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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-8
ARRÊT AU FOND
DU 06 SEPTEMBRE 2023
N° 2023/ 345
N° RG 21/13706
N° Portalis DBVB-V-B7F-BIEK6
[J]
[P]
C/
[O] [C]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Laurie
CALMET
Me Joseph
MAGNAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de proximité de MARTIGUES en date du 11 Janvier 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 1120001639.
APPELANTE
Madame [J] [P]
née le [Date naissance 1] 1944 à [Localité 5], demeurant [Adresse 4]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/004330 du 03/09/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)
représentée par Me Laurie CALMET, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIME
Monsieur [O] [C]
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Joseph MAGNAN, membre de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Anaïs KORSIA, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Maëva GAUTELIER, meuble de la SELEURL GAUTELIER AVOCATS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Mai 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Philippe COULANGE, Président,
Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère
Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Angéline PLACERES.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Septembre 2023.
ARRÊT
Contradictoire, prononcée par mise à disposition au greffe le 06 Septembre 2023, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Mme Maria FREDON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Mme [I] – [E] [P] épouse [K] est propriétaire d’un appartement sis [Adresse 3], qu’elle occupe.
M. [O] [C] est propriétaire d’un appartement (acquis en Janvier 2016) situé
au-dessus et donné à bail.
Se plaignant de dégâts des eaux provenant d le’appartement du dessus, par déclaration au greffe du 10 septembre 2020, Mme [I] – [E] [P] épouse [K] sollicite la condamnation de M. [O] [C] à lui payer les sommes de :
– 1450,90 euros à titre principal, «au titre des dégâts à la suite de « 10 inondations venant du 3ème étage du 24juillet 2016 au 26janvier 2020, date où les locataires ont déménagé, le propriétaire refusant de lui faire un certificat assurant que les travaux ont été faits pour son assurance ”,
– 3549 euros à titre de dommages et intérêts, en réparation de «harcèlements quotidiens insultes, menaces, suivies de dégradations sur sa voiture depuis plus de 4 ans ”.
Une tentative de conciliation relatif à un différend concernant dix inondations de l’appartement occupé par Mme [I] – [E] [P] épouse [K], a été organisée par Mme [H] [F], conciliatrice de justice.
Un bulletin de non-conciliation a été établi le 6 août 2020, précisant que « la tentative de conciliation n’a pas abouti compte tenu de l’absence du propriétaire qui ne reconnaît pas les fuites subies par la plaignante ”.
Par jugement rendu le 11 janvier 2021, considérant que Mme [P] ne rapporte pas la preuve de ses prétentions, le Tribunal a :
Déboute Mme [I] – [E] [P] épouse [K] de toutes ses demandes, fins et prétentions formées à l’encontre de M.[O] [C],
Laisse les dépens à la charge de Mme [I] – [E] [P] épouse [K],
Par déclaration au greffe en date du 27 septembre 2021, Mme [P] a interjeté appel de cette décision.
Elle sollicite:
RECEVOIR Mme [P] en son appel ;
REFORMER la décision dont appel en toutes ses dispositions et notamment en ce qu’elle a :
– Débouté Mme [P] de sa demande de condamnation de M. [C] au paiement de la somme de 1.450,90 € au titre des dégâts subis ;
– Débouté Mme [P] de sa demande de condamnation de M. [C] au paiement de la somme de 3.549 € au titre des dommages-intérêts ;
– Condamné Mme [P] aux dépens ;
– Et plus généralement débouté Mme [P] de toutes ses demandes.
ET STATUANT A NOUVEAU
ORDONNER la remise à Mme [P] du procès-verbal de réception des travaux réalisés dans l’appartement de M.[C] et solutionnant l’origine du dommage.
ADJOINDRE à cette obligation une astreinte de 50 € par jour de retard laquelle commencera à courir un mois après la signification de la décision à intervenir.
CONDAMNER M.[C] au règlement de la somme de 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi (financier et moral) ;
EN TOUT ETAT DE CAUSE
CONDAMNER M.[C] au règlement de la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile, somme distraite au profit de Maître Laurie CALMET au visa de l’article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
CONDAMNER M.[C] aux entiers dépens tant de la première instance que de l’instance d’appel.
A l’appui de son recours, elle fait valoir :
-que le premier dégât des eaux est intervenu le 24 juillet 2016, pensant l’origine réparé son assureur a couvert les travaux de réfection de son appartement,
-que dans les faits cette origine n’a pas été réparée de sorte qu’elle a subi de nouveaux dégâts non pris en charge par son assureur tant que la preuve de la réparation de leur cause n’est pas rapportée, ce qui justifie sa demande de communication sous astreinte,
-que suite au départ des locataires de juin à septembre 2020 le propriétaire du logement du dessus a fait réaliser des travaux,
-qu’elle a fait constater l’état de son logement par un huissier le 15 février 2021 et réalisé les travaux le 14 octobre 2021,
-qu’elle établit que l’origine du dommage provient d’une fuite de l’appartement du dessus, qui du fait de l’absence de réparation a provoqué des dégâts des eaux à répétition pendant plusieurs années constituant un trouble anormal du voisinage que le propriétaire est tenu de réparer,
-qu’elle a porté plainte pour harcèlement.
M. [C] conclut :
JUGER irrecevable toutes les demandes de Mme [P],
CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de proximité de Martigues du 11 janvier 2021 en toutes ses dispositions en ce qu’il a :
– Débouté Mme [P] de sa demande de condamnation de M. [C] au paiement de la somme de 1.450,90 € au titre des dégâts subis ;
– Débouté Mme [P] de sa demande de condamnation de M. [C] au paiement de la somme de 3.549 € au titre des dommages-intérêts ;
– Condamné Mme [P] aux dépens ;
– Et plus généralement débouté Mme [P] de toutes ses demandes.
CONDAMNER Mme [P] au règlement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
CONDAMNER Mme [P] aux entiers dépens tant de la première instance que de l’instance d’appel.
Il soutient :
-que lors de l’achat de son appartement en 2016 il l’a refait et remis en état,
-qu’il a lui même habité ce logement jusqu’en juillet 2016 sans difficulté avant de le mettre en location d’août 2016 à janvier 2020 départ de ses locataires suite au harcèlement de Mme [P],
-que par la suite le bien a été reloué sans fuite signalée,
-que les pièces produites par la partie adverse (photographies et constat d’huissier) si elles établissent la réalité des désordres ne prouvent pas leur origine,
-qu’il a refait récemment la carrelage de la salle de bain sans qu’aucune fuite n’ait été constatée,
-que faute d’établir le fait générateur il ne peut être fait droit ni à la demande de communication du procès verbal de réception des travaux sous astreinte ni aux demandes indemnitaires de Mme [P], qui ne justifie pas des préjudices qu’elle invoque.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 mai 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la responsabilité de M.[C]
Il résulte de l’article 9 du code de procédure civile qu’il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
Il est de jurisprudence constante que la preuve des faits juridiques est libre et que la victime d’un trouble anormal de voisinage trouvant son origine dans l’immeuble donné en location peut demander réparation au propriétaire, indépendamment de toute faute de ce dernier.
En l’espèce, il résulte des pièces versées aux débats que le 24 juillet 2016, Mme [P] a été victime d’un premier dégât des eaux, qui a donné lieu à un constat amiable de la même date, signé par cette dernière et les locataires de M.[C], propriétaire de l’appartement sis au 3ème étage au dessus de celui de Mme [P] sis au 2ème étage.
Il ressort de ce constat amiable des dégradations de la peinture et des plâtres en plafond dus à un WC bouché au 3ème étage.
Les dégradations dues à ce dégât des eaux ont été réparées dans l’appartement de Mme [P], selon facture du 8 mai 2017.
Or force est de constater que la cause de ce dégât des eaux n’a pas été réparée, suite à ce premier incident, puisque Mme [P] justifie par des photographies du logement faites par un professionnel le 19 septembre 2019, mais surtout par un constat d’huissier du 15 février 2021 que les dommages résultant d’infiltrations ont persisté avec traces d’infiltrations au plafond dans les WC, le couloir principal, la salle de bain et une chambre avec détachement et fissures dans la peinture, outre écaillement et boursouflage de la peinture des murs près de la porte et de la fenêtre dans la salle de bain.
S’il est indéniable que l’huissier de justice n’a pas à déterminer les causes de ses constats, n’étant pas un professionnel de la plomberie, Mme [P] verse aux débats un devis d’intervention de PAVAN PLOMBERIE en date du 9 décembre 2019 indiquant que ‘la fuite vient de l’appartement du dessus sous baignoire ou douche’.
Cet avis d’un professionnel ne peut valablement être contredit par une facture de la société NCI en réparation de carrelage dans la salle de bain de M.[C] en date du 31 mars 2021 pour un montant de 274,80€ TTC, qui indique ‘pas de fuite d’eau constatée’, d’une part parce qu’il n’est pas contesté que suite aux travaux réalisés dans l’appartement de M.[C] de juin à septembre 2020, attestés par plusieurs occupants de l’immeuble, plus aucun dégât des eaux n’a été subi par Mme [P] et d’autre part parce que cette société, dont il n’est pas établi qu’elle serait une professionnelle de la plomberie, est intervenue manifestement sur un espace réduit du carrelage de cette salle de bain, eu égard au montant de la facture et nullement sous la douche ou la baignoire, lieux suspectés de la fuite.
Ainsi, Mme [P] a parfaitement démontré l’origine du dommage à savoir une fuite en provenance de l’appartement du dessus, propriété de M.[C], tout comme le caractère anormal des troubles subis, puisqu’elle a, du fait de l’absence de réparation de la fuite, subi des dégâts des eaux à répétitions et ce pendant plusieurs années.
Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.
Sur la demande de communication sous astreinte du procès verbal de réception des travaux
Pour autant, il n’est pas contesté que ces troubles ont cessé depuis les travaux réalisés par M.[C] de juin à septembre 2020, de sorte qu’il n’y a pas lieu de condamner, sous astreinte, ce dernier à communiquer le procès verbal de réception de ces travaux, aux fins de prouver la réparation de la fuite à l’origine des dégâts des eaux et Mme [P] est déboutée de sa demande à ce titre.
Sur les préjudices subis
Mme [P] justifie de frais pour établir la réalité de la situation à hauteur de 583€ en versant aux débats le justificatif des frais d’intervention du photographe pour 50€, du plombier pour 203€ et de l’huissier pour 330€.
Elle verse également aux débats une facture de réfection des plafonds et murs de la chambre, de la salle de bain, des WC et du couloir de son appartement par la société Peinture Décoration, Ravalement de façades, Revêtement sols et murs en date du 14 octobre 2021 pour 2 970€ TTC.
Or, le constat d’huissier ne fait état de dégâts que sur les plafonds de la chambre, des WC et du couloir et sur les murs et plafond de la salle de bain, de sorte que ce préjudice doit être ramené à la somme de 1 000€.
En outre, Mme [P] justifie avoir vécu avec ce dégât des eaux, qui a dégradé les plafonds de plusieurs pièces de son appartement, ainsi que la literie dans la chambre de son fils, durant plusieurs années, alors même qu’elle est âgée de 76 ans, qu’elle a porté plainte le 6 novembre 2017 contre ses voisins du dessus pour injures et menaces et qu’un certificat médical du 8 février 2021 a constaté qu’elle a présenté depuis juillet 2016 un état anxio-dépressif avec insomnies.
Il lui sera alloué au titre de son préjudice de jouissance et moral la somme de 1 000€.
M.[C] est, ainsi, condamné à verser à Mme [P] la somme de 2 583€ au titre de l’indemnisation de ses préjudices, le jugement entrepris étant infirmé sur ce point également.
Sur les autres demandes
M.[C] est condamné à 1500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre aux dépens de première instance et d’appel.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe, en dernier ressort,
INFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 11 janvier 2021 par le Tribunal de proximité de MARTIGUES,
Statuant à nouveau,
DEBOUTE Mme [P] de sa demande de communication sous astreinte du procès verbal de réception des travaux réalisés dans l’appartement de M.[C],
CONDAMNE M.[C] à payer à Mme [P] la somme de 2 583€ à titre de dommages et intérêts pour les préjudices subis,
Y ajoutant,
CONDAMNE M.[C] à régler à Mme [P] la somme de 1500€ sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure Civile,
CONDAMNE [L] aux entiers dépens de première instance et d’appel.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT