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AFFAIRE : N° RG 20/02869
N° Portalis DBVC-V-B7E-GUZU
Code Aff. :
ARRET N°
C.P
ORIGINE : Décision du Pôle social du Tribunal Judiciaire de CAEN en date du 16 Novembre 2020 – RG n° 18/00816
Décison du Pôle social du Tribunal Judiciaire de Caen en date du 24 janvier 2022
COUR D’APPEL DE CAEN
2ème chambre sociale
ARRÊT DU 30 MARS 2023
APPELANT :
S.A.S.U. [4]
[Adresse 3]
Représentée par Mme [K], responsable des affaires sociales, mandatée et par Me LORENZO, du cabinet CAPSTAN AVOCATS, avocats au barreau de NANTES
INTIMES :
Monsieur [F] [I]
[Adresse 2]
Comparant en personne, assisté de Me Yann JULLIEN, avocat au barreau de CAEN
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU CALVADOS
[Adresse 1]
Représentée par M. [E], mandaté
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme CHAUX, Président de chambre,
M. LE BOURVELLEC, Conseiller,
M. GANCE, Conseiller,
DEBATS : A l’audience publique du 26 janvier 2023
GREFFIER : Mme GOULARD
ARRÊT prononcé publiquement le 30 mars 2023 à 14h00 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Mme CHAUX, présidente, et Mme GOULARD, greffier
La cour statue sur l’appel régulièrement interjeté par la société [4] d’un jugement rendu le 16 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Caen et d’un jugement rendu le 24 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Caen dans un litige l’opposant à M. [I] en présence de la caisse primaire d’assurance maladie du Calvados.
FAITS et PROCEDURE
La société [4] (‘la société’) exerce une activité de 2ème transformation des viandes.
Dans la filière de la viande, l’activité de la société s’inscrit dans le processus suivant :
– 1ère transformation : abattage, découpe pour livraison de demi-carcasses,
– 2ème transformation : découpe, désossage des carcasses et parages des muscles,
– 3ème transformation : fabrication de produits élaborés (steak haché, saucisse, jambon, etc).
M. [I] a été embauché par la société le 18 avril 2011 en qualité d’opérateur 2ème transformation des viandes (désosseur de carcasses de porc) sur le site de Brocéliande à [Localité 10], dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée.
Le 3 novembre 2011, il est devenu chef de chantier en production sur le site de Charcuteries Cuisines de [Localité 7].
Suite à sa démission par lettre du 16 janvier 2013 à effet du 1er février 2013, son contrat de travail s’est poursuivi en qualité d’opérateur 2ème transformation de viande couteaux, selon avenant N°2 en date du 18 janvier 2013 au CDI signé le 18 mai 2010.
M. [I] a déclaré deux maladies professionnelles le 21 avril 2016, sur la base de deux certificats médicaux initiaux en date du 14 avril 2016 :
– canal carpien de la main gauche
– canal carpien de la main droite
Il a complété une déclaration de maladie professionnelle le 24 octobre 2016 au titre d’une tendinopathie non rompue non calcifiante épaule gauche, sur la base d’un certificat médical initial du 14 avril 2016 (‘tendinopathie chronique non rompue non calcifiante sans enthésopathie de la coiffe des rotateurs / conflit sous acromial’).
La caisse primaire d’assurance maladie du Calvados (‘la caisse’) a pris en charge ces maladies au titre de la législation professionnelle le 7 septembre 2016 en ce qui concerne le syndrome du canal carpien gauche et le syndrome du canal carpien droit, et le 2 mars 2017 en ce qui concerne la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche, au titre du tableau n° 57 des maladies professionnelles.
Le 24 octobre 2017, M. [I] a complété une nouvelle déclaration de maladie professionnelle au titre d’une tendinopathie chronique non rompue non calcifiante de l’épaule droite, sur la base d’un certificat médical initial du 25 octobre 2017 (‘tendinopathie chronique de l’épaule droite’).
Cette pathologie, rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite, a fait l’objet d’une prise en charge par la caisse au titre de la législation professionnelle le 29 mars 2018 au titre du tableau n° 57 des maladies professionnelles.
Le taux d’incapacité permanente (IPP) de M. [I] a été fixé par la caisse comme suit :
– 5 % pour le canal carpien gauche
– 3 % pour le canal carpien droit
A compter du 1er juin 2018.
– 15 % pour la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche, à compter du 15 mai 2018
– 15 % pour la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite, à compter du 19 juin 2019.
Au mois de septembre 2019, M. [I] a fait l’objet d’un licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Après échec de la tentative de conciliation, M. [I] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Caen le 9 novembre 2018 pour obtenir la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur pour les quatre maladies professionnelles déclarées.
Par jugement du 16 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Caen, auquel a été transféré le contentieux de la sécurité sociale à compter du 1er janvier 2019, a :
– dit que c’est à bon droit que la caisse a pris en charge au titre de la législation professionnelle les pathologies suivantes de M. [I] :
– canal carpien de la main droite, maladie professionnelle déclarée le 14 avril 2016 et reconnue le 7 septembre 2016,
– canal carpien de la main gauche, maladie professionnelle déclarée le 14 avril 2016 et reconnue le 7 septembre 2016,
– tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche, maladie professionnelle déclarée le 14 avril 2016 et reconnue le 2 mars 2017,
– tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite, maladie professionnelle déclarée le 23 octobre 2017 et reconnue le 29 mars 2018,
– dit que les quatre maladies professionnelles précitées sont dues à la faute inexcusable de son employeur, à savoir la société,
– ordonné la majoration au maximum légal de la rente prévue à l’article L.452-2 du code de sécurité sociale pour chacune de ces maladies,
– dit que cette majoration de la rente suivra automatiquement l’augmentation du taux d’IPP en cas d’aggravation de l’état de santé de la victime,
– dit qu’elle sera versée à la victime par la caisse qui en récupérera le montant auprès de l’employeur, conformément aux dispositions de l’article L.452-2 alinéa 6 du code de sécurité sociale,
– avant-dire-droit, ordonné une expertise, confiée à M. [Y],
– accordé à M. [I] une provision de 2 000 euros à valoir sur la réparation de ses préjudices,
– dit que cette provision sera versée directement par la caisse à M. [I],
– dit que la caisse bénéficie de l’action récursoire à l’égard de l’employeur conformément aux articles L.452-2 et suivants du code de sécurité sociale, y compris pour le remboursement de cette provision
– dit que l’affaire sera rappelée à l’audience du 17 mai 2021 à 14 heures,
– réservé l’application de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens,
– ordonné l’exécution provisoire.
La société a formé appel de ce jugement par déclaration du 21 décembre 2020.
M. [Y], expert judiciaire, a déposé son rapport le 8 octobre 2021.
Par jugement en date du 24 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Caen a :
– rejeté la demande de sursis à statuer présentée par la société,
– fixé l’indemnisation du préjudice subi par M. [I] à la suite des maladies professionnelles comme suit :
– préjudice esthétique 500 euros
– préjudice lié aux souffrances endurées 10 000 euros
– déficit temporaire total et partiel 4 736,87 euros
– préjudice d’agrément 1 000 euros
– assistance tierce personne temporaire 4 493,50 euros
– préjudice sexuel 500 euros
– frais médicaux 200 euros
soit au total 21 430,37 euros
En conséquence,
– condamné la société à payer à M. [I] la somme de 21 430,37 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la décision, somme de laquelle il y aura lieu de déduire la provision accordée de 2 000 euros et versée par la caisse,
– débouté M. [I] de sa demande au titre de la perte de chance de promotion professionnelle,
– dit que cette somme sera versée à la victime par la caisse,
– dit que la caisse bénéficie de l’action récursoire à l’égard de la société en vertu de l’article L.452-3 du code de sécurité sociale,
– débouté les parties du surplus de leurs demandes,
– condamné la société à payer à M. [I] une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la société au paiement des dépens, en ce compris les frais d’expertise avancés par la caisse,
– ordonné l’exécution provisoire de la décision.
Par déclaration du 11 février 2022, la société a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions déposées le 19 janvier 2023, soutenues oralement à l’audience par son conseil, la société demande à la cour de :
– à titre liminaire, ordonner la jonction de la présente affaire avec celle enregistrée sous le RG n°20/02869,
A titre principal,
– infirmer le jugement du 16 novembre 2020 en ce qu’il a jugé que la société avait commis une faute inexcusable,
– infirmer le jugement du 16 novembre 2020 en ce qu’il a ordonné la majoration au maximum légal de la rente,
Statuant à nouveau,
– juger que la société n’a commis aucune faute inexcusable,
– débouter M. [I] et la caisse de toute demande formée à l’encontre de la société,
– condamner M. [I] et la caisse à rembourser à la société les sommes indûment perçues.
A titre subsidiaire,
Si par extraordinaire le jugement du 16 novembre 2020 était confirmé, la cour ne pourra que:
– infirmer le jugement du 24 janvier 2022 en ce qu’il a fixé le montant total des préjudices subis par M. [I] à la somme de 21 430,37 euros,
Statuant à nouveau,
– limiter l’indemnisation au titre du déficit fonctionnel temporaire à la somme de 4 421,30 euros,
– limiter l’indemnisation des souffrances endurées à 4/7 et en toute hypothèse limiter l’indemnisation en conséquence à la somme de 7 000 euros,
– limiter l’indemnisation du préjudice au titre des dépenses non prises en charge par l’assurance maladie à la somme de 2 250 euros,
– confirmer le jugement le 24 janvier 2022 en ce qu’il a débouté M. [I] de sa demande indemnitaire au titre du prétendu préjudice esthétique,
– confirmer le jugement du 24 janvier 2022 en ce qu’il a débouté M. [I] de sa demande indemnitaire au titre du prétendu préjudice d’agrément,
– confirmer le jugement du 24 janvier 2022 en ce qu’il a débouté M. [I] de sa demande indemnitaire au titre du prétendu préjudice lié à la perte de chance de promotion professionnelle,
– confirmer le jugement le 24 janvier 2022 en ce qu’il a débouté M. [I] de sa demande indemnitaire au titre du prétendu préjudice lié à la perte des droits de retraite,
– confirmer le jugement le 24 janvier 2022 en ce qu’il a débouté M. [I] de sa demande indemnitaire au titre du prétendu préjudice sexuel,
– infirmer le jugement du 24 janvier 2022 en ce qu’il a condamné la société à verser à M. [I] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens,
– condamner M. [I] et la caisse à rembourser à la société les sommes indûment perçues,
A titre reconventionnel,
– condamner M. [I] au paiement de la somme de 1 500 euros à ce titre.
Par écritures déposées le 10 octobre 2022, soutenues oralement par son conseil, M. [I] demande à la cour de :
– ordonner la jonction des instances portant les références 20/02869 et 22/00359,
– confirmer le jugement du 16 novembre 2020 en ce qu’il a :
– dit que c’est à bon droit que la caisse a pris en charge au titre de la législation professionnelle les pathologies suivantes de M. [I] :
– canal carpien de la main droite, maladie professionnelle déclarée le 14 avril 2016 et reconnue le 7 septembre 2016,
– canal carpien de la main gauche, maladie professionnelle déclarée le 14 avril 2016 et reconnue le 7 septembre 2016,
– tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche, maladie professionnelle déclarée le 14 avril 2016 et reconnue le 2 mars 2017,
– tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite, maladie professionnelle déclarée le 23 octobre 2017 et reconnue le 29 mars 2018,
– dit que les quatre maladies professionnelles précitées sont dues à la faute inexcusable de son employeur, à savoir la société,
– ordonné la majoration au maximum légal de la rente prévue à l’article L.452-2 du code de sécurité sociale pour chacune de ces maladies,
– dit que cette majoration de la rente suivra automatiquement l’augmentation du taux d’IPP en cas d’aggravation de l’état de santé de la victime,
– dit qu’elle sera versée à la victime par la caisse qui en récupérera le montant auprès de l’employeur, conformément aux dispositions de l’article L.452-2 alinéa 6 du code de sécurité sociale,
– réformer le jugement du 24 janvier 2022 en ce qu’il a :
– limité la fixation de l’indemnisation des préjudices non couverts par le livre IV du code de sécurité sociale subis par M. [I] à la suite des maladies professionnelles aux seules sommes suivantes ;
– préjudice esthétique 500 euros
– préjudice lié aux souffrances physiques 10 000 euros
– déficit fonctionnel temporaire total et partiel 4 736,87 euros
– préjudice d’agrément 1 000 euros
– assistance tierce personne temporaire 4 493,50 euros
– préjudice sexuel 500 euros
– frais médicaux 200 euros
soit un total de 21 430,37 euros
-limité la condamnation de la société à payer à M. [I] à la somme de 21 430,37 euros au titre des préjudices non couverts par le livre IV du code de sécurité sociale,
– débouté M. [I] de sa demande au titre de la perte de chance de promotion professionnelle,
– débouté M. [I] du surplus de ses demandes,
Et de statuer à nouveau comme il suit :
– condamner la société à verser à M. [I] les dommages et intérêts suivants :
2 000 euros au titre du préjudice esthétique
20 000 euros au titre du préjudice lié aux souffrances endurées,
4 748,80 euros au titre des jours de déficit temporaire total et partiel,
2 000 euros au titre du préjudice d’agrément,
25 000 euros au titre du préjudice de perte de chance de promotion professionnelle,
6 503,75 euros au titre du préjudice des dépenses de santé non prises en charge par l’assurance maladie,
2 000 euros au titre du préjudice sexuel,
200 euros au titre des frais médicaux restés à la charge de M. [I],
– condamner la société à payer à M. [I] une indemnité de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société au paiement des éventuels dépens de la procédure d’appel, y compris ceux liés à l’exécution de l’arrêt à intervenir,
– déclarer le jugement commun à la caisse.
Aux termes de conclusions déposées le 29 novembre 2022, soutenues oralement à l’audience par son représentant, la caisse demande à la cour de :
– confirmer en toutes leurs dispositions les jugements des 16 novembre 2020 et 24 janvier 2022,
– faire application de l’article L.452-3-1 du code de sécurité sociale,
– donner acte à la caisse de ses droits à remboursement de ses charges (provision, frais d’expertise, majoration de rente/capital et préjudices extra patrimoniaux) relatives à la reconnaissance de la faute inexcusable auprès de l’employeur.
Pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, il est expressément renvoyé à leurs écritures conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR
Il convient, pour une bonne administration de la justice, d’ordonner la jonction du dossier portant le numéro 22/00359 avec le dossier numéro 20/02869.
Le jugement du 16 novembre 2020 n’est pas critiqué en ce qu’il a dit que c’est à bon droit que la caisse a pris en charge au titre de la législation professionnelle les pathologies suivantes de M. [I] :
– canal carpien de la main droite, maladie professionnelle déclarée le 14 avril 2016 et reconnue le 7 septembre 2016,
– canal carpien de la main gauche, maladie professionnelle déclarée le 14 avril 2016 et reconnue le 7 septembre 2016,
– tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche, maladie professionnelle déclarée le 14 avril 2016 et reconnue le 2 mars 2017,
– tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite, maladie professionnelle déclarée le 23 octobre 2017 et reconnue le 29 mars 2018.
Cette disposition est donc acquise, sous réserve de rectifier la décision en ce sens que les deux premières déclarations de maladie professionnelle sont datées du 21 avril 2016, la troisième du 24 octobre 2016 et la quatrième du 24 octobre 2017 (et non du 25 octobre 2017).
Le jugement du 24 janvier 2022 n’est pas contesté en ce qu’il a rejeté la demande de sursis à statuer présentée par la société, cette disposition est définitive.
I. Sur la faute inexcusable
Le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.
Il appartient à la victime de justifier que son employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé son salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour le préserver de ce danger.
La conscience du danger doit être appréciée objectivement par rapport à la connaissance de ses devoirs et obligations que doit avoir un employeur dans son secteur d’activité.
En l’espèce, M. [I] explique que les travailleurs de la filière de la viande sont particulièrement exposés au développement de troubles musculosquelettiques (TMS), et il considère qu’en l’état des données scientifiques disponibles, la société avait ou aurait dû avoir conscience du risque de TMS auquel il était exposé dans le cadre de son emploi de désosseur.
Il indique que début 2013, il a été réaffecté à un poste de simple désosseur, alors qu’il occupait un poste de chef de chantier en production. Il souligne que cette situation devait rester temporaire, car la société s’était engagée oralement à le réaffecter rapidement sur un autre poste de chef de chantier, promesse qui n’a pas été honorée.
Il ajoute avoir informé son employeur de la dégradation de son état de santé mais qu’aucune mesure de prévention n’a été mise en oeuvre.
Il indique avoir été opéré de l’épaule gauche en juillet 2016 et avoir été maintenu au désossage à son retour.
Il estime que son employeur n’a pas pris les mesures de prévention requises.
La société ne conteste pas que les facteurs suivants :
– travail à la chaîne et en cadence,
– port de charges lourdes (les pièces de viande à découper),
– le mauvais affûtage des couteaux,
sont listés comme des risques propres aux métiers des abattoirs responsables de l’exposition aux risques TMS.
Elle souligne que les études produites par M. [I] listent les principales mesures de prévention que les sociétés de la filière des métiers de la viande peuvent mettre en oeuvre. Elle indique être très impliquée et vigilante dans la prévention des risques liés aux TMS.
Elle estime en substance avoir pris toutes les mesures de prévention nécessaires, telles que préconisées par les études sur les TMS.
1° conscience du risque
M. [I] fait état d’une étude de l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) de 1997 pour justifier de ce que les travailleurs de la filière viande sont particulièrement exposés au développement de TMS.
Il cite notamment cet extrait de l’étude de l’INRS de novembre 1997 :
Les industries de transformation de la viande constituent une filière où les conditions de travail sont généralement difficiles. Toutes les études épidémiologiques et statistiques récentes montrent une très forte augmentation des cas de Troubles Musculo-Squelettiques (TMS) dans la filière viande. Le membre supérieur est une localisation préférentielle des TMS et le syndrome du canal carpien apparaît comme la principale pathologie. C’est en tout cas la pathologie la plus souvent étudiée.
Ils surviennent lorsque les contraintes biomécaniques qui s’exercent sur les tendons des
muscles et sur les articulations dépassent les capacités fonctionnelles des opérateurs.
Dès lors, la prévention des TMS doit privilégier les actions qui permettent d’alléger ces contraintes. La détermination des facteurs de risque a fait l’objet de nombreuses publications. La plupart des facteurs de risque professionnels des TMS sont retrouvés dans les activités des salariés de la filière viande et constituent l’explication la plus solide de la forte prévalence de TMS chez les salariés de ces entreprises. Parmi ces facteurs qui, d’un point de vue ergonomique doivent être considérés comme des déterminants, il convient de citer :
‘ les contraintes de temps et productivité (augmentation des cadences),
‘ le travail à la chaîne à l’origine de tâches spécialisées et répétitives,
‘ une variation des produits biologiques qui modifie la durée d’un cycle de travail le plus souvent programmé, minuté et rigide.
Outre ces déterminants de TMS, la filière viande est caractérisée par un personnel peu qualifié, peu formé et souvent renouvelé.
Malgré la complexité du problème, le préventeur doit savoir que des moyens préventifs existent mais la difficulté du problème réside dans la mise en ‘uvre de ces solutions au sein de l’ensemble de la filière viande.
Il cite également un extrait d’un article du 5 février 2016 du site Infoprotection.fr ‘la chasse aux TMS dans l’industrie de la boucherie-charcuterie’ :
Les bouchers-charcutiers figurent parmi les métiers les plus concernés par les TMS qui sont souvent négligés dans ce domaine […] les manipulations répétitives avec un rythme soutenu lors des opérations de transformation de la viande (saucisses, saucissons, jambons, boudins’), des postures contraignantes (station debout prolongée avec piétinements, position penchée en avant avec bras tendus, flexions, torsions’).
A l’instar d’un accord engagé en mai 2015 avec la Confédération nationale des charcutiers-traiteurs (CNCT) visant à diminuer le taux d’AT/MP dans le secteur, la Fédération française des industriels charcutiers, traiteurs, transformateurs de viandes (Fict) vient de réaliser un guide de prévention contre les accidents du travail en mettant l’accent sur les risques de TMS liés aux manutentions et à la conception des équipements. Selon la Cnam-TS, cette démarche engagée depuis dix ans aurait déjà contribué à réduire de 25% l’indice de fréquence des accidents avec arrêt.
Il se fonde aussi sur des comptes rendus de réunions du CHSCT de l’entreprise reprenant le nombre de maladies professionnelles déclarées entre 2016 et 2019 et la répartition des sinistres. Ceux-ci concernent des pathologies aux épaules, aux coudes/bras, aux mains et aux poignets.
La société ne conteste pas avoir conscience des risques inhérents aux métiers de la viande, et bien au contraire, indique avoir fait partie des sociétés ayant participé aux études évoquées par le salarié et des groupes de réflexion sur les conditions de travail des opérateurs de transformation de viande.
Elle ajoute être particulièrement impliquée dans la prévention des risques liés aux TMS.
Il ressort de ces développements que M. [I] rapporte la preuve que la société avait conscience des risques généraux de développements de TMS dans l’exercice de sa profession.
M. [I] argue de ce que son employeur était informé du danger qu’il encourait à titre particulier.
Il indique l’avoir informé, suite à sa réaffectation en 2013 sur un poste de désosseur, de la dégradation de son état de santé.
Il produit un courrier tapuscrit de M. [U], ancien collègue, en date du 4 octobre 2019, non accompagné d’une pièce d’identité, aux termes duquel celui-ci affirme avoir été informé, ainsi que les chefs de chantier et la direction, de l’état de santé de M. [I].
Ce courrier est rédigé en termes trop généraux et sans indications temporelles pour constituer un élément probant pertinent.
Il explique que suite à un arrêt de travail en juillet 2016, puis une opération de l’épaule gauche, le médecin du travail, le 6 mars 2017, dans le cadre de la visite de reprise du travail, a fait le constat suivant ‘reprise en mi-temps thérapeutique depuis ce matin, 1 jour sur 2. Très bonne récupération de l’épaule gauche, l’épaule droite commence à être douloureuse. A revoir lors de la reprise à temps complet.’
Il doit être constaté que dans ce document, extrait du dossier médical de M. [I], le médecin du travail ne formule pas de préconisation de reclassement du salarié.
En revanche, le médecin du travail a écrit, dans le cadre de la visite du 16 février 2017 ‘reclassement vers un poste de formation dans l’entreprise évoqué’, sans qu’il en ressorte que cette préconisation aurait été formalisée et adressée à l’employeur.
Lors de la visite du 31 janvier 2018, le médecin du travail a écrit dans le dossier médical de M. [I] : ‘motif de la visite : salarié en poste avec état de santé précaire. Attend réponse dossier maladie professionnelle (57). Tâches au désossage. Utilise des jrs de congés pour obtenir des repos compensateurs. du 31/01/2018.’
Contrairement à ce qu’affirme M. [I], il n’est pas écrit dans ce compte rendu de la visite du 31 janvier 2018 ‘prévoir un rendez-vous avec la hiérarchie du salarié’.
Il apparaît ainsi que si l’employeur était informé et conscient des risques liés de manière générale à l’exercice de la profession d’opérateur 2ème transformation des viandes, la preuve n’est pas rapportée qu’il avait connaissance de risques concernant la situation particulière de M. [I]. Il n’est justifié ni de recommandation de reclassement de la part du médecin du travail, ni de courriers de celui-ci qui auraient alerté la société sur l’état de santé de M. [I].
2 ° Sur la mise en oeuvre des mesures de prévention des risques
M. [I] soutient que la société s’est abstenue de mettre en oeuvre les mesures de prévention qui s’imposaient et sont préconisées par différentes études scientifiques.
a) absence de remplacement des salariés absents combiné au maintien de quotas et de cadences de production
M. [I] indique que la société s’est abstenue :
– de procéder régulièrement au remplacement des salariés absents,
– d’adapter les quotas et cadences de production lorsque des salariés étaient absents, contraignant les salariés présents à devoir suppléer aux tâches des opérateurs absents, et dès lors à multiplier les gestes répétitifs au-delà du raisonnable.
Il se réfère aux études précitées, ainsi qu’à sa pièce n° 35 – à savoir sa fiche d’activités de juillet à novembre 2012.
Il explique que la lecture de cette fiche démontre qu’il devait régulièrement occuper trois postes simultanément, parfois quatre, en raison des absences de collègues et du manque de personnel.
Il produit également la copie de carnets (pièce n° 68) qu’il tenait lui-même, indiquant qu’il prenait ces notes pour vérifier le montant de la part variable de sa rémunération, dans la mesure où chaque opérateur était rémunéré sur le nombre de jambons découpés sur la ligne avec un coefficient différent en fonction du type de découpe effectué (quasis, fémurs, etc).
Il souligne qu’à temps de travail équivalent, les quantités de jambons produites restaient constantes malgré l’absence d’opérateurs sur la ligne, parce qu’il palliait les absences en occupant simultanément plusieurs postes. Il ajoute que lorsque l’ensemble des opérateurs était présent, il était par défaut assigné au désossage des fémurs sur la totalité de sa journée de travail.
Il convient de noter que la pièce n° 68 est constituée d’une page tapuscrite mentionnant pour février 2015 et janvier 2016 des nombres de jambons, avec indications ‘sans absents’ ou ‘avec absents’, dont il n’est pas contesté que M. [I] en est l’auteur, de sorte qu’il est dépourvu de valeur probante.
Il en est de même de la copie d’un agenda, également pièce n° 68, puisque ce document a aussi été rempli de la main de M. [I], et qu’il reprend de la même façon les semaines qui auraient été ‘avec absents’ ou ‘sans absents’.
Si la pièce n° 33 tend à établir que M. [I] a pu être affecté, pour la période considérée de juillet à novembre 2012, sur trois ou quatre postes simultanément, la société réplique qu’il s’agissait de mettre en oeuvre une des règles de prévention préconisée, à savoir instaurer une polyvalence dans les tâches pour éviter la répétition du même geste.
De fait, dès lors que M. [I] était affecté à plusieurs postes de manière simultanée, il ne pouvait matériellement réaliser les tâches y afférentes en même temps. De plus, la société relève à juste titre que les bulletins de salaire produits par le salarié ne mentionnent pas d’heures supplémentaires, ce qui tend à conforter la thèse de l’employeur selon laquelle une affectation sur plusieurs postes simultanément n’impliquait pas une augmentation de la charge de travail.
Par ailleurs, cette fiche d’activités concerne une période totale d’un peu plus de trois mois (juillet, fin septembre à fin novembre 2012), de sorte que le salarié n’apporte pas la preuve qu’il aurait été régulièrement, de manière habituelle, durant la relation de travail, affecté sur plusieurs postes en même temps.
Ainsi, s’il est acquis que la société manquait de personnel à cette époque, cette circonstance n’apporte pas la preuve des manquements invoqués par M. [I] sur les cadences de production.
b) carences en matière de formation et dans la mise en oeuvre des mesures destinées à prévenir la survenance des TMS
M. [I] cite un extrait de l’étude de 1997 réalisée par l’INRS :
Le salarié de la filière viande doit impérativement être informé du risque de TMS et de l’existence de solutions pour les prévenir, notamment en améliorant sa capacité fonctionnelle. Ainsi, une meilleure hygiène de vie et la pratique d’activités sportives peuvent constituer une piste intéressante quoique partielle car cette approche ne peut être considérée comme une réponse unique ou à privilégier tant les facteurs de risque résident d’abord dans le travail. Par ailleurs, la formation du personnel apparaît comme très importante. La formation initiale des nouveaux embauchés s’avère malheureusement souvent insuffisante. Une connaissance plus précise des gestes et postures favorisant les TMS et l’intégration de ces connaissances dès l’apprentissage semble une piste intéressante mais difficile d’application. D’un point de vue plus pratique, une formation intensive à l’affilage et à l’affûtage, ou la mise en place d’un système centralisé et performant d’aiguisage des couteaux peut également constituer une amélioration.
Il affirme qu’en huit ans, il n’a été formé qu’aux règles d’hygiène, mais pas aux gestes professionnels et postures de travail propres à éviter la survenance de TMS. Il souligne que la société a attendu 2017 pour lancer une action destinée à identifier et transmettre les bonnes pratiques au poste.
Il se réfère au compte rendu du CHSCT de début 2017 qui fait ce constat ‘échauffements et santé au travail : les formations des référents est (sic) en cours pour qu’ensemble ces référents puissent faire des échauffements aux autres salariés sur site’.
Il évoque le document unique d’évaluation des risques (DUER) mis à jour en mai 2017 qui mentionne : ‘préparation à l’activité physique : organisation sur le temps de travail, avant prise de poste, d’un temps de réveil musculaire (échauffements) : en cours de déploiement sur tous les sites’.
Il fait valoir que la société a aussi tardé à mettre en oeuvre un système de polyvalence prévention (rotation des opérateurs sur différents postes afin de varier la typologie des gestes répétitifs au cours d’une même journée), dont il était question au cours d’une réunion du CHSCT d’avril 2018 : ‘la polyvalence doit être effectuée sur les sites de manière régulière et un accompagnement doit être plus approfondi au retour à leur poste de travail des salariés absents (…) compte tenu du manque de main d’oeuvre, l’accompagnement est plus ou moins facile’.
Ces différents éléments apportent la preuve que dès 1997, la formation du personnel affecté aux métiers de la viande était recommandée pour prévenir les risques de TMS.
En réplique, la société produit cinq attestations de formation :
– 2012 : hygiène – qualité sécurité
– 2015 (entre janvier et février) :
hygiène – qualité sécurité
santé au travail
santé au travail
hygiène – qualité sécurité
Il doit être constaté que sur cinq formations, quatre sont intervenues en 2015, alors que M. [I] avait été embauché en 2011. De plus, aucun élément ne permet de déterminer le contenu de ces formations, pas plus que leur durée.
Deux supports de formation sont produits par la société.
L’un, intitulé ‘santé au travail’ n’est pas daté, et ne permet pas de savoir si M. [I] a effectivement bénéficié de la formation qui y est décrite.
L’autre, intitulé ‘sécurité des personnes et des aliments pour le travail à façon des viandes’ est daté du 29 juillet 2015, et est donc postérieur aux formations suivies par M. [I].
De même, le plan de prévention du site de Brocéliande à [Localité 9]- Bocage (pièce n° 2 de la société) prévoit une ‘date de démarrage’ au 1er février 2019, soit après les déclarations de maladie professionnelle. Le livret hygiène et sécurité dont la société indique qu’il a été remis aux salariés a été édité en mai 2018, soit encore une fois après les maladies professionnelles de M. [I] (pièce n° 3 de la société).
Le récépissé de remise de la charte hygiène et sécurité, signé le 27 août 2013 par M. [I], n’est pas accompagné du livret charte dont il est supposé prouver la remise, de sorte qu’il ne peut être vérifié que ce document reprenait en tout ou partie les recommandations adaptées pour prévenir les risques de TMS.
L’employeur critique le jugement du 16 novembre 2020 car celui-ci n’a pas retenu le fait que M. [I] était membre du CHSCT et aurait donc eu une position ‘privilégiée’ pour connaître la présentation des actions de formations qui étaient organisées chaque année.
Pour autant, la qualité de membre du CHSCT ne dispensait pas l’employeur de faire bénéficier le salarié de formations spécifiques en vue de prévenir les TMS.
Il ressort de ces constatations que la société, qui avait conscience des risques de TMS, et de la nécessité de formations pour les prévenir, n’a pas mis en oeuvre les actions de formation requises.
c) absence de reclassement
M. [I] indique que son état de santé s’est progressivement dégradé au cours de la relation de travail, mais que la société n’a pas pris les mesures pour le préserver du risque de développer des TMS.
Il invoque le témoignage d’un collègue, M. [P] [T], lequel expose des considérations générales, sans rien décrire de la situation particulière de M. [I].
Le témoignage de l’épouse de M. [I] apparaît dépourvu de force probante, car rédigée en termes vagues et non circonstanciés. Il en est de même du témoignage de M. [U].
Il a été relevé plus haut que les extraits du dossier médical de M. [I] ne révélaient aucune préconisation de reclassement du médecin du travail, pas plus que de ‘rendez-vous à prévoir avec la hiérarchie’.
Les certificats médicaux établis en juin et septembre 2016 par le médecin traitant de M. [I] n’ont pas été portés à la connaissance de l’employeur à l’époque de leur rédaction, et ils reprennent au moins en partie les déclarations du salarié.
M. [I] soutient que le directeur des ressources humaines avait reconnu, lors de l’entretien préalable au licenciement du 29 juillet 2019, qu’il y avait eu un ‘loupé’ dans la gestion de son dossier et que les promesses de changement de poste n’avaient pas été suivies d’effet.
Aucune pièce du dossier n’apporte la preuve de cette affirmation.
Les premiers juges ont ainsi justement relevé que les allégations de M. [I] relatives à un défaut de reclassement n’étaient pas établies avec certitude.
d) absence de mise à disposition de matériel adéquat
M. [I] fait valoir qu’il a été confronté, sur les différents sites de travail de la société, à des difficultés d’affilage et d’affûtage, alors que les études précitées, notamment celle de l’INRS, rappellent l’importance de mettre à disposition des salariés des outils efficaces et en état.
Il convient cependant de relever, comme l’ont fait les premiers juges, que M. [I] n’apporte pas d’éléments de nature à démontrer cette allégation. Il fait état de considérations générales sur la société, sans prouver qu’il aurait été personnellement confronté à cette difficulté.
Il doit être retenu des développements qui précèdent que la société, qui avait conscience des risques de TMS, qui connaissait d’autant mieux l’importance des actions de formation pour prévenir ces risques qu’elle indique y consacrer un budget conséquent, n’a pas pris les mesures nécessaires pour préserver le salarié de ce danger. En particulier, il n’apparaît pas qu’elle aurait mis en oeuvre les formations spécifiques telles que préconisées par les différentes études sur le sujet, ni à compter de l’embauche de M. [I], ni après que celui-ci ait déclaré ses premières maladies professionnelles.
C’est par conséquent à bon droit que le jugement du 16 novembre 2020 a retenu que les quatre maladies professionnelles déclarées par M. [I] étaient dues à la faute inexcusable de l’employeur.
Le jugement sera confirmé de ce chef, sauf à le rectifier en ce sens que les deux premières déclarations de maladie professionnelle sont datées du 21 avril 2016, la troisième du 24 octobre 2016, et la quatrième du 24 octobre 2017.
II. Conséquences de la faute inexcusable
A. Sur la majoration de la rente et l’action récursoire de la caisse
Conformément aux dispositions des articles L 411-1, L 431-1, L 452-2 et L 453-1 du code de la sécurité sociale, la majoration de rente ou de capital prévue lorsque la maladie professionnelle est due à la faute inexcusable de l’employeur, au sens de l’article L 452-1 du code de la sécurité sociale, ne peut être réduite que lorsque le salarié victime a lui-même commis une faute inexcusable au sens de l’article L 453-1 du même code, c’est à dire une faute d’une exceptionnelle gravité exposant son auteur à un danger dont il aurait du avoir conscience.
Dès lors qu’il n’est ni établi ni argué que M. [I] aurait commis une telle faute, la majoration de rente doit être fixée au maximum.
Il résulte des termes de l’article L 452-2 alinéas 2 et 3 du code de la sécurité sociale, que la majoration de rente ou du capital alloué à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle consécutifs à la faute inexcusable de son employeur est calculée en fonction de la réduction de capacité dont celle-ci reste atteinte, de sorte que cette majoration doit suivre l’évolution du taux d’incapacité de la victime.
En conséquence, il convient de dire que la majoration de rente suivra automatiquement l’augmentation du taux d’IPP en cas d’aggravation de l’état de santé de la victime.
Cette majoration sera versée directement à la victime par la caisse qui en récupérera le montant, auprès de l’employeur, conformément aux dispositions de l’article L 452 – 2 alinéa 6 du code de la sécurité sociale.
Par jugement du tribunal du contentieux de l’incapacité de Chalons en Champagne en date du 25 octobre 2018, le taux d’IPP de M. [I] résultant de la pathologie déclarée le 24 octobre 2016 au titre la tendinopathie non rompue non calcifiante épaule gauche a été fixée à 8 % au lieu de 15 %.
La société précise que cette décision a fait l’objet d’un appel, actuellement en cours.
Il convient donc de dire, par voie d’adjonction, que la caisse ne pourra exercer son action récursoire à l’encontre de l’employeur, s’agissant de la majoration de rente, que dans la limite du taux de :
– 5 % au titre du syndrome du canal carpien gauche
– 3 % au titre du syndrome du canal carpien droit
– 15 % pour la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite
– pour la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche : au taux fixé par la décision à intervenir dans la procédure opposant la caisse à l’employeur.
Sur la provision accordée par le jugement du 16 novembre 2020
Les premiers juges, tenant compte de l’âge de la victime, des taux d’IPP retenus pour quatre maladies professionnelles, ont justement évalué le montant de la provision à valoir sur l’indemnisation des préjudices de M. [I] à la somme de 2 000 euros. Le jugement du 16 novembre 2020 sera confirmé sur ce point.
B. Sur la liquidation du préjudice de M. [I]
En application des articles L.452-1 et L.452-3 du code de la sécurité sociale, lorsque l’accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur ou de ceux qu’il s’est substitués dans la direction, la victime a droit, indépendamment de la majoration de rente qu’elle reçoit, de demander à l’employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d’agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle.
Tel qu’interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale permet à la victime d’un accident du travail de demander à l’employeur dont la faute inexcusable de l’employeur a été reconnue la réparation d’autres chefs de préjudice que ceux énumérés, à la condition que ses préjudices ne soient pas déjà couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.
En l’espèce, la faute inexcusable de l’employeur a été reconnue par le présent arrêt, de sorte que M. [I] est en droit de solliciter l’indemnisation de ses préjudices personnels, tels que définis par les dispositions précitées.
Les dates de consolidation ont été fixées par la caisse au
– 31 mai 2018 pour le canal carpien de la main gauche et de la main droite,
– 14 mai 2018 pour la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche,
– 18 juin 2019 pour la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite.
I. Préjudices extrapatrimoniaux
1° Déficit fonctionnel temporaire
Le déficit fonctionnel temporaire de la victime d’une maladie professionnelle due à une faute inexcusable de l’employeur peut être indemnisé au titre des préjudices non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.
Il inclut, pour la période antérieure à la consolidation, l’incapacité fonctionnelle totale ou partielle, ainsi que le temps d’hospitalisation et les pertes de qualité de la vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique.
Selon l’expert judiciaire, le déficit fonctionnel temporaire (DFT) est total les jours d’intervention, soit le 16 août 2016, le 24 novembre 2016, le 1er décembre 2016 et le 20 février 2018.
Il est partiel à 50 %, suivant chaque intervention d’épaule, période de port du [6], soit du 17 août au 16 septembre 2016 et du 21 février au 20 mars 2018.
Il est de 25 % les 15 jours suivant chaque intervention du canal carpien, avec port d’atelle, soit du 25 au 30 novembre 2016 et du 2 au 16 décembre 2016, ainsi que durant les six mois d’évolution de la capacité rétractile, soit du 21 mars au 20 septembre 2018.
Il est de 10 % du 14 avril au 15 août 2016, du 17 septembre au 23 novembre 2016, du 17 décembre 2016 au 19 février 2018, et du 21 septembre 2018 au 26 juillet 2019.
Les parties s’accordent sur les périodes et les taux de DFT.
M. [I] demande de retenir une base de 26,50 euros par jour en indiquant qu’il s’agit d’une évaluation fondée sur la moitié du SMIC. La société propose une indemnisation sur la base comprise, selon les périodes, entre 24,47 euros et 25 euros, et 25,33 euros pour la dernière période, fondée sur la valeur du minimum garanti.
La proposition de la société est calculée sur la valeur du minimum garanti, selon le montant correspondant année par année (2014 à 2019), tandis que la demande de M. [I] est fondée sur un montant unique quelle que soit l’année considérée.
Il convient dans ces conditions, par voie d’infirmation, et sur la base du calcul proposée par la société, d’accorder à M. [I] une somme de 4 421,30 euros au titre du DFT.
2° Souffrances physiques et morales endurées
Il s’agit d’indemniser toutes les souffrances tant physiques que morales subies par la victime
pendant la maladie traumatique et jusqu’à la consolidation.
M. [Y] écrit que les quatre interventions chirurgicales, liées aux quatre maladies professionnelles, les douleurs, la longue rééducation, la capsulite rétractile, les périodes d’immobilisation justifient une note totale de 4 sur une échelle de 7.
M. [I] sollicite une somme de 20 000 euros, en expliquant que les quatre maladies professionnelles ont simultanément atteint les membres supérieurs gauche et droit, et que pour les gestes de la vie courante, il a dû mobiliser au moins un membre supérieur malade, de sorte que les souffrances endurées ont été plus importantes que pour des pathologies touchant un seul membre.
La société propose une somme de 7 000 euros.
Compte tenu des quatre interventions chirurgicales, et du fait que les membres supérieurs droit et gauche ont été affectés par les quatre pathologies, contraignant M. [I] à mobiliser l’un ou l’autre de ses membres supérieurs, il y a lieu, par voie d’infirmation, d’évaluer ce préjudice à 15 000 euros.
3° Préjudice esthétique temporaire et permanent
L’expert judiciaire indique que, ‘après consolidation, les cicatrices de neuralyse sont extrêmement discrètes, de même un point d’arthroscopie d’épaule droite, sans différence de hauteur d’épaule, justifiant la note de 0,5 sur une échelle de 7″.
M. [I] sollicite une somme de 2 000 euros en fondant sur deux précédents jurisprudentiels.
La société estime que les deux arrêts produits sont sans rapport avec la situation de M. [I] et estime que le jugement du 24 janvier 2022 a retenu à tort l’existence d’un préjudice esthétique.
Il ressort de ces constatations que l’indemnisation réclamée vise exclusivement le préjudice esthétique permanent, dont il convient de constater le caractère léger, au vu des conclusions, non discutées de l’expert. Il n’est cependant pas inexistant et son évaluation a été justement réalisée à hauteur de 500 euros par les premiers juges.
Le jugement doit donc être confirmé sur ce point.
4° Préjudice d’agrément
Le préjudice d’agrément est constitué par l’impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs , et ce poste de préjudice inclut la limitation de la pratique antérieure.
Ce préjudice concerne donc les activités sportives, ludiques ou culturelles devenues impossibles ou limitées en raison des séquelles de l’accident. Il appartient à la victime de justifier de la pratique de ces activités (licences sportives, adhésions d’associations, attestations…) et de l’évoquer auprès du médecin expert afin que celui-ci puisse donner son avis sur le point de savoir si elle peut continuer ces activités.
Il ne se confond donc :
– ni avec la perte de la qualité de la vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, qui est prise en compte au titre du déficit fonctionnel temporaire,
– ni, pour la période postérieure à cette date, avec la perte de la qualité de la vie et les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d’existence personnelles, familiales et sociales, qui sont compris dans le déficit fonctionnel permanent.
L’expert indique que ce préjudice est ‘sans objet, aucune activité n’était organisée avant les maladies professionnelles’.
M. [I], reprenant les constatations de l’expert selon lesquelles il ne peut plus faire de ‘travail domestique’ et ce alors qu’il avait pourtant ‘toujours assuré la tonte’ et le ‘travail des haies’, sollicite une somme de 2 000 euros. Il ajoute qu’il pratiquait habituellement les activités de loisir suivantes :
– jardinage : taillage des haies, entretien du terrain,
– activités de loisir avec ses enfants durant les vacances (accrobranche, puddle, canoé).
Mais d’une part, l’expert judiciaire a seulement repris les déclarations de M. [I], sans avoir réalisé de constatations personnelles sur les activités alléguées, d’autre part, l’intimé ne produit aucun élément pour justifier d’une pratique régulière de loisir dont l’exercice serait devenu difficile ou impossible en raison des maladies professionnelles.
Cette demande sera donc rejetée par voie d’infirmation.
4° Préjudice sexuel
Ce préjudice recouvre trois aspects pouvant être altérés séparément ou cumulativement,
partiellement ou totalement : l’aspect morphologique lié à l’atteinte aux organes sexuels, le
préjudice lié à l’acte sexuel (libido, perte de capacité physique, frigidité), et la fertilité
(fonction de reproduction).
M. [I] reprend un échange intervenu avec l’expert judiciaire dans ces termes :’mentionne des douleurs dans certaines positions’.
Il est établi par le rapport d’expertise que M. [I] est limité dans les tâches avec bras droit au-delà de 90°, au port de charges régulier au-delà de 15 kgs, aux gestes répétitifs des membres supérieurs’.
Ces constatations permettent d’établir la réalité de la gêne positionnelle évoquée par M. [I], constituant un préjudice justement évalué par les premiers juges à 500 euros. Le jugement sera confirmé à ce titre.
II. Préjudices patrimoniaux
1° Assistance à tierce personne
Ce préjudice est visé dans les conclusions de la société en ces termes ‘préjudice au titre des dépenses non prises en charge par l’assurance maladie’.
Il s’agit des dépenses liées à la réduction d’autonomie, qui peuvent être temporaires
entre le dommage et la consolidation. Ce chef de préjudice n’a pas à être réduit en cas de recours à un membre de la famille, ni subordonné à la production de justificatifs de dépenses effectives. Il est constant que le taux horaire peut varier pour la tierce personne en fonction du besoin, de la gravité du handicap et de la spécialisation de la tierce personne.
Les parties s’accordent à reconnaître, sur la base du rapport d’expertise, que M. [I] a reçu l’aide de son épouse durant les périodes de DFT à 50 % et 25 % comme suit :
– 1 heure par semaine pendant 60 jours,
– 5 heures par semaine pendant 210 jours, soit 30 semaines = 150 heures (30 x5).
Compte tenu de ces éléments, et sur la base de 16 euros de l’heure, il convient par voie d’infirmation, d’indemniser ce préjudice comme suit :
60 x 16 = 960
150 x 16 = 2 400
total : 3 360 euros
2° Les dépenses de santé actuelles (Frais médicaux et assimilés)
Les dépenses de santé sont les frais médicaux et pharmaceutiques, non seulement les frais
restés à la charge effective de la victime, mais aussi les frais payés par des tiers (sécurité
sociale, mutuelle…), les frais d’hospitalisation (on les retrouve dans les prestations en nature
des organismes sociaux) et tous les frais paramédicaux (infirmiers, kinésithérapie etc..).
M. [I] indique avoir pris à sa charge le règlement d’une facture de 200 euros.
Il produit pour en justifier la copie d’une facture de l’hôpital privé [Localité 8] à [Localité 5], en date du 16 août 2016, dont l’objet n’est pas précisé, pas plus qu’il n’est justifié qu’elle n’aurait fait l’objet d’aucun remboursement de la sécurité sociale, ni qu’elle se rattacherait à l’une des maladies professionnelles résultant de la faute inexcusable.
Par voie d’infirmation, cette demande sera rejetée.
3° Préjudice résultant de la perte ou la diminution des possibilités de promotion professionnelle
M. [I] explique avoir occupé pendant plus d’une année le poste de chef de chantier en production, avant que la société ne lui demande de revenir temporairement à un poste de désosseur, le temps de lui trouver une autre affectation en qualité de chef de chantier. Il en retient qu’il avait une chance sérieuse de promotion professionnelle qui lui aurait permis, compte tenu de son expérience et de ses compétences, de réaccéder à un poste de chef de chantier en production.
Il souligne que compte tenu de son état de santé, il ne peut plus aujourd’hui accéder à un tel poste.
Les premiers juges ont relevé à juste titre que le poste de désosseur que M. [I] a réintégré, après avoir occupé celui de chef de chantier, impliquait des contraintes physiques au moins aussi importantes que celles de chef de chantier. Il ne pouvait donc en être déduit que le changement de poste aurait été justifié par la dégradation de l’état de santé du salarié.
Il a par ailleurs été relevé précédemment qu’aucune pièce du dossier n’apportait la preuve que la société s’était engagée à réintégrer M. [I] à un poste de chef de chantier, suite à sa démission de ce poste.
La preuve n’étant pas rapportée d’une perte de chance, liée à la dégradation de son état de santé, de réintégrer un poste de chef de chantier de production, il convient de confirmer le jugement du 24 janvier 2022 en ce qu’il a débouté l’intimé de cette demande.
Au total, les préjudices subis par M. [I] s’établissent à 23 781,30 euros selon le détail suivant dont il convient de déduire la provision de 2 000 euros, accordée par 16 novembre 2020, à valoir sur l’indemnisation définitive de ses préjudices.
Préjudices extra-patrimoniaux
Préjudices extra-patrimoniaux temporaires
Déficit fonctionnel temporaire 4 421,30 euros
Souffrances endurées 15 000 euros
Préjudices extra-patrimoniaux permanents
Préjudices d’agrément rejet
Préjudice esthétique permanent 500 euros
Préjudice sexuel 500 euros
Préjudices patrimoniaux temporaires
Frais médicaux rejet
Assistance tierce personne 3 360 euros
Préjudices patrimoniaux
Incidence professionnelle rejet
Total 23 781,30 euros
Provision à déduire 2 000 euros
– Sur l’action récursoire de la caisse
En application des dispositions de l’article L 452-3 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, les sommes ci-dessus allouées seront avancées directement par la caisse.
La faute inexcusable de la société ayant été reconnue, il appartient à la caisse de récupérer auprès de l’employeur les sommes dont elle est tenue de faire l’avance, en ce compris les frais d’expertise. Il convient de rappeler que l’action récursoire de la caisse à l’encontre de l’employeur ,au titre de la majoration de la rente, ne pourra s’exercer que dans la limite de :
– 5 % au titre du syndrome du canal carpien gauche
– 3 % au titre du syndrome du canal carpien droit
– 15 % pour la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite
– pour la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche : au taux fixé par la décision à intervenir dans la procédure opposant la caisse à l’employeur.
– Sur les demandes accessoires
Succombant au principal, la société sera condamnée aux dépens d’appel ainsi qu’aux frais d’expertise.
En complément de la somme de 2 000 euros accordée à M. [I] au titre de l’article 700 du code de procédure civile en première instance, il convient de lui accorder une somme supplémentaire de 1 000 euros au titre des frais exposés pour assurer sa défense en cause d’appel dont le paiement sera mis à la charge de la société.
Le jugement du 24 janvier 2022 sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Ordonne la jonction du dossier portant le numéro 22/00359 avec le dossier numéro 20/02869 ;
Confirme le jugement du 16 novembre 2020, sauf à rectifier la décision en ce sens que les deux premières déclarations de maladie professionnelle sont datées du 21 avril 2016, la troisième du 24 octobre 2016 et la quatrième du 24 octobre 2017 ;
Y ajoutant,
Dit que la caisse primaire d’assurance maladie du Calvados ne pourra exercer son action récursoire, s’agissant de la majoration de la rente, à l’encontre de la société [4] que dans la limite du taux de :
– 5 % au titre du syndrome du canal carpien gauche
– 3 % au titre du syndrome du canal carpien droit
– 15 % pour la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite
– pour la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche : au taux fixé par la décision à intervenir dans la procédure opposant la caisse à l’employeur ;
Confirme le jugement du 24 janvier 2022 en ce qu’il a :
– rejeté la demande de sursis à statuer présentée par la société,
– fixé l’indemnisation du préjudice subi par M. [I] à la suite des maladies professionnelles comme suit :
– préjudice esthétique 500 euros
– préjudice sexuel 500 euros
– débouté M. [I] de sa demande au titre de la perte de chance de promotion professionnelle,
– dit que la caisse bénéficie de l’action récursoire à l’égard de la société en vertu de l’article L.452-3 du code de sécurité sociale,
– débouté les parties du surplus de leurs demandes,
– condamné la société à payer à M. [I] une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la société au paiement des dépens, en ce compris les frais d’expertise avancés par la caisse ;
L’infirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau,
Fixe l’indemnisation du préjudice subi par M. [I] comme suit au titre de :
– préjudice lié aux souffrances endurées 15 000 euros
– déficit fonctionnel temporaire 4 421,30 euros
– assistance tierce personne 3 360 euros
Déboute M. [I] de ses demandes formées au titre du préjudice d’agrément et au titre des frais divers (frais médicaux) ;
Alloue en conséquence à M. [I] la somme totale de 23 781,30 euros,
dont il convient de déduire la somme de 2 000 euros accordée à M. [I] par jugement du 16 novembre 2020, à titre de provision à valoir sur l’indemnisation de ses préjudices ;
Dit que les sommes ainsi allouées seront avancées directement par la caisse primaire d’assurance maladie du Calvados ;
Rappelle que caisse primaire d’assurance maladie du Calvados bénéficie d’une action récursoire à l’égard de l’employeur de M. [I], la société [4], pour les sommes dont elle est tenue de faire l’avance, et , s’agissant de la majoration de la rente, dans la limite de :
– 5 % au titre du syndrome du canal carpien gauche
– 3 % au titre du syndrome du canal carpien droit
– 15 % pour la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite
– pour la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche : au taux fixé par la décision à intervenir dans la procédure opposant la caisse à l’employeur ;
Condamne la société [4] à payer à M. [I] la somme complémentaire de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles ;
Condamne la société [4] aux dépens d’appel, ainsi qu’aux frais d’expertise.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
E. GOULARD C. CHAUX