Tolérance de marque : 17 mai 2013 Cour d’appel de Paris RG n° 11/22637

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Tolérance de marque : 17 mai 2013 Cour d’appel de Paris RG n° 11/22637
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Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 2

ARRET DU 17 MAI 2013

(n° 129, 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 11/22637.

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Juillet 2011 – Tribunal de Grande Instance de PARIS 3ème Chambre 4ème Section – RG n° 09/11985.

APPELANTES :

– SA de droit belge [1]

prise en la personne de ses représentants légaux,

ayant son siège social [Adresse 4]),

– SA BAL DU [1]

prise en la personne de son Président du directoire,

ayant son siège social [Adresse 2],

représentées par la SELARL DES DEUX PALAIS en la personne de Maître Patrick BETTAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0078,

assistées de Maître Pierre LUBET de la SELARL ALTANA, avocat au barreau de PARIS, toque : R021.

INTIMÉE :

SA LES EDITIONS ARTISTIQUES DU TERTRE exploitant sous le nom commercial ARTERTRE

prise en la personne de son représentant légal,

ayant son siège social [Adresse 1],

représentée par Maître Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945,

assistée de Maître Emmanuelle HOFFMAN de la SELARL HOFFMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : C0610.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 mars 2013, en audience publique, devant Madame Véronique RENARD, Conseillère chargée du rapport, les avocats ne s’y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Christine AIMAR, présidente,

Madame Sylvie NEROT, conseillère,

Madame Véronique RENARD, conseillère.

Greffier lors des débats : Monsieur Truc Lam NGUYEN.

ARRET :

Contradictoire,

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

– signé par Madame Marie-Christine AIMAR, présidente, et par Monsieur Truc Lam NGUYEN, greffier présent lors du prononcé.

La société de droit belge [1] a acquis, le 12 décembre 2005, la marque verbale française ‘[1]’, déposée le 3 mai 1973, enregistrée sous le 876972 et renouvelée en dernier lieu le 26 novembre 2002 sous le n°1 311 105 pour désigner les produits et services des classes 1 à 42, parmi lesquels figurent, au sein des classes 16 et 21, ‘la papeterie, les articles de bureau’ et ‘la verrerie’.

La société de droit français BAL DU [1], exploitant à [Localité 1] le cabaret du même nom, bénéficie depuis le 1er septembre 1996 d’une licence exclusive, renouvelée le 6 avril 2006, lui permettant de commercialiser, entre autres, des produits relevant de la classe 21 sous la marque [1].

En vertu d’un avenant du 19 mai 2005 à un contrat de licence antérieur du 29 juin 1992,publié au Registre National des Marques le 28 juillet 2005, la société BAL DU [1] est également licenciée à titre exclusif de la marque [1] n°1 311 105 pour commercialiser notamment les produits de la classe 16.

Les sociétés [1] et BAL DU [1] exposent avoir constaté que la société LES EDITIONS ARTISTIQUES DU TERTRE (ci-après EDITIONS DU TERTRE) commercialisait des articles de souvenir et des produits dérivés, positionnés en bas de gamme, et sur lesquels est reproduite la marque [1], accompagnée le plus souvent d’un dessin d’un moulin de couleur rouge ou d’une photographie de la façade du [1], à savoir une trousse d’écolier, un tapis de souris et des dessous de verre, à travers un large réseau de distribution, dont les Galeries Lafayette, et le site Internet www.paris-gifts.com.

C’est dans ce contexte qu’après une mise en demeure demeurée infructueuse, les sociétés [1] et BAL DU [1] ont, par acte d’huissier en date du 23 juillet 2009, fait assigner la société EDITIONS DU TERTRE devant le Tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de marque ainsi qu’en concurrence déloyale et parasitaire afin d’obtenir, outre l’allocation de dommages et intérêts, des mesures d’interdiction et de publication.

Par jugement contradictoire rendu le 7 juillet 2011, non assorti de l’exécution provisoire le Tribunal de Grande Instance de PARIS a :

– dit recevable l’action des sociétés [1] et BAL DU [1] sur le fondement de la contrefaçon,

– déclaré leur demande irrecevable comme prescrite sur le fondement de la concurrence déloyale et du parasitisme,

– rejeté la fin de non recevoir tirée de la forclusion par tolérance,

– déclaré la société EDITIONS DU TERTRE irrecevable en sa demande en déchéance pour défaut d’exploitation de la marque française ‘[1]’ n°1 311 105,

– l’a déboutée de sa demande en nullité de la marque française [1]’ n°1 311 105,

– dit que l’usage de la dénomination ‘[1]’ par la société EDITIONS DU TERTRE n’est pas constitutif d’un acte de contrefaçon,

– débouté en conséquence les sociétés [1] et BAL DU [1] de l’ensemble de leurs demandes,

– débouté la société EDITIONS DU TERTRE de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts et aux fins de publication du jugement,

– condamné in solidum les sociétés [1] et BAL DU [1] à payer à la société EDITIONS DU TERTRE la somme de 10.000 euros par application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

– les a condamnées in solidum aux dépens de l’instance.

Les sociétés [1] et BAL DU [1] ont interjeté appel de cette décision par déclaration du 19 décembre 2011.

Par dernières écritures signifiées le 18 juillet 2012, les sociétés [1] et BAL DU [1] demandent à la Cour de :

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la fin de non recevoir de la société EDITIONS DU TERTRE tirée de la prescription de l’action en contrefaçon, rejeté fin de non recevoir de la forclusion par tolérance, déclaré la société EDITIONS DU TERTRE irrecevable en sa demande en déchéance pour défaut d’exploitation de la marque française [1] n° 1311105’et débouté cette dernière de sa demande fondée sur la nullité de ladite marque pour défaut de caractère distinctif,

– réformer le jugement pour le surplus en ce qu’il a déclaré l’action en concurrence déloyale prescrite et les a déboutées de leurs demandes,

statuant à nouveau,

– dire et juger qu’elles sont recevables et fondées en toutes leurs demandes,

– dire et juger que la marque ‘[1]’ est une marque renommée au sens des articles L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle et 5§2 de la directive 89/104,

– dire et juger que la société EDITIONS DU TERTRE a commis des actes de contrefaçon de la marque [1] n°1 311 105, en commercialisant des produits sur lesquels sont reproduits cette marque,

– dire et juger que la société EDITIONS DU TERTRE a commis des actes de concurrence déloyale et de parasitisme à leur préjudice, distincts de ceux constitutifs de contrefaçon en utilisant ‘sans bourse délier’ la notoriété de la marque ‘[1]’, la dénomination sociale, le nom commercial et l’enseigne du [1] et l’image de sa façade,

– débouter la société EDITIONS DU TERTRE de toutes ses demandes,

– interdire à la société EDITIONS DU TERTRE la poursuite de tels agissements sous astreinte de 500 Euros par infraction constatée à compter de la signification du jugement à intervenir,

– ordonner aux frais de la société EDITIONS DU TERTRE le retrait et la destruction des produits contrefaisants restant détenus par elle,

– condamner la société EDITIONS DU TERTRE à verser, à titre de provision, une somme de 10.000 euros à chacune d’elles, en réparation du préjudice subi du fait de la commercialisation d’articles de souvenir sur lesquels sont reproduits la marque ‘[1],

– condamner la société EDITIONS DU TERTRE à verser, à titre de provision, une somme de 10.000 euros à chacune d’elles en réparation du préjudice subi du fait de l’atteinte à l’image de la marque ‘[1]’,

– condamner la société EDITIONS DU TERTRE à verser, à titre de provision, une somme de 15.000 euros à la société [1] en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale,

– condamner la société EDITIONS DU TERTRE à verser, à titre de provision, une somme de 30.000 euros à la société BAL DU [1] en réparation du préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire, et pour trouble anormal porté au bâtiment dont elle est propriétaire,

– ordonner la publication de l’arrêt à intervenir dans dix journaux ou périodiques de leur choix, dans la limite de 10.000 euros HT par insertion aux frais de la société EDITIONS DU TERTRE, et selon un communiqué figurant dans leurs écritures,

– ordonner la communication par la société EDITIONS DU TERTRE, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé un délai de 20 jours à compter de la signification du jugement (sic) à intervenir, des documents relatifs au nombre de produits litigieux vendus ainsi que les prix desdits produits,

– condamner la société EDITIONS DU TERTRE à payer à chacune d’elles la somme de 35.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

– condamner la société EDITIONS DU TERTRE aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure civile.

Par dernières écritures signifiées le 19 février 2013, la société EDITIONS DU TERTRE entend voir :

– confirmer le jugement du 7 juillet 2011,

à titre liminaire (sic),

– dire que l’action en concurrence déloyale intentée par les sociétés [1] et BAL DU [1] à son encontre est prescrite,

à titre principal,

– constater que l’usage de la dénomination litigieuse n’est pas un usage à titre de marque,

– dire et juger qu’aucun acte de contrefaçon de la marque ‘[1]’ n’a été commis à l’encontre des sociétés [1] et BAL DU [1],

– réformer le jugement du 7 juillet 2011 en ce qu’il l’a déboutée de sa demande en déchéance de la marque n° 1 311 105, de sa demande en nullité de la même marque, de sa demande reconventionnelle en procédure abusive et a rejeté la fin non recevoir tirée de la forclusion par tolérance en application l’article L 716-5 du Code de la propriété intellectuelle,

statuant à nouveau,

à titre liminaire (sic),

– constater la déchéance pour défaut d’exploitation de la marque ‘[1]’ n° 1 311 105 appartenant à la société [1] et accordée sous licence à la société BAL DU [1],

– constater la tolérance des sociétés [1] et BAL DU [1] à son encontre s’agissant de l’utilisation du vocable [1], et faire application de la forclusion par tolérance de l’article L 714-3 du Code de la Propriété Intellectuelle,

– dire irrecevables les demandes des sociétés [1] et BAL DU [1],

– condamner solidairement les sociétés [1] et BAL DU [1] à lui verser la somme de 10.000 euros au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

en tout état de cause,

– dire et juger qu’aucun acte de contrefaçon de la marque ‘[1]” n’a été commis à l’encontre des sociétés [1] et BAL DU [1],

– dire et juger qu’aucun acte de concurrence déloyale et parasitaire n’a été commis au préjudice des sociétés [1] et BAL DU [1],

– débouter les sociétés [1] et BAL DU [1] de toutes leurs demandes,

– condamner solidairement les sociétés [1] et BAL DU [1] à lui verser à la société la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamner solidairement les sociétés [1] et BAL DU [1] aux entiers dépens de la présente instance.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 7 mars 2013.

SUR CE,

Sur la prescription :

* de l’action en contrefaçon :

Considérant que pour invoquer la prescription de l’action en contrefaçon, la société intimée fait valoir qu’elle commercialise des articles de souvenirs et des produits dérivés qui reproduisent pour la plupart des vues et monuments de [Localité 1] et notamment le [1] et que ‘le [1]’ lui a passé commande entre le 31 juillet 1990 et le 31 octobre 1996 de tels produits, de sorte que les sociétés appelantes avaient connaissance des actes qui lui sont reprochés depuis 1990 ;

Que toutefois, outre le fait que les factures produites à l’appui de cette argumentation ont été émises par ‘Shopping [1] [Adresse 3]’ dont le lien avec l’une ou l’autre des sociétés appelantes n’est pas établi, il convient de rappeler que la contrefaçon est un délit continu et que le point de départ de la prescription court à compter du dernier acte de contrefaçon constaté ;

Or en l’espèce, les faits reprochés à la société EDITIONS DU TERTRE qui fondent l’action en contrefaçon des sociétés [1] et BAL DU [1] ont été constatés par actes d’huissier en date des 13 mars et 20 avril 2009 ;

Que dès lors le délai de prescription de trois ans relatif à ces actes de contrefaçon court à compter de cette dernière date et le Tribunal a donc a bon droit rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription de l’action en contrefaçon ;

* de l’action en concurrence déloyale :

Considérant que la société EDITIONS DU TERTRE invoque les mêmes moyens pour conclure à la prescription de l’action en concurrence déloyale ;

Que toutefois pour le motif déjà exposé tiré du fait qu’aucun élément du dossier, sinon la proximité géographique à elle seule insuffisante, n’établit le lien qui existe ou aurait existé entre la société SHOPPING [1] qui a émis les factures invoquées et la société BAL DU [1] qui exploite le fonds de commerce situé [Adresse 2] ni avec la société [1] titulaire de la marque opposée, la prescription décennale ne peut être acquise ;

Que le jugement dont appel sera donc également infirmé sur ce point ;

Sur la déchéance de la marque :

* sur la recevabilité de la demande la déchéance :

Attendu qu’aux termes de l’article L.714-5 du Code de la Propriété Intellectuelle, ‘encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n’en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l’enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans ; la déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée’.

Qu’en l’espèce, la société intimée soutient qu’au regard des preuves d’exploitation produites, les sociétés [1] et BAL DU [1] n’ont pas fait un usage sérieux de la marque n° 1 311 105 depuis son dépôt ;

Qu’elle sollicite ainsi la déchéance de ladite marque, sans autre précision dans le dispositif de ses écritures, et pour la totalité des produits visés au dépôt et à tout le moins pour les classes 16 et 21 dans les motifs de ces mêmes écritures ;

Que toutefois, les sociétés [1] et BAL DU [1] ne lui opposent leurs droits sur la marque qu’en ce que celle-ci désigne la papeterie et les articles de bureau ainsi que les produits de verrerie ;

Qu’il résulte des dispositions de l’article 70 du Code de Procédure Civile que la demande reconventionnelle en nullité formée en réponse à une demande en contrefaçon est un moyen de défense et s’inscrit dans le périmètre des droits de la marque que le demandeur principal entend opposer à la partie défenderesse ;

Que la société EDITIONS DU TERTRE est donc irrecevable à solliciter la déchéance de la marque pour les produits autres que les produits de papeterie et les articles de bureau ainsi que les produits de verrerie ;

Que s’agissant de ces produits, les sociétés appelantes invoquent la renommée de la marque, et font valoir que la demande en déchéance ne présente pas de lien suffisant avec l’action en contrefaçon à laquelle elle ne permettrait pas de faire échec et qu’elle n’aurait de surcroît pas pour effet de rendre disponible le signe, pour conclure qu’elle doit également être déclarée irrecevable ;

Mais considérant que la demande reconventionnelle en déchéance est un moyen de défense dont le lien avec la demande principale en contrefaçon est évident quelle que soit la renommée de la marque opposée et nonobstant la disponibilité du signe qui résulterait par ailleurs de son usage à titre de dénomination sociale et d’enseigne, l’atteinte portée à ces signes relevant de l’examen au fond des conditions d’usage de ces derniers ;

Que la demande en déchéance est donc bien recevable s’agissant des produits opposés ;

Qu’il convient en conséquence de réformer le jugement de ce chef ;

* Sur le bien fondé de la demande en déchéance :

Considérant que  ni la date de publication de la marque litigieuse ni la date de la première demande en déchéance ne sont révélées à la Cour ;

Qu’en conséquence et à défaut de précision en ce sens tant dans le jugement frappé d’appel que dans les conclusions des parties quant à la date de la première demande en déchéance, il y a lieu de retenir la date des dernières conclusions signifiées par la société EDITIONS DU TERTRE devant le tribunal, soit le 18 mai 2011 ;

Que la période à considérer pour apprécier la demande en déchéance est donc comprise entre le 18 mai 2006 et le 18 mai 2011 en application des dispositions susvisées ;

Considérant qu’il est constant que la preuve de l’exploitation incombe au propriétaire de la marque dont la déchéance est demandée, que cette exploitation doit être publique et non équivoque et que les actes d’usage du signe en cause doivent être réalisés à titre de marque ;

Que pour justifier de l’usage sérieux de la marque opposée, les sociétés appelantes produisent des extraits du site moulinrouge.fr qui ne sont pas datés, des extraits du propre site de la société intimée, des extraits du site moulinrougestore.com datés du 01/09/2010 mais qui montrent des boas, bijoux, articles de coiffure, sacs, champagne, chaussures, articles de vaisselle, tasses, vide-poches, parfums, lampes, cravates, posters, CD, DVD, foulards, T-shirt, porte-clés, boutons de manchettes, verres, jeux de cartes, qui sont sans lien avec les produits opposés à l’exception des verres ;

Qu’elles versent cependant aux débats des factures de fournisseur de ‘produits boutique’, qui lorsqu’elles correspondent à la période considérée, concernent des affiches, cartes postales, stylos, crayons et gommes, ainsi qu’une attestation de son directeur général relatives aux statistiques de ventes desdits produits de 2007 à 2010, accompagnée des récapitulatifs correspondants ;

Que ces pièces sont suffisantes pour démontrer que la marque [1] n° 1 311 105 revendiquée a bien fait l’objet d’un usage sérieux pour désigner les produits de papeterie et les articles de bureau ainsi que les produits de verrerie avant que la demande reconventionnelle en déchéance ne soit présentée par la société intimée ;

Que la demande en déchéance ne peut en conséquence prospérer ;

* sur la forclusion par tolérance :

Considérant que se fondant sur les dispositions de l’article L714-3 du Code de la Propriété Intellectuelle selon lesquelles ‘seul le titulaire d’un droit antérieur peut agir en nullité sur le fondement de l’article L 711-4 du Code de la Propriété Intellectuelle. Toutefois son action n’est pas recevable si la marque a été déposée de bonne foi, et s’il en a toléré l’usage pendant cinq ans’, la société EDITIONS DU TERTRE fait encore valoir que la société BAL DU [1] connaît et tolère l’utilisation du vocable [1] qu’elle incrimine depuis le 31 juillet 1990, de sorte que son action intentée en 2009 serait irrecevable ;

Que les premiers juges ont toutefois relevé que cette exception n’est opposable que par le titulaire d’une marque postérieure dont l’usage a été toléré par le titulaire d’une marque première, ce qui n’est pas le cas de la société EDITIONS DU TERTRE ;

Que le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté ce moyen d’irrecevabilité ;

Sur la nullité de la marque pour défaut de caractère distinctif :

Considérant que la société EDITIONS DU TERTRE sollicite, dans le dispositif de ses dernières écritures, la réformation du jugement dont appel en ce qu’il l’a déboutée de sa demande en nullité de la marque [1] n° 1 311 105 pour défaut de caractère distinctif ;

Qu’étant rappelé que la distinctivité d’une marque s’apprécie au regard des produits et services visés au dépôt, il n’est toutefois pas démontré par l’affirmation selon laquelle ‘les produits souvenirs de la ville (sic) de la société BAL DU [1] et estampillés [1] sont souvent accompagnés d’une illustration représentant la façade du cabaret parisien’ en quoi le signe ne serait pas distinctif pour désigner, non pas des moulins de couleur rouge, mais des produits de papeterie et des articles de bureau ainsi que de la verrerie ;

Que la demande ne peut donc prospérer ;

Sur la contrefaçon :

Considérant que les sociétés [1] et BAL DU [1] reprochent à la société EDITIONS DU TERTRE de commercialiser, notamment sur Internet, des articles de souvenir, en l’espèce une trousse d’écolier, un tapis de souris et des dessous de verre en carton sur lesquels sont reproduits la dénomination [1] ;

Qu’il résulte du procès-verbal de constat des 13 mars et 20 avril 2009 que la trousse d’écolier comporte, entre autres monuments de [Localité 1], un dessin de style enfantin d’un moulin de couleur rouge dans des nuages bleus et la mention [1], que le premier tapis de souris représente l’affiche de [G] réalisée pour la publicité de la revue menée par La Goulue qui mentionne à trois reprises ‘[1]’ avec toutefois un seul M pour les trois inscriptions, et que le second, à l’instar du dessous de verre en carton, représente le cabaret parisien avec des ailes rouges illuminées dans la nuit et comporte la mention [1] ;

Qu’il y a lieu pu de constater que la société EDITIONS DU TERTRE utilise la dénomination [1] en association avec l’image stylisée ou non du moulin qui abrite le cabaret parisien ou reproduit l’affiche de [G] dans le but d’identifier ledit cabaret qui fait partie incontestable du patrimoine touristique de [Localité 1], et ce de façon indissociable du bâtiment éponyme, au même titre d’ailleurs qu’elle reproduit d’autres bâtiments ou monuments emblématiques de la capitale en les désignant par leurs noms ;

Qu’ainsi les premiers juges ont pu valablement décider que l’usage incriminé, s’il constitue bien un usage dans la vie des affaires, ne constitue pas un usage à titre de marque car il ne remplit pas la fonction distinctive conférée à celle-ci, ne faisant qu’identifier un site touristique sans affecter la garantie de provenance des produits d’origine ;

Que le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté l’action en contrefaçon ;

Sur la concurrence déloyale et le trouble à la propriété :

Considérant que la société [1] reproche à ce titre à l’intimée d’avoir sciemment et indûment tiré profit de la notoriété de la marque [1] et de l’univers qu’elle renvoie, sans contrainte ni contrepartie ;

Que ce faisant elle ne se prévaut d’aucun fait distinct de ceux déjà évoqués au titre de la contrefaçon, la notoriété de la marque étant, soit le fondement d’une action distincte fondée sur une atteinte à celle-ci, soit un élément du préjudice résultant de la contrefaçon ;

Considérant que la société BAL DU [1] incrimine quant à elle la reprise de sa dénomination sociale, de son nom commercial et de son enseigne ;

Qu’elle ajoute qu’une telle utilisation ‘de l’élément distinctif’ [1] crée un risque de confusion certain pour le consommateur qui pensera nécessairement que les produits litigieux commercialisés par la société EDITIONS DU TERTRE ont été autorisés par elle, ce d’autant qu’est aussi reproduite la forme stylisée de son enseigne, et que par ailleurs, il est porté un trouble anormal, tant patrimonial que moral, au bâtiment Le [1] de par la reproduction de sa façade qui constitue également son enseigne ;

Que toutefois, il a été dit que la société EDITIONS DU TERTRE reproduit sur ses produits les principaux monuments et lieux touristiques de [Localité 1], en les désignant par leurs noms, sans toutefois, s’agissant précisément du [1], faire référence à l’activité commerciale de cet établissement, de sorte qu’il ne peut exister aucune confusion entre les activités respectivement exercées par les parties et qu’il n’est démontré aucun acte contraire à l’exercice loyal du commerce ;

Qu’ainsi aucun élément ne vient corroborer l’affirmation selon laquelle la société intimée aurait tiré profit ‘de l’image’ du [1] pas plus qu’il n’est caractérisé de fait fautif à son encontre qui serait générateur d’un quelconque préjudice ;

Que les demandes doivent donc être rejetées ;

Sur la demande reconventionnelle en dommages-intérêts pour procédure abusive :

Considérant que l’exercice d’une action en justice constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus que dans le cas de malice, de mauvaise foi, ou d’erreur grossière équipollente au dol ;

Que faute pour la société intimée de rapporter la preuve d’une quelconque intention de nuire ou d’une légèreté blâmable de la part des sociétés [1] et BAL DU [1], qui ont pu légitimement se méprendre sur l’étendue de leurs droits, sa demande tendant à voir condamner ces dernières au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive sera rejetée ;

Sur les autres demandes :

Considérant que l’équité conduit à ne pas faire droit à la demande de remboursement de frais irrépétibles en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de PARIS le 7 juillet 2011 en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a déclaré irrecevable la demande en déchéance de la marque [1] n° 1 311 105 et prescrite l’action en concurrence déloyale.

Rejette la demande en déchéance de la marque [1] n° 1 311 105.

Déclare non prescrite mais mal fondée l’action en concurrence déloyale et en parasitisme et déboute les sociétés [1] et BAL DU [1] de leurs demandes à ce titre.

Déboute la société EDITIONS DU TERTRE de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires.

Dit n’y a voir lieu à application de l’article 700 du Code de Procédure Civile en cause d’appel.

Condamne in solidum la société [1] et la société BAL du [1] aux entiers dépens.

Le greffier,Le Président,

 


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