Validité des Clauses du Contrat d’architecte

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Validité des Clauses du Contrat d’architecte
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La SARL Architecture [I] [B] a été engagée par la société SCEA Terre Patrimoines pour une mission de maîtrise d’œuvre concernant la construction d’un local de stockage. Après avoir réalisé plusieurs étapes de la mission, l’architecte a émis des factures pour le paiement de ses honoraires, mais la société SCEA Terre Patrimoines a refusé de régler ces factures, arguant que le dossier de consultation des entreprises était incomplet. En raison de ce refus, l’architecte a assigné la société en justice pour obtenir le paiement de ses honoraires. Le tribunal d’instance a déclaré la demande recevable mais a débouté l’architecte de ses demandes, condamnant même ce dernier à payer des frais à la société SCEA Terre Patrimoines. L’architecte a fait appel de ce jugement, demandant la confirmation de la recevabilité de sa demande et le paiement de ses honoraires. De son côté, la société SCEA Terre Patrimoines a contesté la recevabilité de l’action de l’architecte, arguant de l’absence de saisine préalable du conseil régional de l’ordre des architectes. Les deux parties ont formulé des demandes et des conclusions contradictoires devant la cour d’appel.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

19 septembre 2024
Cour d’appel de Montpellier
RG n°
20/00270
ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 19 SEPTEMBRE 2024

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 20/00270 – N° Portalis DBVK-V-B7E-OPJB

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 09 DECEMBRE 2019

TRIBUNAL D’INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 1118000620

APPELANTE :

SARL ARCHITECTURE [I] [B] inscrite au RCS de Toulouse sous le n°451.520.316, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Jérémy BALZARINI de la SCP ADONNE AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant substitué par Me Sylvie ATTAL de la SELAS D’AVOCATS ATCM, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant

INTIMEE :

SCEA TERRE PATRIMOINES prise en la personne de ses représentants légaux en exercice dont le siège social est situé

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me Yann LE TARGAT de VINCKEL – ARMANDET – LE TARGAT – BARAT BAIER, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 21 Mai 2024

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 juin 2024,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Thierry CARLIER, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Gilles SAINATI, président de chambre

M. Thierry CARLIER, conseiller

M. Fabrice DURAND, conseiller

Greffier lors des débats : Mme Hélène ALBESA

ARRET :

– contradictoire ;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Hélène ALBESA, greffier.

* * * *

EXPOSE DU LITIGE :

Par contrat du 19 janvier 2016, la SARL Architecture [I] [B] s’est vue confier par la société SCEA Terre Patrimoines une mission de maîtrise d”uvre portant sur la construction d’un local de stockage sis [Adresse 5] à [Localité 4].

L’architecte a réalisé dans le cadre de son contrat les missions suivantes :

– dépôt de permis de construire.

– projet de conception générale.

– consultation des entreprises et projet de l’opération.

Par un premier courrier du 22 septembre 2016, la SARL Architecture [I] [B] à adressé à la société SCEA Terre Patrimoines une facture visant à régler 100 % de la phase “avant projet” et 50 % de la “phase pro”.

Par un second courrier recommandé du 30 octobre 2017, l’architecte a sollicité le paiement du solde de sa facture d’honoraires n° 5-06917 d’un montant de 2 688 euros TTC correspondant au paiement des 100 % de la “phase pro”.

Par courrier recommandé du 20 décembre 2017, le maître d’ouvrage à fait connaître son refus de régler lesdites factures au motif que le dossier de consultation des entreprises n’aurait été réalisé que de manière incomplète.

Compte tenu de la situation de blocage, l’architecte a pris attache, en vain, avec son assureur protection juridique la MAF.

Par acte d’huissier en date du 25 juillet 2018, la SARL Architecture [I] [B] a assigné la société SCEA Terre Patrimoines devant le tribunal d’instance de Narbonne aux fins de la voir :

– condamner au paiement de 5 376 euros TTC correspondant au solde de 2 688 euros sur la facture n°4 et à la somme de 2 688 euros TTC sur la facture n°5,

– dire que la somme de 5 375 euros portera intérêts à compter de la mise en demeure réalisée par la mutuelle des architectes français en date du 29 janvier 2018 et que les intérêts seront capitalisés en application de l’article 1343-1 du code civil,

– condamner à régler à la SARL Architecture [I] [B] la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance et d’ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

Par jugement contradictoire du 09 décembre 2019, le tribunal d’instance de Narbonne a :

– déclaré la demande de la SARLU Architecture [I] [B] tendant au recouvrement de ses honoraires recevable ;

– débouté la SARLU Architecture [I] [B] de l’ensemble de ses demandes ;

– condamné la SARLU Architecture [I] [B] de l’ensemble à payer à la société SCEA Terres Patrimoine la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la SARLU Architecture [I] [B] aux entiers dépens.

Par déclaration d’appel enregistrée au greffe en date du 15 janvier 2020, la SARL Architecture [I] [B] a formé appel du jugement.

Par conclusions enregistrées au greffe en date du 26 août 2020, la SARLU Architecture [I] [B] demande à la cour de :

– confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré recevable la société d’Architecture [I] [B] en ses demandes ;

En conséquence,

– débouter la société Terre et Patrimoines de sa demande visant à voir prononcer l’irrecevabilité des demandes de la société Architecture [I] [B] ;

– débouter la société Terre et Patrimoines de l’intégralité de ses contestations ;

– réformer le jugement en date du 9 décembre 2019 en ce qu’il a rejeté la demande en paiement de la société d’Architecture [I] [B] ;

– condamner la société Terre et Patrimoines à régler à la société Architecture [I] [B] la somme de 5 376 euros TTC correspondant au solde de 2 688 euros sur la facture n° 4 et à la somme de 2 688 euros TTC sur la facture n° 5 ;

– dire que cette somme de 5 376 euros TTC portera intérêts à compter de la mise en demeure réalisée par la Mutuelle des Architectes Français du 29 janvier 2018 et que les intérêts seront capitalisés en application de l’article 1343-1 du code civil ;

– condamner la société Terre et Patrimoines à régler à la société Architecture [I] [B] la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de l’instance.

Par conclusions enregistrées au greffe en date du 17 novembre 2020, la société Terre Patrimoines demande à la cour de :

– infirmer le jugement du 9 décembre 2019 en ce qu’il n’a pas déclaré irrecevable la SARLU Architecture [I] [B] en son action et en ses demandes en l’absence de saisine préalable pour avis du conseil régional de l’ordre des architectes ;

– en conséquence, déclarer irrecevable la SARLU Architecture [I] [B] en son action et en ses demandes en l’absence de saisine préalable pour avis du conseil régional de l’ordre des architectes ;

– en conséquence, déclarer irrecevable l’appel et les demandes formées par la SARLU Architecture [I] [B] à l’encontre de la SARL Terres Patrimoines ;

Subsidiairement :

– confirmer le jugement en date du 9 décembre 2019 en ce qu’il a rejeté, au fond, les demandes de la SARLU Architecture [I] [B] à l’encontre de la société Terre Patrimoines ;

– confirmer le jugement en date du 9 décembre 2019 en ce qu’il a condamné la SARLU Architecture [I] [B] à avoir à verser à la société Terres Patrimoines, une somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance ;

Statuant à nouveau :

– déclarer irrecevable la SARLU Architecture [I] [B] en son action et en ses demandes en l’absence de saisine préalable pour avis du conseil régional de l’ordre des architectes ;

Subsidiairement :

– constater que la SARLU Architecture [I] [B] n’a pas respecté le mode d’échelonnement des versements contractuellement convenus entre les parties ;

– constater que la SARLU Architecture [I] [B] a facturé, de manière anticipée et contraire, au contrat d’architecte ses prestations ;

– constater que la SARLU Architecture [I] [B] n’a pas rempli, de façon complète, la phase “consultation des entreprises” ;

En conséquence,

– rejeter l’ensemble des demandes, fins et conclusions présentées par la SARLU Architecture [I] [B] en ce qu’elles sont injustifiées en droit et en fait ;

– condamner la SARLU Architecture [I] [B] à avoir à verser à la société Terre Patrimoines une somme de 800 euros au titre de ses frais irrépétibles en première instance et une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en appel ;

– condamner la SARLU Architecture [I] [B] aux entiers dépens, en ce compris les dépens de première instance et les dépens d’appel ;

MOTIFS DE L’ARRÊT :

En l’espèce, le contrat d’architecte versé aux débats comprend deux parties :

– une partie 1 : cahier des clauses particulières

– une partie 2 : cahier des clauses générales

Le cahier des clauses particulières mentionne en bas de chaque page que le contrat d’architecte pour travaux neufs est celui en vigueur au 1er juillet 2011.

Par ailleurs, le préambule du contrat d’architecte ‘partie 1″ signé le 19 janvier 2016 par l’architecte et le maître de l’ouvrage stipule expressément ‘Le contrat qui lie le maître de l’ouvrage et l’architecte est constitué par le présent ‘ Cahier des Clauses Particulières ‘ (CCP), par le ‘ Cahier des Clauses Générales ‘ et par l’Annexe Financière ( AF) annexés du… et dont les parties déclarent avoir pris connaissance.Ces trois documents sont complémentaires et indissociables’.

D’une part, si l’architecte fait valoir que les conditions générales n’ont pas été signées par les contractants, cette circonstance est indifférente, les parties ayant déclaré dans le préambule en avoir pris connaissance, ce document étant en outre complémentaire et indissociable du contrat.

D’autre part, contrairement à ce qu’a retenu le tribunal, il ressort explicitement du cahier des clauses particulières et du cahier des clauses générales que les parties ont entendu régir leurs relations contractuelles conformément aux dispositions du 1er juillet 2011 qui sont rentrées dans le champ contractuel, étant observé que la SARL Architecture [I] [B], en sa qualité de professionnelle, ne pouvait ignorer, à l’inverse de la SCEA Terre Patrimoines, la mise à jour du cahier des clauses générales intervenue le 14 janvier 2014, soit deux ans avant le contrat litigieux .

Il lui appartenait donc de soumettre le contrat proposé à sa cliente le 19 janvier 2016 aux nouvelles dispositions du cahier des clauses générales, ce qu’elle n’a pas fait.

Aux termes de l’article G 10 ‘Litiges’ du cahier des clauses générales en vigueur au 1er juillet 2011 ‘ En cas de litige portant sur le respect des clauses du présent contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le conseil Régional de l’Ordre des architectes dont relève l’architecte, avant toute procédure judiciaire, sauf conservatoire.

Cette saisine intervient sur l’initiative de la partie la plus diligente’.

En l’espèce, il n’est pas contesté qu’aucune des parties n’a saisi pour avis le conseil régional de l’ordre des architectes.

Il est constant que le défaut de mise en oeuvre de la clause instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge constitue une fin de non-recevoir.

Par conséquent, les demandes formées par la SARL Architecture [I] [B] seront déclarées irrecevables, le jugement étant infirmé en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevables les demandes formées par la SARL Architecture [I] [B] ;

Condamne la SARL Architecture [I] [B] à payer à la SCEA Terre Patrimoines la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, pour ses frais engagés en première instance et en appel ;

Condamne la SARL Architecture [I] [B] aux entiers dépens de première instance et d’appel.

le greffier le président


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