Vidéogrammes / DVD : 11 mai 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/16366

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Vidéogrammes / DVD : 11 mai 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/16366

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 3

ARRET DU 11 MAI 2022

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/16366 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CARV3

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Juillet 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS RG n° 18/04319

APPELANTE

SAS EOL MODELISME représentée par la SELARL [H] YANG-TING prise en la personne de Me [Y] [H] ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur désignée par jugement du tribunal de commerce de Paris du 2 octobre 2019

immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 304 878 663

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Arnaud GUYONNET de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044, avocat postulant

Assistée de Me Yann LE DOUARIN de la SELARL GAFTARNIK – LE DOUARIN & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L0118, avocat plaidant

INTIMEE

SCI OAVVF agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 410 623 821

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Benoît HENRY de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0148, avocat postulant

Assistée de Me Laure de LA VASSELAIS, avocat au barreau de PARIS, toque : B0343, avocat plaidant

PARTIE INTERVENANTE

SELARL [H] YANG TING prise en la personne de Me [Y] [H] ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société EOL MODELISME désignée à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Paris du 2 octobre 2019

immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 530 194 968

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Arnaud GUYONNET de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044, avocat postulant

Assistée de Me Yann LE DOUARIN de la SELARL GAFTARNIK – LE DOUARIN & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L0118, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 15 Mars 2022, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Gilles BALA’, président de chambre

Madame Sandrine GIL, conseillère

Madame Emmanuelle LEBÉE, magistrate honoraire chargée

de fonctions juridictionnelles

qui en ont délibéré,

un rapport a été présenté à l’audience par Madame Sandrine GIL dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Marie-Gabrielle de La REYNERIE

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Monsieur Gilles BALA’, président de chambre et par Marie-Gabrielle de La REYNERIE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

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FAITS ET PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 12 juillet 2004, la S.C.I. OAVVF a donné à bail à la S.A.S. Eol Modélisme des locaux commerciaux situés [Adresse 3] , pour une durée de neuf ans et 17 jours à compter du 15 juillet 2004 jusqu’au 31 juillet 2013, moyennant un loyer de 150.000 € la première année, de 160.000 € la deuxième année et de 170.000€ à partir de la 3ème année, outre l’indexation. Le bail s’est poursuivi par tacite prolongation.

Par acte d’huissier du 13 juin 2016, la société Eol Modélisme a sollicité le renouvellement du bail à compter du 1er juillet 2016 moyennant un loyer annuel de 170.000 €. Par acte d’huissier du 20 juin 2016, la société OAVVF a accepté le principe du renouvellement mais a sollicité un loyer annuel de 350.000 €.

Par acte d’huissier du 5 février 2018, la bailleresse a fait délivrer à la SAS Eol Modélisme un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail portant sur la somme principale de 141.901,93 € au titre de la dette locative échue au 1er trimestre 2018.

Par acte d’huissier de justice du 6 avril 2018, la société OAVVF a fait citer la société Eol Modélisme aux fins principalement de voir prononcer la résiliation du bail, ordonner l’expulsion de la locataire, condamner cette dernière au paiement d’une indemnité d’occupation et du solde locatif s’élevant à 215.337,65€, arrêté au 1er avril 2018 outre les intérêts majorés, ainsi que d’une indemnité contractuelle de 21.533,76€.

Par jugement en date du 9 juillet 2019, le tribunal de grande instance de Paris, statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort, a :

– Déclaré irrecevables la note et les pièces adressées par la S.C.I. OAVVF en cours de délibéré ;

– Dit n’y avoir lieu d’ordonner une mesure de conciliation en l’état de la procédure ;

– Dit et jugé que la société OAVVF est recevable en sa demande ;

– Dit et jugé que la S.A.S. Eol Modélisme est tenue de continuer à payer les loyers échus au prix fixé dans le contrat de bail du 12 juillet 2004 jusqu’à la fixation définitive du montant du loyer du bail renouvelé à compter du 1er juillet 2016 ;

– Condamné la société Eol Modélisme à payer à la société OAVVF la somme de 432.134,61€ au titre de sa dette locative arrêtée au 2 janvier 2019, premier trimestre 2019 inclus ;

– Dit et jugé que les comptes seront à faire entre le bailleur et le preneur, après la fixation définitive du prix du loyer du bail renouvelé au 1er juillet 2016 conformément aux dispositions de L145-57 ;

– Dit et jugé qu’i1 convient de réduire les clauses pénales du bail manifestement excessives ;

– Dit que la somme de 432.134,61 € portera intérêts au taux légal sur la somme de 141.901,93€ à compter du 5 février 2018, sur celle de 73.435,72 € à compter du 6 avril 2018, sur celle de 144.728,83 € à compter du 6 décembre 2018 et celle de 72.068,13 € à compter du 3 janvier 2019 ;

– Condamné la société Eol Modélisme à payer à la société OAVVF la somme de un euro avec intérêts au taux légal à compter du 3 janvier 2019 au titre de la pénalité prévue à l’article 17 du bail et rejeté le surplus de la demande formée à ce titre ;

– Condamné la société Eol Modélisme à payer à la société OAVVF la somme de un euro au titre de la pénalité prévue à l’article 18 du bail qui sera déduite du dépôt de garantie et rejeté le surplus de la demande formée à ce titre ;

– Rejeté la demande de délais de paiements formée par la société Eol Modélisme;

– Débouté la société Eol Modélisme de sa demande en dommages et intérêts formée à l’encontre de la société OAVVF au titre des refus d`autorisation opposés par cette dernière à la cession de son droit au bail,

– Prononcé la résiliation judiciaire du bail commercial conclu le 12 juillet 2004 et renouvelé le 1er juillet 2016 entre la société OAVVF et la société Eol Modélisme, aux torts de cette dernière, portant sur les locaux commerciaux situés [Adresse 3]; – Ordonné, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les six mois de la signification du présent jugement, l’expulsion la société Eol Modélisme et de tout occupant de son chef des lieux situés [Adresse 3], avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d’un serrurier ;

– Dit, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle et qu’à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l’huissier chargé de l’exécution, avec sommation à la personne expulsée d’avoir à les retirer dans un délai de quatre semaines à l’expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l’exécution, ce conformément aux dispositions légales ;

– Condamné la société Eol Modélisme à payer à la société OAVVF à compter du présent jugement et jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés, une indemnité d’occupation d’un montant trimestriel de 57.973,44€ en principal outre les charges, taxes et accessoires contractuels sans qu’il y ait lieu de l’indexer ni de la modifier en fonction de l’issue de la procédure en fixation du bail renouvelé ;

– Débouté les parties de leurs demandes fondées sur 1’article 700 du code de procédure civile ;

– Ordonné l’exécution provisoire de la présente décision ;

– Rejeté les autres demandes ;

– Condamné la SAS Eol Modélisme aux entiers dépens comprenant le coût de l’état des inscriptions de privilèges avec distraction au profit de Maître L. de La Vasselais, avocat, en application de l’article 699 du CPC.

Par déclaration du 7 août 2019, la société Eol Modélisme, a interjeté appel à l’encontre de ce jugement.

Par jugement du 2 octobre 2019, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société EOL MODELISME et désigné la société MontraversYang-Ting prise en la personne de Maître [Y] [H] en qualité de mandataire judiciaire liquidateur de la société Eol Modélisme et il a fixé la date de cessation des paiements au 31 août 2019. La SCI OAVVF a déclaré sa créance le 14 octobre 2019.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par le RPVA le 21 avril 2020, la société [H]Yang-Ting prise en la personne de Maître [Y] [H] ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Eol Modélisme et la société Eol Modélisme demandent à la Cour de :

– Juger recevable et bien fondée l’intervention volontaire à l’instance de la S.E.L.A.R.L. [H] Yang-Ting, prise en la personne de Maître [Y] [H], ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Eol Modélisme, S.A.S. inscrite au RCS de Paris sous le n° 304 878 663, désignée par jugement du tribunal de commerce de Paris du 2 octobre 2019 ;

– Infirmer en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 9 juillet 2019 par la 18ème chambre 1ère section du TGI de Paris ;

Statuant à nouveau

– Débouter la S.C.I. OAVVF de l’intégralité de ses demandes et prétentions en toutes fins qu’elles comportent ;

– Juger que la société OAVVF ne peut solliciter aucune condamnation en paiement de la société Eol Modélisme et que la dette locative fera l’objet d’une inscription au passif ;

– Admettre au passif de la société Eol Modélisme la créance de la société OAVVF à hauteur de 717.589,09 € dont il conviendra de déduire par compensation le dépôt de garantie à hauteur de 57.244,87 € et la créance de dommages et intérêts de la société Eol Modélisme ;

– Condamner la société OAVVF à payer à la S.E.L.A.R.L, prise en la personne de Maître [Y] [H], ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Eol Modélisme, une indemnité de 435.000 € à titre de dommages et intérêts, majorée des intérêts légaux à compter du 30 janvier 2019, date de la demande formée par conclusions au titre du préjudice lié au refus abusif des cessions de droit au bail, outre une indemnité de 200.000 € en réparation du préjudice moral subi par la société Eol Modélisme résultant directement du comportement de son bailleur ;

– Condamner la société OAVVF à payer à la société [H] Yang-Ting , prise en la personne de Maître [Y] [H], ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Eol Modélisme, une indemnité de 6.000 € sur le fondement de l’article 700 du CPC, outre les entiers dépens de première instance et d’appel.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 10 janvier 2022, la société OAVVF demande à la Cour de :

– Confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions notamment :

– sur la dette locative et les demandes en paiement et accessoires de la société OAVVF

– sur la résiliation judiciaire du bail aux torts de la société Eol Modélisme

– sur le rejet de la demande reconventionnelle en dommages et intérêts de la société Eol Modélisme,

En conséquence et y ajoutant, pour tenir compte notamment de l’évolution de la dette,

– Fixer la créance de la société OAVVF antérieure au jugement de liquidation judiciaire au passif de la liquidation de la société Eol Modélisme à la somme de 645.772,79 € ;

– Fixer la créance de la société OAVVF postérieurement au jugement de liquidation judiciaire et relevant comme telle de l’article L 622-17 du code de commerce, à la somme de 172.105,77€ ;

Subsidiairement: en cas de réformation du jugement déféré sur la résiliation judiciaire du bail

– Constater que la société OAVVF s’en rapporte à justice sur les incidences juridiques du jugement de liquidation judiciaire soutenues sans fondement juridique par Me [H], ès qualités ;

– Vu les dispositions de l’article L 641-12-1° du code de commerce, constater que cette résiliation est intervenue le 17 janvier 2020, par l’effet de la décision adoptée le même jour par la S.E.L.A.R.L. [H] Yang-Ting, prise en la personne de Me [H], ès qualités, de ne pas poursuivre le bail ;

En tout état de cause

– Débouter la société Eol Modélisme et la S.E.L.A.R.L. [H] Yang-Ting, prise ne la personne de Me [H], ès qualités, de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

– Condamner la société [H] Yang-Ting, prise en la personne de Me [H], ès qualités à régler à la société OAVVF une somme de 20.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner la société [H] Yang-Ting, prise en la personne de Me [H], ès qualités ainsi aux entiers dépens, de première instance et d’appel.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 2 mars 2022.

MOTIFS

Il convient de déclarer recevable l’intervention volontaire de la Selarl [H] Yang-Ting, prise en la personne de Maître [Y] [H], ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Eol Modélisme désignée à cette fin par jugement du 2 octobre 2019 du tribunal de commerce de Paris.

Sur la résiliation judiciaire

La société EOL MODELISME expose que le bailleur ne peut pas se prévaloir de la résiliation judiciaire en raison de l’ouverture de la procédure collective ; qu’en outre la résiliation judiciaire du bail prononcée par le jugement entrepris pour arriéré locatif n’est que la conséquence du comportement fautif du bailleur qui a refusé les cessions de droit au bail.

Il résulte des articles L. 622-21 et L. 641-3 du code de commerce que le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L.622-17 et tendant (…)2° à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.

Toutefois, l’ouverture de la procédure de liquidation le 2 octobre 2019 s’oppose au prononcé de la résiliation du bail pour un défaut de paiement de loyers antérieur à l’ouverture de cette procédure faute de décision passée en force de chose jugée, le jugement de première instance faisant l’objet du présent appel.

Il n’est pas sollicité la résiliation judiciaire pour l’arriéré locatif postérieur à l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.

Par conséquent le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire du bail à la date de sa décision.

Le 17 janvier 2020, le liquidateur judiciaire a fait savoir qu’il n’entendait pas poursuivre le bail et les locaux ont été restitués le 10 mars 2020 par remise des clés.

Il s’ensuit que le bail a été résilié le 17 janvier 2020 par application de l’article L641-12 1° du code de commerce.

Les demandes liées à l’expulsion des occupants et à la séquestration des meubles sont devenues sans objet à raison de la restitution des lieux par la liquidation judiciaire de la société EOL MODELISME, le jugement étant dès lors infirmé de ces chefs.

Le jugement sera également infirmé sur la date de l’indemnité d’occupation. En effet le bail ayant été résilié le 17 janvier 2020, celle-ci est due à compter du 18 janvier 2020 (et non à compter du jugement de première instance) jusqu’au 10 mars 2020, date de la remise des clés. La résiliation judiciaire étant prononcée par application de l’article l’article L641-12 1° du code de commerce, il n’y a pas lieu d’accorder une indemnité au titre de la clause pénale, le jugement, qui avait accordé un euro, étant dès lors infirmé de ce chef.

Sur la créance de la SCI OAVVF

La SCI OAVVF sollicite de voir fixer sa créance antérieure au jugement de liquidation judiciaire au passif de la liquidation de la société Eol Modélisme à la somme de 645.772,79 euros et pour la partie due postérieurement au jugement de liquidation à la somme de 172.105,77 euros. Si la somme de 645.772,79 euros n’est pas contestée par la société EOL MODELISME, celle-ci mentionne dans ses écritures une créance postérieure au jugement d’ouverture de 71 816,30 euros.

Il ressort de la déclaration détaillée de créance de la SCI OAVVF, qui l’a actualisée et transmise au liquidateur judiciaire le 26 mai 2020, que celle-ci est justifiée pour la somme de 645 772,79 euros arrêtée à la date du jugement du 2 octobre 2019 du tribunal de commerce.

Il convient de relever que la SCI OAVVF ne réclame plus de sommes au titre d’un prétendu rappel de loyers au titre du bail renouvelé à compter 1er juillet 2016.

S’agissant de la créance postérieure au jugement du 2 octobre 2019 du tribunal de commerce, celle-ci a été calculée sur la base du montant du loyer contractuel, le jugement de première instance ayant fixé l’indemnité d’occupation au montant du loyer contractuel, outre les taxes et charges.

La somme de 71 816,30 euros mentionnée dans la déclaration de créance correspond à la somme due du 2 octobre 2019 au 31 décembre 2019, elle est justifiée au vu du décompte détaillé. Il est en sus réclamé la somme de 58 620,27 euros pour la période du 1er janvier 2020 au 10 mars 2020 date de remise des clés. Cette somme est justifiée au vu des pièces produites par l’intimée à l’appui de la déclaration de créance actualisée du 26 mai 2020, la société EOL MODELISME ayant occupé les locaux jusqu’à cette date, étant relevé que l’indemnité d’occupation, telle que fixée par le jugement entrepris, court à compter du 18 janvier 2020 jusqu’à la date de remise des clés le 10 mars 2020. La société EOL MODELISME ne justifie pas avoir réglé ces sommes.

La SCI OAVVF a inclus dans la créance postérieure au jugement la somme de 20 000 euros qu’elle réclame au titre de l’article 700 du code de procédure civile, somme ne pouvant être incluse à ce stade dans la créance, celle-ci devant être examinée ci-après comme faisant l’objet d’une demande spécifique au titre de l’article 700 du code de procédure civile et ne pouvant être réclamée deux fois.

Il est enfin demandé la somme de 789,20 euros au titre du constat d’huissier de l’état des locaux et la somme de 20 880 euros au titre des frais de débarras des locaux.

La SCI OAVVF a fait établir un constat d’huissier le 6 mars 2020, dont les constatations n’ont pas fait l’objet d’observations par la société EOL MODELISME dans ses conclusions, dont il ressort que du matériel et des meubles ont été laissés sur place. Elle a versé aux débats un devis détaillé de débarras des encombrants en date du 6 mars 2020 de la société Star Net, pour un montant estimé de 20 880 euros TTC ainsi qu’une facture de la société Star Net en date du 25 juin 2020 pour la somme de 14 616 euros TTC. Ce dernier montant correspondant à la somme réellement réglée pour enlever le matériel et les meubles entreposés dans les locaux, elle sera retenue ainsi que le coût du constat d’huissier qui est justifié.

Il s’ensuit que la créance postérieure au jugement du 2 octobre 2019 du tribunal de commerce s’établit à la somme de 145 841,77 euros (71 816,30 euros + 58 620,27 euros + 789,20 euros + 14 616 euros).

Seule la somme de 130 436, 57 (71 816,30 euros + 58 620,27 euros) due au titre des loyers et indemnité d’occupation relève des dispositions de l’article L 622-17 du code de commerce.

Enfin s’agissant du dépôt de garantie de 57 244,87 euros, il convient de préciser que celui-ci viendra en déduction par compensation de la créance de la SCI OAVVF.

Sur la cession du droit au bail

L’appelante considère que la SCI OAVVF a refusé sans motif légitime les cessions de droit au bail au profit de Monoprix courant 2014, puis de Casino et de la société Momonn ; que s’agissant de Monoprix, le refus n’est en outre pas motivé ; qu’une cession aurait permis d’apurer les impayés ; que l’exploitation d’un magasin de distribution alimentaire n’était pas contraire au standing de l’immeuble, ni n’était de nature à générer des troubles pour l’immeuble ; que lorsqu’elle a voulu céder son droit au bail à une salle de sport (Momonn) la bailleresse a d’ailleurs également refusé sans motif légitime. Elle sollicite l’octroi d’une indemnité de 435000 euros correspondant selon elle à la dernière offre qui lui a été faite et qui a été refusée sans motif par la bailleresse ainsi que des dommages et intérêts pour préjudice moral en raison du comportement du bailleur.

L’intimée réplique qu’elle n’a jamais été utilement consultée par la société EOL MODELISME sur les différentes cessions du droit au bail faute d’être informée de la solvabilité des candidats, de la faisabilité technique et juridique de la nouvelle exploitation envisagée, de la nature des travaux envisagés par les candidats et ceux susceptibles d’être mis à sa charge dans le cadre de son obligation de délivrance ; qu’en outre le bail était en tacite reconduction de sorte que les candidats acquéreurs devaient consentir à un loyer déplafonné. Enfin elle conteste avoir refusé sans motif légitime les cessions envisagées par la société EOL MODELISME expliquant que les projets de magasin d’alimentation étaient susceptibles de générer des nuisances pour les résidents de l’immeuble ; que le projet de cession à la société Momonn était une opération complexe, et elle renvoie à la motivation du jugement. Subsidiairement elle fait valoir que la preuve du préjudice invoqué n’est pas rapportée ; que tout au plus il ne pourrait s’agir que d’une perte de chance.

Selon les dispositions de l’article 1134 du code civil dans son ancienne rédaction applicable au contrat en cause, les conventions doivent être exécutées de bonne foi par les parties.

Hors du cas où la cession du bail se fait dans le cadre de la cession du fonds de commerce, qui est visé par l’article L. 145-16 du code de commerce, les parties peuvent convenir que la cession du seul droit au bail sera totalement libre ou, au contraire, soumise à des conditions particulières, voire interdite.

Il est admis que lorsqu’aux termes du bail, la cession du droit au bail est subordonnée à la condition expresse d’avoir recueilli l’accord du bailleur alors le refus opposé par le bailleur ne peut être discrétionnaire et doit revêtir un caractère légitime.

En 1’espèce, le contrat de bail liant les parties stipule que le preneur ‘ne pourra céder son droit au présent bail, si ce n’est à l’acquéreur de son fonds de commerce, sans l’autorisation expresse et par écrit du bailleur, sous peine de résiliation immédiate’. Il est également stipulé au paragraphe suivant que ‘Dans tous les cas de cession, il restera garant et répondant solidaire de son cessionnaire…’.

Comme l’a retenu le jugement entrepris, qui n’est pas discuté par les parties sur ce point, cette clause n’interdit pas la cession du droit au bail indépendamment de celle du fonds de commerce mais elle impose en cas de cession du bail seul, que le locataire cédant obtienne l’autorisation expresse et écrite du bailleur.

Il s’ensuit que le refus opposé par le bailleur doit revêtir un caractère légitime.

Selon le contrat de bail, l’activité autorisée est: ‘vente au détail de modèles réduits, vêtements et produits s’y rapportant, patinettes et tous produits s’y rapportant, CD, DVD, VHS, disques, cassettes, jeux vidéo, films et tous matériels s’y rapportant, plus simplement exprimé tous commerces à l’exclusion de tous commerces de restaurants ou de bouche, nuisants, maladorants ou insalubres ou encore en rapport avec la préparation d’aliments ou la vente de produits de la mer’.

Comme l’a indiqué le jugement entrepris, la destination du bail n’est ainsi pas limitée à l’activité actuellement exercée dans les locaux par la SAS EOLMODELISME mais porte sur ‘tous commerces’ sous les réserves énumérées.

Il n’est pas discuté que les projets de cession invoqués par la société EOL MODELISME sont des cessions du seul droit au bail à un tiers non acquéreur du fonds de commerce.

S’agissant du projet de cession du droit au bail aux fins d’exploiter dans les lieux une activité de supermarché alimentaire sous l’enseigne Monop’, le bailleur, par l’intermédiaire de son conseil, a le 12 décembre 2014 refusé la proposition soumise par la locataire, aux motifs qu’au regard de la situation locative, le projet ne présentait pas d’intérêt pour le bailleur. Dans la mesure où le bail avait expiré, le refus du bailleur relatif à la situation locative était légitime puisque le potentiel acquéreur du droit au bail sollicitait la signature d’un nouveau bail moyennant un loyer de 230 000 euros HT/HC, montant correspondant au loyer contractuel indexé, ce qui aurait privé le bailleur de la possibilité de solliciter, le cas échéant, la fixation d’un loyer déplafonné en cas de renouvellement puisque le bail était en tacite reconduction, outre que le projet qui lui était soumis était sommaire sur l’ampleur des travaux nécessaires pour adapter le local à une activité de supermarché alimentaire. Si les discussions se sont par la suite poursuivies, aucun élément ne démontre que la promesse de cession du droit au bail du 8 mai 2015 produite en pièce 25 par la société EOL MODELISME, modifiée sur le montant du loyer par rapport à la proposition initiale de la société Monop’, ait été transmise par la locataire au bailleur et/ou qu’un nouvel agrément ait été sollicité. Enfin, le bailleur avait mandaté un architecte courant 2015 lequel a conclu que le projet de supermarché alimentaire entraînait des contraintes d’horaires et d’approvisionnement, des incidences sur les réseaux de l’immeuble, des modifications de structure, ce qui montre que le bailleur a examiné avec sérieux la possibilité d’une implantation d’un supermarché alimentaire.

Pour le surplus, la cour renvoie à la motivation du jugement entrepris.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a considéré que le refus de la SCI OAVVF d’autoriser les projets de cession de droit au bail n’était pas abusif et en ce qu’il a débouté la société EOL MODELISME en conséquence de sa demande de dommages et intérêts pour refus abusif. Celle-ci sera également déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral, aucune faute du bailleur, qui a examiné les projets de cession soumis, n’étant démontrée.

Sur les demandes accessoires

Le jugement entrepris sera confirmé sur les dépens de première instance.

En cause d’appel l’équité commande de condamner la Selarl [H] Yang-Ting, prise en la personne de Maître [Y] [H], ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Eol Modélisme à régler à la SCI OAVVF la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La Selarl [H] Yang-Ting, prise en la personne de Maître [Y] [H], ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Eol Modélisme succombant, elle sera condamnée aux dépens d’appel dont distraction au profit de l’avocat postulant par application de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Par arrêt contradictoire

Déclare recevable l’intervention volontaire de la Selarl [H] Yang-Ting, prise en la personne de Maître [Y] [H], ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Eol Modélisme ;

Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire du bail à la date de sa décision, l’expulsion, la séquestration du mobilier et fixé l’indemnité d’occupation à compter de sa décision ainsi que sur la condamnation à un euro au titre de la clause pénale;

Le confirme en ses autres dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant

Dit que le bail a été résilié le 17 janvier 2020 par application l’article L641-12 1° du code de commerce ;

Dit que l’indemnité d’occupation telle que fixée par le jugement entrepris est due à compter du 18 janvier 2020 jusqu’au 10 mars 2020 date de remise des clés ;

Dit que les demandes liées à l’expulsion des occupants et à la séquestration des meubles sont devenues sans objet à raison de la restitution des lieux par la liquidation judiciaire de la société EOL MODELISME ;

Fixe la créance de la société OAVVF antérieure au jugement de liquidation judiciaire au passif de la liquidation de la société Eol Modélisme à la somme de 645.772,79 euros ;

Fixe la créance de la société OAVVF postérieure au jugement de liquidation judiciaire à la somme de 145 841,77 euros dont la somme de 130 436, 57 euros relève des dispositions de l’article L 622-17 du code de commerce ;

Dit qu’il sera déduit par compensation des sommes précitées le dépôt de garantie d’un montant de 57 244,87 euros ;

Condamne la Selarl [H] Yang-Ting, prise en la personne de Maître [Y] [H], ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Eol Modélisme à payer à la SCI OAVVF la somme de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette les demandes plus amples ou contraires ;

Condamne la Selarl [H] Yang-Ting, prise en la personne de Maître [Y] [H], ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Eol Modélisme aux dépens d’appel dont distraction au profit de l’avocat postulant par application de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

 


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