Troubles du voisinage : 12 janvier 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 21/06610

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Troubles du voisinage : 12 janvier 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 21/06610

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre civile

ARRET DU 12 JANVIER 2023

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 21/06610 – N° Portalis DBVK-V-B7F-PGTD

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 20 OCTOBRE 2021

PRESIDENT DU TJ DE PERPIGNAN N° RG 21/00160

APPELANTE :

Madame [P] [D] [Y] [H]

née le 18 Octobre 1979 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Philippe AYRAL de la SCP AYRAL-CUSSAC, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant et Me GAU, avocat au barrreau de TOULOUSE, avocat plaidant

INTIMEES :

Syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘CANET BEACH’, pris en la personne de son syndic en exercice la société FONCIA ROUSSILLON RCS PERP 316 539 030, domicilié en cette qualité au siège social sis

16 ESPACE MEDITERRANNEE

[Localité 2]

Représentée par Me Fanny LAPORTE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et Me MASSOT, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat plaidant

S.C.I. C2B

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Katia LUCAS DUBLANCHE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

Ordonnance de clôture du 08 Novembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 NOVEMBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Virginie HERMENT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Eric SENNA, Président de chambre

Madame Myriam GREGORI, Conseiller

Mme Virginie HERMENT, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Laurence SENDRA

ARRET :

– Contradictoire ;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Monsieur Eric SENNA, Président de chambre, et par Monsieur Salvatore SAMBITO, Greffier.

EXPOSE DU LITIGE

La société C2B est propriétaire au sein de l’ensemble immobilier ‘Canet Beach’, soumis au régime de la copropriété des immeubles bâtis, d’un local à usage commercial.

Aux termes d’un acte sous seing privé en date du 20 février 2013, elle a donné à bail ce local à Madame [E] [J].

Par acte reçu le 3 avril 2014 par maître Marc Denamiel, notaire à Arles-sur-Tech, Madame [E] [J] a cédé à Mme [M] [N] et à Mme [P] [H] son fonds de commerce de snack, restauration rapide à consommer sur place et à emporter, exploité au rez-de-chaussée de l’ensemble immobilier situé à [Adresse 5].

Le 30 janvier 2020, la société C2B a fait délivrer à Mme [P] [H] un commandement d’avoir à exécuter des travaux consistant en la suppression des gaines d’extraction des fumées, la suppression de la grille de protection, le bouchage du trou pratiqué dans le mur et la remise en état de la façade, visant la clause résolutoire contenue au bail.

Faisant valoir qu’elle n’avait pas procédé à l’installation des gaines d’extraction litigieuses et que les travaux avaient été réalisés par l’un de ses prédécesseurs, Mme [P] [H] a, par acte d’huissier en date du 28 février 2020, fait assigner la société C2B devant le tribunal judiciaire de Perpignan afin qu’il dise n’y avoir lieu à constater l’acquisition de la clause résolutoire stipulée au bail en date du 20 février 2013 et de façon plus globale, n’y avoir lieu au prononcé de la résiliation judiciaire du bail.

Le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ a, par actes d’huissier en date du 3 mars 2021, fait assigner Mme [P] [H] et la société C2B devant le président du tribunal judiciaire de Perpignan, statuant en référé, afin d’obtenir leur condamnation in solidum à remettre la façade en son état d’origine ainsi que leur condamnation in solidum au paiement de la somme de 14 000 euros à titre de provision sur l’indemnisation de son préjudice de jouissance, outre la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens, exposant que pour l’exploitation du local commercial, il avait été procédé illégalement à des travaux sur la façade de l’immeuble consistant en l’installation d’une gaine d’extraction des fumées des cuisines à l’origine de nuisances olfactives.

Le 5 mai 2021 était signé un protocole d’accord transactionnel entre Mme [P] [H] et la société C2B prévoyant que Mme [P] [H] acceptait de faire procéder au rebouchage du trou réalisé dans la façade de l’ensemble immobilier, aux frais de la bailleresse, et à la suppression de la gaine d’évacuation et de son coffret, à ses propres frais. Aux termes de ce protocole, il était également prévu que la société C2B acceptait de consentir à Mme [P] [H] une déspécialisation partielle portant sur la jonction de deux activités complémentaires de glacier et de crêperie et qu’un renouvellement anticipé du bail existant serait irrévocablement accordé à effet au 1er mois suivant la réalisation des travaux, moyennant un loyer annuel de 11 000 euros ht et hc et une provision annuelle sur charges de 2 000 euros payable d’avance.

Par ordonnance du 20 octobre 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Perpignan a :

– constaté que le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ se désistait de sa demande tendant à la condamnation in solidum de Mme [P] [H] et de la société C2B à remettre en état d’origine la façade de l’immeuble,

– condamné in solidum Mme [P] [H] et la société C2B à verser au syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ la somme de 12 500 euros à titre de provision,

– dit n’y avoir lieu à référé s’agissant des demandes reconventionnelles de Mme [P] [H] et de la société C2B l’une contre l’autre,

– condamné in solidum Mme [P] [H] et la société C2B à verser au syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Par déclaration en date du 16 novembre 2021, Mme [P] [H] a relevé appel de cette ordonnance.

Selon ordonnance rendue le 24 novembre 2021, l’affaire a été fixée à bref délai à l’audience de plaidoirie du 17 mai 2022 et un avis de caducité d’appel a été adressé au conseil de la demanderesse le 28 décembre 2021.

Par ordonnance du 27 janvier 2022, le président de la 2ème chambre civile de la cour a prononcé la caducité partielle de la déclaration d’appel à l’égard du syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’, au motif que l’appelante n’avait pas déposé ses conclusions dans le délai d’un mois de l’avis de fixation et que l’intimé ayant constitué avocat le 21 décembre 2021, soit dans le délai d’un mois de l’avis de fixation, l’appelante ne pouvait bénéficier des dispositions de l’article 911 du code de procédure civile.

Mme [P] [H] a déféré cette décision à la cour.

Dans un arrêt rendu le 15 septembre 2022, la cour a infirmé l’ordonnance de caducité partielle rendue le 27 janvier 2022 par le président de la 2ème chambre civile de la cour d’appel de Montpellier, a dit n’y avoir lieu à caducité partielle de la déclaration d’appel de Mme [P] [H] à l’égard du syndicat des copropriétaires et a dit que la fixation de l’affaire à l’audience du 15 novembre 2022 était maintenue.

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 3 janvier 2022, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, Mme [P] [H] demande à la cour :

– réformer en toutes ses dispositions l’ordonnance de référé rendue le 20 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de Perpignan,

Statuant à nouveau,

– débouter le syndicat des copropriétaires de toute demande de condamnation,

– condamner le syndicat des copropriétaires à lui verser la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d’appel,

– à titre subsidiaire, condamner la SCI C2B à la relever et garantir de toute condamnation susceptible d’être prononcée à son encontre.

Au soutien de sa demande de réformation, elle soutient que le juge des référés a fait une mauvaise application des dispositions de l’article 835 du code de procédure civile puisque le trouble manifestement illicite ne peut conduire qu’à la mise en oeuvre de mesures conservatoires ou de remise en état, mais ne peut justifier l’octroi d’une provision.

De plus, elle fait valoir que les troubles anormaux du voisinage dont se prévaut le syndicat des copropriétaires sont sérieusement contestables.

Elle mentionne qu’en effet, il résulte du jugement définitif rendu par le tribunal de grande instance de Perpignan le 17 septembre 2007 que si la gaine d’extraction est à l’origine de troubles, ils existent depuis 2003 et que l’action du syndicat des copropriétaires est donc prescrite.

Elle ajoute qu’il n’appartient pas au juge des référés de caractériser l’anormalité d’un trouble.

Elle souligne en outre que l’exploitation d’un commerce de restauration rapide donnant sur la plage de [Localité 4], à l’origine d’odeurs de nourriture ponctuelles pendant le service, n’est pas constitutive d’un trouble anormal du voisinage, alors que ce fonds de commerce est voisin d’une douzaine d’établissements donnant sur la même plage et exerçant la même activité.

Du reste, elle souligne que les travaux d’obturation de la gaine d’extraction ont été réalisés en mai 2021 et que la période de cinq années retenue par le premier juge est donc erronée.

Enfin, elle rappelle que la bouche d’aération litigieuse ainsi que la gaine d’extraction préexistaient à son intervention et que le jugement rendu le 17 septembre 2007 a rejeté définitivement toute demande de suppression du bailleur. Elle en déduit que sur le fondement de l’article 1719 du code civil, elle devra être garantie par sa bailleresse, tenue d’une obligation essentielle de délivrance s’agissant des locaux commerciaux litigieux.

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 11 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ demande à la cour de :

– débouter Mme [P] [H] et la SCI C2B de leurs demandes,

– confirmer l’ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Perpignan le 20 octobre 2021,

– condamner Mme [P] [H] et la SCI C2B in solidum à lui payer à titre provisionnel la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Il invoque les dispositions de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile et expose que Mme [P] [H] et la SCI C2B sont responsables des travaux réalisés sans l’autorisation de l’assemblée générale et des nuisances olfactives qui ont été causées à la copropriété depuis 2017.

En outre, il soutient que contrairement aux affirmations de l’appelante, le juge des référés peut caractériser l’existence d’un trouble anormal du voisinage. Il ajoute qu’il est fondé à solliciter une provision à valoir sur l’indemnisation des divers préjudices de jouissance subis collectivement par les copropriétaires du fait de ces travaux irréguliers.

En ce qui concerne la société C2B, il indique qu’il est de jurisprudence constante que le copropriétaire bailleur est de plein droit responsable, par application des dispositions de l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965, des infractions au règlement de copropriété commises par son locataire, même ignorées de lui.

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 19 février 2022, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la SCI C2B demande à la cour de :

– infirmer l’ordonnance de référé du président du tribunal judiciaire de Perpignan en ce qu’elle l’a condamnée solidairement avec Mme [H] à payer la somme de 12 500 euros à titre provisionnel au syndicat des copropriétaires, outre la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– dire qu’aucune condamnation ne peut intervenir à son encontre,

– débouter les parties de toutes demandes contraires,

– condamner le syndicat des copropriétaires au paiement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d’appel.

Elle rappelle les dispositions de l’article 835 du code de procédure civile et précise qu’en l’espèce, l’obligation est sérieusement contestable.

Elle mentionne qu’en effet, les constats des 2 et 11 août 2017 sont sommaires et imprécis. Elle ajoute que le 5 décembre 2018, l’huissier n’a constaté aucune nuisance.

En outre, elle indique qu’elle ne saurait être condamnée solidairement avec sa locataire alors qu’elle n’est pas restée inerte et que Mme [H] est la seule responsable des faits en cause.

Du reste, elle souligne que le premier juge a omis de prendre en considération le caractère saisonnier de l’activité exercée par la locataire du fonds de commerce.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel interjeté dans les formes et délai de la loi est recevable.

Sur la demande de provision formée par le syndicat des copropriétaires

Selon l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion, de sorte qu’en l’espèce, la cour n’est appelée à statuer que sur la demande d’infirmation des dispositions de l’ordonnance du 24 novembre 2021, aux termes desquelles Mme [P] [H] et la société C2B ont été condamnés in solidum à verser au syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ la somme de 12 500 euros à titre de provision, outre la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.

En application des dispositions de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.

L’absence de constestation sérieuse implique l’évidence de la solution qu’appelle le point contesté. Il appartient au demandeur d’établir l’existence de l’obligation qui fonde sa demande de provision tant en son principe qu’en son montant, laquelle n’a d’autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.

En premier lieu, le syndicat des copropriétaires fonde sa demande de condamnation de Mme [P] [H] et de la société C2B au versement d’une provision, sur la responsabilité délictuelle de la première et sur la responsabilité contractuelle de la seconde, invoquant l’existence de travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble, réalisés sans l’autorisation de l’assemblée générale.

Le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ reproche à Mme [P] [H] d’avoir percé le mur après l’avoir rebouché en 2019.

Son action, engagée suite à des assignations en référé devant le président du tribunal judiciaire de Perpignan délivrées le 3 mars 2021, n’est donc manifestement pas atteinte par la prescription quinquennale de l’article 2224 du code civil.

Il résulte du règlement de copropriété versé aux débats par le syndicat des copropriétaires que les façades constituent une partie commune.

Il s’ensuit que le percement de ces façades nécessite l’autorisation préalable du syndicat des copropriétaires, en application de l’article 25 b de la loi du 10 juillet 1965.

En l’espèce, il ressort du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Perpignan le 17 septembre 2007 que le percement du mur de façade pour la réalisation d’une sortie haute aspirante était intervenu avant l’installation de Mme [P] [H] dans les lieux.

Or, s’il est versé aux débats le procès-verbal de l’assemblée générale des copropriétaires du 8 août 2019, dans lequel il est indiqué qu’en février 2019, Mme [H] a déclaré avoir retiré la hotte et rebouché le trou en vue de la vente de son fonds de commerce, et qu’elle a ensuite remis en place son installation car la vente n’a pas eu lieu, aucune pièce susceptible de justifier de ces éléments n’est produite.

Dans ces conditions, à défaut de tout autre élément sur la personne qui est à l’origine du percement du mur, et dans la mesure où il résulte du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Perpignan le 17 septembre 2007 que ce percement aurait été effectué avant que Mme [H] ne commence son activité dans les lieux, la faute reprochée à l’appelante n’est ni établie ni caractérisée avec l’évidence requise en référé.

Par conséquent, il ne saurait être fait droit à la demande de provision formée par le syndicat des copropriétaires, sur le fondement de la responsabilité délictuelle de Mme [P] [H] et sur le fondement de la responsabilité contractuelle de sa bailleresse.

Le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ fonde également sa demande de condamnation sur l’existence de troubles anormaux du voisinage.

Toutefois, l’action en réparation du dommage issu d’un trouble anormal de voisinage est soumise à un délai de prescription quinquennale en application de l’article 2224 du code civil, le point de départ étant fixé au jour de la découverte du trouble ou à la date à laquelle le demandeur aurait du constater son existence.

Or, en l’espèce, il résulte du procès-verbal de l’assemblée générale des copropriétaires s’étant tenue le 8 août 2019 qu’il avait déjà été demandé à Mme [P] [H] de mettre un terme aux nuisances olfactives au cours de l’année 2015, des courriers lui ayant été adressés en ce sens.

Au vu de cet élément, dont il résulte que le trouble était connu en 2015, et dans la mesure où l’action en indemnisation des troubles anormaux du voisinage subi par les copropriétaires a été engagée suite à la délivrance d’assignations en date du 3 mars 2021, le moyen tiré de la prescription de l’action engagée, soulevé par Mme [P] [H], constitue une contestation sérieuse.

Au surplus, s’agissant des troubles subis, hormis des attestations émanant de copropriétaires, lesquelles ne sont ni précises ni circonstanciées, le syndicat des copropriétaires ne verse aux débats que deux procès-verbaux de constat réalisés les 2 et 11 août 2017, ainsi que le 2 juillet 2019, le procès-verbal de constat réalisé le 5 décembre 2018 n’évoquant que la présence d’une grille de ventilation implanté sur le linteau de la vitrine du local de l’appelante.

Il résulte du premier procès-verbal de constat que le 2 août 2017, l’huissier de justice a constaté que des odeurs de cuisine semblant provenir du restaurant Les Frayettes étaient perceptibles dans trois appartements et que le 11 août 2017, il a relevé que dans l’établissement, une hotte aspirante évacuait les odeurs des aliments qui étaient en train de cuire par une bouche d’aération située en façade.

Dans le procès-verbal de constat du 2 juillet 2019, l’huissier de justice précise avoir constaté une odeur prégnante de friture sur toute la longeur de la galerie extérieure, ainsi que dans le hall d’entrée et dans deux appartements.

Au vu de ces seules pièces, il n’est pas précisément justifié des plages horaires pendant lesquelles sont présentes les odeurs de cuisine, ni des périodes de l’année au cours desquelles s’exerce l’activité de Mme [P] [H], et ce alors qu’il s’agit d’une activité de restauration saisonnière.

De plus, l’intensité des odeurs s’échappant du local commercial exploité par Mme [P] [H] n’est pas précisément décrite, et le nombre de copropriétaires incommodés n’est pas mentionné.

Au surplus, aucune pièce ne vient contredire les allégations de Mme [P] [H] selon lesquelles son local commercial serait voisin d’une douzaine d’autres établissements donnant sur la même plage, à [Localité 4], et exerçant la même activité.

Dans ces conditions, à défaut d’élément précis sur l’intensité de la nuisance olfactive, sa durée, le moment de sa survenance et l’environnement dans lequel elle survient, l’appréciation de l’anormalité des troubles dont Mme [P] [H] est à l’origine excède manifestement la compétence du juge des référés.

Il s’ensuit qu’en l’absence de gêne excédant les inconvénients normaux de voisinage caractérisée avec l’évidence requise en référé, il n’y a lieu de faire droit à la demande de provision formée par le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ au titre du préjudice de jouissance.

La décision du premier juge sera par conséquent infirmée en ce qu’elle a accordé une provision à valoir sur l’indemnisation du syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ succombant en ses demandes, il convient d’infirmer la décision déférée en ce qu’elle a condamné Mme [P] [H] et la société C2B à lui payer une indemnité en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ sera condamné aux dépens de première instance et d’appel.

Il sera du reste condamné à verser à Mme [P] [H] et à la société C2B une somme de 1 500 euros à chacun en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Reçoit Mme [P] [H] en son appel,

Infirme la décision déférée en toutes ses dispositions critiquées,

Statuant à nouveau,

Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande de provision,

Déboute le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ de sa demande formée en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ à verser à Mme [P] [H] une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ à verser à la société C2B une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l’ensemble immobilier dénommé ‘Canet Beach’ aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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