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Vidéosurveillance : 12 octobre 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/04321

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Vidéosurveillance : 12 octobre 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/04321

C 9

N° RG 21/04321

N° Portalis DBVM-V-B7F-LCKJ

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY

la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 12 OCTOBRE 2023

Appel d’une décision (N° RG F 20/00116)

rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 21 septembre 2021

suivant déclaration d’appel du 11 octobre 2021

APPELANTE :

S.A.S. CALBERSON RHONE ALPES agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 3]

représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat postulant au barreau de GRENOBLE,

et par Me Géraldine FRANCON de la SELARL FRANCEA AVOCATS, substituée par Me Elisabeth TALUCIER, avocat plaidant au barreau de LYON

INTIME :

Monsieur [R] [B]

né le 02 Février 1964 à [Localité 4] (ITALIE)

de nationalité Italienne

[Adresse 2]

[Localité 1]

représenté par Me Flavien JORQUERA de la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président,

M. Jean-Yves POURRET, Conseiller,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,

DÉBATS :

A l’audience publique du 06 septembre 2023,

Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de président chargé du rapport et Jean-Yves POURRET, Conseiller, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistés de Mme Carole COLAS, Greffière, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées ;

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 12 octobre 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 12 octobre 2023.

EXPOSE DU LITIGE :

M. [R] [B], né le 2 février 1964, a été embauché le 14 mars 1994 par la société Mutte Transports, en qualité de chauffeur livreur suivant contrat de travail à durée déterminée poursuivi par un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 27 juin 1994.

Au gré de plusieurs fusions absorptions, le contrat de travail de M. [R] [B] a été transféré au sein de différentes entités.

A compter du 1er octobre 2009, M. [R] [B] a intégré la société par actions simplifiée (SAS) Calberson Rhône-Alpes.

Dans le dernier état de la relation contractuelle, M. [R] [B] occupait un poste de nuit sur la fonction d’adjoint chef de quai, statut agent de maîtrise, classification M1, coefficient 150 de la convention collective des transports routiers.

Par courrier remis en main propre le 4 avril 2017, la SAS Calberson Rhône-Alpes a notifié à M. [R] [B] une mise à pied disciplinaire de trois journées pour non-respect des processus et procédures de l’entreprise, non-respect de l’application des horaires de travail, fausses déclarations sur les dépassements d’horaires et manipulation frauduleuse de déclaratif de relevés d’heures.

Par courrier en date du 2 mai 2018, remis en main propre le 11 mai 2018, la SAS Calberson Rhône-Alpes a notifié à M. [R] [B] un avertissement en raison de manquements commis dans la déclaration d’un accident du travail d’un intérimaire en date du 21 avril 2018 et du non-respect des consignes élémentaires de sécurité.

Par courrier en date du 3 juillet 2019, remis en main propre le 5 juillet 2019, la SAS Calberson Rhône-Alpes a notifié à M. [R] [B] un second avertissement en raison de la détérioration d’un rideau de quai liée à une utilisation non autorisée du chariot rétractable de l’entrepôt logistique.

Dans la nuit du 2 au 3 août 2019, des faits de vol ont été commis sur le matériel de la SAS Calberson Rhône-Alpes. Des faits similaires avaient été signalés au cours du printemps et du début de l’été 2019, notamment le 4 juillet 2019.

Par courrier remis en main propre en date du 27 août 2019, M. [R] [B] a été convoqué par la SAS Calberson Rhône-Alpes à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 4 septembre 2019, l’employeur estimant que le salarié avait une part de responsabilité en raison du non-respect de procédures applicables ayant facilité les vols de marchandises par des tiers.

Par lettre en date du 9 septembre 2019, la SAS Calberson Rhône-Alpes a notifié à M. [R] [B] son licenciement pour faute grave.

Par requête en date du 10 février 2020, M. [R] [B] a saisi le conseil de prud’hommes de Grenoble afin de contester son licenciement.

La SAS Calberson Rhône-Alpes s’est opposée aux prétentions adverses.

Par jugement en date du 21 septembre 2021, le conseil de prud’hommes de Grenoble a :

– dit que le licenciement de M. [R] [B] est sans cause réelle et sérieuse :

– condamné la SAS Calberson Rhône-Alpes à payer à M. [R] [B] les sommes suivantes :

5 789,34 € (cinq mille sept cent quatre-vingt-neuf euros et trente-quatre cts) à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

578,93 € (cinq cent soixante-dix-huit euros et quatre-vingt-treize cts) à titre de congés payés afférents :

22 269,65 € (vingt-deux mille deux cent soixante-neuf euros et soixante-cinq cts) à titre d’indemnité légale de licenciement :

Lesdites sommes avec intérêts de droit à compter du 11 février 2020

55 000,00 € (cinquante-cinq mille euros) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Ladite somme avec intérêts de droit à compter du prononcé du présent jugement

1 200,00 € (mille deux cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– rappelé que les sommes à caractère salarial bénéficient de l’exécution provisoire de droit, nonobstant appel et sans caution en application de l’article R. 1454-28 du code du travail dans la limite de 9 mois de salaire, la moyenne mensuelle brute des trois derniers mois de salaire étant de 2 894,67 €

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire au-delà de l’exécution provisoire de droit ;

– ordonné à la SAS Calberson Rhône-Alpes de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à M. [R] [B] dans la limite de six mois à compter du licenciement du salarié au jour du prononcé du jugement en application de l’article L. 1235-4 du code du travail,

– dit qu’une expédition conforme de la présente décision sera adressé par les soins du greffe à Pôle emploi ;

– débouté la SAS Calberson Rhône-Alpes de sa demande reconventionnelle ;

– condamné la SAS Calberson Rhône-Alpes aux dépens.

La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées avec accusés de réception signés le 22 septembre 2021 pour M. [B] et tamponné le 23 septembre 2021 par la société Geodis Interservices pour le compte de la société Calberson Rhône-Alpes.

Par déclaration en date du 11 octobre 2021, la SAS Calberson Rhône-Alpes a interjeté appel à l’encontre dudit jugement.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 30 mai 2022, la Sas Calberson Rhône-Alpes sollicite de la cour de :

Vu le contrat de travail de M. [R] [B];
Vu les pièces et documents produits par la SAS Calberson Rhône-Alpes ;
Vu le code du travail ;
Vu la jurisprudence ;

– D’infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Grenoble du 21 septembre 2021 en ce qu’il a :

– Dit que le licenciement de M. [R] [B] est sans cause réelle et sérieuse :

– Condamné la SAS Calberson Rhône-Alpes à payer à M. [R] [B] les sommes suivantes:

5 789,34€ (cinq mille sept cent quatre-vingt-neuf euros et trente-quatre centimes) à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
578,93 (cinq cent soixante-dix-huit euros et quatre-vingt-treize centimes) à titre de congés payés afférents,
22 269,65€ (vingt deux mille deux cent soixante-neuf euros et soixante-cinq centimes) à titre d’indemnité légale de licenciement

Lesdites sommes avec intérêts de droit à compter du 11 février 2020

55 000,00€ (cinquante-cinq mille euros) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Ladite somme avec intérêts de droit à compter du prononcé du jugement

1 200,00€ (mille deux cent euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– Rappelé que les sommes à caractère salarial bénéficient de l’exécution provisoire de droit, nonobstant appel et sans caution en application de l’article R. 1454-28 du code du travail dans la limite de 9 mois de salaire, la moyenne mensuelle brute des trois derniers mois de salaire étant de 2 894,67€;

– Dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire au-delà de l’exécution provisoire de droit ;

– Ordonné à la SAS Calberson Rhône-Alpes de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à M. [R] [B] dans la limite de six mois à compter du licenciement du salarié au jour du prononcé du jugement en application de l’article L. 1235-4 du code du travail ;

– Dit qu’une expédition conforme de la présente décision sera adressé par les soins du greffe à Pôle emploi ;

– Débouté la SAS Calberson Rhône-Alpes de sa demande reconventionnelle

– Condamné la SAS Calberson Rhône-Alpes aux entiers dépens

Par conséquent :

A titre principal :

– Juger que le licenciement pour faute grave de M. [R] [B] est justifié ;

En conséquence :

– Débouter M. [R] [B] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

A titre subsidiaire :

– Juger que le licenciement de M. [R] [B] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

En conséquence :

– Fixer la moyenne de salaire de M. [R] [B] à 2.894,67 euros bruts ;
– Fixer l’indemnité de licenciement à 21.729,32 euros bruts ;
– Fixer l’indemnité compensatrice de préavis à 5.789,34 euros bruts, outre 578,93 euros bruts d’indemnité de congés payés afférents.
– Débouter M. [R] [B] de sa demande de dommages-intérêts bruts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

A titre infiniment subsidiaire :

– Fixer les dommages-intérêts sollicités par M. [R] [B] conformément au minimum du Barème prévu par l’article L. 1235-3 du code du travail.

En tout état de cause :

– Débouter M. [R] [B] de son appel incident ;

– Condamner M. [R] [B] à payer à la SAS Calberson Rhône-Alpes la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner M. [R] [B] aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 17 février 2023, M. [R] [B] sollicite de la cour de :

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

Dit que le licenciement de M. [R] [B] est sans cause réelle et sérieuse ;

Condamné la SAS Calberson Rhône-Alpes à payer à M. [R] [B] les sommes suivantes :

– 5 789,34€ (cinq mille sept cent quatre-vingt-neuf euros et trente-quatre centimes) à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

– 578,93 (cinq cent soixante-dix-huit euros et quatre-vingt-treize centimes) à titre de congés payés afférents ;

– 22 269,65€ (vingt-deux mille deux cent soixante-neuf euros et soixante-cinq centimes) à titre d’indemnité légale de licenciement

Lesdites sommes avec intérêts de droit à compter du 11 février 2020

– 1 200,00€ (mille deux cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Rappelé que les sommes à caractère salarial bénéficient de l’exécution provisoire de droit, nonobstant appel et sans caution en application de l’article R. 1454-28 du code du travail dans la limite de 9 mois de salaire, la moyenne mensuelle brute des trois derniers mois de salaire étant de 2 894,67€ ;

Dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire au-delà de l’exécution provisoire de droit ;

Ordonné à la SAS Calberson Rhône-Alpes de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à M. [R] [B] dans la limite de six mois à compter du licenciement du salarié au jour du prononcé du jugement en application de l’article L. 1235-4 du code du travail ;

Dit qu’une expédition conforme de la présente décision sera adressé par les soins du greffe à Pôle Emploi ;

Débouté la SAS Calberson Rhône-Alpes de sa demande reconventionnelle ;

Condamné la SAS Calberson Rhône-Alpes aux entiers dépens.

Juger l’appel incident de M. [R] [B] tant recevable que fondé ;

Infirmer la décision entreprise en ce qu’elle a :

Condamné la SAS Calberson Rhône-Alpes à payer à M. [R] [B] les sommes suivantes :

55 000,00€ (cinquante-cinq mille euros) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Ladite somme avec intérêts de droit à compter du prononcé du jugement ;

Statuant à nouveau :

Condamner la SAS Calberson Rhône-Alpes à verser à M. [R] [B] [R] la somme de 72.000 euros net à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de son licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En tout état de cause :

Condamner la SAS Calberson Rhône-Alpes à verser à M. [R] [B] la somme de 3.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la SAS Calberson Rhône-Alpes aux entiers dépens.

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l’article 455 du code de procédure civile de se reporter aux conclusions des parties susvisées.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 25 mai 2023.

L’affaire, fixée pour être plaidée à l’audience du 6 septembre 2023.

EXPOSE DES MOTIFS :

Sur le licenciement :

L’article L 1232-1 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

La faute grave est définie comme celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis.

La charge de la preuve de la faute grave incombe à l’employeur, qui doit prouver à la fois la faute et l’imputabilité au salarié concerné.

La procédure pour licenciement pour faute grave doit être engagée dans un délai restreint après la découverte des faits.

En vertu de l’article L 1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement fixe les termes du litige.

En l’espèce, il ressort de la lettre de licenciement qui fixe les termes du litige, qu’après un rappel du contexte et plus particulièrement le vol par un préposé de la société [N] de colis dans la nuit du 2 au 3 aout 2019 mis à jour par une enquête interne déclenchée à la suite de la disparition de colis au cours des mois d’avril, juin et juillet 2019, il est reproché à M. [B] :

-un non-respect des process et faits d’insubordination

-un non-respect de sa feuille de missions

L’employeur procède également aux rappels de sanctions antérieures en date des 04 avril 2017, 11 mai 2018 et 05 juillet 2019.

L’employeur échoue à rapporter la preuve suffisante de la faute grave qui lui incombe en ce que :

– la société Calberson Rhône-Alpes a certes produit un courriel du 18 juillet 2019 de M. [E], correspondant amélioration qualité distribution et express, par lequel il fait état, dans le cadre d’une enquête vidéo suite à la disparition de 7 TB Philipps, du non-respect de deux points essentiel du process le 04 juillet 2019 lors de l’arrivée d’une traction par Calberson [P] ([Localité 5]) par [N], à savoir le fait que le chauffeur ait déplombé seul sa semie avant de se mettre à quai et que le plomb a été flashé à 3h24 soit une demie heure après son arrivée à 2h49. Il est également versé aux débats une attestation de M. [E] qui ne fait en définitive que reprendre les termes de sa correspondance. Lesdits faits ne sont pas prescrits comme le soutient le salarié puisque la procédure de licenciement a été engagée par courrier du 27 août 2019, soit avant l’expiration du délai de deux mois. En revanche, force est de constater que le courriel n’a pas été adressé qu’à M. [B], mais également et notamment à M. [X], responsable de quai et qu’il n’est aucunement mentionné que M. [B] aurait été le salarié ayant pris en charge ce véhicule, étant observé que l’employeur n’a pas produit aux débats d’exploitation de la vidéosurveillance dont le témoin fait état. L’employeur établit également par sa pièce n°44 que M. [B] faisait office de chef de quai jusqu’à l’arrivée du titulaire à 3h00 ce jour-là. Pour autant, eu égard au fait que le camion a franchi la barrière seulement 11 minutes avant l’arrivée du chef de poste, il existe incontestablement une incertitude sur l’imputabilité des faits allégués et ce d’autant, que l’employeur manque de répondre à un moyen de défense particulièrement opérant tenant au fait que si M. [B] avait pour mission de respecter et faire respecter les consignes de déplombage en l’absence du chef de quai d’après le rappel de ses missions faits par son employeur par courrier du 27 octobre 2015, il oppose à juste titre qu’il n’était pas le seul avec le chef de quai à effectuer les opérations de déplombage au vu de la liste du personnel habilité en date du 01 avril 2019 et que la cour d’appel est en définitive laissée dans l’ignorance des conditions exactes de prise en charge de ce tracteur. En tout état de cause, dès lors que le plomb a été flashé à 3h24, il incombait avant tout au chef de quai de gérer l’incident alors constaté en faisant remarquer au chauffeur qu’il avait procédé de manière irrégulière au déplombage et le cas échéant, de signaler l’incident à la hiérarchie, rien n’indiquant que M. [B] ait pu, alors qu’il n’était pas le seul salarié habilité à procéder aux opérations de déplombage, s’apercevoir dans la période de temps limitée de 11 minutes qu’une irrégularité dans le process avait été commise par un chauffeur. Ce grief n’est dès lors pas retenu.

– S’il ressort du courriel du 24 juillet 2019 que M. [I], responsable exploitation distribution et express, a adressé à M. [B], qu’il a été demandé à ce dernier de vérifier personnellement le plombage sur les tractions, en particulier sur les transports [N], il appert tout d’abord que la seconde obligation de désigner en l’absence de M. [R] ([B]) ou de M. [G] ([X]), une personne pour garantir que les plombs sont bien conformes et intègres sur les tractions, est imposée uniquement au chef de quai, qui n’est pas même destinataire du courriel, et non à M. [B] et que surtout, par courriel du 30 juillet 2019, M. [I], qui témoigne par ailleurs, a transmis une consigne sensiblement différente puisqu’il est manifestement revenu à la règle antérieure consistant à ce que la vérification du plomb soit faite soit par un responsable de quai soit par un agent de quai habilité.

Or, s’agissant des faits de la nuit du 02 au 03 août 2019, aucune pièce produite par l’employeur ne vient démentir le déroulé des faits relatés par le salarié selon lequel lorsque le camion de la société [N], conduit par M. [S], s’est présenté dans les locaux de la société Calberson Rhône-Alpes, alors que le vol de matériel par le chauffeur et, partant, le déplombage, avaient d’ores et déjà eu lieu à l’extérieur de l’enceinte de l’entreprise, d’après le procès-verbal de plainte de l’entreprise, la prise en charge a été assurée par M. [Y] [X], agent de quai habilité d’après la liste précitée, présent sur le planning produit par l’employeur ce jour-là et qui, ayant constaté l’irrégularité sur le plombage, était venu l’avertir de la difficulté dans son bureau où il se trouvait pour vérifier le planning vers 1h10, après sa prise de poste à 1h, et que deux personnes du service de sécurité de l’entreprise sont alors arrivées pour l’informer de ce qui s’était passé et qu’il n’avait été entendu ni par le service de sécurité ni par la gendarmerie nationale. En particulier, l’employeur, pourtant à l’origine de la plainte, n’a pas cru devoir produire l’entièreté de la procédure pénale, le cas échéant en sollicitant l’autorisation du procureur de la République, puisque se limitant à la production du dépôt de sa plainte et du jugement du tribunal correctionnel de Grenoble du 25 juin 2020, sans qu’il n’apparaisse que la société Calberson Rhône- Alpes se soit constituée partie civile. L’employeur développe en définitive un moyen purement spéculatif tenant au fait que le vol commis avant même la prise de service du salarié et de surcroît à l’extérieur de l’entreprise aurait été permis par un non-respect antérieur par M. [B] des consignes alors même qu’il a été vu précédemment qu’aucun manquement évident et certain ne peut lui être directement et personnellement imputé à la seule date précise antérieure du 04 juillet 2019 visée par l’employeur.

– Le manquement allégué à l’article 5-6 du règlement intérieur consistant à imposer de manière générale aux salariés de respecter les consignes qui leur sont confiées dans un esprit d’initiative ne saurait davantage être retenu dès lors qu’aucune faute certaine n’est en définitive caractérisée à l’égard de M. [B] lors des deux événements datés des 04 juillet et des 03/04 août 2019.

– Les manquements antérieurs, qui ont déjà donné lieu à des sanctions disciplinaires, ne sauraient permettre à eux seuls de justifier une nouvelle sanction disciplinaire sous la forme du licenciement pour faute grave querellé.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que le licenciement de M. [R] [B] est sans cause réelle et sérieuse.

Sur les prétentions afférentes au licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Premièrement, dès lors que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, M. [B] a droit à l’indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés afférents, les parties étant en accord sur les quanta retenus par le conseil de prud’hommes de sorte qu’il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la SAS Calberson Rhône-Alpes à payer à M. [R] [B] les sommes suivantes :

5 789,34 € (cinq mille sept cent quatre-vingt-neuf euros et trente-quatre cts) à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

578,93 € (cinq cent soixante-dix-huit euros et quatre-vingt-treize cts) à titre de congés payés afférents :

Lesdites sommes avec intérêts de droit à compter du 11 février 2020.

Deuxièmement, s’agissant de l’indemnité de licenciement, M. [B] sollicite l’application des dispositions légales et réglementaires de l’article R 1234-2 du code du travail plus favorables que les stipulations conventionnelles.

Les parties sont en accord sur le salaire de référence et les modalités de calcul mais divergent s’agissant de l’ancienneté que l’employeur entend voir fixer à 15,02 ans contre 15,58 ans pour le salarié.

M. [B] a été embauché le 14 mars 1994 et a été licencié le 09 septembre 2019 ; ce qui permet effectivement d’aboutir à une ancienneté de 15,58 ans, étant observé qu’il aurait dû même être pris en compte la période de préavis non exécuté mais que la cour d’appel ne peut statuer ultra petita.

Il s’ensuit qu’il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Calberson Rhône-Alpes à payer à M. [B] une indemnité de licenciement de 22269,65 euros.

Troisièmement, au visa de l’article L 1235-3 du code du travail, au jour de son licenciement injustifié, M. [B] avait plus de 25 ans d’ancienneté, de sorte qu’il a droit à une indemnité comprise entre l’équivalent de 3 et 18 mois de salaire.

Il justifie d’une longue période de chômage avec le versement de l’ARE avant des missions d’intérim au bénéfice de la société Portpro à compter du 07 février 2022, l’entreprise utilisatrice l’ayant en définitive embauchée en contrat à durée indéterminée le 07 novembre 2022 moyennant un salaire de 1850 euros brut contre 2894 euros brut au service de la société Calberson Rhône-Alpes, soit une perte de salaire significative.

Au vu de ces éléments, réparant la perte injustifiée de l’emploi et l’incidence sur les droits à retraite, il y a lieu par réformation du jugement entrepris de condamner la société Calberson Rhône-Alpes à payer à M. [B] la somme de 52092 euros brut à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le moyen tiré de l’inconventionnalité du barème énoncé à l’article L 1235-3 du code du travail n’étant pas opérant en l’espèce eu égard à l’appréciation souveraine du préjudice subi n’excédant pas le plafond légal.

Le surplus de la demande indemnitaire de ce chef est rejeté.

Quatrièmement, il y a lieu de confirmer purement et simplement la disposition du jugement ayant condamné la société Calberson Rhône-Alpes à rembourser dans la limite de 6 mois les indemnités chômage perçues par M. [B].

Sur les demandes accessoires :

L’équité commande de confirmer l’indemnité de procédure de 1200 euros allouée par les premiers juges à M. [B] et de lui accorder une indemnité complémentaire de procédure de 2000 euros.

Le surplus des prétentions des parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile est rejeté.

Au visa de l’article 696 du code de procédure civile, confirmant le jugement entrepris et y ajoutant, il convient de condamner la société Calberson Rhône-Alpes, partie perdante, aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS ;

La cour,

Statuant publiquement contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu’il a condamné la société Calberson Rhône-Alpes à payer à M. [B] la somme de 55000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,

CONDAMNE la société Calberson Rhône-Alpes à payer à M. [B] la somme de cinquante-deux mille quatre-vingt-douze euros (52092 euros) bruts à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

DÉBOUTE M. [B] du surplus de ses prétentions au principal

CONDAMNE la société Calberson Rhône-Alpes à payer à M. [B] une indemnité complémentaire de procédure de 2000 euros

REJETTE le surplus des prétentions des parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la société Calberson Rhône-Alpes aux dépens d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président de section, et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière Le Président

 


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