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COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
————————–
ARRÊT DU : 18 DECEMBRE 2018
(Rédacteur : Elisabeth LARSABAL, président,)
N° RG 18/02128
[A] [J]
SARL LE CAKE BORDELAIS
c/
SARL LE FOURNIL AUTHENTIQUE
Nature de la décision : AU FOND
JONCTION AVEC DOSSIER RG 17/07124
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 28 novembre 2017 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 1, RG : 14/01601) suivant déclaration d’appel en date du 26 décembre 2017 (RG 17/07124) suivie d’une assignation à jour fixe en date du 29 mars 2018 (RG 18/02128)
APPELANTS et défendeurs sur assignation à jour fixe :
[A] [J]
de nationalité Française
demeurant [Adresse 1]
SARL LE CAKE BORDELAIS agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 2]
représentés par Maître Françoise FAURIE de la SELARL FRANÇOISE FAURIE ET ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE et demanderesse sur assignation à jour fixe :
SARL LE FOURNIL AUTHENTIQUE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 3]
représentée par Maître Pierre FONROUGE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Clothilde DELBECQ, avocat plaidant au barreau de LILLE
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 23 octobre 2018 en audience publique, devant la cour composée de :
Elisabeth LARSABAL, président,
Catherine BRISSET, conseiller,
Sophie BRIEU, Vice-Président placé,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Véronique SAIGE
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
EXPOSE DU LITIGE
La SARL Le Fournil Authentique (ci-après la société le Fournil Authentique) exploite sous l’enseigne et le nom commercial « Chez [K]», une activité de boulangerie pâtisserie avec trois points de vente au [Localité 1], à Grand-[Localité 2] et au Canon (Gironde).
Le Fournil Authentique commercialise une pâtisserie sous le nom de « DUNE BLANCHE », qui est une chouquette garnie de crème légère et saupoudrée de sucre glace.
Le 28 juillet 2009, la société Le Fournil Authentique a déposé la marque « DUNE BLANCHE », en classe 30 pour désigner les produits suivants « Pâtisserie. Chouquette garnie ».
La SARL le Cake Bordelais (ci-après la société le Cake Bordelais), dirigée par M. [A] [J], exerce une activité de pâtisserie sous l’enseigne « [A] ».
Elle a pour objet la « création, la fabrication et la commercialisation de pâtisseries sucrées et salées, de plats cuisinés, de confiseries et de spécialités diverses régionales et artisanales, notamment en chocolaterie, glacerie et pâtisserie », ainsi que « la vente de pains spéciaux, de viennoiseries, de produits de boulangerie et autres produits dérivés ».
M. [J] a déposé le 1er octobre 2012 auprès de l’INPI :
– la marque verbale « DUNES BY DAVID » n° 3 95 3003 en classes 16, 26, 30, 39 et 43,
– la marque figurative « dunes by David » n° 3 95 3001 en classes 16, 26, 30, 39 et 43.
Ces marques visent notamment en classe 30 les produits « pâtisseries, gâteaux de type sucrés ou salés ». Elles ont été données en licence par M. [J] à la société le Cake Bordelais.
Par ordonnance du 16 décembre 2013, la société le Fournil Authentique a été autorisée à faire procéder à une saisie contrefaçon à l’encontre de la société le Cake Bordelais, laquelle a été pratiquée le 18 décembre 2013.
Estimant que la société le Cake Bordelais exploite illégalement à titre commercial les termes « DUNES » et Dunes by David » pour désigner des pâtisseries dans le cadre de l’offre à la vente et de la fabrication aux fins de vente, la société le Cake Bordelais utilisant d’ailleurs de manière prépondérante la dénomination « dune » pour désigner des choux garnis dans ses établissements, la société le Fournil Authentique a fait assigner par acte du 17 janvier 2014 sur le fondement de la contrefaçon et de la concurrence déloyale et parasitaire, la société le Cake Bordelais et M. [J].
La société le Fournil Authentique demandait notamment que soit :
– jugé que l’utilisation du terme « dune » ou « dunes » en relation avec des produits de pâtisserie par la société le Cake Bordelais et M. [J] constitue une contrefaçon par imitation de la marque « DUNE BLANCHE » n° 3 667 158,
– jugé que le dépôt des marques «DUNES BY DAVID » et « DUNES by David » par M. [J] , ainsi que leur exploitation par la société le Cake Bordelais dont il est le gérant, portent atteinte à la marque antérieure « DUNE BLANCHE »,
– prononcé la nullité des marques « DUNES BY DAVID » n° 3 953 003 et
« DUNES by david » n°3 95 3001.
Par jugement du 28 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :
– dit que M. [A] [J] et la SARL Le cake bordelais ont commis des actes de contrefaçon par imitation de la marque DUNE BLANCHE n°3667158 en déposant et en exploitant les marques ‘DUNES BY DAVID’ n° 3953003 et ‘DUNES by david’ n°3953001,
– déclaré nulles les marques ‘DUNES BY DAVID’ n°3953003 et ‘DUNES by david’ n°3953001,
– interdit à M. [A] [J] et à la SARL Le cake bordelais d’utiliser l’appellation ‘dune’ en lien avec des pâtisseries ou services similaires, sous astreinte de 500 € par infraction constatée, une fois écoulé un délai de trente jours suivant la signification de la présente décision,
– condamné in solidum M. [A] [J] et la SARL Le cake bordelais à payer à la SARL Le fournil authentique une somme de 150 000 € au titre de son préjudice économique et une somme de 50 000 € au titre de son préjudice moral,
– débouté M. [A] [J] et la SARL Le cake bordelais de leurs demandes reconventionnelles,
– ordonné la publication, dans deux quotidiens ou magazines régionaux au choix de la SARL Le fournil authentique, de l’extrait suivant :
‘ Par jugement en date du 28 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Bordeaux, première chambre civile, a dit que M. [A] [J] et la SARL Le cake bordelais ont commis des actes de contrefaçon par imitation de la marque DUNE BLANCHE n°3667158 dont est titulaire la SARL LE FOURNIL AUTHENTIQUE, en déposant et en exploitant les marques ‘DUNES BY DAVID’ n° 3953003 et ‘DUNES by david’ n° 3953001, déclaré nulles les marques ‘DUNES BY DAVID’ n°3953003 et ‘DUNES by david’ n°3953001. Il a été fait interdiction à M. [A] [J] et la SARL LE CAKE BORDELAIS d’utiliser le mot ‘dune’ en lien avec des pâtisseries ou services similaires. M. [A] [J] et la SARL LE CAKE BORDELAIS ont été condamnés au paiement de dommages et intérêts à hauteur de 150 000 € pour le préjudice économique et 50 000 € pour le préjudice moral à la SARL LE FOURNIL AUTHENTIQUE. ‘
– dit que la publication aura lieu aux frais de M. [A] [J] et de la SARL Le cake bordelais dans la limite de 2500 € par publication,
– rejeté la demande d’exécution provisoire de la décision,
– rejeté toute autre demande comme non fondée,
– condamné in solidum M. [A] [J] et la SARL Le cake bordelais à payer à la SARL Le fournil authentique une somme de 5000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné in solidum M. [A] [J] et la SARL Le cake bordelais aux dépens qui comprendront les frais de saisie contrefaçon.
M. [A] [J] et la société Le cake bordelais ont relevé appel total de ce jugement par déclaration au greffe de leur avocat le 26 décembre 2017, dans des conditions de régularité non contestées, sous le RG 17/07124.
Par ordonnance du 1er mars 2018, la première présidente de la 1ère chambre civile de la cour d’appel de Bordeaux a autorisé la société le Fournil Authentique à assigner à jour fixe la société Le cake bordelais et M. [J]. Cette assignation en date du 29 mars 2018 a été enrôlée sous le numéro RG 18/02128.
Le 12 avril 2018, les procédures RG 17/07124 et 18/02128 ont été jointes par mention au dossier.
Par conclusions en réponse signifiées par RPVA le 13 septembre 2018, M. [J] et la société Le cake bordelais demandent à la cour de :
Vu les dispositions des articles 564 et 567 du code de procédure civile,
Vu les dispositions de l’article L711-4, L714-3 du code de la propriété intellectuelle,
Vu le principe général du droit « fraus omnia corrumpit »,
Vu les dispositions de l’article L714-6 du code de la propriété intellectuelle,
Vu les dispositions de l’article L716-13 et L 716-14 du code de la propriété intellectuelle,
Vu les dispositions de l’article 1382 ancien du code civil,
Vu les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
infirmer le jugement du 28 novembre 2017 rendu par le tribunal de grande instance de Bordeaux 1ère chambre civile en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a rejeté la demande d’exécution provisoire formulée par la demanderesse,
En conséquence :
A titre principal :
– prononcer la nullité de la marque « DUNE BLANCHE » n°3 667 158 déposée par la SARL Le cake bordelais pour indisponibilité,
– prononcer la nullité de la marque « DUNE BLANCHE » n°3 667 158 déposée par la SARL Le cake bordelais pour fraude,
En tout état de cause,
– juger la SARL Le fournil authentique irrecevable et non fondée en son action en contrefaçon et en nullité à l’encontre de Monsieur [J] et de la SARL Le fournil authentique ,
– la condamner au paiement d’une indemnité de 300 000 euros au profit de monsieur [J] et de 131 343 euros au profit de la SARL Le fournil authentique pour procédure abusive et concurrence déloyale,
– la condamner à une indemnisation à hauteur de 15.000 € au profit de Monsieur [J] et de la SARL Le fournil authentique au titre des frais irrépétibles non compris dans les dépens ainsi qu’au paiement des entiers dépens,
A titre subsidiaire :
– prononcer la déchéance des droits de la SARL Le fournil authentique pour dégénérescence de la marque « DUNE BLANCHE » n° 3 667 158 à compter du mois de janvier 2012 ou, à tout le moins, à compter du mois d’octobre 2013,
– juger que la procédure de saisie contrefaçon et/ou l’assignation délivrée à l’encontre de Monsieur [J] et de la SARL Le cake bordelais ont été mises en ‘uvre à l’initiative d’une personne morale n’ayant pas qualité pour agir,
En conséquence :
– juger la SARL Le fournil authentique irrecevable à agir en contrefaçon et en nullité des marques déposées par Monsieur [A] [J] et exploitées par la SARL Le cake bordelais,
– débouter la SARL Le fournil authentique de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– la condamner au paiement d’une indemnité de 300 000 euros au profit de monsieur [J] et de 131 343 euros au profit de la SARL Le cake bordelais pour procédure abusive et concurrence déloyale,
– la condamner au paiement des entiers dépens ainsi qu’à une indemnité de 15.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile au profit de Monsieur [J] et de la SARL Le cake bordelais,
A titre plus subsidiaire :
– juger mal fondée l’action en contrefaçon et en nullité diligentée par la SARL Le fournil authentique en l’absence de caractérisation d’un risque de confusion,
En conséquence,
– débouter la SARL Le fournil authentique de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– la condamner au paiement d’une indemnité de 300 000 euros au profit de monsieur [J] et de 131 343 euros au profit de la SARL Le cake bordelais pour procédure abusive et concurrence déloyale,
– la condamner aux entiers dépens ainsi qu’à une indemnité de 15.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile au profit de Monsieur [J] et de la SARL Le cake bordelais,
A titre infiniment subsidiaire :
– juger que l’interdiction d’usage prononcée ne peut concerner que la dénomination « DUNE BLANCHE » et non la dénomination « DUNE »,
– réformer le jugement en ce qu’il a assorti l’interdiction d’usage d’une astreinte et à tout le moins en minorer le montant,
– réformer le jugement sur le quantum de l’indemnisation et limiter celui-ci à la somme maximum de 3.573,48€,
– réformer le jugement en ce qu’il a prononcé une condamnation in solidum des concluantes,
– réformer le jugement en ce qu’il a ordonné une mesure de publication,
– la condamner au paiement d’une indemnité de 300 000 euros au profit de monsieur [J] et de 131 343 euros au profit de la SARL Le cake bordelais pour concurrence déloyale,
– réformer le jugement en ce qu’il a accordé une indemnité au titre des frais irrépétibles à la SARL Le fournil authentique ou à tout le moins en minorer le montant,
– débouter la SARL Le fournil authentique de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires.
Par conclusions d’appel n°3 signifiées par RPVA le 8 octobre 2018, la société le Fournil Authentique demande à la cour de :
Vu le livre VII du code de la propriété intellectuelle,
Vu les articles L. 716-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle,
Vu les articles L.711-4, L. 713-3 et L. 714-3 du code de la propriété intellectuelle,
Vu l’article 1382 du code civil, devenu l’article 1240 du code civil,
Vu l’article 564 du code de procédure civile,
Vu les articles 515 et suivants du code de procédure civile,
Vu l’article 910-4 du code de procédure civile,
Vu les pièces versées au débat,
Vu le jugement déféré,
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :
* dit et jugé la société Le fournil authentique recevable et bien fondée en son action,
* constaté qu’il résultait des opérations de saisie-contrefaçon que la société Le cake bordelais utilisait principalement le terme « Dune » pour commercialiser des chouquettes garnies,
* dit et jugé que la marque DUNE BLANCHE était distinctive et parfaitement valable pour viser des pâtisseries et chouquettes garnies,
* dit et jugé que les pièces versées par les défendeurs en première instance n° 3, 4, 5, 6, 7, 30, 32, 38, 39, 40, 41, 44, 49 pour critiquer la marque DUNE BLANCHE sont inopérantes dès lors qu’elles sont postérieures au jour du dépôt, soit en l’espèce le 28 juillet 2009,
* dit et jugé que Monsieur [J] et la société Le cake bordelais ne démontraient nullement l’absence de validité de la marque DUNE BLANCHE,
* dit et jugé que l’utilisation du terme « Dune » ou « Dunes » en relation avec des produits de pâtisserie par la société Le cake bordelais et Monsieur [J] constitue une contrefaçon par imitation de la marque DUNE BLANCHE n°3667158,
* dit et jugé que le dépôt des marques DUNES BY DAVID n° 3953003 et DUNES by david n° 3953001 par Monsieur [A] [J] , ainsi que leur exploitation par la société Le cake bordelais dont il est le gérant, portent atteinte à la marque antérieure DUNE BLANCHE n° 3667158,
* en conséquence, prononcé la nullité des marques DUNES BY DAVID n° 3953003 et DUNES by david n° 3953001,
* dit et jugé que Monsieur [A] [J] ainsi que la société Le cake bordelais ont commis des actes de contrefaçon engageant leur responsabilité civile,
* interdit par conséquent à la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J] d’utiliser l’appellation « dune » en lien avec des pâtisseries, ou tout produit ou service similaire, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée à compter de la signification de la décision à intervenir,
– pour le surplus, réformer le jugement déféré et :
‘ Sur la validité de la marque DUNE BLANCHE n°3667158 :
A titre principal :
– juger irrecevables la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J] en leur demande en nullité pour indisponibilité de la marque DUNE BLANCHE n°3667158 faute de justifier de droits d’auteur antérieurs tant au titre de leur titularité, de l’originalité que de l’antériorité des droits invoqués,
– juger irrecevables la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J] à agir en nullité de la marque DUNE BLANCHE n°3667158 pour fraude ceux-ci n’ayant pas qualité pour invoquer des marques de tiers et ne démontrant aucun droit d’auteur antérieur,
– débouter la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J] de leur demande en déchéance pour dégénérescence des droits sur la marque DUNE BLANCHE n°3667158 faute d’établir, d’une part, la dégénérescence et, d’autre part, résultant du fait du titulaire de la marque,
A titre subsidiaire :
– juger que la société Le cake bordelais et Monsieur [J] sont forclos en leur demande de nullité de la marque DUNE BLANCHE n°3667158,
– juger que la déchéance des droits sur la marque DUNE BLANCHE n°3667158 n’est encourue qu’à compter du 23 mars 2018 et que, par voie de conséquence, la marque était valablement enregistrée avant cette date, de sorte que cela ne remet pas en cause la contrefaçon invoquée,
‘ Sur les actes de contrefaçon de marque :
A titre principal :
– juger que la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J] sont coupables chacun de contrefaçon de la marque DUNE BLANCHE n°3667158,
– condamner par conséquent in solidum la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J] à verser à la société Le fournil authentique la somme de 1.695.215 euros (un million six cent quatre-vingt-quinze mille deux cent quinze euros) en réparation des conséquences économiques négatives,
– condamner par conséquent in solidum la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J] à verser à la société Le fournil authentique la somme de 150.000 euros (cent cinquante mille euros) au titre de son préjudice moral résultant de la contrefaçon,
A titre subsidiaire :
– juger que les agissements de la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J] sont constitutifs à tout le moins d’actes de concurrence déloyale et parasitaire,
– condamner la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J] à verser à la société Le fournil authentique la somme de 1 100 000 € en réparation du préjudice subi au titre de la concurrence déloyale et parasitaire,
‘ Sur les actes distincts de concurrence déloyale et parasitaire :
– juger que la société Le cake bordelais et Monsieur [J] sont coupables d’agissements déloyaux et parasitaires distincts à l’encontre de la société Le fournil authentique en se présentant comme créateur des « Dunes » et en axant la communication de l’activité de pâtisserie principalement sur les « Dunes »,
– condamner par conséquent in solidum la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J] à verser la somme de 100 000 euros (cent mille euros) en réparation du préjudice subi par la société Le fournil authentique du fait des actes distincts de concurrence déloyale et parasitaire commis par la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J],
‘ En tout état de cause :
– déclarer irrecevables les demandes reconventionnelles formées par la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J] pour procédure abusive et concurrence déloyale,
– en tout état de cause, rejeter les demandes reconventionnelles formées par la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J] pour procédure abusive et concurrence déloyale,
– écarter les pièces adverses n° 98, 106, 111 et 114 ne répondant pas aux conditions de validité des attestations,
– écarter les pièces adverses n° 4, 5, 6, 7, 16, 19, 21, 24, 25, 28, 29, 30, 31, 35, 37, 38, 40, 41, 42, 43, 45, 48, 49, 50, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 63, 64, 67, 73, 74, 75, 124,
– rejeter l’ensemble des demandes, fins et prétentions formulées par la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J],
– interdire à la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J], directement ou indirectement, de réitérer les actes de contrefaçon et de déposer une nouvelle marque ayant effet sur le territoire français et comprenant les termes « dune blanche » ou « dune » pour des pâtisseries et/ou des chouquettes garnies et leurs emballages,
– ordonner la publication judiciaire du jugement à intervenir dans trois revues ou journaux au choix de la société Le fournil authentique et aux frais avancés de la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J] dans la limite de 5 000 euros par publication,
– condamner in solidum la société Le cake bordelais et Monsieur [A] [J] à payer la somme de 30 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers frais et dépens ainsi qu’aux charges et frais exposés au titre de la saisie contrefaçon.
L’affaire, initialement fixée à jour fixe au 3 juillet 2018 a été renvoyée à l’audience du 23 octobre 2018.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, des prétentions et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de rejet de pièces
La société Le fournil authentique demande (page 35 de ses conclusions) :
– le rejet des pièces adverses n° 98, 106, 111 et 114 comme ne répondant pas aux conditions de validité des attestations,
– d’écarter les pièces adverses n° 4, 5, 6, 7, 16, 19, 21, 24, 25, 28, 29, 30, 31, 35, 37, 38, 40, 41, 42, 43, 45, 48, 49, 50, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 63, 64, 67, 73, 74, 75, 124.
S’agissant des pièces qui ne répondraient pas aux conditions de validité des attestations, il apparaît que seule la pièce 106, attestation émanant de M. [P], n’est pas accompagnée d’une copie de pièce d’identité, les pièces (attestations) 98, 111 et 114 étant elles régulièrement accompagnées de cette copie ; il ne sera en conséquence fait droit à la demande que pour la pièce 106.
La pièce 21 sera écartée comme illisible.
S’agissant des trente sept autres pièces dont il est demandé qu’elles soient écartées des débats, ou motif qu’elles seraient hors sujet, ou non datées , la demande sera rejetée, dès lors que leur authenticité ne peut être sérieusement contestée, étant précisé qu’y figure en pièce 42 un constat d’huissier qui relèverait le cas échéant de l’inscription de faux ; il s’agit de captures d’écrans relatives à des établissements (boulangerie , pâtisseries, restaurants) commercialisant des ‘dunes’, des ‘Dunes blanches’, de factures de pâtisseries mentionnant l’achat de dunes, de ‘Dunes blanches’, de journaux (pièces 64) faisant état de la commercialisation ou de la composition ou de la recette des ‘Dunes blanches’, ou encore d’un exemplaire de la revue Madame Figaro du 22 23 mai 2015 faisant référence à la dune blanche, ‘icône de la pâtisserie locale’ , lancée par ‘[K]’ au Cap- Ferret et vendue également par M. [A] [J] sous le nom ‘Dune by David’, mais aussi par d’autres pâtissiers bordelais ou des environs de [Localité 3] nominativement citées avec l’adresse des points de vente, ou en pièce 124 du menu du salon de thé [M] à [Localité 3]; il en est ainsi d’autant plus que la société Le fournil authentique fournit elle- même en appel de nombreuses attestations pour tenter de contredire celles produites par les appelants ; la cour examinera ci après leur caractère probant.
Sur la contrefaçon
Il est avéré que la demande porte sur la contrefaçon de marque et non sur la contrefaçon de produit, la recette de la chouquette fourrée de crème légère qu’ont en commun les pâtisseries commercialisées par la société Le fournil authentique sous la marque ‘Dune blanche’, et la société Le cake bordelais sous les marques déposées par M. [A] [J] n’étant pas en tant que telle protégée, et étant d’ailleurs exploitée par de nombreux autres pâtissiers.
En défense, M. [A] [J] et la société Le cake bordelais opposent la nullité de la marque ‘Dune blanche’ déposée par la société Le fournil authentique
Sur la demande de nullité de la marque déposée par la société Le fournil authentique
M. [A] [J] et la société Le cake bordelais articulent cette demande fondée sur l’article L711-14 du code de la propriété intellectuelle autour :
– de l’indisponibilité
– de la fraude.
La société Le fournil authentique soutient que cette demande est irrecevable faute de qualité à agir en ce qu’elle est formée à la fois par M. [A] [J] qui est la personne physique auteur de la marque et par la société Le cake bordelais, personne morale, qui ne pourraient en être co-titulaire.
Cette fin de non recevoir sera rejetée, dès lors que, en l’absence de revendication par la personne physique auteur de la marque à l’encontre de la personne morale exploitant la marque, celle-ci est présumée être titulaire des droits patrimoniaux sur la marque à l’encontre des tiers poursuivis, en dépit de la présence de l’auteur aux débats.
En l’espèce, M. [A] [J], qui reste titulaire des droits moraux, ne conteste pas le droit à agir de la société Le cake bordelais au soutien des droits patrimoniaux dont elle bénéficie.
La société Le fournil authentique fait par ailleurs valoir la forclusion par tolérance pendant cinq ans en application de l’article L 714-3 du code de la propriété intellectuelle, selon lequel l’action en nullité n’est pas recevable si la marque a été déposée de bonne foi et s’il en a été toléré l’usage pendant cinq ans.
Cette fin de non recevoir sera rejetée, dès lors qu’il ressort des conclusions de la société Le fournil authentique devant le tribunal de grande instance qu’elle n’ignorait nullement en 2009 lors du dépôt de sa marque que M. [A] [J] commercialisait déjà des chouquettes sous le terme dunes, quand bien même celui-ci n’a déposé sa propre marque qu’en 2012, et que la nullité est opposée en défense à une demande en contrefaçon et non en demande à titre principal.
Sur l’indisponibilité
Elle résulte selon les appelants de ce que leurs marques, dont le dessin accompagnant le dépôt de la marque, seraient une oeuvre de l’esprit originale reflétant l’expression de la liberté créative de M. [A] [J] et en tant que telles protégeables.
Cette demande nouvelle en appel ne sera pas accueillie ; elle ne saurait en tout état de cause s’appliquer qu’à la première de ces deux marques, celle enregistrée sous le numéro 12 3 953 001, la marque 12 953 003 ne pouvant être qualifiée d’oeuvre originale en ce qu’elle se borne à utiliser un graphisme particulier mais néanmoins banal.
Il apparaît en effet que le dessin de la marque n° 12 3 953 001 de M. [A] [J], ainsi décrite par le dépôt de marque ‘forme arrondi noire, représentant une sorte de soleil en fusion, avec de petites particules également de forme arrondie et noire qui se détachent et qui semblent graviter tout autour du rond principal et central .Sur le fond noir arrondi apparaissent des inscriptions blanches à savoir le mot ‘Dunes’ en lettres majuscules de police garaline et en dessous ‘by David’ en minuscules et en police régina.’ n’a été déposé qu’en 2012, alors que la marque de la société Le fournil authentique a été déposée en 2009 soit antérieurement, et que si M. [A] [J] justifie de la commercialisation antérieure de dunes, en revanche, il ne justifie nullement de l’usage de ce dessin antérieurement au dépôt de marque.
M. [A] [J] fait valoir par de nombreuses attestations, que rien ne justifie d’écarter des débats et qui visent bien un élément du litige, qu’il utilisait la dénomination dune pour les chouquettes garnies qu’il vendait, et ce dès 2008 en en tout cas le 13 août 2008 (pièce 103, le témoin donnant précisément cette date et exposant pourquoi elle est en mesure de la donner par référence à un évènement familial).
Cependant, la société Le fournil authentique rétorque qu’elle commercialisait elle- même les dites chouquettes garnies sous le nom de ‘Dunes blanches’ et ce dès 2007 ; elle l’établit là encore par de nombreuses attestations de personnes ayant acheté des ‘Dunes blanches’ dans la boutique du [Localité 1] dès cette période, même si l’attestation de M. [C] [O], gérant de la société ne peut être retenue comme constituant une preuve à soi- même.
D’autre part, M. [A] [J] fait état de l’usage de ‘Dune by David’ qui contient un élément nominatif, [A], alors que la société Le fournil authentique a déposé le nom de ‘Dune blanche’, qui est différent du fait de l’adjonction de l’adjectif ‘blanche’.
Au vu de ces éléments, il ne peut être considéré que la marque Dune était indisponible lors du dépôt en 2009 par la société Le fournil authentique.
Sur la fraude
L’annulation d’un dépôt de marque sur le fondement de la fraude, qui corrompt tout, suppose d’apporter la preuve d’intérêts sciemment méconnus par le déposant.
Les appelants font valoir la fraude au motif de l’usage antérieur qu’ils faisaient du signe ‘dunes’, et de l’intérêt sciemment méconnu par la société Le fournil authentique.
En l’espèce, il apparaît qu’à la date à laquelle la société Le fournil authentique a déposé sa marque, le 28 juillet 2009, il existait déjà cinq marques contenant le mot dune pour désigner des pâtisseries en classe 30 : ‘les dunes’ déposée le 27 juin 2007, ‘dunes’ , déposée le 9 février 2009, ‘dunes sélection’, ‘dunes pâtisserie’, ‘dunes restauration’, déposées le 22 juillet 2008 (pièces 10, 78, 79, 80, 81, 82 et 83 des appelants), que la société Le fournil authentique n’a pas contestées.
En déposant une marque qui avait pour effet de lui permettre de s’approprier le terme dune, la société Le fournil authentique a eu pour objectif de faire obstacle à l’usage sur le secteur d’activité (pâtisserie fraîche à destination des particuliers) et le secteur géographique sur lequelle elle opère et opéraient M. [A] [J] et la société Le cake bordelais, alors que cette marque a été frauduleusement obtenue aux dépens des droits des tiers, la fraude s’appréciant par référence à la date du dépôt de la marque et non à un usage antérieur. Cette intention ressort d’ailleurs de la déclaration du conseil de l’intimé à la presse à la suite de la procédure de première instance puisqu’il indiquait à la presse locale ‘L’important c’est que [K] [O] soit reconnu comme l’inventeur des dunes’, et ce alors même qu’une recette n’est pas en tant que telle protégeable (pièce 84 des appelants).
Il apparaît que le terme dune est devenu générique, que la dune est présentée comme une spécialité pâtissière bordelaise au même titre que le canelé et que ce nom est très largement utilisé par de nombreux pâtissiers de [Localité 3] et de sa région, et d’ailleurs, sous le terme ‘dunes’, soit même sous le terme ‘dunes blanches’ sans que la société Le fournil authentique ait contesté ces usages à l’encontre d’autres fabricants et vendeurs, et ce, le cas échéant, en l’absence de dépôt de marque, par la voie de la concurrence déloyale. Ce terme figure en outre sur des cartes de restaurant, sur des sites de recettes, sur des blogs, pour des cours de pâtisserie et dans des articles de presse, et des dunes sont commercialisées également par plusieurs supermarchés de [Localité 3].
De plus la notion de ‘Dune blanche’ correspond en réalité à un concept géographique spécifique aux zones dunaires, zone dans laquelle se trouve le site original de la boulangerie -pâtisserie [Z] au [Localité 1] ; il définit la bande de dune qui suit le haut de la plage et la dune embryonnaire avant la dune grise, et a une végétation dunaire de densité moyenne caractérisée notamment par l’oyat ; un concept géographique relève du patrimoine commun et ne peut pas faire l’objet d’une appropriation ; il existe
également sur la commune de [Localité 4] au village de [Localité 2] une avenue des ‘Dunes blanches’ qui ne peut davantage voir transformer son nom en marque.
De ce fait, la marque ‘Dune blanche’ ne peut être considérée comme valable et doit être annulée.
Le jugement sera infirmé en ce qu’il a débouté M. [A] [J] et la société Le cake bordelais de leur demande de nullité de la marque.
En tout état de cause, et surabondamment, la demande de déchéance pour dégénérescence apparaît fondée en ce que la société Le fournil authentique n’exploite pas la marque telle que déposée, ‘dune blanche ‘ au singulier et dans une police graphique spécifique, mais sous l’appelation ‘ dunes blanches’ au pluriel en graphisme classique (pièce 66 des appelants, pièces 59, 21 et 61-3 de l’intimée), et ce bien qu’elle ait fait signer à différents acteurs économique vendant des dunes blanches un accord par lequel ils s’engagent à ne pas commercialiser sous cette dénomination. En outre , la société Le fournil authentique a déposé le 27 septembre 2017 une nouvelle marque semi-figurative ‘Chez Pascal DUNES BLANCHES’ reprenant ainsi l’usage du pluriel, et ce en classes 29, 30, 35 et 43 et pour un nombre important de produits alimentaires et services liés, ce dont il ressort précisément que la notion de dunes blanches ne se limite pas à la pâtisserie querellée.
Sur la demande subsidiaire de la société Le fournil authentique au titre de la concurrence déloyale
Cette demande est fondée sur l’article 1382 ancien du code civil devenu 1240 ; l’action en concurrence déloyale peut être fondée sur les mêmes faits que ceux allégués à l’appui d’une action en contrefaçon de marque rejetée pour défaut d’atteinte à un droit privatif, dès lors qu’il est justifié d’une comportement fautif, ce dont il appartient à la société Le fournil authentique d’apporter la preuve, la simple utilisation du signe argué à tort de contrefaçon n’étant pas à elle- seule de nature à constituer un acte de concurrence déloyale.
Force est de constater qu’elle est à cet égard défaillante, dès lors que la société Le fournil authentique ne peut revendiquer être à l’origine de la création de la recette de la ‘Dune blanche’, que le terme de dune est communément utilisé de longue date pour désigner les chouquettes fourrées de crème et par de nombreux autres intervenants, et que ni la société Le cake bordelais ni M. [A] [J] ne se sont expressément prévalus de la marque selon des modalités de nature à porter à confusion ou en se prétendant inventeur du concept ou ne sont placés volontairement dans le sillage de la société Le fournil authentique, qui ne justifie pas d’une baisse de son chiffre d’affaires, la concurrence entre celle-ci et la société Le cake bordelais étant essentiellement de nature géographique sur la ville de [Localité 3], mais n’étant pas pour autant déloyale, et étant rappelé que l’activité de la société Le cake bordelais dans le domaine de la pâtisserie ne se limitait pas aux dunes, et s’étendait notamment au chocolat.
La société Le fournil authentique sera déboutée de cette demande, et de la demande de dommages intérêts subséquente.
Sur les mesures annexes sollicitées par la société Le fournil authentique
Dès lors que la validité de la marque ‘Dune blanche’ déposée par la société Le fournil authentique n’est pas reconnue, celle-ci n’est pas fondée à solliciter des mesures d’interdiction de commercialisation ou de dépôt de marque, ou de publication du jugement.
Le jugement sera réformé de ces chefs.
Sur la demande de dommages intérêts de la société Le fournil authentique
Dès lors que sa marque n’est pas reconnue valable, la société Le fournil authentique n’est pas fondée à solliciter sur le fondement de la contrefaçon une indemnisation du préjudice qu’elle allègue (sur la base notamment d’un taux de marge de 82 %) dans des proportions qui apparaissent d’autant plus excessives que M. [A] [J] et la société Le cake bordelais ont cessé de commercialiser des dunes ou des ‘Dunes blanches’ à compter de l’assignation.
Le jugement sera réformé de ce chef.
Sur la demande de nullité des marques déposées par M. [A] [J] et exploitées par la société Le cake bordelais
Dès lors que la demande de la société Le fournil authentique est fondée sur l’atteinte à sa marque ‘Dune blanche’ et que celle-ci est annulée, la demande de nullité des marques ‘Dune by David’, qui ne sont au demeurant plus exploitées, de l’aveu même des appelants, est dépourvue de fondement et la société Le fournil authentique en sera déboutée.
Sur les demandes subsidiaires de M. [A] [J] et de la société Le cake bordelais
Les appelants demandent à titre subsidiaire, plus subsidiaire et infiniment subsidiaire à la cour de :
– prononcer la déchéance des droits de la SARL Le fournil authentique pour dégénérescence de la marque « DUNE BLANCHE » n° 3 667 158 à compter du mois de janvier 2012 ou, à tout le moins, à compter du mois d’octobre 2013,
– juger que la procédure de saisie contrefaçon et/ou l’assignation délivrée à l’encontre de M. [A] [J] et de la SARL Le cake bordelais ont été mises en ‘uvre à l’initiative d’une personne morale n’ayant pas qualité pour agir,
En conséquence :
– juger la SARL Le fournil authentique irrecevable à agir en contrefaçon et en nullité des marques déposées par Monsieur [A] [J] et exploitées par la SARL Le cake bordelais,
– juger mal fondée l’action en contrefaçon et en nullité diligentée par la SARL Le fournil authentique en l’absence de caractérisation d’un risque de confusion,
– juger que l’interdiction d’usage prononcée ne peut concerner que la dénomination « DUNE BLANCHE » et non la dénomination « DUNE »,
– débouter la SARL Le fournil authentique de toutes ses demandes, fins et conclusions.
Dès lors qu’il est fait droit à la demande reconventionnelle principale de nullité de la marque des appelants, qui fait obstacle aux demandes liées à la contrefaçon, il n’y a pas lieu d’examiner ces demandes.
Sur la demande reconventionnelle de dommages intérêts de M. [A] [J] et de la société Le cake bordelais
Le tribunal les avait logiquement déboutés de cette demande dans la mesure où il reconnaissait la contrefaçon.
En appel, les appelants demandent la condamnation de la société Le fournil authentique au paiement d’une indemnité de 300 000 euros au profit de monsieur [J] et de 131 343 euros au profit de la SARL Le cake bordelais pour procédure abusive et concurrence déloyale.
Pour la société Le cake bordelais la somme demandée correspond au déficit allégué et provisionné à hauteur de 200 000 € au bilan 2017.
Il apparaît que la société placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Bordeaux du 13 juin 2018 n’est pas la société Le cake bordelais mais la société SAS [M], créée et immatriculée le 20 juillet 2016 et qui exploitait un salon de thé Allées de Tourny à Bordeaux ; il s’ensuit que la demande de la société Le cake bordelais, qui est en l’état in bonis, même si elle a fait le choix de céder ses actifs, notamment en 2015 le fonds de commerce de la place du Pradeau à [Localité 3], et ce alors qu’elle mentionne dans ses conclusions que les dunes ne constituaient que 30 % de son chiffre d’affaires , ne sera pas accueillie, et que le lien entre les démêlés judiciaires relatifs aux dunes et les difficultés de cette société n’est pas établi.
En revanche, il apparaît que la procédure engagée contre M. [A] [J] a un caractère abusif, notamment par l’effet de la publicité donnée à l’audience du tribunal de grande instance et à la décision du tribunal alors même que celle-ci n’était pas assortie de l’exécution provisoire, présentée comme la condamnation à 200 000 € pour avoir imité les dunes alors que seule la contrefaçon de la marque et non du produit était sanctionnée et alors que le gérant de la société Le fournil authentique ne peut se présenter comme l’inventeur des dunes, mais a formulé à l’encontre de M. [A] [J] l’accusation de plagiat. Il sera accordé à celui-ci à ce titre une somme de 3000 € en réparation de son préjudice moral, son préjudice économique personnel n’étant pas établi, dès lors que ses marques étaient exploitées par la société Le cake bordelais.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Les dépens tant de première instance que d’appel seront mis à la chrage de la société Le fournil authentique dont les demandes sont rejetées et qui sera déboutée de sa demande en application de l’article 700 du code de procédure civile ; il serait inéquitable de laisser à M. [A] [J] et à la société Le cake bordelais la charge de leurs frais de procédure en première instance et en appel, et la société Le fournil authentique sera condamnée à leur payer à ce titre une somme de 9000 €.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Ecarte des débats les pièces 21 et 106 des appelants ;
Dit n’y avoir lieu à écarter les pièces n° 4, 5, 6, 7, 16, 19, 24, 25, 28, 29, 30, 31, 35, 37, 38, 40, 41, 42, 43, 45, 48, 49, 50, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 63, 64, 67, 73, 74, 75, 124 des appelants ;
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
Déclare recevable la demande de nullité de la marque « DUNE BLANCHE » n°3 667 158 déposée par la SARL Le fournil authentique formée par M. [A] [J] et la société Le cake bordelais ensemble ;
Prononce la nullité de la marque « DUNE BLANCHE » n°3 667 158 déposée par la SARL Le fournil authentique pour fraude,
Déboute la société Le fournil authentique de l’ensemble de ses demandes ;
Condamne la société Le fournil authentique à payer à M. [A] [J] la somme de 3000 € à titre de dommages intérêts en réparation de son préjudice moral ;
Déboute M. [A] [J] et la société Le cake bordelais du surplus de leurs demandes ;
Condamne la société Le fournil authentique à payer à M. [A] [J] et à la société Le cake bordelais unis d’intérêt la somme de 9000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Le fournil authentique aux dépens tant de première instance que d’appel.
Le présent arrêt a été signé par Madame Elisabeth LARSABAL, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier,Le Président,