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23 juin 2022
Cour d’appel de Rouen
RG n°
19/03676
N° RG 19/03676 – N° Portalis DBV2-V-B7D-IJEK
COUR D’APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 23 JUIN 2022
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES DU HAVRE du 30 Août 2019
APPELANT :
Monsieur [K] [B]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par Me Pascal HUCHET de la SCP HUCHET DOIN, avocat au barreau du HAVRE
INTIMES :
Me [D] [M] – Liquidateur judiciaire de la S.A.S. SOCIETE NORMANDE D’INFORMATION ET DE COMMUNICATION (SNIC)
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représenté par Me Mathieu LECLERC, avocat au barreau du HAVRE
Me [X] [G] – Liquidateur judiciaire de la S.A.S. SOCIETE NORMANDE D’INFORMATION ET DE COMMUNICATION (SNIC)
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représenté par Me Mathieu LECLERC, avocat au barreau du HAVRE
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA ROUEN
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentée par Me Guillaume DES ACRES DE L’AIGLE de la SCP BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de ROUEN
SYNDICAT NATIONAL DES JOURNALISTES (SNJ)
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Christine MATRAY de la SELARL BESTAUX BONVOISIN MATRAY, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me Olivia MAHL, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 05 Mai 2022 sans opposition des parties devant Madame POUGET, Conseillère, magistrat chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur POUPET, Président
Madame ROGER-MINNE, Conseillère
Madame POUGET, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme WERNER, Greffière
DEBATS :
A l’audience publique du 05 Mai 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 23 Juin 2022
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 23 Juin 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
signé par Monsieur POUPET, Président et par Mme WERNER, Greffière.
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 22 novembre 1976, M. [K] [B] (le salarié), titulaire de la carte d’identité des journalistes professionnels n° 40 361, a été recruté en qualité de journaliste par la société Socpresse.
Dans le dernier état des relations contractuelles, son employeur était la société normande d’information et de communication (SNIC), laquelle détenait le journal [Localité 4]-Normandie.
Par jugement en date du 1er avril 2016, le tribunal de commerce de Rouen a placé la SNIC en redressement judiciaire et un plan de redressement a été adopté par jugements des 15 et 28 mars 2017.
Le 21 avril 2020, la liquidation judiciaire de la société a été prononcée et Mme [X] et M. [D] ont été désignés en qualité de liquidateurs.
Le 30 juin 2017, les salariés de la société ont été informés de la prise de contrôle du capital social par un nouvel investisseur, la société Fininco médias de M. [J] [V].
Le 4 décembre 2017, M. [B] a sollicité le bénéfice de la clause de cession. Il a réitéré sa demande, le 29 janvier 2018, en précisant qu’il quitterait l’entreprise à compter du 30 avril, à l’issue d’un préavis de 2 mois.
La SNIC lui a répondu le 9 janvier 2018 que la clause était inapplicable puis, le 6 février, que sa motivation n’avait rien à voir avec la cession de la société, ce qui lui fermait le bénéfice de la clause.
Après avoir saisi la formation de référé du conseil de prud’hommes du Havre dont l’ordonnance a été infirmée par la présente cour qui a débouté M. [B] de ses demandes, le salarié a saisi la même juridiction concernant le fond du litige, laquelle, par jugement du 30 août 2019, a :
– déclaré recevable l’intervention volontaire du syndicat national des journalistes (SNJ),
-dit que la rupture du contrat de travail de M. [B] constituait une démission ne lui ouvrant pas droit aux indemnités prévues par les articles L. 7112-3 et L.7112-4 du code du travail,
-débouté les parties de leurs autres demandes,
-condamné le salarié aux dépens.
Par conclusions remises le 13 avril 2022, M. [B],qui a relevé appel de la décision, demande à la cour de :
-infirmer le jugement,
-fixer au passif de la liquidation judiciaire de la SNIC les sommes suivantes :
71 075,70 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement avec intérêts de droit du 1 er février 2019, date d’exigibilité de ladite indemnité, au 20 avril 2020,
15 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la créance indemnitaire,
-enjoindre à la SNIC, à Mme [G] [X] et M. [M] [D], ès qualités, de lui remettre sans délai une attestation Pôle emploi conforme comme mentionnant au titre de la rupture du contrat de travail une «rupture à l’initiative du salarié dans les prévisions de l’article L 7112-5 du code du travail produisant tous les effets d’un licenciement» sous astreinte quotidienne de 1 000 euros par jour de retard passé un délai de 8 jours courant à compter de la signification de l’arrêt,
-déclarer commun et opposable au CGEA l’arrêt à intervenir et le dire tenu de garantir le règlement des créances fixées au passif de la liquidation judiciaire de la SNIC dans les limites de sa garantie,
-renvoyer les parties à saisir la Commission arbitrale des journalistes pour qu’elle fixe le montant de l’indemnité de licenciement due par la SNIC au titre de ses années d’ancienneté supérieures à 15 ans,
-condamner Mme [G] [X] et M. [M] [D], ès qualités, au paiement d’une somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens tant de première instance que d’appel.
Par conclusions remises le 8 octobre 2020, Mme [G] [X] et M. [M] [D], ès qualités, demandent à la cour de :
-réformer le jugement en ce qu’il a :
– jugé recevable l’intervention volontaire du SNJ,
– débouté la SNIC de sa demande aux fins de voir juger que le dispositif législatif français dit de la « clause de cession », tel qu’il est prévu notamment par les articles L. 7112-5, 1°, L. 7112-3 et L.7112-4 du code du travail, est contraire au droit communautaire,
-débouté la SNIC de sa demande d’envoi à la CJUE d’une question préjudicielle et de suris à statuer dans l’attente de l’avis de cette juridiction,
-débouté la SNIC de ses autres demandes,
et, statuant à nouveau,
– juger irrecevable l’intervention volontaire du SNJ et en tout cas mal fondée, et le débouter de l’intégralité de ses demandes,
-juger que la résiliation du contrat de travail de M. [B] doit produire les effets d’une démission et le débouter de toutes ses demandes,
à titre subsidiaire,
– juger que le dispositif législatif français dit de la « clause de cession », tel qu’il est prévu notamment par les articles L. 7112-5, 1°, L. 7112-3 et L.7112-4 du code du travail au bénéfice des journalistes professionnels, est contraire à l’article 49 du Traité de fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE) ainsi qu’à l’article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne et, par conséquent, que la résiliation du contrat de travail de M. [B] doit produire les effets d’une démission et le débouter de ses demandes,
à titre très subsidiaire,
-surseoir à statuer et opérer un renvoi préjudiciel en interprétation dudit dispositif législatif à la Cour de justice de l’Union européenne, selon les termes de la question préjudicielle ci-dessus exposés,
en tout état de cause,
-condamner in solidum le SNJ et M. [B] à payer à M. [D] et Mme [X], ès qualités, la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,
dans l’hypothèse où les demandes du salarié seraient totalement ou partiellement accueillies,
-déclarer l’arrêt commun et opposable au CGEA de Rouen dans les limites de la garantie des Ags.
Par conclusions remises le 28 janvier 2022, le SNJ demande à la cour de :
– écarter les fins de non recevoir et confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré recevable son intervention,
-infirmer le jugement en ce qu’il l’a débouté de ses demandes,
-débouter la SNIC, M. [D] et Mme [X], ès qualités, de toutes leurs demandes,
-fixer au passif de la SNIC sa créance d’un montant de 10 000 euros de dommages et intérêts sur le fondement des articles L 2132-3, L 7112-3, L7112-4, L 7112-5 du code du travail,
-condamner M. [D] et Mme [X], ès qualités, à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions remises le 2 octobre 2020, le CGEA demande à la cour de :
à titre principal,
– le mettre hors de cause comme ne garantissant pas les sommes pouvant être allouées à M. [B] et au S.N.J,
à titre subsidiaire,
– les débouter de l’ensemble de leurs demandes,
en tout état de cause,
– débouter le salarié de sa demande de dommages et intérêts, et limiter la garantie de l’AGS au plafond 6 applicable, soit 82 272 euros bruts,
– le mettre hors de cause pour ce qui est de la demande d’astreinte et de frais irrépétibles,
-dire que la garantie de l’AGS n’a qu’un caractère subsidiaire et lui déclarer la décision à intervenir opposable dans la seule mesure d’insuffisance de disponibilités entre les mains du mandataire judiciaire et compte tenu du plafond applicable.
Il est renvoyé aux écritures des parties pour le détail de leur argumentation.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l’intervention volontaire du SNJ
L’article 14 des statuts du SNJ dispose que le syndicat est représenté en justice par son premier secrétaire général ou un membre du bureau national dûment mandaté et qu”‘entre les réunions du bureau national, le premier secrétaire général ou les secrétaires généraux peuvent engager des actions en justice” sous réserve d’informer le bureau national “aux fins de ratification”.
En l’espèce, il s’infère de l’ordre du jour du bureau national du 13 novembre 2018 que celui-ci a voté à l’unanimité l’intervention volontaire du SNJ au titre de la défense des intérêts de la profession au côté, notamment, de M. [K] [B] dans la procédure engagée contre la SNIC et donné mandat pour ce faire à M. [E] [S], avocat au barreau de Paris. Le principe même de l’action en justice du SNJ a, par conséquent, été décidé par ledit bureau, de sorte qu’aucun processus de ratification n’était rendu nécessaire ultérieurement.
Par ailleurs, la SNIC, de par sa qualité de tiers au syndicat, n’est pas fondée à se prévaloir du règlement intérieur de celui-ci pour contester les modalités de convocation des membres du bureau national, ce moyen doit être considéré comme inopérant.
Enfin, l’action de la SNIC vise directement d’une part, à remettre en cause la liberté et le droit fondamental reconnu à un journaliste professionnel de rompre son contrat de travail de sa propre initiative en cas de cession du journal pour lequel il travaille, en application de l’article L. 7112-5 du code du travail, et d’autre part, à voir déclarer le dispositif légal considéré, contraire au droit communautaire.
Dans ces conditions, ladite action ayant pour effet de porter potentiellement atteinte aux intérêts de la profession de journaliste, l’intérêt du SNJ à agir est démontré et son intervention volontaire dans la présente instance est recevable par application des dispositions de l’article 330 du code de procédure civile.
La décision déférée est confirmée sur ce chef.
Sur la rupture du contrat de travail
L’article L.7112-5 du code du travail prévoit que si la rupture du contrat de travail survient à l’initiative du journaliste professionnel, les dispositions des articles L.7112-3 et L. 7112-4 sont applicables lorsque cette rupture est motivée par l’une des circonstances suivantes :
1° Cession du journal ou du périodique ;
2° Cessation de la publication du journal ou périodique pour quelque cause que ce soit ;
3° Changement notable dans le caractère ou l’orientation du journal ou périodique si ce changement crée, pour le salarié, une situation de nature à porter atteinte à son honneur, à sa réputation ou, d’une manière générale, à ses intérêts moraux. Dans ces cas, le salarié qui rompt le contrat n’est pas tenu d’observer la durée du préavis prévue à l’article L. 7112-2.
Il s’infère du courrier recommandé du 4 décembre 2017, ainsi que de ses courriers postérieurs, adressés à son employeur, que M. [B] a manifesté sa volonté de mettre fin à son contrat de travail par application des dispositions légales ci-dessus rappelées, en visant expressément la modification de la structure capitalistique de la SNIC.
Ainsi, M. [B] a entendu faire usage de la possibilité de rompre son contrat de travail en vertu du 1° de l’article L.7112-5, également connue sous le terme de “clause de cession”. Or, celle-ci est distincte de “la clause de conscience” visée par le 5° du même article, si bien que le journaliste professionnel usant de son droit de prendre l’initiative de la rupture en cas de cession de son journal n’a pas à remplir les conditions liées à l’exercice de la clause de conscience, de sorte que les arguments afférents à celle-ci sont inopérants.
La SNIC argue que le salarié ne peut bénéficier de la disposition légale considérée au motif qu’il a attendu près de 9 mois pour se prévaloir de la clause de cession, puisqu’il n’a manifesté aucune volonté de faire jouer ladite clause en apprenant la cession du titre de presse.
Toutefois, l ‘article L. 7112-5-1° n’imposant aucun délai au journaliste pour mettre en ‘uvre la clause de cession, il suffit pour que les dispositions de cet article puissent être invoquées que la résiliation du contrat de travail ait été motivée par la circonstance qu’il énumère, si bien que l’employeur n’est pas fondé à ajouter une condition de délai à la loi qui ne prévoit aucune limite à l’exercice du droit litigieux.
De même, l a signature par M. [B] d’une lettre ouverte datée du 7 mars 2017, adressée à l’actionnaire de l’époque et signée par nombre de salariés, par laquelle ils sollicitent le retrait du plan de continuation, est sans incidence aucune sur l’exercice de la clause de cession, auquel le salarié ne peut, quoi qu’il en soit, renoncer tacitement ou de manière expresse.
Or, il résulte des pièces produites que l’intention du salarié de mettre fin à la relation de travail a été exprimée de manière claire et non équivoque et motivée par la cession du journal, de sorte que contrairement aux motifs développés par les premiers juges, c’est à l’employeur qui conteste cette cause objective de démontrer que la véritable cause de la rupture lui est étrangère.
Pour ce faire, la SNIC ne peut valablement se prévaloir du refus par le salarié de bénéficier des deux plans de départ volontaire, pour soutenir que celui-ci ne souhaitait pas rompre son contrat de travail, alors que ceux-ci ont été proposés antérieurement au changement d’actionnariat intervenu le 30 juin 2017, lequel a motivé la décision de l’appelant.
Se fondant sur l’objectif de la loi de 1935 tel que développé dans le rapport [P], soit permettre au journaliste d’exercer son métier en toute indépendance en lui assurant de pouvoir quitter une entreprise de presse qui change de propriétaire pour aller travailler dans une autre, sans se mettre en difficulté financière dans l’intervalle, la SNIC ne peut se limiter à conclure que le salarié ne démontre pas avoir recherché un emploi de journaliste professionnel après son départ de [Localité 4] Normandie, ou encore qu’il disposait du droit à une pension de retraite à taux plein et souhaitait cumuler la retraite avec un emploi de pigiste tout en bénéficiant d’une substantielle indemnité, sans produire la moindre pièce démontrant ses assertions et, partant, justifiant que le réel motif de la rupture serait étranger à celui exprimé par l’appelant. En effet, il n’est pas concevable que le droit fondamental reconnu au journaliste par la disposition légale critiquée soit remis en cause sur la base d’allégations ou de supputations non confirmées.
Dans ces conditions, la décision déférée est infirmée en ce qu’elle a considéré que les conditions légales ci-dessus rappelées n’étaient pas réunies et, partant, requalifié la rupture du contrat de travail de M. [B] en une démission.
A titre subsidiaire, la Snic soutient que le dispositif légal relatif à la clause de cession porterait atteinte à la liberté d’établissement ainsi qu’au pluralisme de la presse garantis par le droit communautaire.
La société n’est pas fondée à critiquer le dispositif considéré à l’aune de l’article 49 du traité de fonctionnement de l’Union européenne, puisque celui-ci concerne le droit d’établissement des ressortissants, auxquels sont assimilées les sociétés, d’un Etat membre dans le territoire d’un autre Etat membre, ce qui n’est pas la question en l’espèce. De plus, la SNIC ne soutient pas, pas plus qu’elle ne justifie, de que ce dispositif créerait une disparité entre les ressortissants des Etats membres qui lui aurait été préjudiciable.
Enfin, saisie d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à l’article L. 7112-5, la Cour de cassation a rappelé que la disposition légale contestée, qui vise à garantir l’indépendance des journalistes, ne fait que traduire la volonté du législateur de prendre en compte les conditions particulières d’exercice de leur profession et ne porte pas une atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre et à la liberté contractuelle.
Quant à la prétendue atteinte au pluralisme de la presse, garanti par l’article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et par la Charte européenne de la liberté de la presse du 25 mai 2009, la cour constate qu’aucun élément n’en rapporte la réalité mais surtout que ledit pluralisme, comme au demeurant la liberté de la presse, sont au contraire garantis par l’indépendance éditoriale dont bénéficient les journalistes, elle-même assurée, notamment, par le dispositif légal critiqué.
Pour l’ensemble de ces raisons, le moyen tiré de la non conformité de l’article L. 7112-5 au droit communautaire n’est pas pertinent et ne peut prospérer. Enfin, le moyen soulevé n’est manifestement pas de nature à justifier un renvoi préjudiciel en interprétation devant la CJUE.
Sur les conséquences de la rupture
Par conséquent, le salarié est fondé à obtenir l’indemnité de licenciement prévue pour les journalistes dans les conditions des articles L.7112-3 et L. 7112-4 du code du travail, soit la somme de 71 075,70 euros dont le montant n’est pas discuté.
Le point de départ des intérêts sur l’indemnité de licenciement étant la date de convocation devant le bureau de conciliation, laquelle est, en l’occurrence, postérieure à l’ouverture de la procédure collective, ceux-ci ne courent pas en l’espèce, eu égard aux articles L. 622-28, L. 631-14 et L. 641-3 du code du commerce.
Pour le surplus, conformément aux dispositions de l’article L. 7112-4 du code du travail, il appartiendra au salarié ayant plus de quinze ans d’ancienneté de saisir une commission arbitrale.
Par ailleurs, M. [B] sollicite des dommages et intérêts à hauteur de 15 000 euros sans préciser le fondement de sa prétention indemnitaire, ni justifier d’un quelconque préjudice, de sorte que la décision déférée est confirmée en ce qu’elle l’a rejetée.
Il convient d’ordonner à Mme [X] et M.[D], ès qualités, de remettre à M. [B] une attestation Pôle emploi conforme à l’arrêt, sans que les circonstances de la cause exigent d’y adjoindre une astreinte.
Sur la garantie de l’Ags
L’article L. 3253-8-1° du code du travail dispose que l’assurance mentionnée à l’article L. 3253-6 couvre, notamment, les sommes dues aux salariés à la date du jugement d’ouverture de toute procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.
Eu égard aux dates en présence, il ne peut être contesté que le salarié a sollicité la rupture de son contrat de travail et, partant, l’indemnité légale de licenciement afférente, antérieurement à la procédure de liquidation judiciaire, de sorte qu’en application du texte ci-dessus rappelé, l’Ags-Cgea lui doit sa garantie dans les termes des articles L. 3253-8 et suivants dudit code.
Cette garantie ne s’étend ni à la remise des documents de fin de contrat, ni à l’indemnité allouée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Sur la demande indemnitaire du SNJ
Eu égard à la solution retenue, le SNJ est fondé à soutenir l’existence d’un préjudice résultant de la remise en cause par la SNIC de l’existence même du droit fondamental reconnu à tout journaliste professionnel de rompre son contrat de travail dans les conditions précédemment évoquées et des conséquences de cette position sur la sécurité juridique des journalistes actionnant ladite clause.
Le préjudice en résultant sera réparé par l’octroi d’une somme de 1 000 euros.
Sur les dépens et frais irrépétibles
En qualité de partie succombante, Mme [X] et M. [D], ès qualités,sont condamnés aux dépens de première instance et d’appel et déboutés de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
Pour le même motif, ils sont condamnés, ès qualités, à payer à M. [B] la somme de 3 000 euros sur le même fondement et celle de 2 000 euros au SNJ.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Infirme le jugement, sauf en ce qu’il a déclaré recevable l’intervention volontaire du SNJ,
Statuant à nouveau dans cette limite,
Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la SNIC la créance de M. [K] [B] à la somme de 71 075,70 euros au titre de l’indemnité de licenciement ;
Déclare l’Ags-Cgea de [Localité 5] tenue à garantie pour cette somme dans les termes des articles L.3253-8 et suivants du code du travail, seulement en l’absence de fonds disponibles ;
Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la SNIC la créance du SNJ à la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Dit que les intérêts au taux légal ne courent pas sur ces créances ;
Ordonne à Mme [X] et M. [D], ès qualités, de remettre à M. [B] une attestation Pôle emploi conforme à l’arrêt,
Condamne Mme [X] et M. [D], ès qualités, à payer à M. [B] la somme de 3 000 euros et celle de 2 000 euros au SNJ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Condamne Mme [X] et M. [D], ès qualités, aux dépens de première instance et d’appel.
La greffièreLe président