Tentative de conciliation ou de médiation : 4 avril 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 22/03418

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Tentative de conciliation ou de médiation : 4 avril 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 22/03418
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COUR D’APPEL DE BORDEAUX

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU : 04 AVRIL 2023

N° RG 22/03418 – N° Portalis DBVJ-V-B7G-MZOB

[Z] [O]

c/

[I] [K]

Nature de la décision : AU FOND

2B5

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 mai 2022 par le Juge aux affaires familiales de BORDEAUX (RG n° 22/01839) suivant déclaration d’appel du 15 juillet 2022

APPELANT :

[Z] [O]

né le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 10]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 6]

Représenté par Me Emmanuel SUTRE, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

[I] [K]

née le [Date naissance 3] 1978 à [Localité 12]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 4]

Représentée par Me Caroline BRIS de la SELARL CBS AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 21 mars 2023 hors la présence du public, devant la Cour composée de :

Président : Hélène MORNET

Conseiller: Danièle PUYDEBAT

Conseiller : Isabelle DELAQUYS

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Véronique DUPHIL

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 al. 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Madame [I] [K] et de Monsieur [Z] [O] se sont mariés le [Date mariage 2] 2014 à [Localité 13] (Japon), sans contrat de mariage préalable.

De leur union est issu un enfant, [B], né le [Date naissance 5] 2015 à [Localité 13] (Japon).

Par Ordonnance de non-conciliation en date du 7 février 2017, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bordeaux a pour l’essentiel :

– dit que l’autorité parentale s’exercera conjointement sur l’enfant mineur issu du mariage,

– fixé la résidence habituelle de l’enfant mineur chez la mère,

– dit que la fréquence et la durée des périodes au cours desquelles le père pourra accueillir l’enfant seront déterminées à l’amiable entre les parties,

– dit qu’à défaut d’un tel accord, le père pourra accueillir l’enfant selon les modalités suivantes :

Jusqu’au 1 septembre 2017 :

– toutes les fins de semaine paire du vendredi sortie de crèche au dimanche 18H00

– du samedi 15 avril 2017 à 09H00 au dimanche 23 avril 2017 à 18H00

– du samedi 08 juillet 2017 à 09H00 au dimanche 16 juillet 2017 à 18H00

– du samedi 05 août 2017 à 09H00 au dimanche 13 août 2017 à 18H00

à compter du 1 septembre 2017 :

En période scolaire :

– les fins de semaine paire du vendredi sortie de crèche/école au dimanche 18H00

– les milieux de semaine impaire du mercredi sortie de crèche/école au jeudi retour à la crèche/école

Pendant les vacances scolaires :

– la première moitié des vacances scolaires les années impaires, la seconde les années paires (avec fractionnement par quinzaines l’été jusqu’aux sept ans de l’enfant)

– fixé à compter du 1 novembre 2016 la contribution à l’entretien et l’éducation et de l’enfant que le père devra verser à la mère à la somme de quatre-cents euros (400 €), et en tant que de besoin, le condamnons au paiement de cette Somme.

Par jugement du 11 décembre 2018, prononçant le divorce des époux, les modalités de l’autorité parentale ont été ainsi fixées :

– exercice conjoint de l’autorité parentale,

– résidence de l’enfant au domicile de la mère,

– droit de visite et d’hébergement élargi au profit du père,

– contribution du père à l’entretien et l’éducation de l’enfant : 460 euros.

Par jugement en date du 05 janvier 2021 rendu par le Juge des enfants du tribunal judiciaire de Bordeaux était ordonnée une mesure d’assistance éducative en milieu ouvert à l’égard de l’enfant, jusqu’au 31 août 2022.

Le jugement a été confirmé par la Cour d’appel selon arrêt du 30 mars 2022 qui a cependant ordonné une expertise psychiatrique de [B] et de ses deux parents et désigné pour ce faire le docteur [W].

Par assignation délivrée le 08 mars 2022, dans le cadre d’une procédure accélérée au fond, Mme [K] a saisi le juge aux affaires familiales aux fins de modification des modalités de l’autorité parentale.

Par jugement contradictoire du 30 mai 2022, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Bordeaux a pour l’essentiel :

– attribué à la mère l’exercice exclusif de l’autorité parentale,

– maintenu la résidence habituelle de l’enfant mineur chez la mère,

– avant dire droit, sur le droit de visite et d’hébergement paternel, ordonné un bilan psychologique de [B], et commet pour y procéder M. [F] [C],

– dit que l’expert devra déposer son rapport au secrétariat-greffe de ce tribunal avant le 26 septembre 2022,

dans l’attente du dépôt du rapport,

– dit que la fréquence et la durée des périodes au cours desquelles le père pourra accueillir l’enfant seront déterminées à l’amiable entre les parties et à défaut d’accord, selon les modalités suivantes :

*en période scolaire : un week-end sur deux, du vendredi sortie des classes au dimanche 18 heures, les fins de semaines paires,

*pendant les vacances scolaires : la moitié de toutes les vacances scolaires d’une durée supérieure à cinq jours consécutifs avec alternance annuelle (première moitié les années paires et seconde moitié les années impaires), pour l’été 2022 : les 3èmes semaines de juillet et d’août,

– réservé les dépens.

Le rapport d’expertise a été déposé le 19 septembre 2022.

Procédure d’appel

Par déclaration au greffe en date du 15 juillet 2022, M. [O] a interjeté appel limité de ce jugement, dans ses dispositions relatives à l’exercice de l’autorité parentale, à la résidence habituelle de l’enfant et au droit de visite et d’hébergement.

Par jugement en date du 29 septembre 2022, le juge des enfants a renouvelé la mesure éducative en milieu ouvert instaurée au profit de [B] jusqu’au 31 mars 2024.

Par jugement en date du 21 novembre 2022, le juge aux affaires Familiales a pour l’essentiel :

– dit que la fréquence et la durée des périodes au cours desquelles le père pourra accueillir les enfants seront déterminées à l’amiable entre les parties et à défaut d’un tel accord, selon les modalités suivantes :

*en période scolaire : une semaine sur deux du vendredi soir sortie d’école au lundi matin rentrée d’école en alternance et une semaine sur deux du mardi soir sortie d’école au jeudi matin rentrée d’école, sous condition de garantir la régularité du suivi psychologique de l’enfant,

*pendant les vacances scolaires : la moitié de toutes les vacances scolaires avec alternance annuelle (première moitié les années paires et seconde moitié les années impaires), et partage par quart durant les vacances d’été,

– dit que les vacances sont décomptées du jour de la sortie des classes jusqu’au samedi midi de la semaine ou de la quinzaine suivante, pour la première moitié et du samedi midi au dimanche 18 heures de la semaine ou de la quinzaine suivante pour la seconde moitié,

– déclare irrecevable la demande de révision de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant,

– rejeté toute autre demande.

– ordonne une mesure de médiation familiale qui sera organisée par : L’AGEP,

– dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

Mme [K] a interjeté appel de cette décision par déclaration du 22 novembre 2022, limitant son recours aux modalités du droit de visite et d’hébergement accordé au père.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 07 mars 2023, M. [O] demande à la cour de :

– ordonner la jonction avec la procédure RG 22/05849,

– infirmer le jugement dont appel,

– consulter le dossier d’assistance éducative ouvert devant Mme la juge des enfants, et notamment le rapport d’expertise du Dr [W],

– dire que l’exercice de l’autorité parentale sera conjoint sur l’enfant mineur [B], et débouter Mme [K] de sa demande visant à solliciter l’exercice exclusif de l’autorité parentale sur l’enfant mineur,

– débouter Mme [K] de sa demande de réduction des droits de visite et d’hébergement de M. [O] sur l’enfant mineur [B],

– fixer la résidence habituelle de l’enfant alternativement une semaine sur deux au domicile de chacun des parents, à compter du vendredi soir sortie d’école jusqu’au lundi matin rentrée d’école,

– dire que les périodes de vacances scolaires de l’enfant seront partagées, sauf meilleur accord des parents, avec alternance annuelle (première moitié les années paires pour Monsieur, et seconde moitié les années impaires) et partage par quart durant les vacances d’été. Il sera précisé que le 25 décembre est rattaché à la première moitié des vacances scolaires de Noël et le 1er janvier à la seconde moitié,

– dire que l’enfant passera la fête des Pères avec son père et la fête des mères avec sa mère,

Subsidiairement, à défaut de résidence alternée,

– dire que les droits de visite et d’hébergement du père s’exerceront les week-ends des semaines paires, du vendredi soir au lundi matin et une semaine sur deux du mardi soir sortie d’école au jeudi matin rentrée d’école, selon les modalités fixées par le juge aux affaires familiales par jugement du 21/11/2022, et que les périodes de vacances scolaires de l’enfant seront partagées, sauf meilleur accord des parents, avec alternance annuelle (première moitié les années paires pour Monsieur, et seconde moitié les années impaires) et partage par quart durant les vacances d’été. Il sera précisé que le 25 décembre est rattaché à la première moitié des vacances scolaires de Noël et le 1er janvier à la seconde moitié,

– dire que les transferts de l’enfant, pour les congés, seront partagés par les parents, à partir des lieux de domicile habituels des parents,

– dire qu”il n’y aura pas lieu à fixation d’une contribution alimentaire à la charge de l’un ou l’autre des parents, ces derniers devant partager par moitié les charges d’éducation et d’entretien de l’enfant, en ce compris les frais scolaires et extra-scolaires,

– supprimer en conséquence le paiement par M. [O] de la contribution alimentaire mise à sa charge,

– débouter Mme [K] de sa demande d’augmentation de pension alimentaire,

– dire que Mme [K] sera désignée comme allocataire des prestations sociales dues pour l’enfant et que ces dernières seront partagées par moitié,

– fixer les dépens à la charge de Mme [K] et la condamner au paiement d’une indemnité d’un montant de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 16 mars 2023, Mme [K] demande à la cour de :

à titre liminaire,

– ordonner la jonction des deux instances pendantes devant la Cour d’appel sous les numéros de régime général suivants : RG N° 22/03418 – DA N° 22/02692 et RG N° : 22/05849 – DA N° 22/04559,

sur le fond,

– déclarer irrecevable l’appel formé par M. [O] concernant son droit de visite et d’hébergement en ce qu’il s’agit d’une mesure provisoire ordonnée avant-dire droit par le juge aux affaires familiales,

si par extraordinaire l’appel de M. [O] était déclaré recevable concernant son droit de visite et d’hébergement,

– confirmer le jugement du 30 mai 2022 en toutes ses dispositions en ce qu’il a :

*fixé, exclusivement au profit de la mère l’exercice de l’autorité parentale sur [B],

*fixé la résidence habituelle de [B] au domicile de la mère,

– débouter M. [O] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– infirmer le jugement de première instance en ce qu’il a débouté Madame de sa demande de réévaluation du montant de la pension alimentaire,

statuant à nouveau,

– condamner M. [O] à régler à Mme [K] la somme de 580 euros au titre de la contribution à l’éducation et à l’entretien de [B],

– confirmer pour le surplus,

– infirmer le jugement du 21 novembre 2022 en ce qu’il a :

– Fixé un droit de visite et d’hébergement au profit du père, une semaine sur deux, du vendredi soir sortie d’école au lundi matin entrée des classes et une semaine sur deux du mardi soir sortie d’école au jeudi matin entrée d’école et la moitié de toutes les vacances scolaires avec alternance annuelle et par quart l’été ;

statuant de nouveau

– fixer le droit de visite et d’hébergement qu’exercera le père au gré des parties et à défaut selon les modalités suivantes :

en période scolaire :

– les fins de semaines paires, du vendredi soir sortie des classes au lundi matin entrée des classes ;

En période extra-scolaire :

– La moitié des petites vacances scolaires (la première moitié les années impaires et la seconde moitié les années paires) et par quinzaine l’été ;

en tout état de cause,

– condamner M. [O] à la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– le condamner aux entiers dépens.

[B] fait l’objet d’une mesure d’assistance éducative renouvelée jusqu’au 31 mars 2024. La communication du dossier a été demandée en application de l’article 1072-1 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.

L’affaire a été fixée pour être plaidée à l’audience collégiale du 21 mars 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la jonction des procédures enregistrées sous les numéros 22/03418 et 22/05849

Il résulte de l’article 367 du code de procédure civile que le juge peut ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s’il existe un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble.

En l’espèce, M. [O] et Mme [K] ont respectivement relevé appel des décisions du 30 mais 2022 et 21 novembre 2022, la première ayant un caractère mixte pour avoir statué sur l’exercice de l’autorité parentale et la fixation de la résidence du mineur et sursis à statuer sur le droit de visite et d’hébergement accordé au père ayant avant dire droit ordonné une mesure d’investigation, et la seconde ayant statué sur ce droit.

Dans leurs conclusions respectives, les parties ont fait savoir leur accord aux fins que les deux procédures soient jointes.

En conséquence, au vu de ces éléments, il y a lieu pour une bonne justice et en application de l’article 367 du code de procédure civile, d’ordonner la jonction des deux instances visées afin qu’une seule décision soit rendue au titre de l’autorité parentale, la pension alimentaire et la question du droit de visite et d’hébergement du père, sans qu’une autre ne soit rendue sur seul ce droit.

Sur la recevabilité de l’appel de M. [O] quand aux modalités des droits de visite et d’hébergement fixées provisoirement dans le jugement avant dire droit

Au visa de l’article 544 du code de procédure civile, Mme [K] oppose à M. [O] une irrecevabilité de son appel sur les modalités du droit de visite et d’hébergement fixées par le jugement du 30 mai 2022 au motif que son recours porte sur une mesure provisoire prise dans l’attente du résultat de l’expertise psychologique ordonnée.

Mais dès lors que l’article visé dispose que les jugements qui tranchent dans leur dispositif une partie du principal et ordonnent une mesure d’instruction ou une mesure provisoire peuvent être immédiatement frappés d’appel comme les jugements qui tranchent tout le principal, l’appel de M. [O] doit être déclaré recevable en ce qu’il porte tant sur les questions ayant été tranchées sur le fond que sur celles faisant l’objet d’une décision provisoire dans l’attente du résultat de la mesure d’investigation.

Sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale

Selon les dispositions de l’article 372 du code civil, les père et mère exercent conjointement l’autorité parentale. Il résulte toutefois des termes de l’article 373 du même code, que peut être privé de l’exercice de l’autorité parentale, le père ou la mère qui est hors d’état de manifester sa volonté en raison de son incapacité, de son absence ou de toute autre cause ou en application des dispositions de l’article 373-2-1 du code civil, si l’intérêt de l’enfant le commande.

Mme [K] fait valoir au soutien d’un exercice exclusif de l’autorité parentale qui lui serait réservé, que M. [O] est dans le déni concernant les besoins de son fils, en grande souffrance, ayant notamment et volontairement stoppé le suivi psychologique de [B]. Pourtant ce suivi est incontestablement nécessaire au vu des troubles du comportement de [B] constaté par le jugement d’assistance édcuative, la cour d’appel statuant en chambre des mineurs et le rapport d’assistance éducative en milieu ouvert. Elle affirme que le comportement particulièrement violent de l’enfant à son encontre est lié aux propos dévalorisants tenus par le père sur la mère, lequel banalise le comportement violent de [B]. Elle assure que la reprise du suivi psychologique depuis le jugement du 8 juin 2022 est à l’origine d’un réel apaisement de l’enfant et qu’il est donc de son intérêt de maintenir l’exercice exclusif de l’autorité parentale au profit de la mère pour qu’un tel suivi perdure.

En réplique l’appelant fait valoir qu’il n’a jamais contesté l’existence des troubles du comportement de [B] mais qu’il n’a pas pu avoir d’explication, de diagnostic sur ces troubles. Il affirme ne s’être jamais opposé au suivi psychologique de [B] mais regrette de n’avoir jamais eu de retour non plus. Rien ne justifie selon lui le retrait de son exercice de l’autorité parentale et en veut pour preuve les rapports d’expertises déposés par M. [C] et [W] qui soulignent la fragilité de la mère, sa position victimaire et sa difficulté à poser un cadre éducatif à l’enfant.

De l’ensemble des pièces, dont de nombreuses attestations de proches et membres des deux familles, des décisions judiciaires et rapports d’expertise communiquées ainsi que de la consultation du dossier d’assistance éducative, il résulte que le couple s’est séparé alors que l’enfant n’avait pas encore trois ans, dans un contexte de violences que se reprochent réciproquement les époux et dont l’enfant a pu être témoin.

Il est constant que depuis la séparation du couple parental, [B] a fait preuve de troubles du comportement se manifestant pour l’essentiel dans une agressivité verbale et physique de l’enfant à l’égard de sa mère qui interroge. Celle-ci a pris des formes spectaculaires : importantes crises de colère, jets d’objets, insultes, coups mais également morsure et même chute d’un escabeau de sa mère provoquée volontairement par l’enfant. Cette même violence ne se manifesterait pas chez le père.

L’éducatrice exerçant la mesure éducative décidée par le juge des enfants a été témoin de deux scènes de violence intenses de la part de [B] à l’égard de sa mère. Au delà de cette violence très inquiétante, elle a pu également relever que l’enfant disait ‘On me dit des choses dans ma tête, j’entends que maman est une sorcière et qu’elle vole l’argent de papa’. Déjà, en avril 2018, Mme [M] [K], grand mère maternelle de [B] avait attesté qu’alors que l’enfant n’avait que 2 ans celui-ci disait ‘Papa pas content après Maman parce que Maman prend tout l’argent de papa’. Il y a lieu de s’inquiéter de la perception de l’enfant, induite ou spontanée, que sa mère serait ‘le mauvais objet’.

Les expertises n’ont révélé aucune pathologie chez cet enfant. Par contre tant le psychologue que le psychiatre ont fait le constat d’un conflit de loyauté tant il est prisonnier de ‘la passion belliqueuse partagée par ses parents, selon l’expression de M. [C], qui peut le plonger dans une véritable souffrance et détresse psychologique, même si l’expert psychiatre nuance celle-ci. Il parle plutôt d’un ‘trouble oppositionnel avec provocation’ ,dans un désir de domination et d’un trouble d’hyperactivité avec déficit d’attention’. Pour autant le comportement adopté par l’enfant ne peut qu’alarmer, cette violence démontrée à son âge (7 ans à ce jour) ne pouvant rester sans conséquence sur la construction de sa personnalité. Le juge des enfants dans sa récente décision de septembre 2022 a d’ailleurs considéré que cet enfant était toujours en situation de danger.

Un suivi psychologique est donc nécessaire. Il a été mis en place dés septembre 2020, auprès de M. [X], psychologue au [8] à Bordeaux ([9]).

Il est constant et non contesté que M. [O] a cependant brutalement suspendu ce suivi thérapeutique à compter du mois de septembre 2021 en opposition totale avec les préconisations des professionnels de santé qui connaissaient et suivaient [B]. Il a pu expliquer ce refus par l’absence de retours sur le suivi, démentie par l’intimée qui justifie du contraire. Mais dans un mail envoyé à Mme [K] le 7 janvier 2022 il a indiqué que ‘Les raisons pour lesquelles j’ai interrompu le suivi au CSMI sont tout à fait justifiées et je les ai expliquées à l’AGEP et tout suivi s’il donne lieu à des tentatives de manipulations de [B] pour lui faire dire que je le bat ou le maltraite afin de corroborer ton dépôt de plainte ne sera pas bénéfique à [B]’. Cette défiance à l’égard du professionnel, dans une posture du père non dénuée de volonté d’emprise, a conduit le couple à rechercher un autre psychologue à sa demande mais vainement. Aucun thérapeute contacté dans une période de huit mois n’a été retenu faute de démarche concrète du père. Rendez-vous annulés, obstacles divers ont empêché que soit retenu un autre praticien recueillant l’assentiment des deux parents. De fait ce n’est qu’à la faveur du jugement 30 mai 2022 qui a réservé l’exercice exclusif de l’autorité parentale à la mère, que le petit garçon a pu renouer avec son suivi considéré comme indispensable par le juge des enfants pour lui donner un espace de parole dans un contexte familial délétère.

Par suite, en raison de la résistance du père à faire prendre en charge l’enfant par des professionnels, dans une forme de banalisation de troubles exprimés par l’enfant, alors même que tant l’expertise du docteur [C] que celle du docteur [W] insistent sur la nécessité d’une prise en charge psychologique voire pédopsychiatrique, sa difficulté à prendre en considération la souffrance de l’enfant dont il souligne le parfait comportement à son domicile, rejetant à la seule mère l’origine de la posture inadaptée à son égard, dans l’intérêt de l’enfant, le jugement sera confirmé en ce qu’il a réservé l’exercice de l’autorité parentale à la seule mère.

S’agissant du lieu de résidence de l’enfant, la décision sera également confirmée en ce qu’elle l’a fixée chez la mère.

L’article 373-2-11 du code civil dispose en effet que le juge doit, lorsqu’il se prononce sur les modalités de l’autorité parentale, prendre notamment en considération la pratique que les parents avaient précédemment suivie ou les accords qu’ils avaient pu antérieurement conclure, les sentiments exprimés par l’enfant mineur, l’aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l’autre, le résultat des expertises éventuellement effectuées, les renseignements qui ont été recueillis dans le cadre de l’enquête sociale, les pressions ou violences à caractère physique ou psychologique exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre.

Il règle en toutes circonstances les questions qui lui sont soumises en veillant spécialement à la sauvegarde de l’intérêt de l’enfant.

Les témoins requis par la mère et les services sociaux et éducatifs ont pu noter que les troubles du comportement de [B] et sa violence se manifestent pour l’essentiel à son retour du domicile paternel. Ainsi que l’affirme Mme [K], la mise en place de son suivi psychologique a été un des outils, outre la mesure d’assistance éducative, qui lui ont permis de s’apaiser. Fixer une résidence alternée au domicile de chacun des parents ferait prendre le risque d’une nouvelle résistance du père à continuer ce suivi alors même que dans sa décision du 29 septembre 2022, le juge des enfants a renouvelé la mesure éducative avec pour objectifs, notamment, de veiller à ce que le mineur bénéficie de manière ininterrompue de soins psychologiques et pédo psychiatriques adaptés.

Dès le jugement de divorce, le juge aux affaires familiales avait considéré qu’en raison du conflit aigu entre les parents, fait de défiance mutuelle et d’absence de dialogue constructif, un débat sur la résidence alternée ne pouvait être instauré. La lecture des différents mails échangés au cours des deux dernières années démontre que la dynamique parentale reste négative. Par ailleurs l’enfant présente tous les stigmates psychologiques d’un enfant exposé à de la violence, entre ses parents ou contre lui même : agitation en classe, mauvais résultats scolaires, crises de violences. [B] a pu verbaliser regretter que son père ne dise pas bonjour à sa mère lorsque l’échange se fait entre les temps d’accueil. Il a besoin de stabilité et d’un climat apaisé et d’assurance que la mesure éducative doit permettre d’atteindre.

Le jugement sera donc confirmé.

Dans ce contexte, il convient de maintenir un droit de visite et d’hébergement chez le père par moitié des fins de semaine et des vacances sans élargissement au milieu de semaine et ce d’autant que [B] s’est confié à son éducatrice sur des claques, insultes et brimades dont il aurait souffert de la part de son père. Cela doit alerter. La décision du 21 novembre 2022 est donc infirmée en ce qu’elle avait permis un droit de visite et d’hébergement en milieu de semaine.

Sur la contribution à l’entretien et l’éducation de l’enfant

Pour fixer à 460 euros le montant de la contribution du père à l’entretien de l’enfant, le juge du divorce en 2018 avait retenu que M. [O], avait un revenu de 5.030 euros et Madame, auto entrepreneur, ne percevait que des aides sociales à hauteur de 650 euros par mois.

Depuis la situation des parties peut ainsi être résumée :

M. [O] a perdu son emploi mais a retrouvé une situation stable depuis 2021. Il est responsable commercial depuis juin 2021 dans un groupement d’employeurs (convention collective de production agricoles).

Son avis d’imposition 2021 démontre qu’il a déclaré avoir perçu 55.928 € de revenus en 2020 soit un revenu net mensuel de l’ordre de 4.660 €. Son contrat de travail prévoit une rémunération brute mensuelle de 6.000€ hors primes variables sur objectifs et autres primes exceptionnelles.

Son bulletin de salaire du mois de décembre 2021 fait apparaître un cumul net de 42.644 € sur sept mois soit un salaire mensuel net de l’ordre de 6.090 € dont une prime sur objectif de 10.000 € ainsi qu’une prime exceptionnelle de 400 €.

Son bulletin de salaire du mois de décembre 2022 (pièce 31 appelant) fait apparaître un cumul et de 59.049 euros, soit avant impôt 4920,75 euros par mois.

Il justifie de charges à hauteur de 2.106 euros, en ce compris un loyer de 1.199 euros.

Mme [K] est auto-entrepreneur dans l’activité de tourisme.

Elle justifie de ses déclarations fiscales auprès de l’URSSAF de l’année 2020, 2021 et 2022. Elle a déclaré en 2021 avoir perçu 15.688 € de revenus soit environ 1.300 € net par mois. Elle perçoit en outre comme seules prestations sociales l’allocation logement à hauteur de 394 €.

Depuis le mois d’avril 2022 son contrat avec RSC OCCASIONS a pris fin entraînant une chute de ses revenus de 900 €.

Elle bénéficie depuis le mois de juillet 2022 du Revenu de Solidarité Active à hauteur de 62,16 €.

Elle communique également son avis d’imposition 2022 démontrant qu’elle a déclaré 11.303 € de revenus soit un salaire net mensuel de l’ordre de 942 €.

Ses charges s’élèvent à 1.039 euros par mois, dont 70 euros de frais fixes pour la cantine et les acuités extrascolaires de l’enfant commun.

M. [O] affirme que Mme [K] n’est pas transparente sur sa situation financière et qu’elle dispose en réalité d’un important patrimoine (bien, terrains immobiliers et comptes bancaires), que démontre son train de vie. Il indique ainsi qu’elle a reçu par héritage ou donation des biens à [Localité 11] et au [Localité 7]. Mme [K] ne dément pas ces informations. Elle souligne cependant n’être propriétaire que de la nue propriété du bien sis en Gironde, sa mère et sa grand mère en ayant l’usufruit et s’y étant installées, et précise que le bien dans les Hauts de Seine a été vendu et que le capital qu’elle a retiré devrait lui permettre d’accéder à la propriété.

En considération de ces éléments qui ne démontrent pas une évolution notable dans les situations des parties depuis le jugement de divorce, la demande de Mme [K] en réévaluation de la contribution du père sera rejetée.

La cour relève cependant que dans le jugement de divorce, cette contribution avait été fixée avec une indexation annuelle obligatoire. Il appartient au père débiteur d’en assurer une exécution spontanée.

Sur les frais irréptibles et les dépens

Échouant pour l’essentiel, M. [O] sera condamné aux dépens d’appel ainsi qu’à régler à Mme [K] la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Vu le dossier d’assistance éducative ouvert au profit de [B] [O] ;

Ordonne la jonction des procédures enregistrées sous les numéros 22/03418 et 22/05849, sous le seul numéro 22/03418 ;

Déclare recevable l’appel formé par M. [O] à l’encontre du jugement rendu le 30 mai 2022 ;

Confirme les décisions entreprises sauf en ce qui concerne les dispositions relatives au droit de visite et d’hébergement accordé au père ;

Statuant de nouveau,

Dit que M. [O] bénéficiera d’un droit de visite et d’hébergement sur l’enfant [B], à défaut de meilleur accord entre les parties selon les modalités suivantes :

En période scolaire :

– les fins de semaines paires, du vendredi soir sortie des classes au lundi matin entrée des classes ;

En période extra-scolaire :

– La moitié des petites vacances scolaires (la première moitié les années impaires et la seconde moitié les années paires) et par quinzaine l’été ;

Y ajoutant,

Condamne M. [O] aux dépens exposés en cause d’appel ;

Le condamne à verser à Mme [K] une somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Dit qu’une copie du présent arrêt sera communiquée au juge des enfants en charge de la mesure éducative en faveur de [B] [O].

Signé par Hélène MORNET, Présidente de la chambre et par Véronique DUPHIL, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente

 


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