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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-5
ARRÊT AU FOND
DU 09 MARS 2023
LV
N° 2023/ 89
N° RG 22/07041 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJM33
[M] [C]
C/
[N] [U]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Daisy LABECKI-PETIT
SELAS LLC ET ASSOCIES
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Juge de la mise en état de DRAGUIGNAN en date du 25 Avril 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 20/05826.
APPELANT
Monsieur [M] [C]
né le 01 Mai 1944 à [Localité 6], demeurant [Adresse 7]
représenté par Me Daisy LABECKI-PETIT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
INTIMEE
Madame [N] [U]
née le 17 Mai 1965 à [Localité 4] , demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Philippe CAMPOLO de la SELAS LLC ET ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de président de chambre
Madame Patricia HOARAU, Conseiller
Monsieur Olivier ABRAM, Vice Président placé
Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Mars 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Mars 2023
Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Par acte d’huissier en date du 16 septembre 2021, Mme [N] [U] a fait assigner M. [M] [C] devant le tribunal judiciaire de Draguignan aux fins d’obtenir, au visa des articles 544, 676, 677 et 1240 du code civil, la suppression des ouvertures donnant sur sa propriété.
M. [M] [C] a saisi le juge de la mise en état d’un incident aux fins de déclarer Mme [N] [U] irrecevable en ses demandes.
Par ordonnance d’incident en date du 25 avril 2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Draguignan a:
– rejeté la fin de non recevoir soulevée par M. [M] [C],
– dit que M. [M] [C] devra produire l’acte de décès de M. [L] [C] et les coordonnées des ayants droits éventuels dans un délai de quatre mois suivant la signification de la décision,
– disons que passé ce délai, faute de produire ces éléments ou toute justification démontrant l’impossibilité d’accéder à ces informations, M. [M] [C] sera condamné au paiement d’une astreinte de 50 € par jour de retard, durant une période de deux mois,
– condamné M. [M] [C] à payer à Mme [N] [U] la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– renvoyé la cause et les parties à l’audience de mise en état du 20 juin 2022 à 9h00 pour conclusions du défendeur,
– disons que les dépens suivront le cours de l’instance principale,
– rejeté le surplus des demandes.
Par déclaration en date du 13 mai 2022, M. [M] [C] a interjeté appel de cette ordonnance.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées par RPVA le 31 octobre 2022, M. [M] [C] demande à la cour de:
Vu la décision n° 436939 du 22 septembre 2022 du Conseil d’Etat,
Vu l’article 750-1 du code de procédure civile,
– infirmer l’ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Draguignan du 25 avril 2022 conformément aux chefs d’appel contenus dans la déclaration d’appel,
– déclarer irrecevable Mme [N] [U] en ses demandes,
– débouter Mme [N] [U] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– condamner Mme [N] [U] au paiement de la somme de 1.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Il soutient en substance que:
– Mme [U] relate, dans son assignation introductive d’instance ,qu’elle est propriétaire d’une maison contigüe à celle de ‘ MM. [L] et [M] [C]’ , que M. [L] [C] est décédé et s’engage à régulariser la procédure contre la succession du défunt, ce qu’elle s’est abstenue de faire, étant relevé qu’elle ne produit pas l’acte de décès de M. [L] [C],
– sa procédure est donc irrecevable tant qu’elle n’aura pas régularisé la procédure contre les ayants droits de M. [L] [C],
– le premier juge a inversé la charge de la preuve en estimant que l’information concernant la succession de M. [L] [C] devait être produite par l’appelant, qui n’a pas à pallier la carence de Mme [U],
– Mme [U] n’a pas respecté l’article 3 II de la loi du 23 mars 2019 modifiant l’article 4 de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXI ème siècle prescrivant de saisir obligatoirement un conciliateur avant d’engager une procédure en matière de troubles de voisinage,
– la mise en demeure dont elle se prévaut ne constitue en aucune façon la recherche de conciliation prescrite,
– si le Conseil d’Etat, dans sa décision du 22 septembre 2022, a annulé l’article 750-1 du code de procédure civile, il a précisé que cette annulation n’aurait pas d’effet rétroactif.
Mme [N] [U], suivant ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 27 octobre 2022, demande à la cour de:
Vu les articles 544,676, 677 et 1240 du code civil,
Vu les articles 31, 138, 139, 142 et 750-1 du code de procédure civile,
– confirmer l’ordonnance d’incident du 25 avril 2022 en toutes ses dispositions,
– condamner M. [M] [C] à payer à Mme [N] [U] la somme de 2.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Elle fait valoir, pour l’essentiel, que:
– elle a attrait M. [C] en sa qualité de propriétaire de l’immeuble voisin du sine, situé [Adresse 2] sur la commune de [Localité 5], qualité qu’il ne conteste pas,
– dans son acte introductif d’instance, elle sollicitait la production par l’appelant des coordonnées des héritiers de M. [L] [C], aucune des pièces sollicitées n’ayant été produites, de sorte qu’il ne peut soutenir que l’action intentée est irrecevable alors qu’il fait lui-même défaut à son obligation de production de pièces,
– le Conseil d’Etat, dans son arrêt du 22 septembre 2022, a annulé l’article 750-1 du code de procédure civil, annulation qui s’applique aux procédures en cours,
– elle justifie de la mise en oeuvre d’une démarche amiable afin de résoudre le litige, par la production de son courrier du 10 juillet 2019,
– en tout état de cause, elle sollicite la suppression des vues et ouvertures pratiquées sur la propriété appartenant à l’appelant et donnant sur son fonds, lesquelles constituent un trouble anormal de voisinage, action qui ne relève par de l’une des actions mentionnées aux articles R 211-3-4 et R 211-3-8 du code de l’organisation judiciaire,
– aucune obligation de tentative de conciliation, médiation ou procédure participative ne s’impose donc à elle.
La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 27 décembre 2022.
MOTIFS
En vertu de l’article 789 du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent, à l’exclusion de toute autre formation du tribunal, pour statuer sur les fins de non recevoir.
M. [M] [C] soutient en premier lieu que Mme [N] [U] est irrecevable en ses demandes en l’absence de mise en cause des héritiers de M. [L] [C].
Conformément à l’article 31 du code de procédure civile, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
Il ressort des pièces produites que M. [M] [C] a été assigné en qualité de propriétaire de la parcelle C [Cadastre 3] sise [Adresse 2] au [Localité 5], parcelle voisine de celle appartenant à Mme [U], sise [Adresse 1], celle-ci lui reprochant d’avoir créé des ouvertures et vues donnant sur son fonds, dont elle demande la suppression, sur le fondement notamment du trouble anormal de voisinage.
Force est de constater que l’appelant ne conteste pas sa qualité de propriétaire de la parcelle litigieuse, qui ressort au demeurant du relevé de propriété qui est communiqué par l’intimée, de sorte qu’il a bien la qualité de voisin de Mme [U] et donc à défendre la présente action.
Ce moyen d’irrecevabilité sera donc rejeté.
M. [M] [C] se prévaut en outre du non respect des dispositions de l’article
750-1 du code de procédure civile lequel dispose que ‘ A peine d’irrecevabilité que le juge peut prononcer d’office, la demande en justice doit être précédée, au choix des parties, d’une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, d’une tentative de médiation ou d’une tentative de procédure participative, lorsqu’elle tend au paiement d’une somme n’excédant pas 5 000 euros ou lorsqu’elle est relative à l’une des actions mentionnées aux articles R. 211-3-4 et R. 211-3-8 du code de l’organisation judiciaire ou à un trouble anormal de voisinage.
Les parties sont dispensées de l’obligation mentionnée au premier alinéa dans les cas suivants:
1° Si l’une des parties au moins sollicite l’homologation d’un accord ;
2° Lorsque l’exercice d’un recours préalable est imposé auprès de l’auteur de la décision ;
3° Si l’absence de recours à l’un des modes de résolution amiable mentionnés au premier alinéa est justifiée par un motif légitime tenant soit à l’urgence manifeste soit aux circonstances de l’espèce rendant impossible une telle tentative ou nécessitant qu’une décision soit rendue non contradictoirement soit à l’indisponibilité de conciliateurs de justice entraînant l’organisation de la première réunion de conciliation dans un délai manifestement excessif au regard de la nature et des enjeux du litige ;
4° Si le juge ou l’autorité administrative doit, en application d’une disposition particulière, procéder à une tentative préalable de conciliation ;
5° Si le créancier a vainement engagé une procédure simplifiée de recouvrement des petites créances, conformément à l’article L. 125-1 du code des procédures civiles d’exécution.’
Il n’est pas contesté que si dans sa décision du 22 septembre 2022, le Conseil d’Etat a annulé l’article 750-1 du code de procédure civile, il a expressément prévu que ‘ Il y a lieu de déroger au principe de l’effet rétroactif des annulations contentieuses. Par suite il y a lieu de regarder comme définitifs les effets produits par l’article 750-1 du code de procédure civile avant son annulation (…) ‘.
L’article 750-1 susvisé est donc applicable à la présente procédure.
En revanche et comme le souligne à juste titre Mme [U], aucune obligation de tentative de conciliation, médiation ou procédure participative ne s’impose à elle au visa de cet article en ce que:
– sa demande principale ne concerne pas l’obtention d’une somme d’argent mais la dépose d’ouvertures qui auraient été crées irrégulièrement sur la propriété voisine,
– son action ne relève pas de l’une des actions mentionnées aux articles R 211-3-4 et R 211-3-8 du code de l’organisation judiciaire.
Ce moyen d’irrecevabilité des demandes de Mme [U] doit également être écarté.
La communication de pièces ordonnées par le premier juge tenant aux héritiers de M. [L] [C], décédé, au visa des articles 138 et 139 du code de procédure civile, est également justifiée.
En définitive, l’ordonnance entreprise sera confirmée en toutes ses dispositions.
Vu l’article 700 du code de procédure civile,
Vu l’article 696 du code de procédure civile,
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Déboute M. [M] [C] des fins de son recours et confirmer l’ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Draguignan déférée en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne M. [M] [C] à payer à Mme [N] [U] la somme de 1.500€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [M] [C] aux dépens de la procédure d’appel, qui pourront être recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
Le greffier Le président