Sommaire
100 000 euros de dommages et intérêts
Le producteur audiovisuel doit assurer à l’œuvre dont il acquiert les droits un minimum d’exploitation. Un auteur qui avait cédé ses droits de reproduction et de représentation sur des vidéoclips qu’il avait réalisés à partir de phonogrammes, a obtenu la condamnation de son producteur (100 000 euros de dommages et intérêts).
Exploitation du vidéoclip
Le producteur est tenu, par les dispositions de l’article L. 132-27 du Code de la propriété intellectuelle (CPI), d’assurer à l’oeuvre audiovisuelle une exploitation conforme aux usages de la profession, il n’appartient pas à l’auteur de prouver l’absence d’exploitation de ses oeuvres, mais au contraire au producteur de démontrer les diligences qu’il a assurées pour diffuser les oeuvres, afin de les exploiter dans l’intérêt commun des parties contractuellement liées conformément aux usages.
Dans cette affaire, le producteur ne produisait aucune justification des démarches commerciales, promotionnelles ou autres, sous la forme de merchandising qu’ils auraient effectuées pour faire connaître et promouvoir les vidéomusiques acquises. Si le vidéoclip demeure l’accessoire du phonogramme qu’il illustre audiovisuellement, il n’en demeure pas moins un élément essentiel de la musique qu’il sert à souligner et à mettre en valeur.
Reddition des comptes d’exploitation
L’article L.132-28 du CPI impose au producteur de fournir, au moins une fois par an, à l’auteur un état des recettes provenant de l’exploitation de l’œuvre selon chaque mode d’exploitation.
Les contrats de cession de droits d’auteur rappellent le plus souvent cette obligation légale en précisant que les comptes d’exploitation seront arrêtés le 31 décembre de chaque année et adressés à l’auteur ou toute personne désignée par lui dans un délai de 90 jours, accompagnés s’il y a lieu du produit des pourcentages revenant à l’auteur.
Cette obligation légale que le producteur doit remplir spontanément sans que l’auteur ait à réclamer son dû a pour objet de permettre à l’auteur de connaître précisément, au moins une fois par an, les conditions dans lesquelles ses oeuvres sont exploitées et les résultats financiers qu’elles engendrent. Le fait que l’auteur soit adhérent à la SACEM, n’a pas d’impact sur l’obligation de reddition des comptes dans la mesure où les relevés de la SACEM ne contiennent que des informations partielles relatives à la diffusion des œuvres de l’auteur. A noter que la SACEM n’a pas vocation à assurer la promotion et la commercialisation des oeuvres de ses adhérents, l’adhésion ne s’oppose pas à ce que l’auteur affilié agisse pour faire valoir ses droits si ceux-ci s’avéraient être lésés par le producteur avec lequel il a contracté.
Responsabilité personnelle du producteur
Par défaut, les dirigeants sociaux n’encourent une responsabilité personnelle à l’égard des tiers que s’ils ont commis une faute détachable de leurs fonctions, c’est-à-dire une faute d’une particulière gravité incompatible avec l’exercice normal des fonctions sociales. En l’absence de démonstration d’une telle faute, seule peut être engagée la responsabilité de la société.
En l’espèce, la responsabilité personnelle du producteur a été retenue car celui-ci avait fait l’erreur de contracter en son nom personnel comme principal cocontractant (la société n’apparaissant qu’en second lieu).
Crédit sur les vidéoclips
Le producteur a également été condamné pour non-respect du droit moral de l’auteur. Une clause claire et dépourvue d’ambiguïté du contrat imposait au producteur de faire figurer le nom de l’auteur réalisateur au générique des vidéomusiques.
Le fait qu’il soit admis que les vidéoclips n’accréditent pas leurs auteurs ne constitue pas en soi un juste motif de nature à exonérer le producteur de ses obligations contractuelles. En effet, tout auteur d’une création artistique a pour ambition de voir son statut de créateur connue ou reconnue par les professionnels de l’audiovisuel et par le public. La diffusion de clips vidéo sans aucune mention du nom de l’auteur et du réalisateur fait que ceux-ci risquent de demeurer dans l’anonymat contrairement à leur souhait ; il ne sera dès lors pas possible de leur attribuer la paternité de leur création et ils risquent ainsi pour l’avenir de voir leurs initiatives créatrices freinées.
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