Vidéo Snapchat au travail : légal et distinct d’une vidéosurveillance
Vidéo Snapchat au travail : légal et distinct d’une vidéosurveillance
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Licenciement pour motif personnel

Conformément aux dispositions de l’article L.1232-1 du code du travail, le licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, laquelle implique qu’elle soit objective, établie et exacte et suffisamment pertinente pour justifier la rupture du contrat de travail.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et l’employeur qui l’invoque pour licencier doit en rapporter la preuve.

Affaire Foot Locker

En l’espèce, pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, le conseil de prud’hommes a retenu que la vidéo surveillance des vestiaires et locaux affectés au repos des salariés de la société Foot Locker n’était pas autorisée comme portant atteinte au respect de sa vie privée, qu’ainsi, la vidéo sur laquelle s’appuie l’employeur pour reprocher au salarié des propos inadaptés constitue un moyen de preuve obtenu de manière illicite, celle-ci ayant été filmée dans la salle de pause et pendant son temps de pause.

Vidéo filmée par un collègue

Il résulte néanmoins des débats que les propos et attitudes reprochés au salarié n’ont à aucun moment été filmés via un système de vidéo-surveillance mis en place par l’employeur puisqu’il est constant qu’il s’agissait d’une vidéo filmée par un collègue par le biais d’un téléphone portable et diffusée via le réseau Snapchat.

Dès lors, l’ensemble des arguments invoqués par le conseil de prud’hommes sont inopérants dans le cadre du litige.   

Le droit à la preuve prime  

Il résulte des articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 9 du code civil et 9 du code de procédure civile, que le droit à la preuve peut justifier la production en justice d’éléments extraits d’une vidéo snapchat d’un salarié portant atteinte à sa vie privée, à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi.

En l’espèce, il ressort du visionnage de cette vidéo, tournée sur le lieu de travail, qu’elle n’a pas été prise à l’insu du salarié, au contraire, celui-ci y participant activement tant par ses gestes que par ses paroles et il est justifié, par la production de la feuille de pointage, que les faits filmés se sont déroulés pendant le temps de travail effectif du salarié puisqu’il n’a travaillé ce jour-là que six heures et n’a bénéficié d’aucun temps de pause.

Il n’est pas contesté que cette vidéo a été diffusée via Snapchat et aucun élément ne permet de dire qu’elle aurait été capturée de manière illégale, aussi, la juridiction a retenu que la production de cette vidéo, tournée sur le lieu et durant les heures de travail, indispensable pour apporter la preuve des faits reprochés au salarié, est proportionnée au but recherché et est donc licite.

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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 21 JANVIER 2021

N° RG 18/00293 – N° Portalis DBV2-V-B7C-HXQD

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES DU HAVRE du 19 Décembre 2017

APPELANTE :

SAS FOOT LOCKER FRANCE

représentée par Me Vincent MOSQUET de la SELARL LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Olivier ANGOTTI, avocat au barreau de PARIS

INTIME :

Monsieur B Y

représenté par Me G A, avocat au barreau du HAVRE

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2018/004843 du 30/05/2018 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Rouen)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 786 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 25 Novembre 2020 sans opposition des parties devant Madame BACHELET, Conseillère, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente

Monsieur TERRADE, Conseiller

Madame BACHELET, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame LACHANT, Greffière

DEBATS :

A l’audience publique du 25 Novembre 2020, où l’affaire a été mise en délibéré au 21 Janvier 2021

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 21 Janvier 2021, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme GUILBERT, Greffière.

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. B Y a été engagé par la société Foot locker en qualité de vendeur statut employé par contrat de travail à durée déterminée à compter du 21 mai 2014, puis par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 14 juillet 2014.

Il a été licencié pour faute grave le 4 août 2016 dans les termes suivants :

‘Nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave.

Les faits qui justifient ce licenciement sont les suivants :

En date du 28 juin 2016, M. D Z, responsable régional des ventes a transmis au service des ressources humaines une vidéo Snapchat qui a été enregistrée pendant les heures d’ouverture du magasin et en surface de ventes.

Cette vidéo a été filmée au sein de votre magasin du Havre en date du 19 avril 2016 dans laquelle vous apparaissiez à plusieurs reprises en tenue de travail.

En effet, vous étiez filmé dans la cabine d’essayage du magasin, assis sur un tabouret en train de consulter votre téléphone et vous avez dit sur un ton provocateur : ‘c’est ma façon de travailler’. M. A E, vendeur au sein du magasin, a commenté la vidéo et vous a répondu : ‘ah bah bravo’ et vous avez rétorqué : ‘vas-y vas vendre des baskets’. Vous avez ajouté ensuite : ‘c’est l’anniversaire à X’.

Vous étiez ensuite filmé en surface de ventes alors que vous étiez derrière la caisse. Vous regardiez en direction de la personne qui vous filmait puis vous avez lancé l’invitation suivante: ‘Aïe c’est l’anniversaire à X. On va acheter du quatre-quarts, du jus de… Aïe, aïe, aïe on est bien vous êtes tous conviés allez y venez!’.

La vidéo vous a montré ensuite dans le couloir du magasin, assis sur une chaise avec votre téléphone dans la main que vous consultiez. M. A E vous dit : ‘il s’y croit à mort ce batard’ ; phrase à laquelle vous avez répondu avec arrogance : ‘c’est moi le boss, va faire le ménage’.

M. A E vous a filmé ensuite toujours sur la même chaise. Vous y étiez allongé avec les pieds posés sur un carton. Dans cette position, vous dormiez. M. A E retourna le téléphone, ainsi il s’auto-filmait et a dit les propos suivants : ‘pour vous dire tellement qu’on galère B il dort’. Puis vous regardiez en direction du téléphone et vous avez fait le signe V de la main en tendant l’index et le majeur. M. A E ajouta la phrase suivante : ‘c’est bien le boulot chez Foot Locker non”.

Lors de l’entretien, vous nous avez dit que vous n’aviez pas filmé ni publié cette vidéo.

Vous nous avez expliqué que si vous dormiez dans le couloir c’est que vous deviez être en pause. Vous nous avez expliqué que vous pensiez être également en pause lorsque vous utilisiez votre téléphone en cabine d’essayage et dans le couloir alors que vous étiez assis sur la chaise.

Vous avez reconnu avoir convié des personnes au sein du magasin pour fêter l’anniversaire de votre collègue, M. X F, animateur des ventes du magasin et vous nous avez dit : ‘c’est pour faire du chiffre’. Vous avez reconnu avoir commis une faute en ayant agi ainsi.

Vous étiez donc consentant lorsque votre collègue vous filmait puisque vous fixiez l’objectif de la caméra et vous parliez à votre interlocuteur qui vous filmait tout en fixant l’objectif de la caméra.

Nous avons entendu vos explications mais de toute évidence, nous ne pouvons accepter un tel comportement inadapté, déplacé et non professionnel au sein de nos magasins.

Nous ne pouvons accepter le non-respect de notre politique interne en matière de médias sociaux. Nous attendons un comportement exemplaire de la part de nos collaborateurs.

Cette vidéo filmée dans notre magasin et vous mettant en scène ainsi que vos collègues en surface de ventes, pendant votre temps de travail a été diffusée sur Snapchat et a pu être visionnée sans aucun doute par de nombreuses personnes. L’image véhiculée par vos agissements est totalement intolérable.

Nous regrettons en outre, l’image que vous avez donnée, par votre attitude irresponsable, de notre enseigne à l’ensemble des personnes qui ont pu visionner cette vidéo.

Par ailleurs, des investigations concernant vos pointages ont révélé que vous n’avez pas pris de pause en date du 19 avril 2016. Ainsi, l’ensemble des faits qui vous sont reprochés dans ce présent courrier ont eu lieu sur votre temps de travail. (…)’.

M. Y a saisi le conseil de prud’hommes du Havre le 11 mai 2017 en contestation du licenciement ainsi qu’en rappel de salaires et paiement d’indemnités.

Par jugement du 19 décembre 2017, le conseil de prud’hommes, avec le bénéfice de l’exécution provisoire, a :

— requalifié le licenciement pour faute grave de M. Y en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— condamné la société Foot locker France à payer à M. Y :

• indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 6 490,86 euros

• indemnité de licenciement : 486,81 euros

• indemnité de préavis : 2 163,62 euros

• congés payés y afférents : 216,36 euros

• rappel de salaires au titre des 24 heures hebdomadaires minimum : 1 352,26 euros

• dommages et intérêts pour non-respect des jours de repos contractuels : 1 500 euros

— condamné la société Foot locker France à payer à Maître G A au visa de l’article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 la somme de 1 200 euros,

— ordonné la remise des documents de fin de contrat (solde de tout compte, attestation Pôle emploi, certificat de travail, dernier bulletin de paie) corrigés sous astreinte de 10 euros par jour de retard à compter du 15e jour après la notification du jugement, le conseil se réservant la liquidation de l’astreinte,

— ordonné le remboursement à Pôle emploi des indemnités versées par elle dans la limite de six mois,

— dit que le contrat de travail était à durée indéterminée à compter du 21 mai 2014 pour le calcul de l’ancienneté,

— fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à 1 081,81 euros,

— débouté M. Y du surplus de ses demandes et la société Foot locker France de sa demande reconventionnelle et l’a condamnée aux éventuels dépens et frais d’exécution du jugement.

La société Foot locker France a interjeté appel de cette décision le 19 janvier 2018.

Par ordonnance du 14 mars 2019, qui a été confirmée le 13 juin 2019, le président de la chambre sociale et de sécurité sociale chargé de la mise en état a débouté M. Y de sa demande tendant à voir constater la nullité et la caducité de l’appel, a déclaré ses conclusions au fond irrecevables et l’a condamné aux dépens de l’incident.

Par conclusions remises le 10 octobre 2018, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens, la société Foot locker France demande à la cour de :

— infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à verser à M. Y la somme de 6 480,86 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— à titre subsidiaire, juger que le licenciement de M. Y repose sur une cause réelle et sérieuse,

— infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a condamnée à lui verser des sommes au titre des indemnité de licenciement, indemnité de préavis, congés payés afférents, rappel de salaire au titre des 24 heures hebdomadaires, dommages et intérêts au titre du non-respect des jours de repos contractuels et indemnité en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté le surplus des demandes de M. Y,

— condamner M. Y au paiement de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande reconventionnelle et condamner M. Y au paiement de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 12 novembre 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il convient de rappeler que l’intimé dont les conclusions sont irrecevables, est réputé adopter les motifs de la décision de première instance, sans pouvoir se référer à ses conclusions ou pièces déposées devant la juridiction de première instance.

Sur le caractère licite de la preuve

Conformément aux dispositions de l’article L.1232-1 du code du travail, le licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, laquelle implique qu’elle soit objective, établie et exacte et suffisamment pertinente pour justifier la rupture du contrat de travail.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et l’employeur qui l’invoque pour licencier doit en rapporter la preuve.

En l’espèce, pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, le conseil de prud’hommes a retenu que la vidéo surveillance des vestiaires et locaux affectés au repos des salariés n’était pas autorisée comme portant atteinte au respect de sa vie privée, qu’ainsi, la vidéo sur laquelle s’appuie l’employeur pour reprocher à M. Y des propos inadaptés constitue un moyen de preuve obtenu de manière illicite, celle-ci ayant été filmée dans la salle de pause et pendant son temps de pause.

Il résulte néanmoins des débats que les propos et attitudes reprochés à M. Y n’ont à aucun moment été filmés via un système de vidéo-surveillance mis en place par l’employeur puisqu’il est constant qu’il s’agissait d’une vidéo filmée par un collègue par le biais d’un téléphone portable et diffusée via le réseau Snapchat.

Dès lors, l’ensemble des arguments invoqués par le conseil de prud’hommes sont inopérants dans le cadre du présent litige mais la question de la licéité de la preuve est dans le débat.

Il résulte des articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 9 du code civil et 9 du code de procédure civile, que le droit à la preuve peut justifier la production en justice d’éléments extraits d’une vidéo snapchat d’un salarié portant atteinte à sa vie privée, à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi.

En l’espèce, il ressort du visionnage de cette vidéo, tournée sur le lieu de travail, qu’elle n’a pas été prise à l’insu de M. Y, au contraire, celui-ci y participant activement tant par ses gestes que par ses paroles et il est justifié, par la production de la feuille de pointage, que les faits filmés se sont déroulés pendant le temps de travail effectif de M. Y puisqu’il n’a travaillé ce jour-là que six heures et n’a bénéficié d’aucun temps de pause.

Enfin, il ressort de l’attestation de M. Z, directeur régional, qu’il a eu connaissance de cette vidéo lors d’une visite au Havre organisée les 14 et 15 juin 2016, et ce par un employé souhaitant garder l’anonymat.

Alors qu’il n’est pas contesté que cette vidéo a été diffusée via Snapchat, aucun élément ne permet de dire qu’elle aurait été capturée de manière illégale, aussi, il convient de retenir que la production de cette vidéo, tournée sur le lieu et durant les heures de travail, indispensable pour apporter la preuve des faits reprochés à M. Y, est proportionnée au but recherché et est donc licite.

Sur les faits reprochés

Il ressort du visionnage de la vidéo que les faits décrits dans la lettre de licenciement y sont conformes et il convient en conséquence uniquement d’apprécier s’ils constituaient une faute et si celle-ci était de nature à justifier un licenciement pour faute grave.

Dès lors, il est établi l’existence d’une première faute, à savoir celle de se servir de téléphones portables personnels alors que le règlement intérieur ne prévoit qu’une tolérance pour les appels téléphoniques urgents ou importants.

Il résulte par ailleurs du livret d’accueil remis au salarié que, s’il choisit de participer à un réseau social à titre privé, il est personnellement responsable du contenu et toute référence à la société doit être faite de manière responsable. Il y est précisé que la publication et la diffusion de vidéos et images contenant des matériaux, des interviews, des sketches, des scénarios, des produits, des

uniformes, du matériel d’affichage portant sur la société, les fournisseurs, les clients et les employés sont interdites.

Enfin, il est indiqué qu’il est interdit d’utiliser les médias sociaux pour présenter des commentaires, photographies, séquences vidéo ou audio sur la société, les superviseurs, les collaborateurs, les clients ou fournisseurs qui soient malveillants, vulgaires, indécents, obscènes, intimidants ou menaçants.

En l’espèce, il ressort du visionnage que M. Y portait la tenue Foot locker, que les salariés se trouvaient au sein du magasin, certains passages se déroulant au niveau de la caisse, et qu’il y est même filmé la recette du jour du magasin pour appuyer le sens de cette vidéo, à savoir l’absence d’activité ce jour-là.

Or les attitudes et propos de M. Y sur cette vidéo montrent une image peu flatteuse de la société, étant au surplus relevé qu’à un moment M. Y, certes dans une ambiance d’amusement général et sans donner le sentiment de blesser son interlocuteur, s’adresse cependant à lui en lui disant d’aller travailler ‘sale chinois’.

Il est incontestable que ces faits constituent une faute au regard des valeurs ainsi véhiculées et de l’attitude peu professionnelle adoptée par M. Y alors même qu’il était filmé pendant son temps de travail effectif.

Néanmoins, il n’est pas à l’origine de la diffusion de cette vidéo, laquelle est extrêmement courte et se déroule pendant un temps de désoeuvrement des salariés face à l’absence de clientèle.

Aussi, et s’il est certain qu’elle méritait une sanction, il doit néanmoins être relevé que le règlement intérieur prévoit une échelle de sanctions larges, et notamment la possibilité d’une mise à pied disciplinaire.

Dès lors, à défaut de toute sanction ou toute observation antérieures sur le comportement de M. Y, il apparaît que le prononcé d’un licenciement est disproportionné, en ce compris un licenciement pour faute simple.

Il convient en conséquence de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de confirmer le jugement en toutes ses dispositions en ce qui concerne les sommes allouées au titre de la rupture.

Sur la demande de rappel de salaire

Il ressort du jugement déféré qu’il a été accordé un rappel de salaire à M. Y de 2 heures par semaine dans la mesure où son contrat de travail prévoyait une durée de 22 heures hebdomadaires alors que le contrat de travail du salarié à temps partiel doit respecter une durée minimale de travail de 24 heures, et ce, sans que la convention collective applicable n’ait prévu de dispositions particulières pour y déroger.

Si les dispositions transitoires issues de la loi du 14 juin 2013, ayant instauré l’article L. 3123-14-1 du code du travail prévoyant une durée minimale de travail de vingt-quatre heures par semaine pour les salariés à temps partiel, ont été modifiées par la loi du 5 mars 2014 reportant l’entrée en vigueur aux contrats conclus à compter du 1er juillet 2014, force est de constater que le contrat a été conclu en l’espèce le 15 juillet 2014.

Aussi, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a fait droit à la demande de M. Y à hauteur de 1 352,26 euros.

Sur le non-respect des jours de repos contractuellement prévus

Il ressort du jugement déféré qu’au regard des plannings hebdomadaires fournis aux débats, les jours de repos contractuellement prévus n’ont pas été respectés.

Sans contester que M. Y ait pu travailler certains mardis et mercredis alors qu’il était initialement prévu qu’il s’agissait de ses jours de repos, la société Foot locker relève néanmoins qu’il était expressément prévu dans son contrat de travail que, sous réserve de la signature d’un avenant écrit dans le respect des règles légales et conventionnelles, la répartition des horaires pourrait être modifiée dans quatre hypothèses, à savoir nécessité d’effectuer certaines tâches dans des délais courts, absence d’un salarié au moins, accroissement temporaire d’activité ou réorganisation des horaires collectifs de travail.

Aux termes de l’article L. 3123-21 du code du travail, dans sa version applicable au litige, toute modification de la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois est notifiée au salarié sept jours au moins avant la date à laquelle elle doit avoir lieu.

En l’occurrence, force est de constater que les avenants produits par la société Foot locker, non seulement ne respectent pas le délai de sept jours, mais sont parfois signés postérieurement au début de l’avenant.

Néanmoins, ces modifications sont limitées puisqu’elles ne concernent que neuf semaines et, sauf pour trois de ces modifications, elles ont toujours permis à M. Y de bénéficier de son dimanche et de deux jours de la semaine suivis, voire même lui ont permis de bénéficier de trois ou quatre jours de congés de suite.

Aussi, et alors qu’il n’est pas fait état d’un préjudice particulier résultant de ces modifications, il convient d’infirmer le jugement et de le débouter de sa demande.

Sur le remboursement des indemnités Pôle emploi

Conformément à l’article L 1235-4 du code du travail, il convient d’ordonner à la société Foot locker de rembourser à Pôle emploi les indemnités chômage versées à M. Y du jour de son licenciement au jour de la présente décision, dans la limite de six mois.

Sur la remise de documents

Il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a ordonné à la société Foot locker de remettre à M. Y l’ensemble des documents sociaux dûment rectifiés.

Les circonstances de la cause ne justifient cependant pas de prononcer une astreinte.

Sur les dépens et frais irrépétibles

En qualité de partie succombante, il y a lieu de condamner la SAS Foot locker aux entiers dépens, y compris ceux de première instance, de confirmer le jugement en ce qu’il a accordé à Me A la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de la débouter de sa demande formulée en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant contradictoirement,

Infirme le jugement en ce qu’il a accordé à M. B Y des dommages et intérêts pour

non-respect des jours de congés contractuellement prévus et en ce qu’il a ordonné une astreinte pour la remise des documents ;

Statuant à nouveau de ces chefs,

Déboute M. B Y de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect des jours de congés contractuellement prévus ;

Dit n’y avoir lieu à astreinte pour la remise des documents ;

Confirme le jugement pour le surplus, sauf à préciser que le remboursement des indemnités à Pôle emploi s’effectue dans la limite de six mois du jour du licenciement de M. B Y au jour de la présente décision ;

Y ajoutant,

Déboute la SAS Foot locker France de sa demande formulée en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SAS Foot locker France aux entiers dépens.

La greffière La présidente


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