Troubles du voisinage : 5 janvier 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/07511

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Troubles du voisinage : 5 janvier 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/07511
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COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 64A

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 05 JANVIER 2023

N° RG 21/07511

N° Portalis DBV3-V-B7F-U4XT

AFFAIRE :

S.A.R.L. NOUVELLE REINE FOCH Société NOUVELLE REINE FOCH

C/

[F] [R]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Octobre 2021 par le TJ de VERSAILLES

N° Chambre : 3

N° RG : 20/02406

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Anne-lise ROY

Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES

Me Ghislaine D’ORSO de la SCP CABINET D’ORSO

Me Mélina PEDROLETTI

Me Ghislaine DAVID-MONTIEL

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE CINQ JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A.R.L. NOUVELLE REINE FOCH

N° SIRET : 775 708 514

[Adresse 11]

[Localité 7]

Représentant : Me Anne-lise ROY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 343 – N° du dossier REINE

Représentant : Me Tristan DUPRE DE PUGET de la SCP FISCHER TANDEAU DE MARSAC SUR & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0147

APPELANTE

****************

1/ Monsieur [F] [R]

né le [Date naissance 3] 1950 à [Localité 14] (35)

de nationalité Française

[Adresse 9]

[Localité 7]

2/ Madame [Y] [D] épouse [R]

née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 15] (59)

de nationalité Française

[Adresse 9]

[Localité 7]

3/ S.C.I. DU [Adresse 9], représentée par son gérant

N° SIRET : 392 847 4 22

[Adresse 9]

[Localité 7]

4/ SDC DU [Adresse 9] ET [Adresse 8], agissant son syndic en exercice Monsieur [R]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 2267892

Représentant : Me François PERRAULT, Plaidant, Barreau Versailles Vestiaire C393

INTIMES

5/ VILLE DE [Localité 16] Collectivité publique territoriale située dans le département des Yvelines (SIREN n°217.806.462), représentée par son maire en exercice dûment habilité

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentant : Me Ghislaine ORSO (D’) de la SCP CABINET D’ORSO, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 201 N° du dossier 1810094

INTIMEE

6/ SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU [Adresse 5] ET [Adresse 10] représenté par son Syndic la SARL SOCAGI,

N° SIRET : 385 213 293

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626

Représentant : Me Eléonore ADDUARD, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Représentant : Me François BLANGY de la SCP CORDELIER & Associés, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0399

INTIME

7/ SAS REINE 45

N° SIRET : 392 656 526

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représentant : Me Ghislaine DAVID-MONTIEL, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 216

Représentant : Me Amany GIRGIS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, Plaidant, avocat substituant Me Emmanuel RASKIN de la SELARL SOCIETE D’ETUDES FISCALES ET JURIDIQUES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0230

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 14 Octobre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Florence PERRET, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence PERRET, Président,,

Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

Madame Gwenael COUGARD, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,

———

FAITS ET PROCEDURE :

La société du [Adresse 9] (ci-après, la SCI du [Adresse 9]), dont les associés sont M. [F] [R] et Mme [Y] [D] épouse [R], alors propriétaire d’un immeuble situé [Adresse 9] depuis le 29 novembre 1974, a procédé à la mise en copropriété de l’immeuble suivant règlement de copropriété avec état descriptif de division établi par Me [V], notaire associé à [Localité 13], le 21 juin 2016.

La société [Adresse 9] est actuellement propriétaire des appartements situés au 1er, 2ème et 3ème étages, constituant les lots n°2 et 3 de l’état descriptif de division.

L’immeuble voisin, édifié dans les années 1950 sur 7 niveaux et situé à l’angle du [Adresse 12], est la propriété du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et [Adresse 10] (ci-après, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10]).

Les lots en rez-de-chaussée et au sous-sol n°1, 3, 32 et 33 de cet immeuble appartiennent à la société Nouvelle Reine Foch (ci-après, la société Nouvelle Reine) et sont exploités depuis 1980 par la société Reine 45, sous l’enseigne « U EXPRESS ».

Se plaignant de troubles acoustiques du fait de l’approvisionnement des marchandises du supermarché au moyen de transpalettes par les portes du [Adresse 5] et par une porte située immédiatement à droite de leur immeuble, constitutifs, selon lui, d’un trouble manifestement illicite, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et [Adresse 8] (ci-après, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9]) représenté par son syndic, M. [R], a fait assigner en référé la société Reine 45, la société Nouvelle Reine et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10] pour voir interdire l’utilisation du couloir au déchargement, celui-ci devant l’être par les portes du 45, interdire l’utilisation de chariots transpalettes avant 7 heures et obtenir la désignation d’un expert.

La société [Adresse 9] est intervenue volontairement à la procédure.

Par ordonnance du 21 juin 2017, le juge des référés du tribunal de grande instance de Versailles a rejeté les demandes d’interdiction mais a fait droit à la demande d’expertise et désigné M. [Z] [K].

Par ordonnance du 2 novembre 2018, l’expertise a été rendue commune à la ville de [Localité 16] qui a constitué avocat mais n’a pas conclu.

L’expertise a établi des notes aux parties les 5 juin 2018 et 28 décembre 2018 puis le 10 janvier 2020, la première partie de son rapport contenant ses constatations et ses préconisations de travaux, renvoyant à son rapport final l’analyse des travaux, celle des responsabilités et ses réponses aux dires des parties.

Par acte du 11 mars 2020, M. et Mme [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la SCI du [Adresse 9] ont fait assigner devant le tribunal judiciaire de Versailles la société Reine 45, la société Nouvelle Reine, la ville de [Localité 16] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10] afin que le tribunal sursoie à statuer sur les responsabilités dans l’attente de l’exécution des travaux et du rapport d’expertise définitif à intervenir, interdise l’entrée de transpalettes de marchandises par le couloir du [Adresse 10], enjoigne à la société Reine 45 d’entretenir et changer tous les six mois les roulettes de ses chariots, enjoigne à la société Reine 45 de ne pas entreposer de marchandises sur l’espace public, enjoigne à la ville de Versailles de faire poser des enrobages sur toute la longueur du trottoir et condamne la société Reine 45 à payer à M. et Mme [R] la somme mensuelle de 5 000 euros à titre de provision au titre des troubles de jouissance subis.

Le 8 février 2021, M. et Mme [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la société [Adresse 9] ont notifié des conclusions d’incident aux fins de voir ordonner des mesures provisoires.

Pour sa part, la société Nouvelle Reine a soulevé par conclusions d’incident notifiées le 1er mars 2021 des fins de non-recevoir tirées du défaut de qualité et d’intérêt à agir du syndicat des copropriétaires du [Adresse 9], de la SCI du [Adresse 9] et de M. et Mme [R] et de la prescription de leur action.

Par ordonnance du 3 mars 2021, le juge de la mise en état a ordonné la jonction des incidents.

Par jugement du 21 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Versailles a :

– dit que le juge de la mise en état est compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir soulevées par la société Nouvelle Reine, la société Reine 45 et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10],

– rejeté les fins de non-recevoir soulevées par la société Reine 45, la société Nouvelle Reine et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10] tirées du défaut de qualité et d’intérêt à agir des demandeurs et de la prescription de leur action,

– déclaré en conséquence M. et Mme [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la société du [Adresse 9] recevables en leur action,

– dit que le juge de la mise en état est compétent pour statuer sur les demandes de mesures provisoires,

– débouté M. et Mme [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la société [Adresse 9] de leurs demandes de mesures provisoires,

– débouté les parties de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que les dépens de l’incident suivront le sort des dépens de l’instance au fond,

– renvoyé l’affaire à la mise en état.

a) Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité et d’intérêt à agir des demandeurs, le tribunal a retenu qu’agissant dans l’intérêt collectif de la copropriété en étant représenté par son syndic auquel l’assemblée générale des copropriétaires avait donné mandat d’agir en justice à l’encontre des défendeurs afin d’obtenir la cessation des troubles de jouissance subis et l’allocation de dommages et intérêts, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] justifiait d’une qualité et d’un intérêt à agir, de sorte que son action était recevable. De même, le tribunal a considéré qu’en qualité de copropriétaire, la société [Adresse 9] avait qualité et intérêt à agir en cessation du trouble anormal de voisinage, sans avoir à démontrer qu’elle subit un préjudice personnel et direct, l’existence du préjudice invoqué par le demandeur n’étant pas une condition de recevabilité de l’action mais de son succès. En outre, le tribunal a jugé qu’en qualité d’occupants de l’immeuble, M. et Mme [R] étaient recevables à agir sur le fondement du trouble anormal de voisinage.

b) Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription, le tribunal a relevé que l’immeuble n’avait été placé sous le régime de la copropriété que le 21 juin 2016 et que M. et Mme [R] n’y avaient installé leur domicile qu’à compter du 26 janvier 2017, de sorte que si les nuisances sonores avaient pu commencer avant janvier 2017, ces derniers ne pouvaient avoir connaissance des nuisances avant cette date. Il a par ailleurs constaté, d’une part, qu’il n’était pas démontré que la société [Adresse 9] aurait été informée par son ancien locataire des nuisances avant l’occupation de ses locaux par M. et Mme [R] en janvier 2017 et, d’autre part, que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] ne pouvait agir avant le 21 juin 2016, date de sa constitution. Il en a déduit que l’action des demandeurs, fondée sur la théorie du trouble anormal du voisinage, était recevable, l’assignation délivrée le 11 mars 2020, l’ayant été avant l’expiration du délai de prescription quinquennal de l’article 2224 du code civil.

c) Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à défendre du syndicat des copropriétaires du [Adresse 10], le tribunal a retenu que les demandeurs recherchant la responsabilité du syndicat des copropriétaires du [Adresse 10] sur le fondement de l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965 et de l’action oblique prévue à l’article 1341-1 du code civil, ce dernier avait bien qualité à défendre à ces actions.

Sur les mesures provisoires, le tribunal a considéré qu’il n’y avait pas lieu de faire droit à la demande de mesures provisoires dès lors que les opérations d’expertise étaient toujours en cours et que l’expert ne s’était pas prononcé sur les responsabilités et l’analyse des devis de travaux, la société Reine 45 ayant en outre missionné la société Decibel France afin de procéder à une étude acoustique du magasin, avec une recherche de solutions.

Par acte du 20 décembre 2021, la société Nouvelle Reine, propriétaire du supermarché situé au rez-de-chaussée du [Adresse 10] et baillerresse, a interjeté appel et prie la cour, par dernières écritures du 3 mars 2022, de :

A titre principal,

– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a :

dit que le juge de la mise en état est compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir soulevées par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10] et [Adresse 6] ,

rejeté les fins de non-recevoir soulevées par la société Nouvelle Reine tirées du défaut de qualité et d’intérêt à agir des demandeurs et de la prescription de leur action,

déclaré en conséquence M. et Mme. [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la société [Adresse 9] recevables en leur action,

dit que le juge de la mise en état est compétent pour statuer sur les demandes de mesures provisoires,

débouté les parties de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

dit que les dépens de l’incident suivront le sort des dépens de l’instance au fond,

renvoyé l’affaire à la mise en état,

– confirmer le jugement incident du 21 octobre 2021 pour le reste,

Le reprenant et y ajoutant,

– déclarer le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Versailles incompétent pour connaître des demandes de mesures provisoires sollicitées par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9], la société [Adresse 9] et M. et Mme [R] compte tenu de leur identité avec leurs demandes formulées au fond,

– juger irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires du [Adresse 9], de la société [Adresse 9] et de M. et Mme [R] pour défaut de qualité et d’intérêt à agir,

– juger irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires du [Adresse 9], de la société [Adresse 9] et de M. et Mme [R] comme prescrites,

En conséquence,

– débouter le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9], la société [Adresse 9] et M. et Mme [R] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions au fond, et in fine provisoires,

– mettre fin à l’instance,

Subsidiairement, si la cour devait (i) juger les demanderesses recevables en leurs demandes et actions et (ii) retenir la compétence matérielle du juge de la mise en état pour connaître des demandes de mesures provisoires,

– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9], la société [Adresse 9] et M. et Mme [R] de leurs demandes de mesures provisoires infondées,

En tout état de cause,

– débouter M. et Mme [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la société [Adresse 9] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

– condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9], la société [Adresse 9] et M. et Mme [R] à payer solidairement à la société Nouvelle Reine la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens avec recouvrement direct, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par dernières écritures du 13 juin 2022, M. et Mme [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la société [Adresse 9] prient la cour de :

– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :

dit que le juge de la mise en état était compétent pour statuer sur les fins de non- recevoir soulevées par la société Nouvelle Reine, la société Reine 45 et le syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 10],

rejeté les fins de non-recevoir soulevées par la société Reine 45, la société Nouvelle Reine et le syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 10] tirées du défaut de qualité et d’intérêt à agir des demandeurs et de la prescription de leur action,

déclaré en conséquence M. et Mme [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la société du [Adresse 9] recevables en leur action,

dit que le juge de la mise en état est compétent pour statuer sur les demandes de mesures provisoires,

renvoyé l’affaire à la mise en état,

– déclarer recevable et bien fondé l’appel incident,

– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a :

débouté M. et Mme [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la société [Adresse 9] de leurs demandes de mesures provisoires et les a déboutés de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

– ordonner à titre provisoire à la société Reine 45 de ne pas utiliser de transpalettes dans le couloir du [Adresse 10] et ce jusqu’à la constatation par M. [K] de la bonne fin des travaux préconisés dans son rapport déposé le 10 janvier 2020, à savoir la ‘ réalisation, sur l’ensemble du plancher du tunnel de livraison, d’une isolation vibratoire qui pourrait être réalisée à l’aide d’une chape flottante d’environ 50 mm d’épaisseur avec interposition d’un matériau isolant type Domisol, et ce sous astreinte de 5.000 € par infraction constatée,

– ordonner à titre provisoire à la société Reine 45 de faire entrer ou sortir ses palettes de marchandise ou de cartons usagés exclusivement par les portes en façade du [Adresse 5] et ce jusqu’à la constatation par M. [K] de la bonne fin des travaux préconisés dans son rapport déposé le 10 janvier 2020, à savoir la réalisation, sur l’ensemble du plancher du tunnel de livraison, d’une isolation vibratoire qui pourrait être réalisée à l’aide d’une chape flottante d’environ 50 mm d’épaisseur avec interposition d’un matériau isolant type Domisol, et ce sous astreinte de 5 000 euros par infraction constatée,

– subsidiairement, ordonner à titre provisoire que les livraisons ne pourront se faire qu’à partir de 9 heures 30 ou après l’heure de fermeture au public du magasin fixée à 19 h 50 et ce sous astreinte de 5 000 euros par infraction constatée,

– juger que les astreintes ci-dessus prononcées commenceront à courir à compter de la signification de l’arrêt à intervenir et pour une durée de deux mois, en réserver le pouvoir de la liquider à la troisième chambre du tribunal judiciaire de Versailles,

Y ajoutant,

– condamner in solidum la société Reine 45, la société Nouvelle Reine et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10] à payer à chacun des demandeurs de la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Par dernières écritures du 16 février 2022, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10] prie la cour de :

– le déclarer recevable et bien-fondé en son appel incident,

– infirmer le jugement rendu en ce qu’il a débouté le syndicat des propriétaires du [Adresse 10] de sa fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité et d’intérêt à agir des requérants,

– le confirmer pour le surplus,

Statuant à nouveau,

– déclarer irrecevables les demandes présentées M. et Mme [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la société [Adresse 9] pour défaut de qualité à agir et d’intérêt à défendre,

– juger que le tribunal est dessaisi de l’ensemble des demandes présentées par M. et Mme [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la société [Adresse 9] en ce qu’elles sont dirigées contre le syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 10],

– les condamner à verser au syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 10] la somme de 4000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens avec recouvrement direct, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par dernières écritures du 16 décembre 2022, la société Reine 45, locataire des locaux commerciaux, prie la cour de :

– recevoir la société Reine 45 en ses conclusions et l’y déclarer bien fondée,

A titre principal,

– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a :

dit que le juge de la mise en état est compétent pour statuer sur les fins de non- recevoir soulevées par le syndicat des copropriétaires de du [Adresse 10],

rejeté les fins de non-recevoir soulevées par la société Nouvelle Reine Foch tirées du défaut de qualité et d’intérêts à agir des demandeurs et de la prescription de leur action,

déclaré en conséquence M. et Mme. [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9], et la société [Adresse 9] recevables en leur action,

dit que le juge de la mise en état est compétent pour statuer sur les demandes de mesures provisoires,

débouté les parties de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

dit que les dépens de l’incident suivront le sort des dépens de l’instance au fond,

renvoyé l’affaire à la mise en état,

– confirmer le jugement déféré pour le reste, le reprenant et statuant à nouveau :

– déclarer le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Versailles incompétent pour connaître des demandes de mesures provisoires sollicitées M. et Mme. [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la société [Adresse 9], compte tenu de leur identité avec leurs demandes formulées au fond,

– déclarer irrecevables les demandes de M. et Mme [R], du syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et de la société [Adresse 9] pour défaut de qualité et d’intérêt à agir,

En conséquence,

– débouter M. et Mme [R], le syndicat des copropriétaires [Adresse 9] et la société [Adresse 9] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions au fond, et celles formulées à titre provisoire,

– mettre fin à l’instance.

Subsidiairement, si la cour devait juger le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9], la société [Adresse 9] et M. et Mme [R] recevables en leurs demandes et actions et retenir la compétence matérielle du juge de la mise en état pour connaître des demandes de mesures provisoires,

– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9], la société [Adresse 9] et M. et Mme [R] de leurs demandes de mesures provisoires infondées,

Sur l’appel incident formulé par M. et Mme [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la société [Adresse 9],

– juger que les demandes de mesures provisoires formulées par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9], la société [Adresse 9] et M. et Mme [R] dans le cadre de l’appel sont mal fondées,

En conséquence,

– débouter le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9], la société [Adresse 9] et M. et Mme [R], de leurs demandes de mesures provisoires.

En tout état de cause,

– condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9], la société [Adresse 9] et M. et Mme [R] à payer solidairement à la société Reine 45 la somme de 7 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La ville de [Localité 16] a constitué avocat mais n’a pas conclu.

La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 29 septembre 2022.

SUR QUOI :

1°) Sur la compétence du juge de la mise en état pour statuer sur les mesures provisoires sollicitées par les époux [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la SCI du [Adresse 9] :

Selon les dispositions de l’article 789, 6° du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 applicable aux instances introduites après le 1er janvier 2020, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les fins de non-recevoir. Lorsque la fin de non-recevoir nécessite que soit tranchée au préalable une question de fond, le juge de la mise en état statue sur cette question de fond et sur cette fin de non-recevoir sauf opposition des parties et par des dispositions distinctes dans le dispositif de l’ordonnance.

Le juge de la mise en état était compétent pour statuer sur les mesures provisoires dont la loi lui réserve seul la compétence pour le cours de la procédure jusqu’à l’ordonnance de clôture et le jugement déféré sera confirmé sur ces points.

2°) Sur la recevabilité des demandes formulées par les époux [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la SCI du [Adresse 9] :

– sur le défaut de qualité et d’intérêt à agir :

La société Nouvelle Reine, propriétaire du supermarché ainsi que la société Reine 45, sa locataire exploitante, soulèvent l’irrecevabilité des mesures sollicitées compte tenu de leur identité avec les demandes formulées au fond dès lors que les demandes de mesures provisoires des intimés ont le même objet que leurs demandes au fond et sont fondées sur des moyens et des éléments de preuve débattus au fond.

Or, il est toujours loisible à une partie de demander la réalisation de mesures provisoires pour le cours de la procédure, le juge restant libre de les accepter ou non au vu de ce qu’il estime nécessaire ou urgent, mesures dont le bien-fondé sera de nouveau analysé lors de la décision au fond si leur maintien ou leur renouvellement sont encore demandés. Aucune disposition ne s’oppose à l’examen de ces demandes présentées par les intimés au juge de la mise en état.

Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

La société Nouvelle Reine soulève ensuite, au visa des articles 122, 31 et 32 du code de procédure civile, l’irrecevabilité des demandes de mesures provisoires sollicitées par les époux [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la SCI du [Adresse 9] en soutenant que l’action pour troubles du voisinage ne peut prospérer que si le demandeur peut faire valoir un préjudice personnel et direct et qu’en l’espèce :

– la SCI du 79 ne démontrerait aucun intérêt à agir puisque seuls les occupants de l’immeuble seraient victimes du trouble anormal du voisinage qu’elle invoque, le fait que M. [R] soit son gérant ne pouvant suffire à lui conférer un quelconque intérêt ou qualité à agir,

– le syndicat des copropriétaires du 79 ne démontrerait aucun intérêt à agir quant aux prétendues nuisances sonores puisqu’il ne saurait alléguer qu’un préjudice acoustique subi dans les seules parties communes,

– les époux [R] ne rapporteraient pas la preuve qu’ils occupent les lieux depuis 2017 et ils n’étaient pas parties à l’expertise.

Le syndicat des copropriétaires estime également que M. et Mme [R], le syndicat des copropriétaires et la SCI du [Adresse 9] sont irrecevables à agir à son encontre pour défaut de qualité à agir et défaut de qualité du syndicat à défendre.

ll fait valoir que pour mettre en ‘uvre la responsabilité de plein droit de l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965, il faut démontrer que les dommages proviennent des parties communes de l’immeuble et qu’ils résultent d’un vice de construction, ce qui n’est pas le cas en l’espèce ; que par ailleurs, l’action oblique sur le fondement des troubles anormaux de voisinage n’a pas vocation à s’appliquer, le syndicat des copropriétaires n’étant débiteur d’aucune obligation à l’encontre des demandeurs. Il ajoute qu’aucun copropriétaire ne s’est jamais plaint d’un quelconque manquement au règlement de copropriété du fait de l’exploitation par la société Reine 45 de son local commercial et ce, depuis plus de trente ans.

Les époux [R], la SCI et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] exposent au regard de la qualité à agir, que la SCI représentée par son gérant, M. [R], propriétaire des lots situés au 1er, 2e et 3e étage, a qualité pour défendre l`objet social de ses statuts ainsi que le syndicat des copropriétaires qui est chargé d’assurer la destination des parties privatives et la plénitude des droits de ses propriétaires, de même que M. et Mme [R] occupant les lieux qui subissent personnellement les troubles de jouissance.

Ils assurent par ailleurs que l’articIe L.112-16 du code de la construction et de l’habitation n’a pas vocation à s’appliquer puisque la société Reine 45 ne prouve pas s’être conformée aux dispositions des lois et règlements et ne prouve pas que son activité de supermarché s’est poursuivie dans les mêmes conditions.

Sur ce,

L’article 31 du code de procédure civile énonce que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé. Selon l’article 32 du même code, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.

La cour a pu constater que les époux [R] avaient versé aux débats toutes les pièces prouvant leur propriété des lots 2 et 3 de l’état descriptif de division, les statuts de la SCI ainsi que l’autorisation à agir délivrée au syndic de l’immeuble par l’assemblée générale du syndicat des copropriétaires du [Adresse 9].

S’agissant du syndicat des copropriétaires, l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit qu’il a qualité pour agir en justice, tant en demandant qu’en défendant ; il peut notamment agir, conjointement ou non avec un ou plusieurs de ces derniers, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l’immeuble.

Il résulte de ces dispositions que le syndicat des copropriétaires peut agir en réparation d’un dommage causé à la copropriété par un copropriétaire ou un tiers à condition que le préjudice atteigne l’ensemble des copropriétaires. Il ne peut agir que si le préjudice est distinct de celui des copropriétaires ou que l’intérêt collectif et les intérêts individuels sont liés.

En l’espèce, il apparaît que le syndicat des copropriétaires entend défendre l’intérêt collectif de la copropriété, étant rappelé que le syndicat des copropriétaires est constitué de deux copropriétaires mais qu’il est indifférent que celui qui possède les locaux du rez-de-chaussée ne se soit pas joint à l’action. Les nuisances alléguées ne peuvent qu’affecter les parties communes de l’immeuble de même qu’ils sont encore plus audibles du rez-de-chaussée que des 1er, 2e et 3e étages de sorte que le syndicat des copropriétaires est recevable à agir pour les faire cesser.

Quant aux époux [R] et à la SCI du [Adresse 9], dans la mesure où les nuisances qu’ils dénoncent se produisent dans l’immeuble jouxtant leurs lots et où M. [R] prouve qu’il a été dûment habilité (pour le syndicat des copropriétaires) et qu’il représente valablement la SCI pour invoquer ce préjudice direct et personnel, ils ont également à la fois intérêt à agir et qualité pour le faire.

Le jugement déféré sera confirmé sur le point de la recevabilité des actions engagées par la SCI, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et de M. et Mme [R] qui ont intérêt et qualité à agir.

– sur la prescription :

La société Nouvelle Reine soulève l’irrecevabilité des demandes de mesures provisoires sollicitées par les époux [R], le syndicat des copropriétaires et la SCI du [Adresse 9] en raison de leur prescription.

Elle fait valoir que la SCI du 79 est devenue propriétaire de l’immeuble situé au [Adresse 9] par acte notarié en date du 29 novembre 1974 ; que depuis la fin des années 80, l’immeuble sis [Adresse 6] est donné à bail par la société Nouvelle Reine Foch à la société Reine 45 qui l’exploite à usage de supermarché sous l’enseigne « SUPER U ” ; que la SCI du 79 et les époux [R], en tant que dirigeants de la SCI du 79, ont donc nécessairement connaissance des troubles allégués depuis près de 30 ans ; que leur action initiée en 2017 est prescrite, sauf pour les demandeurs à rapporter la preuve d’une modification des conditions d’exploitation par la société Reine 45 des locaux qui lui sont donnés à bail.

Les époux [R], la SCI et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] soutiennent que leur action est recevable et au regard de la prescription, ils expliquent que l’immeuble du [Adresse 9] était à usage de bureaux jusqu’en 2014, date à laquelle son propriétaire a procédé à sa réhabilitation et l’a soumis au régime de la copropriété (RCP du 21 juin 2016) et divisé en 3 lots principaux: le lot n° 1 en rez-de-chaussée dont la SC Sèvres a fait l’acquisition est demeuré à usage de bureaux, les lots n° 2 et 3 restant la propriété de la SCI du [Adresse 9], constitués des 1er, 2è et 3e étages aménagés à usage d’habitation dans lesquels M. et Mme [R], membres de la SCI, ont installé leur domicile ; que ce n’est au plus tôt qu’à partir du 26 janvier 2017 que la SCI propriétaire a été en mesure de constater les désordres acoustiques dont le siège se trouvait essentiellement dans l’absence d’isolation phonique du sas et les défauts de structure de l’immeuble voisin ; que le point de départ de la prescription étant fixé selon les dispositions de l’article 2224 du code civil à compter du jour ou le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer l’action, les demandes formées par assignation du 11 mars 2017 ont été engagées dans les cinq ans à compter de la connaissance effective du fait dommageable et de la première manifestation du trouble ou de son aggravation ayant causé le

dommage ; que, de même, les violations des dispositions réglementaires des 11 décembre 2012 et 30 juin 2017 sont constitutives à elles seules du point de départ de la prescription et suffisent à la recevabilité de I’action.

Sur ce,

L’action des intimés est fondée sur la théorie du trouble anormal de voisinage et relève de la prescription quinquennale de l’article 2224 du code civil qui édicte que le point de départ de la prescription s’entend du ” jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer “.

L’article 2241 alinéa 1 du même code précise que la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.

En l’espèce, il est établi que la société Reine 45 exploite un supermarché dans les locaux sis [Adresse 6] et [Adresse 10] depuis le 19 novembre 1993.

Les époux [R] produisent les justificatifs de l’occupation des locaux dont ils revendiquent la propriété depuis leur achat, leur usage de bureaux en location depuis leur achat jusqu’en 2014, le congé donné à leur locataire, la société PVP Participations, donné à compter du 30 juin 2014 par acte d’huissier du 19 décembre 2013, le procès-verbal de réception de leur propre chantier de réhabilitation en date du 26 janvier 2017, travaux dont la société Nouvelle Foch a dit elle-même dans un dire n°1 adressé à l’expert le 22 mars 2019 qu’ils ont été ‘très significatifs’.

C’est dès le 30 janvier 2017, soit quelques jours après leur installation dans ces locaux à usage de domicile principal qu’ils ont fait établir un procès-verbal afin de faire constater les nuisances occasionnées par la livraison des marchandises du magasin ” U Express “.

Ils prouvent donc qu’ils ont agi dans le délai de 5 ans prévu par l’article 2224 du code civil et n’ont pu mesurer le bruit engendré par l’exploitation commerciale que depuis le 26 janvier 2017 constituant le point de départ du délai de prescription pour agir sur le fondement du trouble anormal de voisinage qui les affecte, en tant qu’habitants de l’immeuble et qui atteint l’intérêt de la SCI qui possède les lots qu’ils occupent.

Rien ne vient prouver que la SCI elle-même, bailleresse, ait été informée par son ancien locataire des nuisances avant l’occupation de ses locaux par les époux [R] en janvier 2017.

Enfin, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 9] ayant été constitué le 21 juin 2016, il ne pouvait agir avant cette date.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a dit que l’action du syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 9], de la SCI du [Adresse 9] et des époux [R], introduite par assignation délivrée le 11 mars 2020, est recevable pour être intervenue avant l’expiration du délai de prescription de cinq ans.

3°) Sur le bien-fondé des mesures provisoires sollicitées :

La société Nouvelle Reine soutient le caractère mal fondé des demandes de mesures provisoires sollicitées par les époux [R], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9] et la SCI située à la même adresse.

A titre subsidiaire, la société Nouvelle Reine Foch invoque le caractère injustifié des mesures provisoires sollicitées en faisant valoir quelles ont déjà fait l’objet d’une décision de rejet par le juge des référés en 2017, faute de preuve des troubles allégués, qu’elles ne reposent que sur les énonciations d’un rapport d’expertise dont la validité est expressément contestée devant le juge du fond et contre lequel le juge en charge du contrôle a été saisi, et qu’elles sont mal fondées en droit compte tenu de l’antériorité de l’activité de la société Reine 45 par rapport à l’emménagement des époux [R] et à la création du syndicat des copropriétaires du 79.

La société Reine 45, exploitante du supermarché, fait valoir que les mesures telle que l’interdiction de déchargement avant 9h30 reviendrait à priver la société Reine 45 de la possibilité d’exploiter son magasin qui ouvre à 8h30 et l’interdiction d’utiliser les transpalettes dans le couloir du [Adresse 10], seule voie possible et autorisée pour effectuer les livraisons nécessaires au fonctionnement du magasin, reviendrait à mettre la société Reine 45 dans l’illégalité eu égard à l’arrêté municipal n° A 2016/1853 et à l’empêcher d’exploiter ; qu’il n’appartient pas au juge de la mise en état d’ordonner la réalisation de travaux qui ne peuvent pas s’analyser comme des ‘mesures provisoires’.

Sur ce,

Selon l’article 789, 4° du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est seul compétent pour ordonner des mesures provisoires, même conservatoires, à l’exception des saisies et mesures de sûreté.

En l’occurrence, le syndicat des copropriétaires et la SCI du [Adresse 9] et les époux [R] ont saisi le juge de la mise en état d’un incident tendant à voir prononcer des mesures provisoires. De telles mesures, prévues par l’article 789, 4° précité, sont bien de la compétence du juge de la mise en état.

Il ressort des pièces produites aux débats que l’expert judiciaire a effectué des mesures acoustiques les 18 et 19 avril 2018 et du 5 au 7 mai 2018, puis le 10 décembre 2018 qui établissent la réalité du trouble allégué et son caractère anormal.

Dans la première partie de son rapport d’expertise établie le 10 janvier 2020, il indique qu’au vu de l’analyse des mesures acoustiques et du fonctionnement de ce type de magasin, les livraisons peuvent fonctionner en temps cumulé, entre 2 et 4 heures, ce qui conduit à des valeurs d’émergence de 5 dB(A) en période nocturne et 7 dB(A) en période diurne. Il précise que les mesures qui ont été réalisées du mercredi 18 avril 2018 à 18h20 au jeudi 19 avril 2018 à 17h25, puis du samedi 5 mai à 20h00 au lundi 7 mai 2018 à 13h35 mettaient déjà en évidence une émergence non réglementaire de jour comme de nuit de 12,4 dB(A) ; que les dernières mesures effectuées le 10 décembre 2018 confirment cette émergence non réglementaire puisqu’elle est égale à 17,5 dB(A). Il note par ailleurs que le bruit engendré par les livraisons, notamment le bruit des déplacements des transpalettes est particulièrement audible et gênant dans l’appartement de M. et Mme [R].

Il conclut que les mesures d’isolement aux bruits aériens et les mesures de vibrations permettent de constater que l’essentiel du mode de transmission du bruit se fait par voix solide au travers de la structure de l’immeuble abritant le magasin ‘U Express’. Il préconise de réaliser, sur l’ensemble du plancher du tunnel de livraison, une isolation vibratoire à l’aide d’une chape flottante d’environ 50 mm d’épaisseur avec interposition d’un matériau isolant type Domisol et, afin d’éviter toute propagation vers l’extérieur du bâtiment, de réaliser un traitement acoustique du plafond et, éventuellement, des parois verticales afin de diminuer la résonnance interne par l’abaissement de la durée de réverbération.

Il indique ” qu’il y aurait également lieu d’adapter les horaires de livraison afin que ceux-ci n’aient pas lieu en période nocturne”.

La seconde partie de son rapport n’a pu être réalisée, l’expert assurant n’avoir pas reçu les devis lui permettant d’accomplir complètement sa mission et promettant de le faire ultérieurement. La cour n’a pas connaissance de la réalisation d’une seconde partie qui seule, comprenant une plus grande précision dans la définition des travaux préconisés et l’analyse des devis, lui permettrait de faire réaliser notamment des travaux d’isolation du couloir par lequel les palettes passent au [Adresse 10].

Dans ces conditions, il appartiendra aux demandeurs d’agir au fond pour faire éventuellement compléter cet avis technique.

La société Reine 45 justifie avoir fait doubler le mur mitoyen entre le local de réception de marchandises et le couloir d’accès par la société Decibel France après le dépôt du rapport d’expertise, le 10 décembre 2021, sans que la cour soit informée des conséquences sur la propagation des bruits indésirables. Aucune des parties n’évoque cette modification des lieux dont l’impact pourrait être évalué par une nouvelle mesure technique et qui a peut-être changé l’environnement dans lequel est intervenu l’expert.

Le flou des préconisations techniques jugées nécessaires par ce dernier couplé au fait qu’aucun chiffrage n’est proposé ni aucun devis analysé ne permet pas à la cour de prononcer de quelconques mesures provisoires pour le cours de la procédure.

Quant à celles consistant en une interdiction de décharger les palettes avant 9h30 et d’utiliser pour ce faire le couloir du [Adresse 10] jusqu’à la réalisation des travaux préconisés par l’expert, elles sont prématurées au vu du faible degré d’information de la cour sur l’efficacité qui peut être attendue des travaux d’isolation du couloir, passés et à venir.

4°) Sur les frais irrépétibles et dépens :

Il n’est pas inéquitable que chaque partie conserve à sa charge les frais irrépétibles engendrés par la présente procédure. Les différentes demandes formées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

Chaque partie conservera à sa charge ses propres dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Dit que chaque partie conservera à sa charge les frais irrépétibles engagés pour la procédure d’appel ainsi que ses propres dépens d’appel.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Florence PERRET, Président, et par Madame Claudine AUBERT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

 


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