Tentative de conciliation : 31 janvier 2023 Cour d’appel de Besançon RG n° 21/01287

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Tentative de conciliation : 31 janvier 2023 Cour d’appel de Besançon RG n° 21/01287
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ARRÊT N°

MW/FA

COUR D’APPEL DE BESANÇON

– 172 501 116 00013 –

ARRÊT DU 31 JANVIER 2023

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

Contradictoire

Audience publique du 29 novembre 2022

N° de rôle : N° RG 21/01287 – N° Portalis DBVG-V-B7F-EMY2

S/appel d’une décision du TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE BESANCON en date du 08 juin 2021 [RG N° 19/01958]

Code affaire : 56B Demande en paiement du prix, ou des honoraires formée contre le client et/ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix, ou des honoraires

S.C.A. COOPERATIVE AGRICOLE TERRE COMTOISE C/ G.A.E.C. FERME DU CRET MONNIOT

PARTIES EN CAUSE :

S.C.A. COOPERATIVE AGRICOLE TERRE COMTOISE société coopérative agricole au capital variable minimum de 1 616 281,60 euros, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, immatriculée au RCS de Besançon sous le numéro 775 570 955

Sise [Adresse 1]

Représentée par Me Florence ROBERT de la SELARL ROBERT & MORDEFROY, avocat au barreau de BESANCON

APPELANTE

ET :

G.A.E.C. FERME DU CRET MONNIOT prise en la personne de son représentant légal, immatriculé au RCS de Besançon sous le numéro 384 762 373

[Adresse 2]/FRANCE

Représentée par Me Guillaume MONNET de la SCP MONNET – VALLA – BESSE, avocat au barreau de BESANCON

INTIMÉE

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre.

ASSESSEURS : Messieurs Jean-François LEVEQUE et Cédric SAUNIER, conseillers.

GREFFIER : Madame Fabienne ARNOUX, Greffier.

Lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre, magistrat rédacteur

ASSESSEURS : Messieurs Jean-François LEVEQUE, et Cédric SAUNIER, conseillers.

L’affaire, plaidée à l’audience du 29 novembre 2022 a été mise en délibéré au 31 janvier 2023. Les parties ont été avisées qu’à cette date l’arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

**************

Par contrat du 1er janvier 2007, le GAEC la Ferme du Cret Monniot a adhéré à la coopérative agricole Coopadou, aux droits de laquelle se trouve désormais la SCA Coopérative Agricole Terre Comtoise.

Par exploit du 12 septembre 2019, la Coopérative Agricole Terre Comtoise a fait assigner le GAEC la Ferme du Cret Monniot devant le tribunal de grande instance de Besançon en paiement de la somme de 13 000 euros au titre du solde de son compte, de celle de 3 115,73 euros au titre des intérêts conventionnels, outre capitalisation, et de celle de 409,30 euros au titre des frais de recouvrement. Elle a contesté l’applicabilité d’une clause de conciliation préalable faisant obstacle à son action, a nié l’intervention d’une transaction avec effacement de la dette, et a fait valoir que la dette avait été reconnue, et qu’elle correspondait à un solde de compte, et non au paiement de factures.

Le GAEC la Ferme du Cret Monniot a soulevé l’irrecevabilité des demandes formées à son encontre, subsidiairement a conclu à leur rejet. Il a fait valoir que le règlement intérieur de la coopérative prévoyait le recours obligatoire à la conciliation préalablement à toute action judiciaire, subsidiairement a invoqué le paiement de la dette ayant donné lieu à l’établissement par la coopérative d’un solde de tout compte et de deux avoirs. Plus subsidiairement, il a considéré que la preuve de la créance n’était pas rapportée par les pièces versées aux débats.

Par jugement du 8 juin 2021, le tribunal judiciaire a :

– accueilli le GAEC du Cret Monniot en sa fin de non-recevoir ;

– déclaré l’action introduite par la SCA Terre Comtoise irrecevable ;

– condamné la SCA Terre Comtoise à verser au GAEC Ferme du Cret Monniot une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la SCA Terre Comtoise aux entiers dépens ;

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu :

– que la clause d’un contrat instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge, dont la mise en ‘uvre suspendait jusqu’à son issue le cours de la prescription, constituait une fin de non-recevoir qui s’imposait au juge lorsque les parties l’invoquaient, et qu’était qualifiée de clause de conciliation obligatoire celle qui était assortie de conditions particulières de mise en ‘uvre ;

– que les parties s’accordaient pour voir reconnaître l’application au litige du règlement intérieur du 29 mars 2019, lequel contenait un article 12 intitulé ‘Attribution de juridiction’ aux termes duquel ‘Toute contestation sera portée devant le conseil d’administration qui s’efforcera de trouver un accord amiable, dans les 60jours. A défaut d ‘accord amiable, tous litiges éventuels relatifs aux relations de la société coopérative agricole avec ses adhérents ou tiers non associés seront portés devant la juridiction compétente’ ;

– qu’une contestation était bien née entre la coopérative et son adhérent quant à l’exigibilité des sommes réclamées dans le cadre de l’instance ; que la clause prévoyait dans un premier temps une tentative de conciliation, précisant à la fois l’organisme en charge de procéder à cette mesure, mais aussi sa durée ; qu’elle prévoyait dans un second temps qu’en cas d’échec, la contestation serait portée devant la juridiction compétente en précisant les contentieux relevant de l’application de cette clause, et notamment les litiges opposant la coopérative à ses adhérents ; qu’il s’agissait dès lors d’une clause de conciliation obligatoire et préalable à l’engagement de toute procédure judiciaire qui était assortie de conditions particulières de mise en ‘uvre ;

– qu’aucune conciliation n’ayant été engagée préalablement à la présente instance, la SCA Terre Comtoise avait manqué à son obligation de mise en oeuvre d’une procédure de conciliation obligatoire et préalable, de sorte que son action était irrecevable.

La SCA Terre Comtoise a relevé appel de cette décision le 12 juillet 2021 en déférant à la cour l’ensemble de ses dispositions.

Par conclusions récapitulatives notifiées le 7 mars 2022, l’appelante demande à la cour :

Vu les articles 122 et suivants et l’article 1530 du code de procédure civile,

Vu les articles 1134 (ancien) et 1343-2 du code civil,

Vu les articles R. 522-2 et R. 522-3 du code rural,

– d’infirmer le jugement déféré en ce qu’il a :

* accueilli le GAEC la Ferme du Cret Monniot en sa fin de non-recevoir ;

* déclaré l’action introduite par la SCA Terre Comtoise irrecevable ;

* condamné la SCA Terre Comtoise à verser au GAEC la Ferme du Cret Monniot la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ;

Statuant à nouveau,

– de rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut de conciliation préalable ;

– de juger les demandes de la SCA Terre Comtoise recevables et bien fondées,

– de condamner le GAEC la Ferme du Cret Monniot à payer à la Société Coopérative Agricole Terre Comtoise les sommes suivantes :

* 13 000 euros à titre principal ;

* 3 115,73 euros au titre des intérêts conventionnels, outre capitalisation annuelle des intérêts ;

* 2 417,36 euros au titre de la clause pénale conventionnelle ;

* 409,30 euros au titre des frais de recouvrement ;

– de condamner le GAEC la Ferme du Cret Monniot à payer à la SCA Terre Comtoise la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– de condamner le GAEC la Ferme du Cret Monniot aux entiers dépens de première instance et d’appel, par application des articles 696 et 699 du code de procédure civile, dont distraction au profit de la SELARL Robert & Mordefroy.

Par conclusions responsives et récapitulatives notifiées le 25 octobre 2022, le GAEC la Ferme du Cret Monniot demande à la cour :

Vu I’article 122 du code de procédure civile,

Vu les articles 1100 et suivants du code civil,

Vu l’article 1359 du code civil,

A titre principal,

– de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

En conséquence,

– de déclarer irrecevables les demandes formulées par la Société Coopérative Agricole Terre Comtoise faute d’avoir mis en ‘uvre la procédure de conciliation obligatoire et préalable ;

– de débouter la Société Coopérative Agricole Terre Comtoise de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

A titre subsidiaire,

– de dire et juger que les comptes du GAEC la Ferme du Cret Monniot ouvert dans les livres de la coopérative Terre Comtoise ont été entièrement apurés par la remise d’un chèque pour solde de tous les comptes ;

– de débouter, en conséquence, la Société Coopérative Agricole Terre Comtoise de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

A titre éminemment subsidiaire,

– de dire et juger que la Société Coopérative Agricole Terre Comtoise ne justifie pas du montant de sa créance ;

– de débouter, en conséquence, la Société Coopérative Agricole Terre Comtoise de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

En toutes hypohèses,

– de condamner la Société Coopérative Agricole Terre Comtoise à payer au GAEC la Ferme du Cret Monniot la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– de condamner la coopérative Terre Comtoise aux entiers dépens.

La clôture de la procédure a été prononcée le 8 novembre 2022.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l’exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.

Sur ce, la cour,

Sur la recevabilité

L’appelante conteste la fin de non-recevoir retenue par le premier juge, au motif qu’il n’avait pas été contractuellement stipulé de véritable clause de conciliation préalable s’imposant aux parties à peine d’irrecevabilité de l’action judiciaire.

Il sera rappelé que l’article12 du règlement intérieur de la coopérative agricole Terre Comtoise énonce que ‘Toute contestation sera portée devant le conseil d’administration qui s’efforcera de trouver un accord amiable, dans les 60 jours. A défaut d ‘accord amiable, tous litiges éventuels relatifs aux relations de la société coopérative agricole avec ses adhérents ou tiers non associés seront portés devant la juridiction compétente.’

C’est d’abord à mauvais escient que l’appelante soutient qu’il n’existerait pas en l’espèce de contestation à trancher, au motif que le GAEC la Ferme du Cret Monniot avait reconnu sa dette, alors que ce dernier conteste précisément devoir le solde qui lui est réclamé, peu important que celui-ci corresponde à des prélèvements impayés.

Toutefois, il doit être relevé que la clause litigieuse prévoit de porter le différend devant le conseil d’administration de la coopérative. Or, celui-ci est l’un des organes de la coopérative agricole, qui est elle-même l’une des parties au procès, de sorte qu’il ne peut en aucun cas être qualifié de tiers au litige. Dans ces conditions, il ne saurait être retenu que la clause litigieuse met en place un processus structuré en vue de parvenir à un accord en-dehors de toute procédure judiciaire, avec l’aide d’un tiers choisi par les parties.

La saisine du conseil d’administration de la coopérative ne peut donc s’analyser en un préalable de conciliation conditionnant la recevabilité de l’action judiciaire.

Le jugement déféré sera en conséquence infirmé, la coopérative agricole Terre Comtoise étant déclarée recevable en ses demandes.

Sur le fond

L’appelante sollicite le paiement en principal de la somme de 13 000 euros correspondant à deux prélèvements impayés de 6 500 euros, en faisant valoir que, si elle avait certes délivré postérieurement au GAEC un reçu pour solde de tout compte, c’était dans l’ignorance du défaut de paiement des prélèvements concernés.

Le GAEC la Ferme du Cret Monniot conteste rester redevable de la somme demandée, en indiquant qu’elle avait soldé sa dette au moyen d’un chèque de 59 964 euros, et que la coopérative lui avait alors remis un reçu pour solde de tout compte attestant de l’apurement des comptes. Il précise que la coopérative lui a accordé une remise commerciale correspondant aux prélèvements impayés, en échange d’un maintien des approvisionnements auprès d’elle, ce à quoi il s’était conformé.

Les prélèvements impayés constituant la créance alléguée de la coopérative agricole Terre Comtoise sont respectivement datés de novembre et décembre 2014. Or, il est constant qu’à la suite du paiement par le GAEC la Ferme du Cret Monniot de la somme de 59 964,50 euros, le directeur administratif et financier de la coopérative lui a remis le 17 juin 2015 un document intitulé ‘attestation de remise de chèque pour solde de tous les comptes’, dans lequel il est expressément indiqué que ‘le GAEC la Ferme du Cret Monniot (…) a régularisé la totalité de sa dette chez Terre Comtoise à hauteur de 59 964,50 euros’. Cette attestation est signée pour le compte de la coopérative par M. [K] [Y], directeur administratif et financier, et contresignée pour le GAEC par M. [J] [I]. La seule réserve émise à la suite, qui tient au bon encaissement du chèque remis, est sans emport en l’espèce, dès lors qu’il est reconnu que le chèque a été encaissé sans incident.

L’appelante ne peut pas sérieusement prétendre qu’à la date de délivrance de ce reçu, elle était dans l’ignorance du défaut de paiement des prélèvements survenu plus de 6 mois auparavant, alors qu’elle produit elle-même ses relevés de compte afférents aux mois correspondants, dont il ressort que ces impayés y figurent à bonne date, de sorte qu’elle en a nécessairement pris connaissance en temps réel.

Il doit en être déduit que le solde de tous comptes a été consenti par la coopérative en parfaite conscience de l’état de la dette de l’intimé, de sorte qu’il ne peut être unilatéralement remis en cause.

Les demandes en paiement formées par la coopérative seront donc rejetées.

Sur les autres dispositions

Le jugement enrepris sera confirmé s’agissant des frais irrépétibles et des dépens.

L’appelante sera condamnée aux dépens d’appel, ainsi qu’à payer à l’intimé la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

Statuant contradictoirement, après débats en audience publique,

Confirme le jugement rendu le 8 juin 2021 par le tribunal judiciaire de Besançon s’agissant des frais de défense irrépétibles et des dépens ;

L’infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau, et ajoutant :

Déclare recevables les demandes formées par la SCA Coopérative agricole Terre Comtoise à l’encontre du GAEC la Ferme du Cret Monniot ;

Au fond, les rejette ;

Condamne la SCA Coopérative agricole Terre Comtoise aux dépens d’appel ;

Condamne la SCA Coopérative agricole Terre Comtoise à payer au GAEC la Ferme du Cret Monniot la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été signé par Michel Wachter, président, magistrat ayant participé au délibéré et Fabienne Arnoux, greffier.

Le greffier, Le président,

 


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