Validité de la clause résolutoire du contrat de location de site internet

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Validité de la clause résolutoire du contrat de location de site internet
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En l’absence de dysfonctionnements d’un site internet et en l’absence de paiement de ses loyers par le locataire, la clause résolutoire produit ses effets.

Le contrat de location de site internet peut prévoir une clause qui stipule que le contrat peut être résilié de plein droit par le loueur, sans aucune formalité judiciaire, 8 jours après une mise en demeure restée infructueuse dans le cas notamment de non paiement à échéance d’un seul terme de loyer.

L’article 1171 du code civil dispose que “Dans un contrat d’adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.

L’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix à la prestation.”

Résumé de l’affaire : Le 18 février 2020, Locam a signé un contrat de location de site web avec la SARL Lili et Dom, prévoyant 48 loyers mensuels de 150 euros HT pour financer un site web développé par Inleed. Le site a été mis en ligne le 4 février 2021. En raison de non-paiement de plusieurs loyers, Locam a mis en demeure Lili et Dom le 23 janvier 2022, puis a résilié le contrat et demandé une injonction de payer. Le tribunal de commerce de Reims a ordonné le 14 mars 2022 à Lili et Dom de verser 7 200 euros, plus une clause pénale de 720 euros et des intérêts. Lili et Dom a formé opposition le 14 avril 2022. Le 11 avril 2023, le tribunal a déclaré l’opposition mal fondée, annulé l’injonction de payer, et condamné Lili et Dom à payer 7 200 euros, 720 euros de clause pénale, 1 500 euros pour frais, et a rappelé l’exécution provisoire. Lili et Dom a interjeté appel le 10 mai 2024, contestant la validité de la résiliation et la clause résolutoire, arguant d’un déséquilibre contractuel. Locam a demandé la confirmation du jugement et a soutenu que Lili et Dom n’était pas un consommateur au sens du code de la consommation. L’affaire a été renvoyée pour plaidoirie le 24 juin 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

17 septembre 2024
Cour d’appel de Reims
RG n°
23/00787
ARRET N°

du 17 septembre 2024

N° RG 23/00787 – N° Portalis DBVQ-V-B7H-FKSF

S.A.R.L. LILI ET DOM

c/

S.A.S. LOCAM

Formule exécutoire le :

à :

la SCP DELVINCOURT – CAULIER-RICHARD – CASTELLO AVOCATS ASSOCIES

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 17 SEPTEMBRE 2024

APPELANTE :

d’un jugement rendu le 11 avril 2023 par le tribunal de commerce de REIMS

La société Lili et Dom, SARL immatriculée au registre de commerce et des sociétés de REIMS sous le numéro 753 728 708, dont le siège social est situé [Adresse 1] à [Localité 3], agissant poursuites et diligences par son dirigeant domicilié ès qualité audit siège,

Représentée par Me Vincent NICOLAS, avocat au barreau de REIMS

INTIMEE :

La société LOCAM – LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS, société par actions simplifiée au capital de 11 520 000 €, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de SAINT ÉTIENNE sous le numéro B 310 880 315, dont le siège est situé [Adresse 2] à [Localité 4], agissant poursuites et diligences par son dirigeant domicilié ès qualités audit siège,

Représentée par Me Mélanie CAULIER-RICHARD de la SCP DELVINCOURT – CAULIER-RICHARD – CASTELLO AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS, avocat postulant, et Me Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI Conseil & Défense, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Christina DIAS DA SILVA, présidente de chambre

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre

Madame Sandrine PILON, conseillère

GREFFIER :

Madame Jocelyne DRAPIER, greffière lors des débats

Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffière lors de la mise à disposition

DEBATS :

A l’audience publique du 24 juin 2024, où l’affaire a été mise en délibéré au 17 septembre 2024

ARRET :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 17 septembre 2024 et signé par Madame Christina DIAS DA SILVA, présidente de chambre, et Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Le 18 février 2020, la société Locam a conclu avec la SARL Lili et Dom un contrat de location de site web prévoyant le règlement de 48 loyers mensuels de 150 euros HT afin de financer le site web commandé auprès de la société Inleed.

Le site web a été livré, installé et mis en ligne à compter du 4 février 2021.

Invoquant le non paiement de plusieurs échéances, la société Locam a, le 23 janvier 2022, mis en demeure la société Lili et Dom de les régulariser puis a pris acte de la résiliation de plein droit du contrat. Elle a ensuite déposé une requête aux fins d’injonction de payer devant le président du tribunal de commerce de Reims qui y a fait droit par décision du 14 mars 2022, ordonnant à la société Lili et Dom de lui verser la somme de 7 200 euros outre la clause pénale de 720 euros et les intérêts légaux.

Le 14 avril 2022, la société Lili et Dom a formé opposition à l’ordonnance qui lui avait été signifiée le 7 avril précédent.

Par jugement du 11 avril 2023, le tribunal de commerce de Reims a :

– reçu la société Lili et Dom en son opposition et déclaré celle-ci mal fondée,

– mis à néant l’ordonnance d’injonction de payer,

– débouté la société Lili et Dom de toutes ses demandes,

– condamné la société Lili et Dom à régler à la société Locam la somme principale de 7 200 euros outre 720 euros au titre de la clause pénale avec intérêts au taux légal et autres accessoires de droit à compter de la mise en demeure du 23 janvier 2022

– condamné la société Lili et Dom à régler à la société Locam la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

– rappelé que l’exécution provisoire est de droit.

Par déclaration du 10 mai 2024, la société Lili et Dom a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions communiquées par voie électronique le 27 juillet 2023, elle demande à la cour de :

– infirmer le jugement,

– statuant à nouveau,

– sur la forme

– juger le défaut de fondement de droit et de fait valablement recevable à l’appui de la prétention de la société Locam,

– juger le manque de preuve rapportée au soutien des prétentions de la société Locam,

– juger mal fondée la demande en justice de la société Locam et la débouter de toutes ses demandes,

– sur le fond

– juger le caractère abusif de la clause résolutoire,

– juger non écrite la clause résolutoire,

– juger qu’il n’y a pas eu de résiliation valable par la société Locam,

– juger l’exécution du contrat par la société Locam,

– prononcer la résolution du contrat purement et simplement,

– débouter la société Locam de toutes autres demandes,

– condamner la société Locam au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens sous le bénéfice de la distraction.

Elle fait valoir qu’elle n’est que consommatrice, et non professionnelle, s’agissant du contrat signé avec la société Locam ; que l’article 18 du contrat prévoit la faculté discrétionnaire de résiliation du contrat par cette dernière et non par elle, de sorte que le contrat crée un déséquilibre significatif et que la clause de résiliation doit être considérée comme abusive.

Elle ajoute que la résiliation n’a pas pu être valablement décidée par la société Locam; que l’engagement de cette dernière a été “imparfaitement inexécuté” puisqu’elle a toujours fait part de ses difficultés résultant de l’impossibilité d’utiliser le site web.

Aux termes de ses conclusions communiquées par voie électronique le 24 octobre 2023, la société Locam demande à la cour de :

– déclarer non fondé l’appel et débouter la société Lili et Dom de toutes ses demandes,

– confirmer le jugement entrepris,

– condamner la société Lili et Dom à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Elle fait valoir que la clause résolutoire pour défaut de paiement des loyers n’engendre pas un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et ne constitue pas une clause abusive sanctionnée au regard du code de la consommation ; que de plus la société appelante n’est pas un consommateur au sens du code de la consommation et ne peut se prévaloir des dispositions que ce code contient.

Elle ajoute qu’aucune faute d’exécution ne lui est imputable et la société Inleed n’a même pas été appelée en la cause alors que les griefs formulés par l’appelante concernent ce fournisseur et non la société Locam.

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 11 juin 2024 et l’affaire a été renvoyée pour être plaidée à l’audience du 24 juin suivant.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient à titre liminaire d’indiquer que la société appelante demande de :

– “sur la forme :

– juger le défaut de fondement de droit et de fait valablement recevable à l’appui de la prétention de la société Locam,

– juger le manque de preuve rapportée au soutien des prétentions de la société Locam,

– juger mal fondée la demande en justice de la société Locam et la débouter de toutes ses demandes,

– débouter la société Locam de toutes ses demandes”.

Cependant la société Locam produit des pièces à l’appui de sa demande en paiement et fonde celle-ci sur des moyens de fait et de droit. Les prétentions de la société appelante qu’elle présente “sur la forme” ne peuvent donc pas prospérer.

– Sur la validité de la clause résolutoire du contrat

L’article 1171 du code civil dispose que “Dans un contrat d’adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite.

L’appréciation du déséquilibre significatif ne porte ni sur l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix à la prestation.”

Le contrat conclu entre la société Lili et Dom et la société Locam le 18 février 2020 contient une clause qui stipule que le contrat peut être résilié de plein droit par le loueur, sans aucune formalité judiciaire, 8 jours après une mise en demeure restée infructueuse dans le cas notamment de non paiement à échéance d’un seul terme de loyer.

La société appelante ne peut valablement soutenir que la clause résolutoire prévue au contrat est abusive puisqu’en matière de location financière et eu égard au caractère purement financier de l’intervention de la société Locam, cette dernière a exécuté instantanément l’intégralité des obligations mises à sa charge en réglant au fournisseur le prix des biens commandés par le locataire et en les mettant à la disposition de ce dernier. Ainsi, le défaut de réciprocité de la clause résolutoire de plein droit pour inexécution du contrat prévu par la clause litigieuse se justifie par la nature des obligations auxquelles sont respectivement tenues les parties et ne crée aucun déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.

Dès lors, les demandes de la société appelante tendant à voir juger abusive la clause résolutoire et dire qu’il n’y a pas eu de résiliation valable du contrat sont rejetées.

– Sur les conséquences de la résiliation de plein droit

Contrairement aux affirmations de l’appelante, les pièces produites aux débats prouvent que la société Locam a accompli l’intégralité des obligations mises à sa charge, le procès verbal de livraison et de conformité du matériel installé par le fournisseur, en la personne de la société Inleed, étant daté du 4 février 2021.

Il sera d’ailleurs observé que l’appelante, qui invoque le non fonctionnement du site web et avoir informé la société Locam de ces dysfonctionnements, ne produit aucune pièce à l’appui de ses affirmations permettant de justifier la réalité du mauvais fonctionnement du site et l’information donnée au loueur relativement à cette difficulté. La demande de résolution du contrat est donc mal fondée.

De son coté, la société Locam justifie avoir vainement mis en demeure la société Lili et Dom de régler les loyers échus et impayés, cette dernière ne contestant d’ailleurs pas le non paiement de ceux-ci. Il s’ensuit que c’est par une juste appréciation des éléments fournis que le tribunal de commerce a condamné la société Lili et Dom à régler à la société Locam la somme principale de 7 200 euros outre 720 euros au titre de la clause pénale avec intérêts au taux légal et autres accessoires de droit à compter de la mise en demeure du 23 janvier 2022. Le jugement est donc confirmé en toutes ses dispositions.

– Sur les frais de procédure et les dépens

La société Lili et Dom qui succombe doit supporter les dépens d’appel et verser à la société Locam une indemnité supplémentaire de 1 500 euros au titre des dispositions prévues par l’article 700 du code de procédure civile, sa demande faite à ce titre étant nécessairement mal fondée.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Déboute la société Lili et Dom de toutes ses demandes ;

Condamne la société Lili et Dom aux dépens d’appel ;

Condamne la société Lili et Dom à payer à la société Locam la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le greffier La présidente


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