Travail dissimulé : 28 juillet 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/00554

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MINUTE N° 23/615

Copie exécutoire

aux avocats

Copie à Pôle emploi

Grand Est

le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A

ARRET DU 28 JUILLET 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/00554 – N° Portalis DBVW-V-B7F-HPP3

Décision déférée à la Cour : 15 Décembre 2020 par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE HAGUENAU

APPELANTE :

S.A.S. ISRI FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Bernard ALEXANDRE, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIME :

Monsieur [G] [R]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Gaëlle MOOTOOSAMY, avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 28 Février 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme DORSCH, Président de Chambre

M. PALLIERES, Conseiller

M. LE QUINQUIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme THOMAS

ARRET :

– contradictoire

– prononcé par mise à disposition au greffe par Mme DORSCH, Président de Chambre,

– signé par Mme DORSCH, Président de Chambre et Mme THOMAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [G] [R], né le 02 juillet 1960, a été embauché le 12 septembre 1988 par la SAS ISRI France, au poste d’opérateur catasphorèse. Il occupait depuis 2008 le poste de pilote catasphorèse, et percevait une rémunération moyenne de 2.281,71 € bruts.

La SAS ISRI France qui compte trois usines, est spécialisée dans la fabrication d’équipements automobile notamment des sièges (fabrication de mousses, de ressorts etc.). La société possède un parc de machines réparties entre le secteur soudure, et le secteur catasphorèse, ce dernier étant notamment équipé de cuves.

Monsieur [G] [R] a été victime d’un accident du travail dans la nuit du 13 novembre 2014. En montant sur une échelle adossée à une cuve, il a fait une chute de 3,50 m entraînant un traumatisme crânien, une fracture de la hanche, et diverses contusions. Hospitalisé durant trois semaines, il a été placé en arrêt de travail de manière continue du 13 novembre 2014 au 1er janvier 2018, date de consolidation de son préjudice.

Par décision du 23 février 2018 la caisse primaire d’assurance-maladie a reconnu un taux d’invalidité de 60 %.

Le 23 février 2018 le médecin du travail a délivré un avis d’inaptitude avec dispense de reclassement, l’état de santé du salarié faisant obstacle à tout reclassement.

Par courrier du 20 mars 2018, la SAS ISRI France a notifié à Monsieur [G] [R] son licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle, et impossibilité de reclassement.

Le 17 octobre 2018, Monsieur [G] [R] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Strasbourg afin notamment de faire constater l’existence d’une faute inexcusable de l’employeur. Par jugement du 25 novembre 2020, le pôle social a reconnu l’existence d’une faute excusable, et a ordonné une expertise judiciaire sur les demandes de réparation. Ce jugement fait l’objet d’un appel actuellement pendant devant la cour d’appel de Colmar.

Le 22 octobre 2018, Monsieur [G] [R] a saisi le conseil de prud’hommes de Haguenau aux fins de faire juger que la société a manqué à son obligation de sécurité, que l’inaptitude définitive a pour origine l’accident du travail, et que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Il réclamait par conséquent 54.761 € à titre de dommages et intérêts pour le manquement à l’obligation de sécurité, ainsi que le même montant à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre des frais irrépétibles. Ces demandes ont été réduites à 45.634 € en cours de procédure.

La procédure a fait l’objet d’une décision de radiation le 05 avril 2019.

Par jugement avant-dire droit du 17 septembre 2019 le conseil des prud’hommes a rejeté la demande de sursis à statuer dans l’attente de la décision du pôle social.

Par jugement du 15 décembre 2020, le conseil de prud’hommes a :

– déclaré les demandes régulières et recevables,

– déclarer que la société Isri France a manqué à son obligation de sécurité,

– déclaré que l’inaptitude définitive a pour origine l’accident de travail du 13 novembre 2014,

– dit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

– débouté Monsieur [R] de sa demande de dommages et intérêts de 45.634 € pour manquement à l’obligation de sécurité,

– condamné la société Isri France à lui payer 45.634 € soit 24 mois de salaire à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société a été condamnée aux entiers frais et dépens de l’instance.

La SAS ISRI France 15 janvier 2021 interjeté appel à l’encontre de ce jugement.

Par dernières conclusions d’appelant N°3, transmises par voie électronique le 20 décembre 2021, la SAS ISRI France demande à la cour d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il déboute Monsieur [R] de sa demande de dommages et intérêts pour l’obligation de sécurité. Elle demande par conséquent à la cour de :

– dire et juger qu’elle a satisfait à son obligation de sécurité de résultat,

– débouter Monsieur [R] de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et au titre de l’article 700 code de procédure civile,

– condamner Monsieur [R] à lui payer 2.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– le condamner aux entiers frais et dépens.

Par dernières conclusions transmises par voie électronique le 19 juillet 2021, Monsieur [G] [R] demande à la cour de confirmer que :

la société appelante a manqué à son obligation de sécurité de résultat,

l’inaptitude définitive a pour origine l’accident du travail du 13 novembre 2014, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En conséquence,

condamner la société appelante à lui payer la somme de 45.634 € au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En tout état de cause,

condamner la société appelante à lui payer une indemnité de 3.000 € « ou telle autre qu’il plaira au conseil d’arbitrer » en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

la condamner aux entiers frais et dépens de l’instance.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 08 juin 2022.

L’affaire fixée à l’audience du 21 juin 2022 a été renvoyée au 28 février 2023 suite au départ d’un conseiller.

Il est, en application de l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits moyens et prétentions des parties, renvoyé aux conclusions ci-dessus visées.

MOTIFS

I. Sur l’origine professionnelle de l’inaptitude

La SAS ISRI France demande à la cour dans le dispositif de ses conclusions d’infirmer le jugement en ce en ce qu’il a déclaré que l’inaptitude définitive du salarié avait pour origine l’accident du travail survenu le 13 novembre 2014.

Pour autant elle ne développe aucun moyen à l’appui de cette demande.

Cette demande apparaît étonnante dès lors que la société elle-même écrit dans la lettre de licenciement du 20 mars 2018 que l’objet du courrier est : « votre licenciement pour impossibilité de reclassement suite à votre inaptitude d’origine professionnelle »

Il convient néanmoins de rappeler qu’il résulte de l’article L.1226-10 du code du travail que les règles applicables aux victimes d’un accident du travail, ou d’une maladie professionnelle s’appliquent dès lors que l’inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée, ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident, ou cette maladie, et que l’employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement. Ces deux conditions étant cumulatives.

En l’espèce Monsieur [G] [R] a fait une chute depuis une échelle, à l’occasion de son travail, durant les heures de travail, et sur les lieux mêmes de son emploi. Ces circonstances illustrent la définition même de l’accident du travail.

Il a immédiatement été évacué depuis l’usine vers l’hôpital, s’est trouvé en arrêt de travail pour accident de travail dès le jour de l’accident, et ce de manière ininterrompue jusqu’au 1er janvier 2018. Par ailleurs l’employeur a régulièrement échangé avec le médecin du travail, qui a fait une étude de poste et des conditions de travail, et a délivré un avis d’inaptitude totale, suite à une visite de reprise « accident du travail ». L’employeur a lui-même visé l’inaptitude d’origine professionnelle dans la lettre de licenciement, et enfin est opposé au salarié dans une procédure parallèle quant à l’existence d’une faute inexcusable.

Il est ainsi clairement établi que l’employeur avait parfaitement connaissance de l’origine professionnelle de l’inaptitude lors du licenciement.

Il résulte de ce qui précède que l’inaptitude définitive de Monsieur [G] [R] a une origine professionnelle comme étant la conséquence de l’accident du travail du 13 novembre 2014, et que l’employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.

Le jugement est par conséquent confirmé sur ce point.

II. Sur la violation de l’obligation de sécurité

Est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude lorsqu’il est démontré que l’inaptitude est consécutive à un manquement préalable de l’employeur qui l’a provoquée. (Notamment Cass. 12 janvier 2022 N° 20-22.573).

En d’autres termes, quand bien même le licenciement est prononcé en raison d’une inaptitude constatée par le médecin du travail, tel le cas en l’espèce ; si cette inaptitude résulte d’une faute de l’employeur, telle la violation de l’obligation de sécurité, la rupture du contrat de travail est dépourvue de cause réelle et sérieuse.

La SAS ISRI France conteste le jugement en ce qu’il a retenu qu’elle a manqué à son obligation de sécurité.

1. Sur les attributions du pilote cataphorèse

Se référant à la définition du poste occupé par Monsieur [R], la SAS ISRI France affirme que ce dernier a pris des initiatives outrepassant sa mission, qu’il a mené des actions seul sans en informer quiconque, et qu’il a ainsi mis gravement en danger sa sécurité, voire sa vie. Elle affirme qu’en aucun cas il ne lui appartenait d’emprunter l’échelle pour accéder au dessus de la cuve, alors que seul le service maintenance, qu’il devait prévenir avait compétence pour gérer ce type d’incident.

Il résulte de la procédure que le salarié constatant qu’une cuve débordait a, conformément au protocole, signalé vers 2h30 du matin ce dysfonctionnement au service de maintenance, qui lui a recommandé de mettre la cuve en mode manuel, et selon lui, de vérifier l’état de la sonde. Malgré le positionnement en mode manuel, le problème ne s’est pas résorbé, de sorte que vers 4h30 le salarié, voulant, selon ses déclarations, vérifier la sonde dans la cuve située à 3.50 m du sol, a utilisé l’échelle qui a basculé de manière latérale, l’entraînant dans une lourde chute. Il est précisé qu’aucun témoin assisté à l’accident.

Les parties sont opposées quant aux motifs ayant conduit le salarié a emprunter l’échelle.

L’employeur affirme qu’il appartenait aux seuls services de maintenance de vérifier le fonctionnement et éventuellement de réparer les pompes, et que Monsieur [R] a outrepassé ses fonctions en voulant résoudre lui-même la panne. Elle affirme qu’en aucun cas il n’avait à utiliser une échelle pour accéder au dessus de la cuve.

Monsieur [R] pour sa part affirme qu’il n’a jamais eu l’intention de sortir la pompe de 15 à 20 kg, ni d’intervenir sur celle-ci, mais qu’il voulait vérifier l’état de la sonde qui flotte dans la cuve, voir si elle était collée à la paroi, ou avait un flotteur emmêlé, et non pas réparer ladite sonde. Il affirme que le service maintenance lui avait demandé de vérifier la sonde.

Les fiches de poste du pilote cataphorèse intitulées « définition de fonction » sont

produites par la société appelante en pièce 7, et par le salarié en pièce 14.

Il existe quelques différences entre les deux fiches produites, en particulier la réalisation de la maintenance qui est de niveau 1 à 3 sur l’exemplaire du salarié, mais uniquement de niveau 1 sur celle de l’employeur.

Or la fiche de poste produite par l’employeur date du 04 mars 2019, et ne pourra par conséquent être retenue pour définir le poste occupé par Monsieur [R] lors de l’accident du travail le 13 novembre 2014, près de cinq ans plus tôt. La cour retiendra par conséquent la fiche de poste produite par le salarié en pièce 14.

En page 2, cette fiche de poste énumère les principales missions et activités associées du pilote cataphorèse, en listant notamment :

– suit tous les paramètres de fonctionnement, de contrôle, et de réglage de l’installation de cataphorèse (peinture, TTS, Step),

– intervient sur les réglages en cas de dérive, et de non-conformité,

réalise la maintenance de niveau 1 à 3 sur l’installation.

Il est également précisé que le pilote garantit que l’organisation et les réglages de la ligne cataphorèse permettent de produire dans les standards de qualité de productivité et de sécurité, ou encore que vis-à-vis du procès, il garantit le respect des modes opératoires, et des réglages.

La société appelante produit en pièce 10, 4, et 9 les fiches d’entretien préventif pour les maintenances de niveau 1, 2, et 3.

Or parmi la longue liste des points relevant de la maintenance de niveau 1, il est prévu dès la ligne 5 la : « vérification de l’état de la propreté des flotteurs de niveau » étant précisé que les moyens utilisés sont à la fois : « visuel + manuel », le responsable de l’action étant le pilote.

Ainsi tel que le soutenait Monsieur [R] la vérification manuelle des flotteurs relevait bien de sa compétence. La maintenance de niveau 1 prévoit également la vidange et le nettoyage des cuves, la vérification de l’état et le nettoyage s’il y a lieu des flotteurs de la cuve peinture, ou encore le contrôle de l’aspect du dessus du bain (mousses, circulation etc.).

Ainsi l’opération de vérification manuelle des flotteurs situés dans la cuve relève bien de la compétence du pilote cataphorèse, poste occupé par Monsieur [R], qui affirme que telle était son intention.

Par ailleurs aucun élément du dossier ne permet d’établir que le salarié, présenté selon les attestations comme particulièrement respectueux des procédures, n’ait voulu sortir la pompe de la cuve, d’autant qu’il savait pertinemment que celle-ci était particulièrement lourde.

Ainsi l’opération de vérification des flotteurs, qui fait partie de ses missions, conduisait nécessairement le salarié à utiliser une échelle pour accéder au dessus de la cuve.

2. Sur l’utilisation d’une échelle inadaptée

Il est établi que l’accident résulte du fait que l’échelle adossée à la cuve, a glissé latéralement, entraînant le salarié dans sa chute.

L’article R 4323-84 du code du travail prévoit que :

« Les échelles portables sont appuyées et reposent sur des supports stables, résistants, et de dimensions adéquates afin de demeurer immobiles.

Afin qu’elles ne puissent ni glisser, ni basculer pendant leur utilisation, les échelles portables sont soit fixées dans la partie supérieure ou inférieure de leur montant, soit maintenues en place au moyen de tout dispositif antidérapant, ou par toute autre solution d’efficacité équivalente. »  

Or Monsieur [Y] [T] technicien méthode outillage atteste que : « l’échelle utilisée pour accéder aux capteurs situés sur la citerne de stockage verticale et cylindrique n’était pas adaptée, mais était la seule disponible à l’époque. » Il ajoute que ses propositions de mise en place d’une plate-forme d’accès adaptée et sécurisé avaient toujours été refusées.

Monsieur [E] [Z] témoigne que « l’échelle de service cette nuit est celle qui était utilisée pour tous les travaux en hauteur de la cataphorèse. Celle-ci après l’incident, fut immédiatement interdite d’utilisation avec une note de service spécifiant qu’elle n’était pas conforme.»

Monsieur [B] [H] ouvrier, atteste que « l’échelle que M. [R] [G] a utilisé était présente depuis la mise en route de la cataphorèse en 2009 et servait à différents travaux dans la cataphorèse. (‘). Cette échelle était de type simple d’environ 3 m de long. Elle fut détruite par un responsable et mise à la benne ferraille peu de temps après ».

Il résulte clairement de ces témoignages que l’échelle utilisée par Monsieur [R] pour vérifier l’état de la sonde conformément à ses attributions, était la seule disponible, et au demeurant utiliser par les autres salariés.

Cette échelle ne comportait visiblement aucun des éléments de sécurité décrits par l’article R 4323-84 du code du travail, ce qui n’est d’ailleurs pas contesté par l’employeur qui conteste à tort la légitimité du salarié à l’utiliser. Le remplacement de l’échelle après l’accident confirme l’inadaptation totale de cet équipement.

Or il apparait que c’est l’utilisation par le salarié de cette seule, et inadaptée échelle à sa disposition, qui est la cause de la chute, compte tenu l’instabilité de cet équipement.

Le non-respect par l’employeur de son obligation de sécurité est caractérisé dès lors qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs comme le lui impose l’article L 4121-1 du code du travail. En l’espèce en ne mettant pas à la disposition du salarié, dans le cadre de l’exécution de ses tâches, une échelle comportant des dispositifs de sécurité conforme aux dispositions précitées.

Le jugement déféré est par conséquent confirmé en ce qu’il a jugé que la SAS ISRI France a manqué à son obligation de sécurité.

III. Sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse

L’inaptitude professionnelle subie par Monsieur [R] résulte de l’accident du travail qui trouve par ailleurs son origine dans le non-respect par l’employeur de son obligation de sécurité.

Par conséquent le licenciement pour inaptitude qui en résulte est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré est par conséquent confirmé en ce qu’il a jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Monsieur [R] sollicite la confirmation du jugement qui lui a alloué une somme de 45.634 € représentant 20 mois de salaire à titre de dommages et intérêts.

La SAS ISRI France conclut au rejet de la demande de dommages et intérêts des lors que le salarié n’établit aucun préjudice et ne fournit aucun justificatif du préjudice. Elle se réfère par ailleurs aux barèmes d’indemnisation qui permet d’octroyer entre 3 et 20 mois de salaire pour un salarié ayant 29 ans d’ancienneté de sorte que le conseil des prud’hommes ne pouvait allouer 24 mois de salaire pour une ancienneté de 30 ans.

Les deux parties conviennent que le salaire moyen perçu par Monsieur [G] [R] est de 2.281,71 €. Le conseil des prud’hommes a alloué au salarié une somme de 45.634 € qui correspond à 20 mois de salaire. C’est par erreur qu’il mentionne dans le dispositif que cette somme correspond à 24 mois de salaire. Il y a lieu d’infirmer le jugement sur ce dernier point.

Monsieur [G] [R] était âgé de 57 ans au moment du licenciement, bénéficiait d’une ancienneté de 29 ans, et percevait un salaire moyen de 2.281,71 €. Il déclare n’avoir pu retrouver d’emploi compte tenu de son âge, ci-dessus rappelé, et de son état de santé qui en effet a entraîné un taux d’invalidité de 60 %. Son licenciement résulte par ailleurs d’une inaptitude professionnelle résultant d’un accident du travail provoqué par le non-respect de l’obligation de sécurité.

Il apparaît dans ces conditions que l’allocation par le conseil des prud’hommes de la somme de 45 634 € à titre de dommages et intérêts indemnise justement le préjudice subi par l’intimé. Le jugement est par conséquent confirmé s’agissant de la somme, mais doit être complété en ce que le montant est un montant brut, et infirmé en ce qu’il mentionne dans le dispositif que cette somme représente 24 mois de salaire ce qui est inexact puisqu’elle représente 20 mois de salaire.

IV. Sur le remboursement des indemnités Pôle Emploi

Aux termes de l’article L.1235-4 du code du travail, dans les cas prévus aux articles L.1132-4, L.1134-4, L.1144-3, L.1152-3, L.1152-4, L.1235-3, et L.1235-11, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé.

Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées, ce qui est le cas en l’espèce.

Il conviendra en conséquence d’ordonner le remboursement des indemnités éventuellement versées à Monsieur [G] [R] dans la limite de quatre mois.

Sur les demandes accessoires

Compte tenu de l’issue du litige, le jugement entrepris doit être confirmé s’agissant des frais irrépétibles et des dépens.

La SAS ISRI France qui succombe en toutes ses prétentions est condamnée aux dépens d’appel et par voie de conséquence déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité commande par ailleurs de la condamner à payer à Monsieur [G] [R] une somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par mise à disposition de l’arrêt au greffe, contradictoirement et en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi

CONFIRME le jugement rendu par le conseil des prud’hommes de Haguenau le 15 décembre 2020 en toutes ses dispositions, SAUF en ce qu’il condamne la SAS ISRI France à payer à Monsieur [G] [R] 24 mois de salaire à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

INFIRME le jugement entrepris uniquement sur le chef non confirmé,

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant,

CONDAMNE la SAS ISRI France à payer à Monsieur [G] [R] la somme de 45 634 € bruts représentant 20 mois de salaire, à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

ORDONNE le remboursement par la SAS ISRI France à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à Monsieur [G] [R], dans la limite de quatre mois à compter de la rupture,

CONDAMNE la SAS ISRI France Alsace à verser à Monsieur [G] [R] une somme de 2.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel,

REJETTE la demande de la SAS ISRI France sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SAS ISRI France aux dépens d’appel ;

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 28 juillet 2023, signé par Madame Christine Dorsch, Président de Chambre, et Madame Martine Thomas, Greffier.

Le Greffier, Le Président,