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République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 4
ARRÊT DU 25/05/2023
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N° de MINUTE : 23/515
N° RG 22/01105 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UESF
Jugement (N° 11-21-618)rendu le 13 Janvier 2022 par le Tribunal de proximité de Lens
APPELANTE
Madame [S] [E]
née le [Date naissance 1] 1996 à [Localité 6]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Me Eloïse Behra, avocat au barreau de Bethune, avocat constitué
INTIMÉE
EPIC Pas de Calais Habitat
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Christian Delevacque, avocat au barreau d’Arras, avocat constitué
DÉBATS à l’audience publique du 21 mars 2023 tenue par Emmanuelle Boutié magistrat chargé d’instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Harmony Poyteau
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Véronique Dellelis, président de chambre
Emmanuelle Boutié, conseiller
Catherine Menegaire, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 25 mai 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Véronique Dellelis, président et Harmony Poyteau, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 10 fevrier 2023
****
Par acte sous seing privé en date du 27 juin 2018, Pas De Calais Habitat Office Public De L’Habitat a donné à bail à Mme [S] [E] un logement situé [Adresse 5] à [Localité 4].
La résidence dans laquelle vit Mme [S] [E] est composé de 12 logements, Mme [W] [J], âgée de 74 ans, étant sa voisine directe.
Par acte d’huissier de justice en date du 25 mai 2021, Pas De Calais Habitat Office Public De L’Habitat a assigné Mme [S] [E] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Lens et a sollicité de prononcer la résiliation du bail de Mme [E] [S] pour troubles du voisinage, ordonner l’expulsion de Mme [E] [S] du logement dans les 15 jours du jugement à intervenir, ainsi que celle de tous occupants de son chef, avec le concours de la force publique si besoin est, condamner Mme [E] au paiement d’une astreinte journalière de 75 euros à compter du jugement et jusqu’au jour de la libération effective des lieux, condamner Mme [E] [S] au paiement d’une indemnité d’occupation égale au loyer, y compris les charges, laquelle subira les augmentations légales, condamner Mme [E] [S] au paiement de la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, condamner Mme [E] aux dépens.
Par jugement en date du 13 janvier 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Lens a :
– prononcé la résiliation judiciaire du bail conclu le 27 juin 2018 entre Pas De Calais Habitat Office Public De L’Habitat d’une part, et Mme [S] [E] d’autre part, concernant les locaux situés [Adresse 5] à [Localité 4] à compter du présent jugement,
– dit que Mme [S] [E] est occupante sans droit ni titre,
– autorisé, à défaut de départ volontaire des lieux Pas De Calais Habitat Office Public De L’Habitat à faire procéder à l’expulsion de Mme [S] [E] ainsi que de tout occupant de son chef, avec l’assistance d’un serrurier et de la force publique si nécessaire, passé Ie délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, conformément aux dispositions des articles L412-1 et suivants, R411-1 et suivants, R412-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,
– dit que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L433-1 et L433-2 du code des procédures civiles d’exécution,
– condamné Mme [S] [E] à payer à Pas De Calais Habitat Office Public De L’Habitat une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant du loyer et des provisions sur charges actuels, et ce à compter du 13 janvier 2022 jusqu’à complète libération des lieux caractérisée par la remise des clés au bailleur ou un procès-verbal d’expulsion,
– rappelé que le contrat de bail étant résilié par l’effet de l’acquisition de la clause résolutoire, l’indemnité d’occupation est exclusive du paiement de toute autre somme qui ne peut plus être facturée à l’occupant du logement (charges, taxes … ),
– condamné Mme [S] [E] à payer à Pas De Calais Habitat Office Public De L’Habitat une somme de 250 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté les parties de leurs plus amples demandes,
– condamné Mme [S] [E] aux dépens,
– rappelé que la présente décision est exécutoire de droit.
Mme [E] a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 4 mars 2022, déclaration d’appel critiquant chacune des dispositions de la décision entreprise.
Pas De Calais Habitat Office Public De L’Habitat a constitué avocat en date du 11 mars 2022.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 novembre 2022, Mme [E] demande la cour de:
– infirmer le jugement rendu le 13 janvier 2022 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Lens en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire du bail conclu le 27 juin 2018 entre Pas De Calais Habitat Office Public De L’Habitat d’une part, et Mme [E] d’autre part, concernant les locaux situés [Adresse 5] à [Localité 4] à compter du présent jugement, dit que Mme [E] est occupant sans droit ni titre, autorisé, à défaut de départ volontaire des lieux, Pas De Calais Habitat Office Public De L’Habitat à faire procéder à l’expulsion de Mme [E] ainsi que de tout occupant de son chef, avec l’assistance d’un serrurier et de la force publique si nécessaire, passé le délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, conformément aux dispositions des articles L412-1 et suivants, R411-1 et suivants, R412-1 et suivants des codes des procédures civiles d’exécution, dit que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L433-1 et L433-2 du code des procédures civiles d’exécution, condamné Mme [E] à payer à Pas De Calais Habitat Office Public De L’Habitat une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant du loyer et des provisions sur charges actuels et ce à compter du 13 janvier 2022 jusqu’à complète libération des lieux caractérisée par la remise des clés au bailleur ou un procès-verbal d’expulsion, rappelé que le contrat de bail étant résilié par l’effet de l’acquisition de la clause résolutoire, l’indemnité d’occupation est exclusive du paiement de toute autre somme qui ne peut plus être facturée à l’occupant du logement (charges, taxes … ), condamné Mme [E] à payer à Pas De Calais Habitat Office Public De L’Habitat une somme de 250 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, débouté les parties de leurs plus amples demandes, condamné Mme [E] aux dépens,
Statuant à nouveau :
– débouter Pas De Calais Habitat Office Public De L’Habitat de sa demande tendant à la résiliation du bail de Mme [E] pour trouble de voisinage et de toutes les conséquences relatives à celle-ci,
– condamner Pas De Calais Habitat Office Public De L’Habitat à verser à Mme [E] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Pas De Calais Habitat Office Public De L’Habitat aux entiers frais et dépens.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 1er septembre 2022, l’Epic Pas De Calais Habitat demande à la cour de :
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 13
janvier 2022 par le juge des contentieux et de la protection près le tribunal de proximité de Lens,
Par suite,
– condamner Mme [E] à verser à Office Pas de la Calais Habitat la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
– débouter Mme [E] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– condamner Mme [E] [S] au paiement des entiers dépens,
A titre subsidiaire, si par impossible et extraordinaire, la cour entendait, nonobstant les éléments produits au débat, infirmer le jugement rendu et débouter Office Pas de Calais Habitat de ses demandes,
– débouter Mme [E] ses demandes tendant à condamner Office Pas de Calais Habitat à lui verser la somme de 700 euros au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ainsi qu’aux entiers frais et dépens.
Il est renvoyé aux conclusions pour un exposé détaillé des demandes et des moyens en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS :
Sur la demande principale au titre du prononcé de la résiliation du bail
L’article 1224 du code civil dispose que la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.
Il résulte des dispositions de l’article 1728 1° du même code que le preneur est tenu d’user de la chose louée raisonnablement et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d’après les circonstances; à défaut de convention.
Aux termes des dispositions de l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est obligé:
b) d’user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée par le contrat de location;
c) de répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d’un tiers qu’il n’a pas introduit dans le logement;
d) de prendre à sa charge l’entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations, ainsi que l’ensemble des réparations locatives définies par décret en Conseil d’Etat, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure (…).
Il résulte des termes de la clause II-6 insérée au contrat de bail régularisé par les parties, intitulée ‘Clauses résolutoires’ que le paragraphe ‘C- Le non-respect de l’obligation d’user paisiblement des locaux loués’ dispose ‘qu’en cas de non-respect de l’obligation d’user paisiblement des locaux loués, et à défaut de libération des lieux, le tribunal pourra, dans les conditions légales, prononcer la résiliation du bail et autoriser l’expulsion du locataire et de tous occupants de son chef’.
Le bailleur sollicite le prononcé de la résiliation du bail compte tenu de la violation par Mme [E] de ses obligations contractuelles en l’absence de jouissance paisible du logement loué et de troubles du voisinage.
Ainsi, une sommation d’avoir à cesser les troubles du voisinage lui a été signifiée par acte d’huissier de justice en date du 16 juin 2020, cet acte faisant suite à quatre courriers du bailleur en date des 20 février 2019, 30 janvier 2020, 17 avril 2020 et 5 juin 2020 informant la locataire de l’existence de plaintes du voisinage pour tapage nocturnes et la mettant en demeure de cesser ses agissements.
En outre, plusieurs mains courantes et dépôts de plaintes étaient effectuées par d’autres locataires de la résidence entre le mois de mai 2019 et le mois de juin 2020, l’intervention des services de police étant requise pour des faits de tapage nocturne et des nuisances sonores émanant du logement occupé par Mme [E].
De plus, si Mme [E] fait valoir qu’il existe des tensions avec sa voisine directe, Mme [J], ayant conduit à un conflit de voisinage d’une ampleur telle que les voisins ont été conduits à prendre position pour l’une ou pour l’autre, force est de constater qu’outre les attestations de Mme [J], sont produites aux débats les attestations établies par d’autres locataires de la résidence, s’agissant de Mme [G], Mme [P], Mme [Y], Mme [M] et M. [D], rédigées conformément aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile, qui décrivent de manière précise et circonstanciée, les nuisances sonores diurnes et nocturnes causées par Mme [E].
Par ailleurs, c’est à juste titre que le premier juge a retenu que bien que Mme [E] affirme avoir usé des lieux loués paisiblement après le constat d’accord intervenu le 16 octobre 2020 devant le conciliateur de justice aux termes duquel la locataire s’est engagée à cesser les nuisances sonores caractérisées par l’organisation très fréquente, de jour comme de nuit, dans son appartement, de fêtes accompagnées de musiques, de chants et de cris, impactant fortement la tranquillité des autres locataires de la résidence, de nombreuses plaintes ont été déposées par des voisins de Mme [E] décrivant le comportement discourtois voire violent de la locataire ou de ses proches postérieurement à cet accord.
Ainsi, Mme [J] a à nouveau déposé plainte contre Mme [E] le 7 mai 2021 pour des faits de troubles à la tranquillité par agressions sonores, faisant suite à une précédente plainte déposée en juin 2020 pour les mêmes faits, décrivant l’organisation d’une soirée fin avril 2021, avec ‘de la musique, des cris incessants, des portes qui claquent, des bruits de gens qui courent’, ces faits de tapage étant confortés par les auditions de M. [B], faisant état de cris provenant de l’appartement de Mme [E] ‘généralement le soir et la nuit’ et précisant que sa fille lui avait dit ‘qu’il était impossible de dormir tellement il y avait du bruit’, de Mme [X] faisant état ‘de cris, d’engueulades entre elle et son copain, des portes qui claquent et de la musique’ et précisant avoir constaté que depuis l’appartement de Mme [J], ‘c’était insupportable le bruit que faisait Mme [E]’ ainsi que M. [D] qui décrivait aussi des faits de tapage nocturne avec l’organisation de ‘soirées hyper bruyantes’ et s’agissant de la soirée d’avril 2021, ‘de portes qui ont claqué toute la nuit mais surtout des cris’.
En outre, M. [D] a à son tour déposé plainte pour les mêmes faits le 9 juin 2021, précisant que ‘le week-end dernier ça a été la folie, je dirais même le délire au domicile de [E] [S]’ et décrivant ‘des bruits ressemblant à des meubles que l’on bouge, des portes qui claquent mais énormément de cris provenant notamment de femmes’.
Ainsi, au vu de la gravité et la réitération des troubles du voisinage dénoncés par les autres locataires, il y a lieu de retenir que le comportement de Mme [E] ne correspond pas à ce que l’on est susceptible d’attendre d’une voisine en contrevenant aux dispositions de l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989 et justifie de prononcer la résiliation du bail conclu entre les parties.
Le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef.
Il le sera par ailleurs en ce qu’il a prononcé l’expulsion de Mme [E] ainsi que celle de tous occupants de son chef si besoin avec le concours de la force publique et en toutes ses autres dispositions, concernant notamment la fixation de l’indemnité d’occupation.
Sur les autres demandes
Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Mme [E], partie perdante, sera condamnée aux dépens d’appel.
Il n’apparaît pas inéquitable de la condamner à verser à l’Epic Pas de Calais Habitat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions;
Condamne Mme [S] [E] à payer à l’Epic Pas de Calais Habitat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel,
Condamne Mme [S] [E] aux dépens d’appel.
Le Greffier Le Président
H. Poyteau V. Dellelis