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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-2
ARRÊT
DU 02 MARS 2023
N° 2023/169
Rôle N° RG 21/18357 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BITIE
[P] [C]
[Z] [L] épouse
C/
[W] [U] veuve [T]
[X] [T]
[I] [T]
Commune [Localité 23]
Etablissement Public METROPOLE [Localité 22] COTE D’AZUR
[I] [T]
[X] [T]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Céline ALINOT
Me Noreddine ALIMOUSSA
Me Philippe CHRESTIA
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal Judiciaire de Nice en date du 13 décembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/01012.
APPELANTS
Monsieur [P] [C]
né le 12 mars 1946 à [Localité 22], demeurant [Adresse 7]
Madame [Z] [L] épouse [C]
née le 13 juillet 1951 à [Localité 22], demeurant [Adresse 7]
représentés par Me Céline ALINOT, avocat au barreau de NICE
INTIMES
Madame [W] [U] veuve [T]
née le 27 août 1952 à [Localité 21], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Noreddine ALIMOUSSA, avocat au barreau de NICE
Commune de [Localité 23]
prise en la personne de son Maire en exercice
dont le siège social est situé [Adresse 20]
représentée par Me Philippe CHRESTIA de la SELARL ASSO – CHRESTIA, avocat au barreau de NICE
La METROPOLE [Localité 22] COTE D’AZUR
Prise en la personne de son Président en exercice
dont le siège social est situé [Adresse 8]
défaillante
PARTIES INTERVENANTES
Monsieur [I] [T]
né le 16 avril 1987, demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Noreddine ALIMOUSSA, avocat au barreau de NICE
Monsieur [X] [T]
né le 25 septembre 1976, demeurant [Adresse 13]
représenté par Me Noreddine ALIMOUSSA, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 24 janvier 2023 en audience publique devant la cour composée de :
M. Gilles PACAUD, Président
Mme Catherine OUVREL, Conseillère
Madame Myriam GINOUX, Conseillère rapporteur
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Julie DESHAYE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 mars 2023.
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 mars 2023,
Signé par M. Gilles PACAUD, Président et Mme Julie DESHAYE, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [P] [C] et Mme [Z] [C] née [L] ont acquis la propriété des parcelles n°s [Cadastre 10], [Cadastre 17], et [Cadastre 12], sises sur la commune de [Localité 23]( 06) par acte du 11 février 2011, les parcelles n°s [Cadastre 9] et [Cadastre 16], par acte notarié du 30 octobre 2013, la parcelle n° [Cadastre 4] par acte du 26 juin 2020, parcelles également situées sur cette même commune.
Mme [W] [T] née [U], en indivision avec ses enfants, messieurs [X] et [I] [T], en suite du décès de son époux survenu le 10 juillet 2019, est propriétaire des parcelles voisines cadastrées n° A [Cadastre 11] et [Cadastre 15], acquises selon acte notarié en date du 17 avril 2014.
Se plaignant d’une situation d’enclave due au refus de passage sur la parcelle A [Cadastre 4] par les consorts [C], et exposant que cette parcelle est une voie publique ou entretenue par la commune, suivant acte d’huissier en date du 26 mai 2021, [W] [U] épouse [T] a assigné Monsieur et Madame [C] en référé devant le Président du tribunal judiciaire de Nice sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, aux fins de désignation d’un expert judiciaire à titre principal pour donner tout élément d’appréciation sur l’état d’enclave des parcelles A [Cadastre 11] et [Cadastre 15] lui appartenant et subsidiairement, de les voir condamner à permettre le passage sur la parcelle A [Cadastre 4] aux consorts [T] en indivision comme étant le seul accès aux parcelles A [Cadastre 11] et [Cadastre 14] à titre conservatoire, le temps qu’il soit statué sur l’état d’enclave, de les condamner à laisser en l’état la servitude de tréfonds de leur installation d’eau à titre conservatoire, de les condamner à permettre la réparation de la berge endommagée et rétrécie suite aux intempéries du mois d’octobre 2020 ainsi qu’à lui payer
la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La Metropole [Localité 22] COTE d’AZUR ainsi que la commune de [Localité 23] étaient également attraites à la procédure.
Par ordonnance réputée contradictoire en date du 13 décembre 2021, ce magistrat a :
– déclaré recevable l’action introduite par Mme [W] [T] née [U],
– a ordonné une expertise judiciaire afin en substance de déterminer la réalité de l’état d’enclave des parcelles A [Cadastre 11] et A [Cadastre 15], avec mission habituelle,
– rejeté toutes autres demandes,
– dit n’y avoir lieu faire droit aux demandes formulées en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– laissé les dépens à la charge de Mme [W] [T] née [U].
Le premier juge a considéré que ‘la fermeture par les défendeurs du passage permettant l’accès à la propriété des demandeurs a entraîné un état d’enclave de la propriété, alors que la nature même de la parcelle A [Cadastre 4] est controversée selon les écritures de la métropole [Localité 22] COTE D’AZUR’ ; qu’ainsi la demanderesse justifiait d’un motif légitime.Il a exposé ne pas avoir à aborder les demandes faites à titre subsidaire qui se heurtent à d’importantes contestations ; a rejeté la demande de mise hors de cause de la métropole [Localité 22] COTE D’AZUR, prenant acte de ses contestations et réserves en ce qui concerne la demande d’expertise.
Selon déclaration reçue au greffe le 27 décembre 2021, M. [P] [C] et Mme [Z] [C] née [L] ont interjeté appel de cette décision, l’appel portant sur toutes ses dispositions dûment reprises.
Par dernières conclusions transmises le 22 décembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, M.[P] [C] et Mme [Z] [C] née [L] sollicitent de la cour qu’elle :
– juge irrecevable pour la première fois en cause d’appel, l’intervention volontaire de messieurs [X] et [I] [T],
– infirme l’ordonnance contestée du seul chef de l’expertise qui a été ordonnée et statuant à nouveau,
– déboute les consorts [T] de leur demande,
– sur l’appel incident des consorts [T], dise qu’elle n’est pas saisie de cet appel incident, le dispositif des conclusions ne déférant à la cour aucun chef de jugement querellé,
– juge irrecevable les demandes formées pour la première fois en appel,
– juge irrecevable celle articulée par les conclusions du 16 décembre 2022 tendant à ‘voir condamner M. [P] [C] et Mme [Z] [C] née [L] à laisser Mme [W] [T] née [U] rétablir son arrivée d’eau qui passe sur la parcelle [Cadastre 4] sous astreinte de 2 000 € par opposition constatée’, cette demande constituant un demande nouvelle,
– déboute Mme [W] [T] née [U] et messieurs [X] et [I] [T] de leur appel incident,
– déboute Mme [W] [T] née [U] et messieurs [X] et [I] [T] de toutes leurs demandes,
– condamne Mme [W] [T] née [U] et messieurs [X] et [I] [T] à leur payer la somme de 10 000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens distraits au profit de leur avocat.
Ils développent que messieurs [X] et [I] [T], qui se sont abstenus volontairement ou pas d’intervenir en première instance, n’ont pas la qualité de tiers au sens de l’article 554 du code de procédure civile et sont irrecevables à intervenir pour la première en cause d’appel.
Ils estiment que Mme [W] [T] née [U], qui ensuite du décès de son époux, n’était pas titulaire à elle seule des deux tiers des droits indivis, ne pouvait agir, sans l’accord préalable de ses co-indivisaires, messieurs [X] et [I] [T], en application des dispositions de l’article 815-3 du code civil ; qu’elle était donc irrecevable en ses demandes devant le premier juge ; qu’elle était également irrevevable à agir en sollicitant une expertise afin de désenclavement, alors que les propriétés dont elle sollicite le désenclavement n’ont pas fait l’objet du moindre bornage, cette action étant actuellement en cours devant le tribunal de proximité de Nice. Elle précise qu’il est impossible de désenclaver la propriété [T] ( à la supposer enclavée) ne serait ce que parce qu’il serait impossible de calculer l’assiette des éventuelles servitudes à constituer pour y parvenir en l’absence de tout bornage ; que la prescription acquisitive dont Mme [T] se prévaut ne peut être examinée que par le juge du bornage statuant au fond ; que la parcelle A [Cadastre 4] qui est elle-même enclavée, et traversée par un torrent est de plus manifestement impropre à servir à une action en désenclavement.
Elle considère au fond que Mme [W] [T] née [U] ne rapporte pas la preuve de ce que sa propriété est enclavée.
Elle expose que la cour ne peut être saisie de l’appel incident formé par Mme [W] [T] née [U], le dispositif des écritures communiquées ne contenant aucune prétention tendant à l’infirmation des chefs du jugement querellé ; que de plus cet appel incident présente à la cour des demandes nouvelles qui n’ont pas été examinées par le premier juge au mépris des dispositions de l’article 564 du code de procédure civile ; que la demande relative au rétablissement de l’arrivée d’eau aurait dû être formée en première instance, puisque cet élément connu depuis a minima le 20 mai 2021 ; que cet appel incident n’est pas fondé, aucune servitude de passage n’ayant été établie par titre et par suite aucun trouble manifestement illicite ne peut être soutenu, que les consorts [T] disposent d’une tolérance de passage depuis le 11 juillet 2022 par le chemin Chalvin qui est un chemin communal, appartenant à la commune et qui l’a aménagé, de sorte que ceux-ci ne subissent aucun trouble manifestement illicite .
Que les consorts [T] ne bénéficient non plus d’aucune tolérance de tréfonds et ont installé sans autorisation leurs canalisations et compteur d’eau sur la parcelle A [Cadastre 4], ce qui constitue un empiètement illégal ; que d’ailleurs ce compteur d’eau a été déplacé par la régie EAU d’AZUR les 17 et 20 mai 2021 sur la voie publique de [Adresse 19], et que les raccordements de viabilité de la parcelle [Cadastre 11] en tréfonds peuvent se faire par le chemin communal qui longe la parcelle A [Cadastre 5] dont la commune est propriétaire, sans passer par la parcelle [Cadastre 4].
Qu’en conséquence, la cour statuant en tant que juge des référés ne saurait accorder une quelconque servitude terrestre et de tréfonds, même à titre conservatoire sur la parcelle A [Cadastre 4], ce qui aurait pour effet de valider un empiètement illégal et de créer un trouble manifestement illicite à leur détriment.
Par dernières conclusions transmises le 15 décembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Mme [W] [T] née [U] et messieurs [X] et [I] [T] sollicitent de la cour qu’elle :
– accueille l’intervention volontaire de messieurs [X] et [I] [T] et la juge recevable et bien fondée,
– confirme l’ordonnance querellée en ce qu’elle a désigné un expert,
– rejette les demandes de M. [P] [C] et Mme [Z] [C] née [L] ,
‘ à titre incident, qu’elle :
– condamne M. [P] [C] et Mme [Z] [C] née [L] à permettre le passage par la parcelle A [Cadastre 4] à Mme [W] [T] née [U] et messieurs [X] et [I] [T] comme étant le seul accès aux parcelles A [Cadastre 11] et [Cadastre 15], à titre conservatoire, sous astreinte de 1000 € par jour de retard,
– les condamne sous la même astreinte à remettre le goudron sur le chemin d’accès dont ils ont retiré le goudron,
– les condamne à laisser en l’état la servitude de tréfonds de l’installation d’eau de Mme [W] [T] née [U] et messieurs [X] et [I] [T], à titre conservatoire, sous la même astreinte,
– les condamne à laisser Mme [W] [T] née [U] rétablir son arrivée d’eau qui passait sous la parcelle A [Cadastre 4], sous astreinte de 2 000 € par opposition constatée des [C],
– les condamne à leur payer une somme de 10 000 € au titre du préjudice de jouissance et moral subi,
– les condamne à leur payer la somme de 3500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
Mme [W] [T] née [U] soutient qu’elle était parfaitement recevable, en tant qu’indivisaire, à introduire une action tendant à la conservation du bien indivis, et que pour éviter toute difficulté, ses fils, co-indivisaires sont intervenus volontairement en cause d’appel ; que leur intervention est également recevable ; que l’ absence de bornage ne rend pas la demande irrecevable et que l’expert pourra éventuellement faire état de cette difficulté ; que son action portant sur une demande d’expertise, elle n’a pas à être précédée d’une tentative préalable de conciliation ; qu’à la suite de l’interdiction des [C], elle n’avait plus l’accès dont elle disposait auparavant, ce qui justifie la demande expertale ; que l’objet de la demande d’expertise est de voir déterminer si la parcelle est enclavée ou non et non de se voir reconnaître par le juge des référés la reconnaissance d’une quelconque servitude, qu’il n’existe aucune autre voie d’accès à leur terrain, le prétendu chemin communal étant en réalité un canal d’eau.
S’agissant de son appel incident, elle considère reprendre en appel les demandes conservatoires faites devant le premier juge à titre principal ou subsidiaire.
Elle soutient qu’ en lui faisant interdiction subitement d’utiliser le chemin mentionné à leur acte de propriété et passant sur la propriété [C], et qui constitue son seul chemin d’accès, ces derniers ont commis une voie de fait constituant un trouble manifestement illicite . A cet effet, ils doivent le remettre en l’état en le regoudronnant, à laisser en l’état la servitude de tréfonds dont celle de son installation d’eau que les appelants ont coupé au printemps 2021, ce qui constitue également un trouble manifestement illicite. Ils précisent que le dispositif de leurs conclusions est très clair et saisit la cour de leur appel, ces demandes constituant de surcroît l’accessoire et le complément de leur demande d’expertise.
La commune de [Localité 23] s’est constituée en cause d’appel mais n’a pas conclu.
L’Etablissement Public METROPOLE [Localité 22] COTE D’AZUR n’a pas constitué avocat.
L’instruction de l’affaire a été close par ordonnance en date du 10 janvier 2023.
Par soit transmis du 14 février 2023 adressé à l’ensemble des avocats, la cour a sollicité les observations des parties sur la recevabilité de la demande de dommages-intérêts formulée par les consorts [T], non articulée à titre provisionnel.
Me [H], dans sa réponse du 18 février prend acte de ce qu’effectivement cette demande n’a pas été articulée à titre provisionnel, et Me [E] en sollicite l’irrecevabilité.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de l’intervention volontaire de messieurs [X] et [I] [T] :
Il résulte de l’acte de notoriété dressé le 18 mars 2021, que Mme [T], depuis le décès de son époux en date du 10 juillet 2019, est propriétaire indivisaire avec ses deux fils des parcelles A [Cadastre 11] et A [Cadastre 12] et du bien y érigé.
Aux termes de l’article 815-2 du code civil, tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis ‘même si elles ne présentent pas un caractère d’urgence.’
L’action de Mme [T], sollicitant une expertise afin de voir déterminer l’existence de l’état d’enclave de ses parcelles suite au refus de passage des consorts [C] sur la parcelle [Cadastre 4] s’analyse, comme une mesure visant à la conservation des biens indivis, qui, en tant que telle, peut être prise par un seul des indivisaires.
Elle est donc parfaitement recevable.
L’ordonnance entreprise doit être confirmée de ce chef.
Ses fils interviennent à la procédure, appuyant les prétentions de leur mère co-indivisaire, conformément aux termes de l’article 330 du code de procédure civile.
En application de l’article 554 du code de procédure civile qui dispose que peuvent intervenir en cause d’appel les personnes qui n’ont été ni parties, ni représentées en première instance , messieurs [T], qui n’y sont pas obligés, interviennent en raison d’un intérêt qu’ils défendent, en qualité de co-indivisaires et alors qu’ils n’étaient ni parties ni représentés en première instance, de sorte qu’ils avaient la qualité de tiers .
Leur intervention volontaire est donc également parfaitement recevable.
Sur l’absence de bornage préalable :
L’absence de bornage n’interdit pas de solliciter une expertise en vue de constater la réalité de l’état d’enclavement de parcelles et ne rend donc pas irrecevable cette demande.
L’ordonnance sera confirmée de ce chef.
Sur l’absence de tentative de conciliation obligatoire :
Aux termes de l’article 750-1 du code de procédure civile, ‘ à peine d’irrecevabilité que le juge peut prononcer d’office, la demande en justice doit être précédée au choix des parties, d’une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, d’une tentattive de médiation ou d’une tentative de procédure participative, lorsqu’elle tend au paiement d’une somme n’excédant pas 5 000 € ou lorsqu’elle est relative à l’une des actions mentionnées aux articles R 211-3-4 et R 211-3-8 du code de l’organisation judiciaire ou à un trouble anormal de voisinage’.
En l’espèce, l’action porte sur une demande d’expertise, est indéterminée et n’entre pas dans le champ des articles sus cités.
Elle n’avait donc pas à être précédée d’une tentative préalable de conciliation ou de médiation.
L’irrecevabilité soulevée doit être écartée et l’ordonnance confirmée de ce chef.
Sur la demande d’expertise judiciaire :
En application de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, des mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout interessé, notamment en référé.
Le motif légitime est caractérisé dès lors qu’il existe un litige susceptible d’opposer les parties devant le juge du fond, non manifestement voué à l’échec et à la résolution duquel la mesure d’instruction est utile.
Il suffit que le demandeur à la mesure rapporte la preuve d’éléments suffisants à rendre crédibles ses allégations et démontre que le résultat de l’expertise à ordonner présente un intérêt probatoire, dans la perspective d’un procès au fond susceptible d’être engagé ultérieurement.
La demanderesse à la première instance et les deux intervenants volontaires sollicitent la désignation d’un expert judiciaire afin de déterminer l’éventuelle existence d’un état d’enclave et les moyens d’y remédier.
Ils versent aux débats :
– leur acte de propriété lequel précise en sa page 9 au chapitre accès:
‘ concernant l’accès à la propriété, au vu du plan cadastral, le chemin d’accès paraît être situé au nord des parcelles [Cadastre 4],[Cadastre 5] et [Cadastre 6] .
Toutefois l’acquéreur déclare que sur le terrain ledit chemin borde le ruisseau (ou le ravin sur le plan) et que le chemin du cadastre est un chemin piétonnier.
M. [M] géomètre expert à [Localité 18] a indiqué aux termes d’un courriel joint du 9 avril 2014 au notaire :’ il semble que la voie d’accès sur la parcelle n° [Cadastre 4] soit une voie publique, entretenue par la commune ( goudronnée dénommée [Adresse 19])’
Par courrier du 9 avril 2014, la mairie de [Localité 23] a indiqué ce qui suit: ‘ faisant suite à votre courriel du 26 mars dernier, nous vous informons que la voie goudronnée desservant les diverses propriétés appartient à la métropole [Localité 22] Cote d’Azur’,
– l’extrait de plan cadastral qui fait apparaître le chemin du Landuon qui traverse la parcelle [Cadastre 4] pour accéder à la maison des [T],
– trois attestations de voisins, régulières au sens de l’article 202 du code de procédure civile qui témoignent de ce qu’ils utilisent le chemin de Landuon passant par la parcelle A [Cadastre 4] pour accéder à leurs propriétés depuis 30 ans pour M.et Mme [Y], 1992 pour Mme [B], 1984 pour M. [F] lequel précise que pour accéder à sa parcelle A [Cadastre 3] qui jouxte la parcelle A [Cadastre 4], il passe, comme ses auteurs, et comme les auteurs des consorts [T] par le chemin qui traverse la parcelle A [Cadastre 4] , chemin goudronné et permettant la circulation des véhicules.
Les époux [C] ne contestent pas avoir interdit aux consorts [T] de passer sur leur parcelle A [Cadastre 4] .
Il s’évince de l’ensemble des pièces sus indiquées, avec l’évidence requise en référé, que la fermeture, par les consorts [C], du passage permettant l’accès à la propriété [T] est de nature a entraîner une situation d’enclave de cette propriété, ce qui caractérise le motif légitime permettant de faire droit à la demande d’expertise.
L’ordonnance querellée sera donc confirmée de ce chef.
Sur l’appel incident des consorts [T] :
En première instance, Mme [T] avait formulé à titre principal une demande d’expertise, et à titre subsidiaire, articulé des demandes conservatoires relatives à la condamnation des consorts [C] à lui permettre le passage, à laisser en l’état la servitude de tréfonds de leur installation d’eau, à leur permettre de faire réparer la berge endommagée suite aux intempéries du mois d’Octobre 2020.
Faisant droit à la demande principale de Mme [T], le premier juge n’a pas statué sur les demandes subsidiaires de cette dernière.
Mme [T] forme un appel incident relatif à ces demandes subsidiaires conservatoires.
En application des dispositions de l’article 542 du code de procédure civile, l’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou son annulation par la cour d’appel.
En l’espèce, le premier juge, ayant fait droit à la demande principale de Mme [T], n’a pas, légitimement, statué sur ses demandes subsidiaires .
Il s’ensuit, que la cour d’appel qui ne peut être saisie que par des chefs de dispositions qui ont été tranchées en première instance, n’est pas saisie par l’appel incident articulé par les consorts [T] sur des demandes subsidiaires non tranchées.
Cet appel incident est donc irrecevable.
Enfin, la demande de Mme [T] sollicitant la condamnation des époux [C] à la laisser rétablir son arrivée d’eau qui passait par la parcelle A [Cadastre 4], sous astreinte, n’a pas été formulée en première instance et constitue une demande nouvelle, qui, en application des dispositions de l’article 564 du code de procédure civile, doit être déclarée irrecevable.
Sur la demande de dommages-intérêts des consorts [T] :
Mme [T] sollicite la condamnation des époux [C] à lui payer une somme de 10 000 € au titre du préjudice moral et de jouissance subi.
Cette demande de dommages-intérêts qui n’est pas articulée à titre provisionnel doit être déclarée irrecevable.
Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens
L’ordonnance querellée sera confirmée en ce qui concerne les dépens et les frais irrépétibles.
M. [P] [C] et Mme [Z] [C] née [L] qui succombent en cause d’appel supporteront les dépens de la procédure d’appel.
Mme [W] [T] née [U] et messieurs [I] et [X] [T] ont exposé des frais pour leur défense en cause d’appel qu’il serait inéquitable qu’ils conservent à leur charge. Il leur sera donc alloué, globalement, une somme de 2 000 euros en cause d’appel.
En revanche, M. [P] [C] et Mme [Z] [C] née [L] seront déboutés de leur demande sur le même fondement.
PAR CES MOTIFS
La cour,
– Déclare recevable l’intervention volontaire de messieurs [X] et [I] [T],
– Confirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,
Y ajoutant :
– Déclare irrecevable l’appel incident formé par Mme [W] [T] née [U],
– Déclare irrecevable la demande nouvelle de Mme [T] relative au rétablissement de son arrivée d’eau,
– Déclare irrecevable la demande de dommages-intérêts articulée par les consorts [T],
– Condamne monsieur [P] [C] et son épouse née [Z] [L] au paiement des dépens d’appel,
– Condamne monsieur [P] [C] et son épouse née [Z] [L] à payer à madame [W] [T] née [U] et à messieurs [X] et [I] [T], globalement , la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– Déboute monsieur [P] [C] et son épouse née [Z] [L] de leur demande sur ce même fondement.
La greffière Le président