

Statuant à nouveau des chefs infirmés :

Condamne in solidum la société SH France Auvergne et la société Chubb European Group SE à payer à la société DV Design Stand la somme de 3.250 euros en réparation de son préjudice matériel,

Y ajoutant :

Condamne in solidum la société SH France Auvergne et la société Chubb European Group SE aux dépens d’appel,

Condamne in solidum la société SH France Auvergne et la société Chubb European Group SE à payer à la société DV Design Stand la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Déclare irrecevable la demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société Inexpo,

Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

 


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