Ce point juridique est utile ?
La version numérisée d’une oeuvre d’art est qualifiable de document administratif, son détenteur (un musée) peut donc être dans l’obligation légale de la communiquer.
Affaire Rodin
Il ressort des appels à projets du ministère de la culture de 2010, 2012 et 2013, dans le cadre desquels ont été scannées les œuvres du musée Rodin, et des réponses adressées par le musée, que les scans n’ont pas été réalisés dans une perspective commerciale mais afin de mieux connaître et de diffuser largement l’œuvre de Rodin. Ces documents ont donc été réalisés afin d’être diffusés à un large public et ne peuvent être regardés comme couverts par le secret des affaires.
La circonstance que le rendu n° 2 ne soit accessible qu’avec l’aide d’un logiciel propriétaire n’est pas de nature à s’opposer à sa communication. Dans ces conditions, le refus opposé aux demandes de M. E doit être annulé.
Les limites du droit de communication
En revanche, un ensemble de données brutes ne peut être considéré comme un document administratif achevé dès lors qu’il n’est qu’une étape dans le traitement des données et ne révèle aucune intention de la part de l’administration, mais constitue seulement le matériau brut nécessaire à la production ultérieure de documents.
Par suite, il ne constitue pas un document achevé au sens et pour l’application des dispositions de l’article L. 311-2 du code des relations entre le public et l’administration. Par suite, les conclusions de M. E tendant à obtenir l’annulation du refus de communiquer les fichiers contenant les rendus n°1 doivent être rejetées.
Concernant les rendus n°s 2 à 5, ces fichiers n’ont pas été réalisés dans le cadre de l’activité commerciale du musée et revêtent le caractère de documents administratifs achevés.
Les circonstances indifférentes
La circonstance qu’un musée perçoive une part substantielle de ses recettes de la commercialisation des reproductions d’œuvres de Rodin, et que la communication des fichiers contenant les scans 3D serait de nature à bouleverser son économie est par elle-même sans influence sur le caractère communicable des documents sollicités.
Les risques de contrefaçons par le requérant sont également sans influence sur le caractère communicable des œuvres. Il incombera au musée de faire appliquer la loi en cas de violation par le requérant du code de la propriété intellectuelle, la seule transmission des fichiers ne pouvant être assimilée à une diffusion de l’œuvre au sens des dispositions de l’article L. 121-2 de ce code.
La communication des documents administratifs
Pour rappel, selon l’article L. 311-1 du code des relations entre le public et l’administration, ” Sous réserve des dispositions des articles L. 311-5 et L. 311-6, les administrations mentionnées à l’article L. 300-2 sont tenues de communiquer les documents administratifs qu’elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent livre “.
L’article L. 311-2 du même code dispose que ” Le droit à communication ne s’applique qu’à des documents achevés. ” et l’article L. 311-6 que ” Ne sont communicables qu’à l’intéressé les documents administratifs :/ 1° Dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée, au secret médical et au secret des affaires, lequel comprend le secret des procédés, des informations économiques et financières et des stratégies commerciales ou industrielles et est apprécié en tenant compte, le cas échéant, du fait que la mission de service public de l’administration mentionnée au premier alinéa de l’article L. 300-2 est soumise à la concurrence ; “
Vu la procédure suivante :
Par une requête et quatre mémoires complémentaires, enregistrés le 9 décembre 2019, le 24 mai 2021, le 20 mars 2022, le 19 avril 2022 et le 13 mars 2023, M. B E, représenté par Me Fiitzjean O Cobhthaigh, demande au tribunal :
1°) d’annuler la décision du 11 décembre 2018 par laquelle la directrice du musée C a refusé de lui communiquer les documents suivants :
1 – les fichiers contenant la version numérisée tridimensionnelle (” scan 3D “) du ” Penseur ” de M. F C, y compris la version utilisée pour imprimer les copies du Penseur dont la promotion est assurée sur l’adresse suivante : https://boutique.musee-rodin.fr/en/sculpture-reproductions/380-the-thinker-miniature.html, de même que tout autre version de meilleure qualité ;
2 – la liste de l’ensemble des fichiers, actuellement en la possession du musée C, contenant des versions numérisées tridimensionnelles des sculptures composant les collections du musée C ou d’autres collections (les jeux de scan 3D en sa possession), ainsi que lesdits fichiers ;
3 – l’ensemble des courriels, échangés, envoyés ou reçus par le musée C, un de ses employés ou un des membres de son équipe dirigeante, ayant pour objet, traitant ou mentionnant les précédentes demandes de M. E ;
4 – l’ensemble des notes internes, analyses, rapports, études, lignes directrices, directives, échanges de courriels ou tout autre document relatif à la politique du musée C à l’égard des fichiers contenant des versions numérisées tridimensionnelles d’une sculpture composant les collections du musée C ou d’autres collections, en particulier la politique du musée concernant l’accessibilité à ces données ;
5 – l’ensemble des accords, contrats, conventions, traités liant le musée C et le Baltimore Museum of Art, en particulier, ceux ayant pour objet, traitant ou mentionnant les fichiers contenant la version numérisée tridimensionnelle (scan 3D) du ” Penseur ” de M. F C, ou de tout autre sculpture ;
6 – tout document démontrant que le musée C a obtenu des revenus de l’utilisation des fichiers contenant la version numérisée tridimensionnelle (scan 3D) du ” Penseur ” de M. F C à des fins de fabrication de répliques ;
7 – tout document démontrant que le musée C a obtenu des revenus de licences octroyées à des tiers à propos de l’utilisation de n’importe lequel des fichiers contenant des versions numérisées tridimensionnelles des sculptures composant les collections du musée C ou d’autres collections ;
8 – en particulier, pour la période s’étendant du 1er janvier 2014 à la réception de la demande : l’ensemble des correspondances entre le musée C et le Baltimore Museum of Art, l’ensemble des courriels internes, des notes internes, analyses, rapports, lignes directrices ou tout autre document relatif à l’impression en trois dimension et des correspondances, échangés, envoyés ou reçus entre le musée C, un de ses employés ou un des membres de son équipe dirigeante, d’une part, et le ministère de la culture, d’autre part, ayant pour objet, traitant ou mentionnant l’impression tridimensionnelle, la numérisation tridimensionnelle ou le Baltimore Museum of Art ;
9 – en particulier, pour la période s’étendant du 1er janvier 2018 à la réception de la présente demande, l’ensemble des correspondances échangées, envoyées ou reçues entre le musée C et M. Olivier Japiot, conseiller d’Etat membre du Conseil supérieur de la
propriété
> littéraire et artistique ;
2°) d’enjoindre au musée C de communiquer les documents administratifs sollicités, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la lecture de la décision à intervenir ;
3°) à titre subsidiaire, de diligenter une mesure d’instruction ou de prescrire une mesure d’enquête sur le fondement de l’article R. 623-1 du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge du musée C une somme de 8 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. E soutient que :
– la décision attaquée n’est pas motivée en droit ;
– les documents dont il demande communication existent et sont communicables.
Par trois mémoires en défense, enregistrés le 5 mars 2021, le 18 mars 2022 et le
20 février 2023, le musée C, représenté par Me Crespelle, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. E une somme de 15 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
– les demandes de M. E sont imprécises ;
– il a déjà communiqué l’ensemble des documents en sa possession qui sont communicables ;
– la communication des fichiers contenant les versions numérisées des oeuvres remettrait en cause son modèle économique et irait à l’encontre de sa mission d’ayant-droit moral de l’artiste.
Par un mémoire enregistré le 27 janvier 2023, la ministre de la culture soutient avoir transmis les documents dont elle disposait à M. E dans le cadre d’une demande de communication de pièces et précise n’avoir rien à ajouter.
Par une intervention, enregistrée le 24 mai 2021, l’association Wikimédia France, l’association Communia International Association on the Public Domain, dite ” Communia “, et l’association La Quadrature du Net, demandent que le tribunal fasse droit à la requête
n° 1926348.
Elles soutiennent que le refus de communication des documents est entaché d’erreur de droit et d’erreur manifeste d’appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code de la <
propriété
> <
intellectuelle
> ;
– le code des relations entre le public et l’administration ;
– le code du commerce ;
– le code général de la <
propriété
> des personnes publiques ;
– le décret n° 93-163 du 2 février 1993 relatif au musée C ;
– le conseil n° 20190026 adressé par la commission d’accès aux documents administratifs au musée C le 7 février 2019 et l’avis n° 20192300 du 6 juin 2019 ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique, tenue en présence de Mme Sueur, greffière d’audience :
– le rapport de M. A,
– les conclusions de M. Thulard, rapporteur public,
– et les observations de Me Fiitzjean O Cobhthaigh représentant M. E et de Me Alamargot pour le musée C.
Une note en délibéré, enregistrée le 6 avril 2023, a été présentée pour M. E par Me Fiitzjean O Cobhthaigh.
Considérant ce qui suit :
1. M. B E, citoyen des Etats-Unis d’Amérique, a adressé le
15 novembre 2018 au musée C une demande de communication portant principalement sur les fichiers contenant la version numérisée tridimensionnelle (” scan 3D “) du Penseur de M. F C, ainsi qu’un ensemble de documents relatifs à la politique du musée au regard de ces scans. Cette demande a été rejetée par une décision du 11 décembre 2018.
Le secrétaire général du musée C a saisi la commission d’accès aux documents administratifs (CADA) d’une demande de conseil au sujet des ” scans 3D “. Par un conseil
n° 20190026 adressé le 7 février 2019, la CADA a conclu au caractère communicable de ces documents. M. E a saisi la CADA le 8 février 2019 du refus opposé par le musée C. Par un avis du 6 juin 2019, la CADA a conclu au caractère communicable des documents à l’exception de ceux pour lesquels la demande était sans objet et de ceux ayant un caractère préparatoire. M. E doit être regardé comme demandant l’annulation du refus implicite de communication des documents sollicités.
Sur la recevabilité de l’intervention des associations Wikimédia France, Communia, et La Quadrature du Net :
2. Les associations Wikimédia France, Communia et La Quadrature du Net, qui ont pour objet le partage et la promotion de la connaissance sous format ouvert et l’enrichissement du domaine public, ont intérêt à la communication des documents sollicités. Leur intervention doit être admise.
Sur les conclusions à fin d’annulation :
3. Les demandes de M. E sont suffisamment précises pour être examinées. La fin de non-recevoir opposée par le musée C doit donc être écartée.
En ce qui concerne le défaut de motivation :
4. La décision du 11 décembre 2018 comprend l’exposé des considérations de droit et de fait sur lesquelles s’est fondé le musée C pour rejeter les demandes de M. E. Par suite, le moyen tiré de l’insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté.
En qui concerne le cadre juridique du litige :
5. Selon l’article L. 311-1 du code des relations entre le public et l’administration, ” Sous réserve des dispositions des articles L. 311-5 et L. 311-6, les administrations mentionnées à l’article L. 300-2 sont tenues de communiquer les documents administratifs qu’elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent livre “. L’article L. 311-2 du même code dispose que ” Le droit à communication ne s’applique qu’à des documents achevés. ” et l’article L. 311-6 que ” Ne sont communicables qu’à l’intéressé les documents administratifs :/ 1° Dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée, au secret médical et au secret des affaires, lequel comprend le secret des procédés, des informations économiques et financières et des stratégies commerciales ou industrielles et est apprécié en tenant compte, le cas échéant, du fait que la mission de service public de l’administration mentionnée au premier alinéa de l’article
L. 300-2 est soumise à la concurrence ; “
6. Le musée C fait valoir qu’il tire, en application de l’article 12 du décret n° 93-163, une part substantielle de ses recettes de la commercialisation des reproductions d’œuvres de C et que la communication des fichiers contenant les scans 3D serait de nature à bouleverser son économie. Cependant cette circonstance est par elle-même sans influence sur le caractère communicable des documents sollicités.
7. Les risques de contrefaçons par le requérant sont également sans influence sur le caractère communicable des œuvres. Il incombera au musée de faire appliquer la loi en cas de violation par le requérant du code de la <
propriété
> <
intellectuelle
, la seule transmission des fichiers ne pouvant être assimilée à une diffusion de l’œuvre au sens des dispositions de l’article L. 121-2 de ce code.
En ce qui concerne les différents fichiers dont la communication est demandée :
8. Le musée C soutient qu’à la suite des campagnes de numérisation menées à compter de 2008 par deux prestataires (7DWorks et Digiscan), cinq types de rendus lui ont été remis pour certaines des œuvres de C. Le rendu n°1 est constitué de données brutes 7DWorks en format texte alors que les rendus 2 à 5 sont constitués des documents générés à partir de ces données. Le rendu n° 2 est constitué de la visualisation de la numérisation qui ne peut être utilisée qu’avec le logiciel 7depro de 7DWorks, le rendu n° 3 est constitué de documents en format Flash générés par 7 D Work, le rendu n° 4 est constitué de documents en format STL générés par Digiscan et le rendu n° 5 est constitué de documents en format VRML générés par Digiscan, qui seraient en cours de traitement afin de faire apparaître sur chaque document la mention ” Reproduction ” et qui ne seraient pas exploitables en raison de problèmes de compatibilité avec le système d’exploitation Windows 10.
9. Le musée soutient ainsi disposer :
– dans le cadre de la campagne de numérisations menée en 2010 : des rendus n°s 2 et 3 du Baiser en Marbre et de la Porte de l’Enfer en plâtre, des rendus 1, 2, 3 et 5 du Sommeil en terre cuite, des rendus n°s 4 et 5 du Sommeil en plâtre et du Baiser en terre cuite ;
– dans le cadre de la campagne de numérisations menée en 2012 : des rendus n°s 1 et 2 du Baiser en plâtre et d’éléments de la Porte de l’Enfer, en plâtre ; s’agissant du Sommeil en terre cuite, plâtre et marbre, il soutient, sans être contesté, que cette commande concernait une publication web en format flash, obsolète depuis la disparition du logiciel Flash Player au
1er janvier 2021, et que la conversion vers le format html5 n’a pas été engagée, seule une version antérieure en terre cuite et plâtre étant en ligne ;
– dans le cadre de la campagne de numérisations menée en 2013 : des rendus n°s1 et 2 de pièces diverses de la Porte de l’Enfer, de fragments du Penseur moyen modèle réalisé pour la Porte de l’enfer en terre cuite, du Penseur moyen modèle en plâtre patiné.
Par ailleurs, aucun fichier n’existerait concernant une numérisation du baiser en plâtre.
10. Concernant le rendu n° 1, il est constitué, ainsi qu’il a été mentionné,
d’un ensemble de données brutes, intitulé ” nuage de points “. Si le musée C soutient que le rendu n°1 du Penseur est inachevé en raison de sa qualité médiocre, le caractère lacunaire d’un document n’est toutefois pas de nature à le faire considérer comme inachevé au sens de l’article L. 300-2 du code des relations entre le public et l’administration. De même, si l’absence de toute mention ” reproduction “, préconisée par la charte des bonnes pratiques dans le domaine de la modélisation et de l’impression en 3D dans le domaine de l’art, révèle le caractère incomplet du document, cette charte a en tout état de cause été signée le 9 mars 2022,
soit environ 10 ans après la réalisation dudit document et ne saurait être invoquée à titre rétroactif, le requérant demandant la communication d’un document administration dans l’état où il était lors de sa réalisation.
11. Cependant un ensemble de données brutes ne peut être considéré comme un document administratif achevé dès lors qu’il n’est qu’une étape dans le traitement des données et ne révèle aucune intention de la part de l’administration, mais constitue seulement le matériau brut nécessaire à la production ultérieure de documents. Par suite, il ne constitue pas un document achevé au sens et pour l’application des dispositions de l’article L. 311-2 du code des relations entre le public et l’administration. Par suite, les conclusions de M. E tendant à obtenir l’annulation du refus de communiquer les fichiers contenant les rendus n°1 doivent être rejetées.
12. Concernant les rendus n°s 2 à 5, ces fichiers n’ont, ainsi qu’il a été rappelé, pas été réalisés dans le cadre de l’activité commerciale du musée et revêtent le caractère de documents administratifs achevés.
13. Le musée C fait valoir que la transmission des fichiers en cause porterait atteinte au secret des affaires, protégé par l’article L. 151-1 du code du commerce. Cependant il ressort des appels à projets du ministère de la culture de 2010, 2012 et 2013, dans le cadre desquels ont été scannées les œuvres du musée C, et des réponses adressées par le musée, que les scans n’ont pas été réalisés dans une perspective commerciale mais afin de mieux connaître et de diffuser largement l’œuvre de C. Ces documents ont donc été réalisés afin d’être diffusés à un large public et ne peuvent être regardés comme couverts par le secret des affaires.
14. La circonstance que le rendu n° 2 ne soit accessible qu’avec l’aide d’un logiciel propriétaire n’est pas de nature à s’opposer à sa communication. Dans ces conditions, le refus opposé aux demandes de M. E doit être annulé.
15. Le musée C soutient qu’il a mis en ligne les rendus n° 3 et 4 dont il dispose, pour le Baiser en marbre et le Sommeil en terre cuite. Si. M. E affirme que les fichiers ” STL ” mis à disposition sur le site du musée C sont d’une qualité médiocre et ont été volontairement altérés, il n’établit pas l’existence de fichiers d’une qualité supérieure.
En revanche, il est constant que ces fichiers ont été modifiés en cours d’instance pour y porter l’inscription ” Reproduction numérique – musée C “. Or, le requérant est fondé à demander la communication des documents dans leur version antérieure à cet ajout. Les refus opposés à M. E doivent donc être annulés dans cette seule mesure.
16. Pour la même raison, le refus de communication opposé à la transmission des rendus n° 5 au motif de l’absence de la mention reproduction doit être annulé, à la condition que le musée soit en mesure d’en vérifier le contenu à l’aide d’un système d’exploitation courant.
17. En revanche, le musée C soutient finalement qu’il ressort de ses recherches qu’il n’a pas procédé à la digitalisation des ” Trois ombres ” en raison de difficultés techniques. Dans ces conditions, aucun fichier ne peut en être communiqué.
En ce qui concerne l’ensemble des courriels, échangés, envoyés ou reçus par le musée C, un de ses employés ou un des membres de son équipe dirigeante, ayant pour objet, traitant ou mentionnant les précédentes demandes de M. E :
18. Ces documents sont communicables, sous réserve du secret entourant les communications entre le musée et son avocat.
En ce qui concerne les autres documents sollicités :
19. Le musée C ayant communiqué en cours d’instance la liste des versions numérisées en sa possession, il n’y a pas lieu de statuer sur ce point.
20. Le musée C soutient qu’il n’a pas eu de politique concernant les numérisations, n’a pas passé pas d’accord avec le Baltimore Museum of art et que les versions numérisées tridimensionnelles n’ont pas été réutilisées par des tiers ni par le musée à des fins de commercialisation de réplique et n’ont par suite pas entraîné la réalisation de documents. Les conclusions à fin d’annulation du refus de communiquer ces documents doivent donc être rejetées.
21. Concernant les revenus que le musée C tirerait de l’exploitation des fichiers dont la communication est demandée, aucun élément ne permet d’en établir l’existence. Les conclusions à fin d’annulation du refus de communication de ces documents doivent par suite être rejetées.
22. En ce qui concerne la politique de numérisation, M. E a obtenu en cours d’instance du ministère de la culture les informations relatives au programme national de numérisation dans le cadre duquel ont été réalisées les numérisations des œuvres du musée, documents dont le musée C soutient qu’il les avait perdus. Dès lors, il n’y a pas lieu de statuer sur la communication de ces documents.
23. Par ailleurs, le musée a transmis un courriel échangé avec M. G D au sujet des numérisations tridimensionnelles, dont il soutient qu’il s’agit du seul existant. Par suite, il n’y a pas lieu de statuer sur la communication de ces documents.
Sur les conclusions à fin d’expertise :
24. Il n’apparaît pas nécessaire de diligenter une expertise pour se prononcer sur l’existence et la communicabilité des documents demandés.
Sur les conclusions à fin d’injonction :
25. Il y a lieu d’enjoindre au musée C de communiquer à M. E les documents mentionnés aux points 14, 15 et 16 dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement, sans qu’il soit besoin d’assortir cette injonction d’une astreinte.
Sur les frais irrépétibles :
26. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge du musée C, en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le requérant et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Les interventions de l’association Wikimédia France, de l’association Communia International Association on the Public Domain, dite ” Communia “, et de l’association La Quadrature du Net sont admises.
Article 2 : Il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes de M. E portant sur la liste des fichiers numérisées en sa possession (point 2 de la demande), sur l’ensemble des notes internes, analyses, rapports, études, lignes directrices, directives, échanges de courriels ou tout autre document relatif à la politique du musée C à l’égard des fichiers contenant des versions numérisées tridimensionnelles d’une sculpture composant les collections du musée C ou d’autres collections, en particulier la politique du musée concernant l’accessibilité à ces données (point 4 de la demande), sur les correspondances échangées, envoyées ou reçues entre le musée C et M. G D (point 9 de la demande). Le refus de communiquer les courriels, échangés, envoyés ou reçus par le musée C, un de ses employés ou un des membres de son équipe dirigeante, ayant pour objet, traitant ou mentionnant les précédentes demandes de M. E est également annulé.
Article 3 : Le refus opposé par le musée C à la demande de communication des fichiers numériques comprenant les rendus n° 2 du Baiser (marbre et plâtre), la Porte de l’Enfer (plâtre), du Sommeil (terre cuite), du Penseur moyen modèle (terre cuite et plâtre patiné), ainsi que les rendus n° 3 des mêmes œuvres dans les conditions mentionnées au point 14 et, dans les mêmes conditions, que les rendus n°4 du Sommeil (plâtre) et du Baiser (terre cuite), et que les rendus n° 5 du Sommeil (terre cuite et plâtre), du Baiser (terre cuite) est annulé.
Article 4 : Il est enjoint au musée C de communiquer à M. E ces documents dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement. Le musée C communiquera au greffe du tribunal copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter le présent jugement.
Article 5 : Le musée C versera à M. E une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 7 : Le présent jugement sera notifié à M. B E, à l’association Wikimédia France, à l’association Communia International Association on the Public Domain, dite ” Communia “, à l’association La Quadrature du Net et au musée C.
Copie en sera adressée à la ministre de la culture.
Délibéré après l’audience du 6 avril 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Riou, présidente,
Mme Kanté, première conseillère,
M. Coz, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 avril 2023.
Le rapporteur,
Y. A
La présidente,
C. Riou
La greffière,
L. Sueur
La République mande et ordonne à la ministre de la culture en ce qui la concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.