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COMM.
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 4 octobre 2016
Cassation partielle
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 832 FS-P+B
Pourvoi n° U 14-22.245
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par la commune de B…, représentée par son maire en exercice, domicilié […] ,
contre l’arrêt rendu le 4 avril 2014 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 2), dans le litige l’opposant :
1°/ à la société Lunettes Folomi, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est […] ,
2°/ à la société Simco Cash, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,
3°/ à la société Polyflame Europe, société anonyme, dont le siège est […] ,
4°/ à la société TSP, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est […] , anciennement dénommée Tendance séduction,
5°/ à la société […] , dont le siège est […] (Belgique), venant aux droits de la société Byttebier Home textiles,
6°/ à la société […], société par actions simplifiée, dont le siège est […] ,
7°/ à la société LCL Partner, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,
8°/ à M. H… I…,
9°/ à M. F… I…,
tous deux domiciliés […] ,
10°/ à la société […], société par actions simplifiée, dont le siège est […] , anciennement dénommée GTI – GIL technologies internationales,
11°/ à la société […] , société par actions simplifiée, dont le siège est […] ,
12°/ à la société Garden Max, dont le siège est […] ,
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les huit moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 12 juillet 2016, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Darbois, conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mmes Laporte, Bregeon, M. Grass, Mmes Orsini, Poillot-Peruzzetto, M. Sémériva, conseillers, M. Contamine, Mmes Tréard, Le Bras, M. Gauthier, conseillers référendaires, M. Mollard, avocat général référendaire, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Darbois, conseiller, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la […] , de la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat de MM. H… et F… I… et des sociétés […] , de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat des sociétés TSP, D… […] et LCL Partner, l’avis de M. Mollard, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la commune de B…, connue pour ses couteaux ornés d’une abeille et pour son fromage bénéficiant d’une appellation d’origine contrôlée, soutenant que son nom constitue une indication de provenance pour certaines catégories de produits et qu’il fait l’objet depuis 1993 d’une spoliation en raison de nombreux dépôts de marques, a, en 2010, assigné MM. H… et F… I… et la société […], anciennement dénommée GTI – GIL technologies internationales, titulaires, en tout, de vingt-sept marques verbales ou semi-figuratives françaises, communautaires et internationales comportant le nom “B…”, assorti pour certaines de la représentation d’une abeille, la société […] , qui a pour activité le bail de licences ou de sous-licences sur les produits ou services de quelque nature que ce soit, ainsi que les sociétés Polyflame Europe, Garden Max et LCL Partner, la société Tendance séduction, devenue TSP, la société Byttebier Home textiles, aux droits de laquelle vient la société […] , et les sociétés Simco Cash, Lunettes Folomi et […], qui commercialisent des produits sous les marques ou nom “B…”, le catalogue de leurs produits étant mis en ligne sur le site “[…]” et, pour la société Polyflame Europe, sur le site “www.polyflame.com”, pour pratiques commerciales trompeuses et parasitisme, ainsi qu’en nullité des marques et, subsidiairement, en déchéance des droits des titulaires sur les marques ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois dernières branches :
Attendu que la commune de B… fait grief à l’arrêt du rejet de ses demandes fondées sur le parasitisme alors, selon le moyen :
1°/ qu’indépendamment même de tout risque de confusion, constitue une faute civile le fait de détourner la notoriété d’un lieu géographique à son profit, sans avoir la moindre relation avec ce lieu ; que constitue donc une faute civile le seul fait d’utiliser le nom B… pour désigner des produits qui n’ont aucun rattachement avec la commune de B…, peu important que cette commune ne soit pas connue pour fabriquer les produits concernés et qu’il n’y ait donc pas de risque de confusion dans l’esprit du consommateur ; qu’en jugeant le contraire, la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil ;
2°/ qu’est notoire le nom connu par une partie substantielle du public ; qu’en l’espèce, les juges du fond ont eux-mêmes constaté que près de la moitié de la population française, 47 %, connaissait la commune de B…, petit village de 1 300 habitants, et que les défendeurs eux-mêmes la connaissaient avant le dépôt des marques litigieuses ; qu’en jugeant par ailleurs que la notoriété de cette commune ne serait pas démontrée, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l’article 1382 du code civil ;
3°/ que le fait de détourner la notoriété d’un tiers à son profit cause nécessairement un préjudice à ce tiers, qu’il appartient au juge d’évaluer ; qu’en stigmatisant dès lors l’absence de preuve du préjudice subi par la commune de B…, faute de démonstration de la valeur économique soustraite, la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil ;
Mais attendu que, la cour d’appel ayant, par des motifs non critiqués, retenu que, par application de l’article 954 du code de procédure civile, elle n’était saisie que de la condamnation des parties poursuivies pour pratiques commerciales trompeuses sur le fondement des articles L. 120-1 et L. 121-1 du code de la consommation, la commune de B… ne peut présenter un moyen au soutien d’une demande de dommages-intérêts pour parasitisme dont la cour d’appel n’était pas saisie ; que le moyen est irrecevable ;
Et sur le deuxième moyen :
Attendu que la commune de B… fait grief à l’arrêt de déclarer irrecevables ses demandes en nullité des marques n° 93 480 950, 93 491 857, 93 485 514, 94 544 784 et 93 491 857 alors, selon le moyen, que l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet d’un jugement et a été tranché dans son dispositif ; que l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 3 novembre 2009 s’étant borné à réformer le jugement ayant accueilli la demande en nullité des cinq marques litigieuses contenant le nom “B…”, sans accueillir ou rejeter lui-même ces demandes en nullité, n’avait pas tranché dans son dispositif cette question de l’éventuelle nullité des marques en question ; qu’en jugeant pourtant que la demande en nullité formée dans la présente instance se heurtait à l’autorité de la chose jugée attachée à cet arrêt, la cour d’appel a violé les articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile ;