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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 1
ARRET DU 19 AVRIL 2023
(n°064/2023, 21 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : 21/12725 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEAFA
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Mai 2021 – Tribunal Judiciaire de PARIS – 3ème chambre – 2ème RG n° 19/05930 – Jonction avec le dossier RG 21/14628 par ordonnance du 08 novembre 2022
APPELANTS
Monsieur [X] [M]
Né le 20 mars 1952 à RODEZ (12),
De nationalité française
Demeurant [Adresse 1]
[Localité 3]
L’INSTITUT [5] -[5]
Association Loi 1901 déclarée en préfecture sous le numéro 06882
Agissant poursuites et diligences de son Président M. [X] [M] en exercice, dûment habilité aux fins de la présente procédure et domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentés par Me Guillaume DAUCHEL de la SELARL CABINET SEVELLEC DAUCHEL, avocat au barreau de PARIS, toque : W09
Assistés de Me Lisa LE STANC de la SCP LE STANC ‘ CARBONNIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
FÉDÉRATION FRANCAISE DE KARATE ET DISCIPLINES ASSOCIEES
Association Loi 1901 déclarée en préfecture,
Immatriculée sous le numéro 304 951 858,
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334
Assistée de Me Alexandra ATLAN-ELHAIK de ATLAN & BOKSENBAUM AVOCATS, avocat au bareau de PARIS, toque E1876
INTIMÉS
Monsieur [X] [M]
Né le 20 mars 1952 à RODEZ (12),
De nationalité française
Demeurant [Adresse 1]
[Localité 3]
L’INSTITUT [5] -[5]
Association Loi 1901 déclarée en préfecture sous le numéro 06882
Prise en la personne de son Président M. [X] [M] en exercice, dûment habilité aux fins de la présente procédure et domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentés par Me Guillaume DAUCHEL de la SELARL CABINET SEVELLEC DAUCHEL, avocat au barreau de PARIS, toque : W09
Assistés de Me Lisa LE STANC de la SCP LE STANC ‘ CARBONNIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
FÉDÉRATION FRANCAISE DE KARATE ET DISCIPLINES ASSOCIEES
Association Loi 1901 déclarée en préfecture,
Immatriculée sous le numéro 304 951 858,
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334
Assistée de Me Alexandra ATLAN-ELHAIK de ATLAN & BOKSENBAUM AVOCATS, avocat au bareau de PARIS, toque E1876
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Déborah BOHEE, Conseillère et Mme Françoise BARUTEL, Conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Mme Isabelle DOUILLET, Présidente
Mme Françoise BARUTEL, Conseillère, chargée du rapport.
Mme Déborah BOHEE,Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL
ARRET :
– Contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Isabelle DOUILLET, Présidente et par Karine ABELKALON, Greffière présente lors de la mise à disposition.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
La FEDERATION FRANÇAISE DE KARATE ET DISCIPLINES ASSOCIEES (ci-après la FFKDA) est une association française loi 1901, fondée le 19 mars 1975 dont le rôle principal est d’organiser, de contrôler et de développer la pratique du karaté, des styles et disciplines associés, sur le territoire français.
Elle s’est vue accorder, en 1976, l’agrément ministériel pour l’organisation et le développement de plusieurs disciplines relevant des arts martiaux, notamment japonais puis, par un arrêté ministériel du 31 décembre 2008, la délégation pour l’organisation et le développement [5] dont le [5], synthèse de toutes les techniques de combat enseignées au Vietnam depuis les années 30.
La FFKDA expose qu’en sa qualité de délégataire du ministre chargé des sports, elle dispose du droit exclusif de délivrer les grades appelés « dang » dans cette discipline du [5], ce par l’intermédiaire de sa commission spécialisée des « dans » et grades équivalents (CSGDE).
L’INSTITUT [5], créé en 2002, se présente comme une structure associative permettant l’étude, l’enseignement et la sauvegarde [5]. Il a été fondé par M. [X] [M], qui se présente comme un grand spécialiste [5] et, plus particulièrement, du [5] qu’il pratique depuis 1971 et, en qualité de professionnel, depuis 1995.
M. [X] [M] est titulaire des marques verbales françaises «DANG» n° 96644429 déposée le 1er octobre 1996 en classes 16 ; 24 ; 28 ; 35 ; 39 ; 41 ; 43 (publiée au BOPI le 8 novembre 1996) et «DANG [5]» n° 96644996 déposée le 4 octobre 1996 en classes 16 ; 24 ; 28 ; 35 ; 38 ; 41 ; 42 ; 43, (publiée au BOPI le 15 novembre 1996) désignant notamment les «activités sportives et culturelles», «l’organisation de concours en matière d’éducation et de divertissements» et «l’enseignement des arts martiaux».
Suivant lettre du 31 octobre 2018, M. [X] [M] et l’INSTITUT [5] [5] ont mis en demeure la FFKDA d’avoir à les indemniser du fait de l’utilisation non autorisée du terme « dang ».
Par courrier du 20 novembre 2018, la FFKDA, contestant les faits qui lui étaient imputés, a vainement demandé à l’INSTITUT [5] de renoncer à l’enregistrement des marques et de cesser tout usage du terme « Dang » ainsi que la délivrance des grades.
C’est dans ce contexte que, par acte signifié le 15 mai 2019, la FFKDA a fait assigner l’INSTITUT [5] et M. [X] [M] devant le tribunal judiciaire de Paris afin de demander l’annulation des marques françaises «DANG» et «DANG [5]» et la réparation de son préjudice.
Par acte signifié du 25 juin 2019, soulevant l’incompétence du tribunal judiciaire de Paris, M. [X] [M] et l’INSTITUT [5] ont fait assigner la FFKDA devant le tribunal judiciaire de Nanterre pour des faits de contrefaçon de marques et de concurrence déloyale.
Par ordonnance du 13 mars 2020, le juge de la mise en état a dit le tribunal judiciaire de Paris compétent pour connaître du litige.
Suivant ordonnance du 9 juillet 2020, le juge de la mise en état près le tribunal judiciaire de Nanterre s’est dessaisi au profit du tribunal judiciaire de Paris.
Dans son jugement rendu le 7 mai 2021 dont appel, le tribunal judiciaire de Paris a :
– déclaré irrecevable la demande de nullité des marques françaises « DANG » n° 96644429 et « DANG [5] » n° 96644996 ;
– prononcé la déchéance des droits de [X] [M] sur les marques françaises «DANG» n° 96644429 et «DANG [5]» n° 96644996 et ce, pour la totalité des produits et services visés à leur enregistrement pour défaut d’usage à titre de marque ;
– dit que la décision une fois définitive sera transmise à l’INPI à l’initiative de la partie la plus diligente, pour être transcrite sur le registre national des marques ;
– fait interdiction à l’INSTITUT [5] de délivrer à ses adhérents des « DANG » dans la discipline du [5] ;
– rejeté les demandes indemnitaires et de publication formulées par la FEDERATION FRANÇAISE DE KARATE ET DISCIPLINES ASSOCIEES ;
– débouté [X] [M] et l’INSTITUT [5] de leurs demandes sur le fondement de la contrefaçon de marque et du parasitisme ;
– débouté [X] [M] et l’INSTITUT [5] de leurs demandes sur le fondement de la déloyauté fautive ;
– condamné [X] [M] et l’INSTITUT [5] à payer ensemble à la FEDERATION FRANÇAISE DE KARATE ET DISCIPLINES ASSOCIEES la somme totale de 6000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné [X] [M] et l’INSTITUT [5] aux dépens.
Le 6 juillet 2021, M. [X] [M] et l’INSTITUT [5] [5] ont interjeté appel de ce jugement, déclaration enregistrée sous le N° de RG 21/12725.
Puis, le 27 juillet 2021, la FEDERATION FRANÇAISE DE KARATE ET DISCIPLINES ASSOCIEES a également interjeté appel, déclaration enregistrée sous le N° de RG 21/14628.
Par ordonnance du 8 novembre 2022, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction entre les deux instances, l’affaire étant instruite sous le N° de RG 21/12725.
Dans leurs dernières conclusions numérotées 2 signifiées au RPVA le 28 novembre 2022, M. [X] [M] et l’INSTITUT [5] [5] demandent à la cour de :
Vu les articles L. 713-2 et suivants du code de la propriété intellectuelle,
Vu l’article les articles L712-1 et suivants ainsi que L. 716-3 du code de la propriété intellectuelle
Vu l’article 1240 et 2224 du code civil,
– confirmer le jugement du 7 mai 2021 du tribunal judiciaire de Paris (RG 19/05930) en ce qu’il a :
– jugé irrecevable la demande de nullité des marques françaises « DANG » n°96644429 et « DANG [5] » n°96644996 ;
– rejeté les demandes indemnitaires et de publication formulées par la Fédération Française de Karaté et Disciplines Associées.
– infirmer le jugement en ce que celui-ci a :
– prononcé la déchéance des droits de [X] [M] sur les marques françaises « DANG » n°96644429 et « DANG [5] » n°96644996 et ce pour la totalité des produits et services visés à l’enregistrement pour défaut d’usage à titre de marque ;
– jugé que la décision une fois définitive sera transmise à l’INPI à l’initiative de la partie la plus diligente, pour être transcrite sur le registre national des marques ;
– fait interdiction à L’INSTITUT [5] de délivrer à ses adhérents des « DANG » dans la discipline du [5] ;
– débouté [X] [M] et L’INSTITUT [5] de leurs demandes sur le fondement de la contrefaçon de marque et du parasitisme,
– débouté [X] [M] et L’INSTITUT [5] de leurs demandes sur le fondement de la déloyauté fautive;
– condamné [X] [M] et L’INSTITUT [5] à payer ensemble à la Fédération Française de Karaté et Disciplines Associées la somme totale de 6000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné [X] [M] et L’INSTITUT [5] aux dépens.
Statuant à nouveau :
– juger que les marques « DANG » n°96 644 429 et « DANG [5] » n°96 644 996 sont valides et font l’objet d’un usage sérieux pour les services visés dans l’enregistrement;
– juger qu’en exploitant le signe « DANG », la FFKDA a commis des actes de contrefaçon de la marque n°96 644 429 ;
– juger que la FFKDA a commis de manière distincte des agissements parasitaires gravement préjudiciables à l’INSTITUT [5] – [5] ;
– subsidiairement, juger que la FFKDA a commis des agissements fautifs de dépréciation de l’image et des méthodologies de M. [M] et de l’INSTITUT [5]- [5] ;
– en conséquence, condamner la FFKDA à communiquer, sous astreinte de 500 (cinq cents) euros par jour de retard le nombre, certifié conforme, de « DANG » délivrés par elle au cours des années 2014-2015, 2015-2016, 2016-2017, 2017-2018, 2018-2019, 2019-2020 ;
– interdire, sous astreinte de 500 (cinq cents) euros par jour de retard à compter de la signification du Jugement à intervenir, à la FFKDA de reproduire et/ou représenter et, plus généralement, exploiter le signe « DANG » ;
– condamner la FFKDA à verser à M. [M] la somme de 45.000 (quarante-cinq mille) euros à titre de dommages et intérêts, sauf à parfaire au regard des demandes de communication formées,
– condamner la FFKDA à verser à l’INSTITUT [5]- [5] la somme de 12.000 (douze mille) euros en réparation des actes de parasitisme accomplis par la défenderesse ;
– condamner la FFKDA à verser à l’INSTITUT [5]- [5] à titre de réparation pour l’utilisation trompeuse et déloyale du signe distinctif « DANG » exploité par l’INSTITUT, la somme de 16.000 (seize mille) euros, sauf à parfaire au regard des demandes de communication formées,
– ordonner la diffusion du dispositif du Jugement, sous huit (8) jours à compter de sa signification et ce, pendant deux (2) mois sur la page d’accueil du site Internet de la FFKDA, accessible à l’adresse www.ffkarate.fr ou tout site qui y serait substitué, sous astreinte de 500 (cinq cents) euros par jour de retard, le Tribunal restant saisi de la liquidation de l’astreinte définitive ;
– ordonner que cette publication intervienne en partie supérieure de cette page d’accueil et en toute hypothèse au-dessus de la ligne de flottaison, sans mention ajoutée, en police de caractères ‘Times New Roman” de taille “12”, droits, de couleur noire et sur fond blanc, dans un encadré de 468 x 120 pixels, en dehors de tout encart publicitaire, le texte devant être précédé du titre “PUBLICATION JUDICIAIRE” en lettres capitales de taille 16 ;
– rejeter les appels incidents de la FFKDA.
– condamner la FFKDA à verser à M. [M] et à l’INSTITUT [5]- [5] la somme de 16.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la FFKDA aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions signifiées au RPVA le 10 janvier 2023, la FEDERATION FRANÇAISE de KARATÉ et DISCIPLINES ASSOCIÉES demande à la cour de :
Vu les articles L.711-2, L.711-3 et L.714-5 du code de la propriété intellectuelle,
Vu les articles L.131-14, L.212-5 et A.212-175-15 du code du sport,
Vu l’arrêté du 31 décembre 2016 accordant la délégation prévue a’ l’article L. 131-14 du code du sport,
Vu l’article 2 du décret n°2020-896 du 22 juillet 2020 dérogeant à certaines dispositions du code du sport,
Vu les articles 1240 et 1241 du code civil,
Vu les articles 11, 699 et 700 du code de procédure civile,
– déclarer recevable en tout état de cause, la Fédération Française de Karaté et Disciplines Associées en son appel,
– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris en ce qu’il a:
– prononcé la déchéance des droits de [X] [M] sur les marques françaises «DANG» n°96644429 et «DANG [5]» n°96644996 et ce, pour la totalité des produits et services visés à leur enregistrement pour défaut d’usage à titre de marque;
– dit que la décision une fois définitive sera transmise à l’INPI à l’initiative de la partie la plus diligente, pour être transcrite sur le registre national des marques ;
– fait interdiction à L’INSTITUT [5] de délivrer à ses adhérents des « DANG » dans la discipline du [5] ;
– débouté [X] [M] et L’INSTITUT [5] de leurs demandes sur le fondement de la contrefaçon de marque et du parasitisme,
– débouté [X] [M] et L’INSTITUT [5] de leurs demandes sur le fondement de la déloyauté fautive.
– infirmer ledit jugement en ce qu’il a,
– déclaré irrecevable la demande de nullité des marques françaises « DANG » n°96644429 et « DANG [5] » n°96644996 ;
– rejeté les demandes indemnitaires et de publication formulées par la Fédération Française de Karaté et Disciplines Associées ;
Et statuant de nouveau,
– ordonner, avant dire droit, à M. [M] et l’INSTITUT la communication sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision qui ordonnera cette communication, de l’ensemble des éléments comptables, certifiés conformes par un expert-comptable ou commissaire aux comptes, établissant le nombre d’établissements sportifs ayant souscrit une licence de marque auprès de M. [M] pour la délivrance de « dangs », la date de souscription de cette licence, et le nombre d’inscriptions aux passages de « dangs », auprès de l’INSTITUT ou d’un club affilié à l’INSTITUT, et ce, depuis la constitution de l’INSTITUT.
Par ailleurs,
– constater que les demandes en nullité des marques « DANG » n°96644429 et « DANG [5] » n°96644996 ne sont pas prescrites,
– constater que la marque verbale « DANG » n°96644429 ne remplit pas les conditions de validité des articles L.711-2 et L.711-3 du code de la propriété intellectuelle, pour les services suivants : Éducation ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ; Éducation et divertissement ; institutions d’enseignement ; Organisation de concours en matière d’éducation ou de divertissement ; Enseignement de la gymnastique et des arts martiaux.
– constater que la marque verbale « DANG [5] » n°96644996 ne remplit pas les conditions de validité des articles L.711-2 et L.711-3 du code de la propriété intellectuelle, pour les services suivants : Éducation ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles; Éducation et divertissement ; institutions d’enseignement ; Organisation de concours en matière d’éducation ou de divertissement ; Enseignement de la gymnastique, des sports et des arts martiaux ; Tous documents, diplômes, certificat, grades, compétitions, réunions, stages, cartes de grades et passeports sportifs.
En conséquence,
– prononcer l’annulation de la marque verbale « DANG » n°96644429, pour les services suivants:
Éducation ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ; Éducation et divertissement ; institutions d’enseignement ; Organisation de concours en matière d’éducation ou de divertissement ; Enseignement de la gymnastique et des arts martiaux.
– prononcer l’annulation de la marque verbale « DANG [5] » n°96644996, pour les services suivants: Éducation ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ; Éducation et divertissement ; institutions d’enseignement ; Organisation de concours en matière d’éducation ou de divertissement ; Enseignement de la gymnastique, des sports et des arts martiaux ; Tous documents, diplômes, certificat, grades, compétitions, réunions, stages, cartes de grades et passeports sportifs.
En tout état de cause,
– condamner solidairement M. [M] et l’INSTITUT à verser 50.000 euros, sauf à parfaire, à la Fédération Française de Karaté et Disciplines Associées en réparation du préjudice commercial subi,
– condamner solidairement M. [M] et l’INSTITUT à verser 30.000 euros à la Fédération Française de Karaté et Disciplines Associées en réparation du préjudice du fait de l’obstruction subie dans sa mission de service public,
– ordonner la publication du dispositif de l’arrêt à intervenir, dans trois journaux et/ou sur les services de communication au public en ligne y afférent aux frais de M. [M] de l’INSTITUT, dans la limite de 3.500 euros par insertion, ainsi que sur la page d’accueil du site internet de l’INSTITUT, accessible à l’adresse www.[06].com, et ce pendant une durée d’un mois à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard,
– condamner solidairement M. [M] et l’INSTITUT à verser à la Fédération Française de Karaté et Disciplines Associées la somme de 15.000 euros (quinze mille euros) en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [M] et l’INSTITUT aux entiers dépens.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 14 février 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu’elles ont transmises, telles que susvisées.
Sur les demandes en nullité de marques
Sur la prescription de l’action
M. [X] [M] et l’INSTITUT [5] soutiennent que l’action en nullité des marques « DANG » n°96644429 et « DANG [5] » n°96644996 est prescrite, ces marques ayant été déposées et publiées en 1996 et les demandes en nullité n’étant intervenues que 23 ans plus tard ; qu’en vertu de l’article 2222 du code civil, la loi qui allonge la durée d’une prescription est sans effet sur une prescription acquise ; que la loi PACTE n’indique pas expressément que l’article L716-2-6 du code de la propriété intellectuelle dérogerait au principe de non-rétroactivité de la loi nouvelle ; que la prescription de l’action en nullité des marques « DANG » n°96644429 et « DANG [5] » n°96644996 pour défaut de distinctivité et déceptivité était d’ores et déjà acquise le 19 juin 2013, suite à la réforme de la prescription de 2008, outre que le délai butoir prévu par l’article 2232 du code civil permet de retenir qu’en 2016, l’action était prescrite.
La FÉDÉRATION FRANÇAISE DE KARATÉ ET DISCIPLINES ASSOCIÉES rappelle que l’article L716-2-6 du code de la propriété intellectuelle, issu de la loi PACTE qui dispose que l’action ou la demande en nullité d’une marque n’est soumise à aucun délai de prescription, est applicable aux titres en vigueur au jour de la publication de la loi, et donc aux deux marques en cause, de sorte que, selon elle, son action en nullité n’est pas prescrite; qu’en tout état de cause, le point de départ du délai de cinq ans est la connaissance, par le demandeur en nullité, de l’usage effectif de la marque et non la publication de la demande de marque ou la publication de son enregistrement et qu’elle n’a eu connaissance de l’existence des marques que 6 mois seulement avant d’en demander la nullité, lorsque les appelants l’ont mise en demeure de cesser tout usage du signe «DANG»; qu’ainsi l’action n’était pas prescrite ; que les dispositions de l’article 2232 consacrant une date butoir ne peuvent s’appliquer à un droit né antérieurement à leur entrée en vigueur, le 17 juin 2008.
En vertu de l’article L.716-2-6 du code de la propriété intellectuelle, «Sous réserve des articles L. 716-2-7 et L. 716-2-8, l’action ou la demande en nullité d’une marque n’est soumise à aucun délai de prescription.» Cette disposition, qui résulte de l’entrée en vigueur de loi n°2019-486 du 22 mai 2019 pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), est applicable selon son article 124, «aux titres en vigueur au jour de la publication de la présente loi».
La cour rappelle qu’avant son entrée en vigueur, il était constamment jugé que l’action principale en nullité d’une marque était soumise au délai de prescription de droit commun prévu à l’article 2224 du code civil aux termes duquel «Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer».
Par ailleurs, selon l’article 2 du code civil, la loi ne dispose que pour l’avenir et elle n’a pas d’effet rétroactif. Plus précisément, s’agissant d’une loi relative au délai de prescription, l’article 2222 du code civil prévoit que «La loi qui allonge la durée d’une prescription ou d’un délai de forclusion est sans effet sur une prescription ou une forclusion acquise. Elle s’applique lorsque le délai de prescription ou le délai de forclusion n’était pas expiré à la date de son entrée en vigueur. Il est alors tenu compte du délai déjà écoulé (…)». Il résulte de ces dispositions que, lorsque le législateur allonge le délai d’une prescription, cette loi n’a pas d’effet sur la prescription définitivement acquise, à moins qu’une volonté contraire soit expressément affirmée dans ladite loi.
Au cas présent, les nouvelles dispositions relatives à la prescription de l’action en nullité d’une marque doivent être considérées comme allongeant la durée de la prescription, puisqu’elles rendent celle-ci imprescriptible. Or, dans la mesure où aucune mention expresse dans le texte en cause, ni dans les travaux parlementaires ayant conduit à son élaboration, ne permettent de caractériser une volonté contraire sur ce point du législateur, il s’ensuit que le nouvel article L. 716-2-6 du code de la propriété intellectuelle n’est pas applicable aux actions en nullité de marque dont la prescription était déjà acquise lors de l’entrée en vigueur de la loi PACTE le 24 mai 2019.
Il convient, dès lors, d’examiner si le délai de prescription de droit commun prévu à l’article 2224 du code civil, auquel l’action en nullité de marque était soumise jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi susvisée avait, ou non, expiré et, ainsi, de rechercher le jour où le titulaire du droit a eu connaissance ou aurait dû connaître les motifs de nullité allégués. En effet, les deux marques déposées respectivement les 1er et 4 octobre 1996, étaient soumises, à ces dates, à la prescription de 30 ans de l’article 2262 ancien du code civil qui n’était pas acquise à la date d’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription, ayant ramené le délai de prescription à 5 ans.
À cet égard, M. [X] [M] et l’INSTITUT [5] ne sont pas fondés à soutenir que le point de départ de la prescription de l’action en nullité de ces marques, même invoquée pour un motif absolu, commencerait à courir à compter de leur publication au BOPI, mais de déterminer quand celle-ci a eu, ou aurait dû avoir, connaissance de l’existence de ces marques, et ainsi du fait lui permettant d’exercer l’action en nullité. De même, les appelants ne sont pas fondés à opposer les dispositions de l’article 2232 du code civil qui dispose que « le report du point de départ, la suspension ou l’interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit», les droits invoqués par les appelants étant nés antérieurement à l’entrée en vigueur de ces dispositions issues de la loi du 17 juin 2008. (Cass civ 3 1er octobre 2020, 19-16986).
Alors que la FFKDA, association française sans but lucratif, qui ne revendique aucun droit de marque sur les termes «DANGS» et «DANG [5]», et n’exerçait donc pas de veille sur ces signes en matière de propriété industrielle, M. [X] [M] et l’INSTITUT [5] [5] ne démontrent pas qu’elle a eu connaissance de l’existence de celles-ci avant la mise en demeure qu’ils lui ont adressée le 31 octobre 2018, de cesser tout usage du signe «DANG» comme portant atteinte à leur marque.
En conséquence, l’action en nullité de ces marques introduite le 15 mai 2019, n’est pas prescrite et le jugement dont appel doit être infirmé de ce chef.
Sur la validité des marques
La FÉDÉRATION FRANÇAISE DE KARATÉ ET DISCIPLINES ASSOCIÉES soutient que les marques litigieuses ne sont pas distinctives car les termes «DANG» et «DANG [5]» sont descriptifs des services considérés puisque correspondant à la désignation usuelle, nécessaire et générique de l’enseignement de l’art martial [5] et à la délivrance des grades qui y est associée. Elle constate que dans l’arrêt qui lui est opposé, la nullité des marques litigieuses n’avait pas été soulevée et qu’aucun élément démontrant le caractère descriptif de la marque « DANG » n’avait été produit. La FFKDA retient également que les marques litigieuses présentent un caractère illicite et trompeur en ce que, selon les dispositions du code du sport, seuls les organismes habilités par le Ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports peuvent délivrer les dans et grades équivalents, et que, seule la CSDGE dispose de la délégation ministérielle pour délivrer les « dangs » en [5]; que l’utilisation du terme « Dang » est réglementée, et rend tout usage non autorisé, et a fortiori tout enregistrement à titre de marque, contraire à l’ordre public et légalement interdit. Elle souligne que l’enregistrement, à titre de marque, de la désignation usuelle des grades délivrés dans les arts martiaux vietnamiens, implique pour son titulaire, l’octroi d’un monopole sur ce terme contraire à la loi, rappelant que l’habilitation ministérielle qui lui a été octroyée couvre incontestablement, sous le terme « grades équivalents», les « dangs» délivrés dans les arts martiaux vietnamiens.
M. [M] et l’INSTITUT [5] soutiennent que la marque « DANG » est utilisée pour désigner la distinction remise aux pratiquants du [5], selon les conditions de délivrance qu’ils prônent et qui revêt une signification profondément spirituelle, relevant de l’apprentissage de l’art martial traditionnel et de ses modes de vie, et ce sans aucune visée compétitive; que cette essence complexe du «DANG» explique que ce terme ne corresponde pas à la traduction vietnamienne du terme «grade» sportif; qu’il ne revêt donc aucun sens pour la population française et qu’il n’est a fortiori pas associé dans son esprit à un « grade sportif », ce que la cour d’appel de Rennes a déjà jugé en 2005, et qu’il présente un caractère distinctif ; qu’ au jour du dépôt des marques «DANG» et «DANG [5]», la commission spécialisée des dans et grades équivalents (CSDGE) de la FFKDA n’avait aucune emprise sur leur délivrance; que l’article L. 212-5 du code du sport ne fait littéralement aucune interdiction aux fédérations sportives indépendantes de délivrer des distinctions à leurs adhérents, contrairement à ce que laisse penser la FFKDA.
L’article L.711-2 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que ‘ Le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés. Sont dépourvus de caractère distinctif :
a) Les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ;
b) Les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation de service ; (…)»
Le caractère distinctif d’une marque signifie que cette marque est apte à identifier le produit ou le service pour lequel est demandé l’enregistrement comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ce produit ou ce service de ceux d’autres entreprises, ledit caractère distinctif devant être apprécié à la date de son dépôt.
La cour rappelle que le caractère distinctif d’une marque doit être apprécié par rapport à la perception des milieux intéressés qui sont constitués par les consommateurs moyens de la catégorie de produits et de services en cause, normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés.
La validité de la marque verbale « DANG » n°96644429 est contestées pour les services suivants: Éducation; formation; divertissement; activités sportives et culturelles; Éducation et divertissement ; institutions d’enseignement; Organisation de concours en matière d’éducation ou de divertissement; Enseignement de la gymnastique et des arts martiaux.
La validité de la marque verbale « DANG [5] » n°96644996 est contestée pour les services suivants : Éducation; formation; divertissement; activités sportives et culturelles; Éducation et divertissement ; institutions d’enseignement; Organisation de concours en matière d’éducation ou de divertissement; Enseignement de la gymnastique, des sports et des arts martiaux; Tous documents, diplômes, certificat, grades, compétitions, réunions, stages, cartes de grades et passeports sportifs.
La FFKDA démontre que le terme «DANG» constitue le terme usuel pour désigner les différents niveaux ou grades délivrés dans le [5], art martial vietnamien.
Ainsi, sur le propre site internet de l’Institut, accessible à l’adresse www.[06].com (Procès-verbal de constat sur internet versé en pièce 8 par l’intimée), il est mentionné « Le «DANG ®» constitue une référence en matière de niveau et hiérarchie dans les arts martiaux vietnamiens, il hiérarchise les différents stades de la progression après la ceinture noire technique. Du 09/03/89 au 20 juillet 1996, le «Dang» fut la propriété de la FEAMVVD (fédération européenne d’arts martiaux vietnamiens, [5] et sino-vietnamiens) qui l’utilisait à ces fins.»
Toujours sur le site internet de l’Institut, il est mentionné que le [5] s’est établi en France en 1973, au travers de la Fédération Française de [5].
Cet usage antérieur au dépôt de la marque le 1er octobre 1996 du signe Dang pour désigner les grades du [5] est encore confirmé par la production de nombreux documents par la FFKDA:
– Extrait d’un ouvrage italien consacré au [5] de 1980 (pièce 9),
– Liste officielle des maîtres et des gradés établie par la Fédération Française de [5] de 1982 (pièce 10),
– Note concernant le diplôme d’enseignement de [5] au sein de la Fédération Française de [5], de 1986 (pièce 11) ,
– Procès-verbal de la réunion des présidents de comités et dirigeants de la Fédération Française de [5] du 12 avril 1986 (pièce 12),
– Fiche de stage organisé par la Fédération Française de [5] – 1986 (pièce 13),
– Déclaration de la Fédération Européenne d’Arts Martiaux Vietnamiens – 1988 (pièce 14),
– Programme officiel d’enseignement au [5] – 1993 (pièce 15),
– Charte fédérale de l’assemblée des grandes écoles et styles d’arts martiaux de la Fédération Européenne d’Arts Martiaux Vietnamiens – 1991 (pièce 16),
– Bulletin de liaison établi par la Fédération Européenne d’Arts Martiaux Vietnamiens – 1992 (pièce 17),
– Courrier du Président de la FFKAMA (maintenant FFKDA) en date du 18 janvier 1996 (pièce 18),
– Annonce de la Fédération Française de [5] – 1978 (pièce 23),
– Courrier du centre culturel de [5] de 1982 (pièce 24),
– certificat de grade [5] de 1987 ( pièce 25),
– Courrier d’information de la Fédération européenne d’Arts martiaux vietnamiens de 1993 (pièce 28).
Ces documents, qui attestent d’un usage habituel et nécessaire pour désigner les gardes décernés dans les arts martiaux vietnamiens, au sein des pratiquants de ce sport, sont en outre confortés par la production de nombreux extraits de magazines sportifs d’arts martiaux dans lesquels le terme «dang» est systématiquement employé pour désigner ces mêmes grades de manière continuelle depuis 1976, ou encore sur des affiches promotionnelles d’un gala organisé à l’arche de la défense en 1992, au sein d’un public beaucoup plus large.
Ces pièces permettent d’établir identiquement que le terme «[5]» est utilisé exclusivement pour désigner cet art martial vietnamien, depuis la même époque et bien antérieurement au dépôt de la marque en cause, certains articles de magazines sportifs relatant l’historique de la discipline (pièce 31.20), d’autre parutions mentionnant cette discipline en page de couverture (pièce 31.28, parution de 1990). Les appelants ne peuvent en conséquence être suivis lorsqu’ils affirment que cet usage serait circonscrit et connu, uniquement, par un cercle restreint d’initiés.
La validité de la marque «DANG» ne ressort pas davantage de l’arrêt rendu par la cour d’appel de Rennes le 15 novembre 2005 qui a eu à statuer, uniquement, en matière de contrefaçon de ce signe par une autre marque déposée, dans un litige où la FFKDA n’était pas partie.
En conséquence, pour le consommateur moyen de la catégorie des produits et services concernés, le terme «Dang», en ce qu’il désigne nécessairement et usuellement les différentes grades et niveaux au sein de l’enseignement, de la formation et de la pratique sportive du [5], art martial, n’est pas distinctif, pour désigner les services suivants : «Éducation ; formation; divertissement; activités sportives et culturelles; Éducation et divertissement; institutions d’enseignement; Organisation de concours en matière d’éducation ou de divertissement; Enseignement de la gymnastique et des arts martiaux.»
La même analyse doit être faite pour la marque «DANG [5]», qui associe le grade et le sport auquel il se rapporte, et en constitue la dénomination nécessaire et usuelle, qui ne présente pas, pour le même public concerné, de caractère distinctif pour désigner les produits et services suivants: «Éducation; formation; divertissement; activités sportives et culturelles; Éducation et divertissement ; institutions d’enseignement; Organisation de concours en matière d’éducation ou de divertissement; Enseignement de la gymnastique, des sports et des arts martiaux; Tous documents, diplômes, certificat, grades, compétitions, réunions, stages, cartes de grades et passeports sportifs.»
Il convient, en conséquence, de prononcer la nullité de ces marques pour ces produits et services, sans qu’il y ait lieu d’examiner les autres motifs de nullité invoqués par la FFKDA.
Sur la demande de déchéance pour défaut d’usage sérieux des marques
La FÉDÉRATION FRANÇAISE DE KARATÉ ET DISCIPLINES ASSOCIÉES retient d’abord que les appelants ne contestent pas ne pas exploiter ces signes pour de nombreux produits et services visés à l’enregistrement. Elle souligne ensuite que les appelants ne démontrent nullement qu’ils font un usage à titre de marque des signes en cause mais, uniquement, comme désignation usuelle des grades dans la pratique du [5] ; que ce terme «Dang» n’identifie ainsi aucunement l’origine commerciale des produits et services visés au dépôt et proposés par l’INSTITUT et M. [M] ; qu’il est de principe constant que l’adjonction d’un sigle ® ou « TM » n’a aucune incidence sur la qualification de l’usage d’un signe ; que les éléments versés à la procédure par M. [M] et l’INSTITUT (à savoir des captures écran du site internet de l’INSTITUT) ne font qu’établir l’usage du terme « DANG » dans son sens commun; que la production du contrat de licence consenti ne suffit pas pour échapper à la déchéance de la marque concernée, en l’absence de toute preuve d’exploitation effective de la marque sur le marché ; que M. [M] et l’INSTITUT tentent de revendiquer et maintenir un monopole sur un terme commun, utilisé dans un contexte banal, sous prétexte qu’ils en auraient une appréciation et compréhension personnelles ; que M. [M] n’exploite pas davantage la marque « DANG [5]; que l’exploitation du terme isolé « [5] » ne saurait valoir usage sérieux de la marque « DANG [5] », dès lors que ce terme, de surcroît non distinctif, diffère de manière significative de la marque telle qu’elle est déposée.
M. [M] et l’INSTITUT [5] soutiennent que les signes « DANG » et « DANG [5] » font bien l’objet d’un usage sérieux à titre de marque ; que M. [X] [M] a conclu une licence de la marque «DANG» depuis le 14 novembre 2002 avec l’INSTITUT [5]- [5] qui est renouvelée d’année en année ; qu’est assimilé à un usage sérieux, l’usage fait avec le consentement du propriétaire de la marque ; que l’utilisation du signe «DANG» pour désigner les produits et services déposés s’accompagne systématiquement du logo ®; que la marque «DANG» est utilisée comme garantie de provenance, de la récompense délivrée conformément à leur charte de qualité, et dont ils ont développé la notoriété; que dès lors que la marque « DANG » a fait l’objet d’un usage sérieux, cet usage peut en effet être étendu à la marque « DANG [5] » puisqu’est assimilé à un usage, l’usage sous une forme modifiée n’en altérant pas le caractère distinctif, selon L.714-5 du code de la propriété intellectuelle.
L’article L.714-5 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose que ‘ Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n’en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l’enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans.
Est assimilé à un tel usage :
a) L’usage fait avec le consentement du propriétaire de la marque ou, pour les marques collectives, dans les conditions du règlement ;
b) L’usage de la marque sous une forme modifiée n’en altérant pas le caractère distinctif ;
c) L’apposition de la marque sur des produits ou leur conditionnement exclusivement en vue de l’exportation.
La déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée. Si la demande ne porte que sur une partie des produits ou des services visés dans l’enregistrement, la déchéance ne s’étend qu’aux produits ou aux services concernés.
L’usage sérieux de la marque commencé ou repris postérieurement à la période de cinq ans visée au premier alinéa du présent article n’y fait pas obstacle s’il a été entrepris dans les trois mois précédant la demande de déchéance et après que le propriétaire a eu connaissance de l’éventualité de cette demande.
La preuve de l’exploitation incombe au propriétaire de la marque dont la déchéance est demandée. Elle peut être apportée par tous moyens.
La déchéance prend effet à la date d’expiration du délai de cinq ans prévu au premier alinéa du présent article. Elle a un effet absolu.’
Pour être considéré comme sérieux, l’usage du signe doit être fait conformément à sa fonction essentielle à titre de marque pour identifier ou promouvoir dans la vie des affaires, aux yeux du public pertinent, des produits et services visés au dépôt et opposés aux défenderesses, ce qui suppose l’utilisation de la marque pour désigner chacun des produits et services couverts par son enregistrement.
L’usage même minime d’une marque peut être suffisant pour être qualifié de sérieux à condition qu’il soit considéré comme justifié dans le secteur économique considéré pour maintenir ou créer des parts de marché pour les produits et services protégés par la marque.
À titre liminaire, il doit être rappelé que la marque «DANG» a été annulée pour les services suivants : Éducation ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ; Éducation et divertissement; institutions d’enseignement ; Organisation de concours en matière d’éducation ou de divertissement; Enseignement de la gymnastique et des arts martiaux et que la marque «DANG [5]» a été annulée pour les produits et services suivants: Éducation ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles; Éducation et divertissement ; institutions d’enseignement ; Organisation de concours en matière d’éducation ou de divertissement ; Enseignement de la gymnastique, des sports et des arts martiaux ; Tous documents, diplômes, certificat, grades, compétitions, réunions, stages, cartes de grades et passeports sportifs.
Il convient donc d’examiner si les appelants justifient d’un usage sérieux du signe «DANG» pour les autres produits et services visés à l’enregistrement, soit les « Papiers et articles en papiers, carton et articles en carton, imprimés, journaux et périodiques, livres, articles pour reliure, photographies, papeteries, matières adhésives, matériels pour les artistes, pinceaux, machines à écrire de bureau, matériel d’instruction ou d’enseignement à l’exception des appareils, cartes à jouer, caractères d’imprimerie, clichés. Tissus, couverture de lit et de table. Jeux; jouets; articles de gymnastique et de sports (à l’exception des vêtements chaussures et tapis); décoration et ornement pour arbre de Noël. Publicité; gestion des affaires commerciales; administration commerciale; travaux de bureau. Distribution de prospectus, d’échantillons. Services d’abonnement de journaux pour des tiers. Conseils, informations ou renseignements d’affaires. Comptabilité. Reproduction de documents. Bureaux de placement. Gestion de fichiers informatiques. Organisation d’expositions à but commerciaux ou de publicité. édition de livres, revues, prêt de livres, revues. Dressage d’animaux. Divertissements, spectacles. Divertissements radiophoniques ou par télévision. Production de films. Agences pour artistes. Location de films, d’enregistrement phonographiques, d’appareils de projection et de cinéma et accessoires, de décors de théâtre. Distribution de journaux. Services de camp de vacances, bande vidéo, enregistrement, filmage» et de la marque «DANG [5]» pour les «Papiers et articles en papier, carton et articles en carton, imprimés, journaux et périodiques, livres, articles pour reliure, photographies, papeteries, matières collantes, bande, ruban pour la papeterie ou le ménage, matériels pour les artistes, pinceaux, machines à écrire de bureau, matériel d’instruction ou d’enseignement à l’exception des appareils, cartes à jouer, caractères d’imprimerie, clichés. Tissus à usage textiles, couverture de lit et de table. Jeux; jouets; articles de gymnastique et de sports (à l’exception des vêtements chaussures et tapis); décoration et ornement pour arbre de Noël. Publicité; affichage, agence de publicité, annonces publicitaires, publication de texte publicitaires, publicité radiophonique, télévisée, tracts, imprimés, documentation, journaux et livres; gestion des affaires commerciales; administration commerciale; travaux de bureau. Distribution de prospectus, d’échantillons. Services d’abonnement de journaux pour des tiers. Conseils, informations ou renseignements d’affaires. Comptabilité. Reproduction de documents. Bureaux de placement. Gestion de fichiers informatiques. Organisation d’expositions à but commerciaux ou de publicité; édition de livres, revues, prêts de livres, revues, abonnement de journaux. Dressage d’animaux. Divertissements, spectacles. Divertissements radiophoniques ou par télévision. Production de films. Agences pour artistes.
Location de films, d’enregistrement phonographiques, d’appareils de projection et de cinéma et accessoires de décors de théâtre. Services de camps de vacances, filmage sur bande vidéo, service enregistrement, filmage. Communication radiophoniques, télégraphiques, téléphoniques, émission radiophonique, télévisée, messagerie électronique, transmission par ordinateur, programme de télévision et radiophonique transmission de télécopies, informations en matière de télécommunications, agence de presse».
Or, force est de constater qu’il n’est justifié d’aucun usage de ces signes à titre de marque depuis leur dépôt pour chacun de ces produits et services par les appelants. À cet égard, la seule conclusion d’un contrat de licence entre M. [X] [M] et l’INSTITUT [5] ne permet pas de caractériser cet usage, ni davantage la mention du signe «DANG» associé au logo ®, les appelants revendiquant au demeurant un usage du signe «DANG» pour définir «leur propre récompense», soit uniquement comme un niveau ou une distinction au sein de la pratique du sport concerné, le «[5]», ce qui ne caractérise pas un usage à titre de marque dont la fonction essentielle est de garantir l’identité des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée. Il n’est pas davantage démontré un usage à titre de marque du signe «DANG [5]» pour les services et produits en cause.
En conséquence, aucun usage pour les produits et services susvisés n’ayant été démontré, il convient de prononcer la déchéance des marques «DANG» n° 96644429 et «DANG [5]» n° 96644996 pour les services et produits visés ci-dessus à compter, respectivement, du 8 novembre 2001 et du 15 novembre 2001, soit cinq années après la publication de leur enregistrement au BOPI.
Sur les demandes indemnitaires et réparatrices de la FÉDÉRATION FRANÇAISE DE KARATÉ ET DISCIPLINES ASSOCIÉES
Sur l’interdiction de délivrer des « DANG »
M. [M] et l’INSTITUT [5] soutiennent que le tribunal ne pouvait prononcer une telle interdiction absolue visant les récompenses délivrées spécifiquement par l’INSTITUT car les distinctions remises à ses adhérents ne sont pas celles visées par l’article L.212-5 du code du sport ; que cet article ne fait au demeurant littéralement aucune interdiction aux fédérations sportives indépendantes de délivrer des distinctions à leurs adhérents ; que, dès lors que les grades et distinctions remis par une fédération sportive indépendante n’entretiennent aucune confusion sur leur portée, ils peuvent être librement décernés sans porter atteinte au monopole des Commissions Spécialisées des dans et grades équivalents ; que cette commission n’existait pas lorsque M. [M] a commencé à délivrer des DANG.
La FÉDÉRATION FRANÇAISE DE KARATÉ ET DISCIPLINES ASSOCIÉES soutient le bien fondé de cette demande rappelant qu’elle bénéficie d’une délégation ministérielle pour l’organisation et le développement [5] qui couvre également l’octroi des grades, dénommés «dangs» dans la pratique du [5] et que l’Institut ne peut prétendre également délivrer de tels grades, en violation notamment des dispositions de l’article L.212-5 du code du sport.
La cour constate d’abord que la FFKDA justifie, en application des articles L.131-14 et L. 131-15 du code des sports, avoir reçu délégation du ministère chargé des sports notamment pour organiser s’agissant [5] «les compétitions sportives à l’issue desquelles sont délivrés les titres internationaux, nationaux, régionaux ou départementaux ; (…)»
En outre, selon l’article L.131-16 du même code, «Les fédérations délégataires édictent :
1° Les règles techniques propres à leur discipline ainsi que les règles ayant pour objet de contrôler leur application et de sanctionner leur non-respect par les acteurs des compétitions sportives ;
2° Les règlements relatifs à l’organisation de toute manifestation ouverte à leurs licenciés ; (…)»
Par ailleurs, en vertu de l’article L.212-5 du code des sports, « Dans les disciplines sportives relevant des arts martiaux, nul ne peut se prévaloir
1: Mise en gras ajoutée par la cour.
d’un dan ou d’un grade équivalent sanctionnant les qualités sportives et les connaissances techniques et, le cas échéant, les performances en compétition s’il n’a pas été délivré par la commission spécialisée des dans et grades équivalents de la fédération délégataire ou, à défaut, de la fédération agréée consacrée exclusivement aux arts martiaux.
Un arrêté du ministre chargé des sports, fixe la liste des fédérations mentionnées au premier alinéa.»
Et selon l’article A.212-175-15 du même code, « La liste des fédérations dont les commissions spécialisées des dans et grades équivalents délivrent des dans ou grades équivalents est la suivante:
Union des fédérations d’aïkido;
Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées;
Fédération française de taekwondo et disciplines associées;
Fédération française de karaté et disciplines associées; (..)»
La cour considère, au regard du caractère nécessaire et usuel de l’usage du terme «DANG» pour désigner les passages de niveau dans la pratique du [5], qu’il constitue un grade équivalent au dan dans la pratique de cet art martial.
En conséquence, il résulte de ces dispositions que seule la commission spécialisée des dans et grades équivalents de la fédération délégataire, en l’espèce la FFKDA, peut délivrer des «dangs».
Les appelants ne peuvent être suivis lorsqu’ils affirment que les «dangs» qu’ils délivrent à leurs adhérents ne sanctionnent pas les performances en compétition mais le niveau de leurs connaissances générales des arts martiaux, dans la mesure où l’emploi de ce terme, à l’identique, ne peut qu’entraîner une confusion sur sa portée chez les titulaires et dans le public, avec le grade effectivement délivré dans la pratique du [5]. En outre, dans la mesure où l’article L212-5 précité mentionne, expressément, que nul ne peut se prévaloir d’un tel titre s’il n’est pas délivré par la commission spécialisée de la fédération délégataire, il consacre un monopole dans son attribution à cette commission, sauf à priver cette disposition de toute portée.
C’est en conséquence, à juste titre, que les premiers juges ont fait interdiction à l’INSTITUT [5] de procéder à la délivrance de « Dangs».
Sur les demandes indemnitaires et de publication
La FFKDA rappelle que l’usage des marques en cause par M. [M] et son Institut dans le cadre de la délivrance de grades, constitue une violation des dispositions du code des sports et du monopole qui lui a été accordé et réclame en conséquence l’indemnisation, d’une part, de son préjudice commercial correspondant au manque à gagner résultant du détournement des candidats au passage de grades, et d’autre part, de son préjudice résultant de l’obstruction et du ternissement de sa mission de service public, la délivrance de grades non officiels à des pratiquants de [5] nuisant, selon elle, à l’intégrité et à la valeur des «dangs» qu’elle a pour mission de protéger.
Elle insiste enfin sur la nécessité de publier la décision à venir afin de rétablir la vérité auprès du public quant à l’absence de légitimité des grades octroyés par l’INSTITUT [5] et de l’interdiction absolue de s’en prévaloir.
M. [M] et l’INSTITUT [5] soutiennent que les demandes de réparation de la FFKDA à hauteur de 50.000 € ne peuvent être accueillies dès lors qu’elle ne rapporte pas la preuve que la délivrance de grades dont elle aurait le monopole serait de 50 € par candidat affilié et de 150 € par candidat non affilié, ni la preuve de son préjudice financier ; que les «dangs» délivrés avant la délégation de 2008 de la FFKDA ne peuvent entrer en considération dans le calcul du montant du préjudice ; que la FFKDA ne démontre pas que les personnes répertoriées dans le Registre Officiel du « DANG » de M. [M] et de L’INSTITUT auraient été attirées par le passage de grade spécifique de la FFKDA ; que l’indemnisation résultant d’une perte de chance ne peut jamais être égale à l’avantage qui aurait été tiré si l’événement manqué s’était réalisé ; que la FFKDA ne rapporte aucune preuve du préjudice invoqué au titre du « ternissement de sa mission de service public ».
Sur le préjudice commercial
À titre liminaire, il doit être rappelé que l’absence de délégation ne fait pas obstacle à l’existence de fédérations indépendantes au sein desquelles les pratiquants peuvent pratiquer leur sport, sous réserve du respect de la législation applicable. Ainsi, comme l’a justement retenu le tribunal, les dispositions précitées n’interdisent pas la pratique du [5] au sein d’une association indépendante. En conséquence, la FFKDA ne peut invoquer un préjudice évalué en fonction du nombre d’adhérents au sein de l’Institut.
Il doit cependant être relevé que le fait que l’Institut délivre des «dangs» alors que cette délivrance relève de la seule FFKDA constitue un comportement fautif à son égard, au regard des dispositions déjà mentionnées.
Par ailleurs, la FFKDA justifie, à hauteur d’appel, que le passage de ce grade fait l’objet d’un droit d’inscription à la Fédération de 50 euros et, pour les non licenciés, de 150 euros (Pièce 38), et que, contrairement à ce que soutiennent les appelants, sa délégation a été prolongée jusqu’au 31 décembre 2025.
Sur le site internet de l’Institut est publiée une liste intitulée «registre officiel des «Dangs ®» listant les nombres de gradés, qui permet de constater que 494 récompenses ont été ainsi attribuées par l’Institut. Cependant, dans la mesure où la FFKDA n’a reçu délégation du ministère des sports que depuis 2008, elle n’est pas fondée à revendiquer un préjudice à hauteur de l’ensemble de ces distinctions qui sont, pour certaines, antérieures à cette date, la délivrance de ces grades ayant débuté en 1996.
En conséquence, au vu de cet ensemble d’éléments, la cour considère que le préjudice ainsi subi par la FFKDA, constitué par le manque à gagner résultant de la perte des frais d’inscription dont auraient dû s’acquitter les candidats au passage de grade, sera justement réparé par l’octroi d’une somme de 5.000 euros, sans qu’il soit nécessaire, en conséquence, de faire droit à la demande de communication de pièces sollicitées par l’intimée.
Le jugement déféré doit en conséquence être infirmé de ce chef.
– Sur le préjudice d’image
La FFKDA invoque également subir un préjudice résultant de l’obstruction commise par les intimées dans la bonne conduite de sa mission de service public, qui ont délivré des grades non officiels et ont ainsi nui à l’intégrité et à la valeur des «dangs» qu’elle a pour mission de protéger.
Cependant, la cour constate que la FFKDA se contente de procéder par affirmation sur ce point, sans apporter aucun élément de preuve, alors que M. [X] [M] et l’INSTITUT [5] démontrent, de leur côté, avoir défendu et promu ce sport depuis de nombreuses années, avant même que la FFKDA ne se voit confier la responsabilité de la délivrance des grades, et qu’ils n’ont jamais remis en cause publiquement son rôle.
En conséquence, les demandes formulées sur ce point par la FFKDA doivent être rejetées et le jugement déféré confirmé de ce chef.
– Sur la demande de publication
Dans la mesure où la FFKDA justifie d’une délégation de service public du ministère des sports notamment pour délivrer, via la commission spécialisée, les dans et grades équivalents, comme les «dangs» et que les appelants continuent à contester ce monopole, l’INSTITUT [5] – [5] décrivant toujours sur son site internet le 25 octobre 2021 les conditions dans lesquelles il délivre les «Dangs» à ses adhérents, il convient de faire droit à la mesure de publication sollicitée par la FFKDA, dans les conditions précisées au dispositif.
Le jugement déféré est en conséquence infirmé de ce chef.
Sur les demandes de M. [M] et L’INSTITUT [5]
Au titre de la contrefaçon de marques
Dans la mesure où les marques invoquées par les appelants au titre de la contrefaçon ont été jugées nulles pour certains produits et services et déchues pour les autres et qu’il n’est allégué d’aucun acte de contrefaçon à l’encontre de la FFKDA antérieurement au 11 août 2001 et au 15 novembre 2001, époque où elle n’avait, au demeurant, pas encore reçu de délégation du ministère des sports dans cette discipline, il convient de les débouter de l’ensemble de leurs demandes présentées au titre de la contrefaçon et de confirmer le jugement déféré de ce chef.
Au titre du parasitisme
M. [M] et l’INSTITUT [5] – [5] soutiennent que le tribunal s’est trompé en ne tenant pas compte de l’implication de M. [M] dans le développement de l’art martial du [5] alors qu’il est un des plus grands spécialistes [5] ; que l’INSTITUT a en outre acquis un droit opposable sur le signe distinctif « [5] », exploité de manière continue et publique comme dénomination sociale et nom de domaine ; que la FFKDA cherche à tirer profit de la réputation de l’INSTITUT ; qu’elle a choisi de reprendre les termes [5] aux cotés des termes « VOVINAM » et « DANG », générant ainsi une confusion auprès des pratiquants de l’Institut. Ils dénoncent enfin l’ampleur prise par la FFKDA qui étouffe leur pratique et les prive de jouir des retombées liées à cette notoriété, fruit d’un immense travail, leur causant un préjudice considérable.
La FÉDÉRATION FRANÇAISE DE KARATÉ ET DISCIPLINES ASSOCIÉES rappelle que le terme « [5] » constitue la désignation usuelle et générique, depuis les années 60-70, de cet art martial vietnamien et que ne pouvant faire l’objet d’aucun droit privatif, il ne constitue en rien une valeur propre à l’Institut.
Sur ce, s’il ne peut être contesté l’implication de M. [X] [M] dans la pratique et le développement de la pratique du [5], il doit également être relevé que les termes «[5]» et «DANG» constituent en France les termes communs pour désigner cet art martial vietnamien et le nom du grade sanctionnant la pratique de cette discipline depuis au moins les années 80, la fédération française de [5] ayant été créée en 1973, comme le mentionnent eux-mêmes les appelants sur le site internet de l’INSTITUT [5] – [5]. En conséquence, l’usage par la FFKDA de ces signes nécessaires à la désignation de ce sport et de ses niveaux de pratique, ne peut caractériser un agissement parasitaire au préjudice des appelants, et ce d’autant que celle-ci s’est vue confier, par le ministère chargé des sports, la délégation pour l’organisation et le développement [5], renouvelée depuis.
C’est en conséquence à raison que le tribunal a débouté l’INSTITUT [5] – [5] des demandes formulées à ce titre, le jugement déféré étant confirmé de ce chef.
Au titre de la déloyauté fautive
M. [M] et l’INSTITUT [5] soutiennent essentiellement que les actes d’exploitation de la FFKDA ont généré une dépréciation du signe «DANG». Ils rappellent que ce signe fait référence à des valeurs particulières et témoigne non seulement d’aptitudes physiques et sportives mais, également, de connaissances et d’une pratique de valeurs d’ordre intellectuel qui ne constituent pas les critères d’attributions des «Dangs» délivrés par la FFKDA. Ils reprochent également à la FFKDA de revendiquer un monopole dans la délivrance des « DAN/DUAN/DANG et grades équivalents » ce qui leur cause un préjudice.
La FÉDÉRATION FRANÇAISE DE KARATÉ ET DISCIPLINES ASSOCIÉES soutient qu’elle dispose, contrairement à l’INSTITUT, d’une délégation ministérielle et présente toutes les garanties et les gages de qualité pour encadrer et organiser les passages de «Dangs» en [5].
Sur ce, dans la mesure où il a déjà été retenu que la FFKDA dispose d’une délégation ministérielle afin d’organiser et de développer les arts martiaux vietnamiens et le passage des grades dans ces disciplines, dont le [5] fait partie, l’Institut ne peut se prévaloir à son encontre d’aucune faute susceptible d’ouvrir droit à réparation.
C’est en conséquence à juste titre que les premiers juges l’ont débouté de cette demande, le jugement déféré sera confirmé de ce chef.
Sur les autres demandes:
M. [X] [M] et l’INSTITUT [5], succombants, seront condamnés aux dépens d’appel et garderont à leur charge les frais non compris dans les dépens qu’ils ont exposés à l’occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant confirmées.
Enfin, l’équité et la situation des parties commandent de condamner M. [X] [M] et l’INSTITUT [5] in solidum à verser à la FFKDA une somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a
– déclaré irrecevable la demande de nullité des marques françaises « DANG » n° 96644429 et « DANG [5] » n° 96644996 ;
– prononcé la déchéance des droits de [X] [M] sur les marques françaises «DANG» n° 96644429 et «DANG [5]» n° 96644996 et ce, pour la totalité des produits et services visés à leur enregistrement pour défaut d’usage à titre de marque ;
– rejeté les demandes indemnitaires et de publication formulées par la FEDERATION FRANÇAISE DE KARATE ET DISCIPLINES ASSOCIEES ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Rejette la fin de non recevoir tirée de la prescription de l’action en nullité des marques françaises « DANG » n° 96644429 et « DANG [5] » n° 96644996 ;
Prononce la nullité de la marque française« DANG » n°96644429, pour les services suivants: «Éducation ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ; Éducation et divertissement ; institutions d’enseignement ; Organisation de concours en matière d’éducation ou de divertissement ; Enseignement de la gymnastique et des arts martiaux»,
Prononce la nullité de la marque française « DANG [5] » n°96644996, pour les produits et services suivants: « Éducation ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ; Éducation et divertissement ; institutions d’enseignement ; Organisation de concours en matière d’éducation ou de divertissement ; Enseignement de la gymnastique, des sports et des arts martiaux ; Tous documents, diplômes, certificat, grades, compétitions, réunions, stages, cartes de grades et passeports sportifs.»
Prononce la déchéance des droits de M. [X] [M] sur la marque française «DANG» n° 96644429 pour les produits et services suivants « Papiers et articles en papiers, carton et articles en carton, imprimés, journaux et périodiques, livres, articles pour reliure, photographies, papeteries, matières adhésives, matériels pour les artistes, pinceaux, machines à écrire de bureau, matériel d’instruction ou d’enseignement à l’exception des appareils, cartes à jouer, caractères d’imprimerie, clichés. Tissus, couverture de lit et de table. Jeux; jouets; articles de gymnastique et de sports (à l’exception des vêtements chaussures et tapis); décoration et ornement pour arbre de Noël. Publicité; gestion des affaires commerciales; administration commerciale; travaux de bureau. Distribution de prospectus, d’échantillons. Services d’abonnement de journaux pour des tiers. Conseils, informations ou renseignements d’affaires. Comptabilité. Reproduction de documents. Bureaux de placement. Gestion de fichiers informatiques. Organisation d’expositions à but commerciaux ou de publicité. édition de livres, revues, prêt de livres, revues. Dressage d’animaux. Divertissements, spectacles. Divertissements radiophoniques ou par télévision. Production de films. Agences pour artistes. Location de films, d’enregistrement phonographiques, d’appareils de projection et de cinéma et accessoires, de décors de théâtre. Distribution de journaux. Services de camp de vacances, bande vidéo, enregistrement, filmage» à compter du 8 novembre 2001;
Prononce la déchéance des droits de M. [X] [M] sur la marque française « DANG [5] » n°96644996 pour les produits et services suivants «Papiers et articles en papier, carton et articles en carton, imprimés, journaux et périodiques, livres, articles pour reliure, photographies, papeteries, matières collantes, bande, ruban pour la papeterie ou le ménage, matériels pour les artistes, pinceaux, machines à écrire de bureau, matériel d’instruction ou d’enseignement à l’exception des appareils, cartes à jouer, caractères d’imprimerie, clichés. Tissus à usage textiles, couverture de lit et de table. Jeux; jouets; articles de gymnastique et de sports (à l’exception des vêtements chaussures et tapis); décoration et ornement pour arbre de Noël. Publicité; affichage, agence de publicité, annonces publicitaires, publication de texte publicitaires, publicité radiophonique, télévisée, tracts, imprimés, documentation, journaux et livres; gestion des affaires commerciales; administration commerciale; travaux de bureau. Distribution de prospectus, d’échantillons. Services d’abonnement de journaux pour des tiers. Conseils, informations ou renseignements d’affaires. Comptabilité. Reproduction de documents. Bureaux de placement. Gestion de fichiers informatiques. Organisation d’expositions à but commerciaux ou de publicité; édition de livres, revues, prêts de livres, revues, abonnement de journaux. Dressage d’animaux. Divertissements, spectacles. Divertissements radiophoniques ou par télévision. Production de films. Agences pour artistes. Location de films, d’enregistrement phonographiques, d’appareils de projection et de cinéma et accessoires de décors de théâtre. Services de camps de vacances, filmage sur bande vidéo, service enregistrement, filmage. Communication radiophoniques, télégraphiques, téléphoniques, émission radiophonique, télévisée, messagerie électronique, transmission par ordinateur, programme de télévision et radiophonique transmission de télécopies, informations en matière de télécommunications, agence de presse» à compter du 15 novembre 2001,
Dit que la décision une fois irrévocable sera transmise à l’INPI à la requête de la partie la plus diligente pour être inscrite sur le registre national des marques,
Ordonne, la publication de l’extrait suivant «Par arrêt du 19 avril 2023, la cour d’appel de Paris a confirmé le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 7 mai 2021 qui a fait interdiction à l’INSTITUT [5] de délivrer à ses adhérents des « DANG » dans la discipline du [5]» sur la page d’accueil du site internet de l’INSTITUT [5], accessible à l’adresse www.[06].com, et ce pendant une durée d’un mois, dans un délai d’un mois à compter de la signification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai,
Condamne in solidum M. [X] [M] et l’INSTITUT [5] à payer à la FEDERATION FRANÇAISE DE KARATE ET DISCIPLINES ASSOCIEES une somme de 5.000€ en réparation de son préjudice,
Déboute la FEDERATION FRANÇAISE DE KARATE ET DISCIPLINES ASSOCIEES de ses autres demandes,
Condamne M. [X] [M] et l’INSTITUT [5] aux dépens d’appel,
Condamne M. [X] [M] et l’INSTITUT [5], in solidum, à verser à la FEDERATION FRANÇAISE DE KARATE ET DISCIPLINES ASSOCIEES une somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE