Tentative de conciliation : 30 juin 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/01369

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Tentative de conciliation : 30 juin 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/01369
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ARRÊT DU

30 Juin 2023

N° 883/23

N° RG 21/01369 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TZDU

VC/CH

Jugement du

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ARRAS

en date du

30 Juin 2021

(RG F 20/00103 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 30 Juin 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

– Prud’Hommes-

APPELANT :

M. [M] [R]

[Adresse 2]

représenté par Me Martin DANEL, avocat au barreau de DUNKERQUE

INTIMÉES :

Association AGS – CGEA [Localité 4]

[Adresse 1]

représentée par Me Tal LETKO BURIAN, avocat au barreau d’ARRAS, substitué par Me Ancel MIART, avocat au barreau d’ARRAS

S.E.L.A.S. MJS PARTNERS La SELAS MJS PARTNERS, es qualité de liquidateur judiciaire de la SAS IMPRIMERIE CHARTREZ

[Adresse 3]

représentée par Me Nathalie POULAIN, avocat au barreau d’ARRAS

DÉBATS : à l’audience publique du 11 Mai 2023

Tenue par Virginie CLAVERT

magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Valérie DOIZE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Pierre NOUBEL

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Virginie CLAVERT

: CONSEILLER

Laure BERNARD

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Juin 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Pierre NOUBEL, Président et par Valérie DOIZE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 20 avril 2023

EXPOSE DU LITIGE ET PRETENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES :

La société TILLIE MOPIN a engagé M. [M] [R] par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 19 avril 2010 en qualité de technico-commercial, catégorie employé, coefficient groupe IIIA de la convention collective nationale de l’imprimerie de labeur et de l’industrie graphique.

Par avenant du 29 décembre 2014, le contrat de travail de l’intéressé a été transféré à compter du 1er janvier 2015 à la société IMPRIMERIE CHARTREZ.

La SAS IMPRIMERIE CHARTREZ a été placée en redressement judiciaire par jugement du 21 janvier 2019, puis en liquidation judiciaire suivant décision du 29 mai 2019, Me [O] étant désigné en qualité de mandataire liquidateur.

Par lettre du 1er juillet 2019, M. [M] [R] s’est vu notifier son licenciement pour motif économique.

Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités consécutivement à la rupture de son contrat de travail, M. [M] [R] a saisi le 26 juin 2020 le conseil de prud’hommes d’Arras qui, par jugement du 30 juin 2021, a rendu la décision suivante :

– dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,

– fixe les créances de M. [M] [R] dans la procédure collective de la SAS IMPRIMERIE CHARTREZ de la façon suivante :

– 2688 euros bruts au titre de rappel de salaire 2018/2019,

– 268,80 euros de congés payés,

– 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– déboute M. [M] [R] de ses plus amples prétentions,

– précisé que le jugement d’ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que tous les intérêts de retard et majorations,

– dit le jugement opposable à Me [O],

– rappelle les conditions et les limites de la garantie du CGEA,

– dit que les parties supporteront les dépens de l’instance chacune pour ce qui la concerne,

– déboute la SELAS MJS PARTNERS représentée par Me [O] [C] de sa demande d’article 700 du code de procédure civile,

– demande que les documents rectifiés soient transmis au demandeur dans un délai de 20 jours à compter de la notification du présent jugement sous astreinte de 50 euros par jour de retard limitée à deux mois, le conseil se réservant le droit de liquider l’astreinte,

– dit le jugement opposable au CGEA dans la limite de ses garanties.

M. [M] [R] a relevé appel de ce jugement, par déclaration électronique du 4 août 2021.

Vu les dernières conclusions notifiées par RPVA le 2 novembre 2021 au terme desquelles M. [M] [R] demande à la cour d’infirmer le jugement déféré et de :

– Fixer au passif de liquidation de la Société IMPRIMERIE CHARTREZ les créances de M. [M] [R] comme suit :

– 18 180 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif

– 30 526 euros à titre de rappel de salaire,

– 12 120 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé

– 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de formation

– 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale périodique

– Remise du solde de tous comptes, du certificat de travail et de l’attestation Pôle Emploi, sous astreinte de 100 € par jour de retard passé le délai de 15 jours suivant notification du jugement

– 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résiliation anticipée de la mutuelle

– 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Dépens de l’instance

– Déclarer le jugement commun et opposable au CGEA.

– Condamner solidairement le CGEA et Maître [C] [O] es qualité à payer à M. [M] [R] la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

– Condamner tout succombant aux entiers dépens, par application des dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile.

Au soutien de ses prétentions, M. [M] [R] expose que :

– Le licenciement dont il a fait l’objet est dépourvu de cause réelle et sérieuse, en ce que la rupture du contrat de travail a été notifiée avant le jugement de liquidation judiciaire, en ce que le CSE n’a pas été consulté, en ce qu’il n’est pas justifié d’une convocation à entretien préalable et en ce qu’aucune recherche de reclassement n’a été réalisée.

– Le liquidateur n’était pas exonéré de recherches de reclassement, nonobstant la liquidation judiciaire de la société, dès lors que celle-ci appartenait au groupe MTI TILINVEST qui ne faisait à l’époque l’objet d’aucune mesure de liquidation judiciaire tout comme les autres sociétés du groupe dont certaines ont fait l’objet d’une reprise par plan de cession.

– L’employeur a, par ailleurs, manqué, durant la relation de travail, à son obligation de formation ainsi qu’à l’obligation de suivi médical du salarié, ouvrant droit à des dommages et intérêts.

– En outre, la société IMPRIMERIE CHARTREZ a mis fin prématurément au contrat collectif de prévoyance qui avait été souscrit, causant au salarié un préjudice lié à l’absence de couverture pendant l’exécution de son contrat de travail et postérieurement par l’effet de la portabilité.

– Il doit être fait droit aux demandes de requalification salariale et de rappels de salaire, justifiées par les pièces versées aux débats, compte tenu de son emploi à un échelon ne correspondant pas aux minima salariaux de la convention collective concernant les fonctions occupées de technico-commercial.

– L’infraction de travail dissimulé est également caractérisée dans la mesure où il n’a pas été rémunéré au niveau de sa qualification, au vu et au su de l’employeur.

Vu les dernières conclusions notifiées par RPVA le 12 janvier 2022, dans lesquelles la SELAS MJS PARTNERS, représentée par Me [C] [O], en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS IMPRIMERIE CHARTREZ, intimée, demande à la cour de :

– Confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes d’ARRAS le 30.06.2021 dans l’ensemble de ses dispositions,

Y ajoutant,

– Condamner M. [M] [R] à payer à la SELAS MJS PARTNERS, représentée par Maître [C] [O], es qualité de liquidateur judiciaire de la SAS IMPRIMERIE CHARTREZ la somme de 2 000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamner M. [R] aux entiers frais et dépens d’appel,

A titre infiniment subsidiaire,

– constater l’irrecevabilité de la demande indemnitaire au titre de la résiliation anticipée de la mutuelle,

– constater la prescription de la demande de rappel de salaire antérieurement au 27 juin 2017.

A l’appui de ses prétentions, la SELAS MJS PARTNERS soutient que :

– Le licenciement économique de M. [R] ne souffre d’aucune irrégularité, dès lors que la société IMPRIMERIE CHARTREZ a été placée en liquidation judiciaire le 29 mai 2019 et que le salarié a été licencié le 1er juillet suivant.

– Concernant les recherches de reclassement, si l’imprimerie CHARTREZ appartenait au groupe TIL INVEST lequel comprenait 5 imprimeries, le groupe a été placé en redressement judiciaire dès le 21 janvier 2019 puis a été liquidé le 24 juillet 2019, de sorte qu’aucun reclassement n’était envisageable au sein des entreprises du groupe.

– Le licenciement présente donc une cause réelle et sérieuse et M. [R] doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts formée à ce titre, ce d’autant que celle-ci excède les limites du barème prévu à l’article L1235-3 du code du travail.

– Concernant la demande de rappel de salaire, il ne peut être fait droit à ladite demande au-delà des sommes accordées par le conseil de prud’hommes. En outre, la demande de rappel de salaire est partiellement prescrite pour la période antérieure au 26 juin 2017. Par ailleurs, les calculs opérés par le salarié sont erronés et tronqués, ne tenant compte que de la partie fixe et non du variable.

– Aucun travail dissimulé n’est établi et aucun argument ne se trouve développé ni aucune pièce produite.

– Concernant la résiliation de la mutuelle, cette demande est irrecevable pour n’avoir pas été soulevée dans sa requête introductive d’instance devant le CPH et compte tenu de la suppression du principe de l’unicité de l’instance.

– Il en va, de même, des demandes formulées au titre de l’absence de formation et du défaut de visites médicales qui doivent être rejetées.

Vu les dernières conclusions notifiées par RPVA le 7 janvier 2022, en vertu desquelles l’UNEDIC, intimée et appelante incidente, demande, pour sa part, à la cour de :

– CONFIRMER le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes d’ARRAS en ce qu’il a :

– Dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,

– Débouté Monsieur [M] [R] de ses plus amples prétentions,

– Débouté le demandeur de sa demande de condamnation solidaire du CGEA et de Maître [C] [O] à lui payer la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

– INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes d’ARRAS en ce qu’il a :

– Fixé les créances de Monsieur [M] [R] dans la procédure collective de la SAS IMPRIMERIE CHARTREZ aux sommes suivantes qui seront inscrites sur l’état des créances déposé au greffe du Tribunal de Commerce conformément aux dispositions de l’article L. 625-6 du code du commerce :

– 2 688 € bruts au titre de rappel de salaires 2018/2019

– 268,80 € de congés payés

– 200 € au titre de sa demande d’article 700 du Code de procédure civile

– demandé que les documents rectifiés (solde de tout compte, certificat de travail et attestation Pôle emploi) soient transmis au demandeur dans un délai de 20 jours à compter de la notification du présent jugement, sous astreinte de 50 € par jour de retard (tous documents confondus) limitée à 2 mois, le Conseil se réservant le droit de liquider l’astreinte ;

‘ JUGER irrecevable la demande de Monsieur [M] [R] sollicitant des dommages et intérêts au titre de la résiliation de la mutuelle ;

‘ RAPPELER que la société IMPRIMERIE CHARTREZ a été placée en liquidation judiciaire le 29 mai 2019 ;

‘ JUGER que le licenciement de Monsieur [M] [R] repose sur un motif économique ;

‘ JUGER que Monsieur [M] [R] ne démontre pas la réalité de son préjudice ;

‘ JUGER que le maintien des droits à mutuelle implique que le contrat ou l’adhésion liant l’employeur à l’organisme assureur ne soit pas résilié ;

‘ JUGER que Monsieur [M] [R] ne peut solliciter le bénéfice du maintien de ses droits à mutuelle ;

‘ JUGER que Monsieur [M] [R] ne justifie pas du bien fondé de ses demandes ;

‘ JUGER que les demandes de Monsieur [M] [R] sont irrecevables et mal fondées ;

En conséquence :

‘ DEBOUTER Monsieur [M] [R] de l’ensemble de ses demandes, fin et conclusions ;

‘ DIRE ET JUGER que le CGEA n’a pas vocation à garantir les indemnités au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

En tout état de cause :

‘ DECLARER le jugement opposable au Centre de Gestion et d’Etudes AGS (CGEA), en qualité de Mandataire de l’AGS, par application de l’article L 3253-14 du Code du travail, et à l’AGS, dans les limites prévues aux articles L 3253-1 et suivants, du Code du Travail et des plafonds prévus aux articles L 3253-17 et D 3253-5 du Code du Travail ;

‘ JUGER que l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le Mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement ;

‘ CONDAMNER tout autre que l’Association concluante aux entiers frais et dépens.

A l’appui de ses prétentions, l’UNEDIC soutient que :

– La demande de dommages et intérêts pour résiliation anticipée de la mutuelle est irrecevable, n’ayant pas été formulée dans la requête introductive d’instance et compte tenu de la suppression du principe de l’unicité de l’instance en matière prud’homale.

-Le licenciement économique de M. [R] repose sur une cause réelle et sérieuse, en ce que la rupture du contrat de travail est intervenue après le placement en liquidation judiciaire de la société IMPRIMERIE CHARTREZ, et en ce qu’un entretien préalable a bien eu lieu avec la remise d’un contrat de sécurisation professionnelle accepté par le salarié.

– En tout état de cause, l’absence d’entretien préalable ne rend pas le licenciement abusif et n’ouvre pas droit à des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

– Concernant la recherche de reclassement, les sociétés IMPRIMERIE CHARTREZ et TILINVEST ne disposaient pas de la même activité et la seconde a été placée en liquidation judiciaire avant même que le contrat de travail de M. [R] ait pris fin.

– Concernant la demande de rappel de salaire, M. [R] ne démontre pas avoir été rémunéré en deçà des minimas conventionnels et ne justifie pas non plus du quantum de ses demandes.

– La demande de travail dissimulé ne repose sur aucun fondement juridique ni aucun élément de preuve et l’intention frauduleuse n’est pas démontrée.

– Il en va de même concernant l’absence de formation et le défaut de visites médicales périodiques, ce d’autant que l’intéressé ne justifie nullement d’un quelconque préjudice.

– Subsidiairement, concernant la résiliation prématurée de la mutuelle, le maintien des droits d’un salarié dont l’employeur est placé en liquidation judiciaire implique que le contrat ou l’adhésion liant la société à l’organisme assureur ne soit pas résilié.

– Or, M. [R] ne justifie ni de la résiliation prématurée ni du quantum de sa demande, ni du maintien d’une quelconque garantie.

– Enfin, en tout état de cause, la garantie de l’AGS ne couvre ni l’article 700 du code de procédure civile ni les dépens.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 20 avril 2023.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux dernières conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la recevabilité de la demande de dommages et intérêts pour résiliation prématurée de la mutuelle :

Les intimés se prévalent de l’irrecevabilité de la demande de dommages et intérêts pour résiliation prématurée de la mutuelle qui n’a pas été formulée dans les premières écritures de M. [M] [R].

Il résulte de l’article 70 du code de procédure civile que les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

Par ailleurs, concernant la justice prud’homale, l’article 8 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 a conduit à la suppression de l’article R1452-7 du code du travail, lequel disposait que “Les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel. L’absence de tentative de conciliation ne peut être opposée. Même si elles sont formées en cause d’appel, les juridictions statuant en matière prud’homale connaissent les demandes reconventionnelles ou en compensation qui entrent dans leur compétence”.

En l’espèce, la requête introductive d’instance déposée devant la juridiction prud’homale ne comportait aucune demande de dommages et intérêts pour résiliation prématurée de la mutuelle.

En outre, aucun lien suffisant ne permet de rattacher cette nouvelle demande afférente à la mutuelle aux prétentions originelles formulées qui concernaient le licenciement sans cause réelle sérieuse, un rappel de salaire et de congés payés, et diverses demandes d’indemnité et dommages et intérêts en lien avec le travail dissimulé, l’absence de formation et le défaut de visite médicale.

Par conséquent, cette demande de dommages et intérêts pour résiliation prématurée de la mutuelle est irrecevable.

Sur la formation :

Conformément aux dispositions de l’article L6321-1 du code du travail, l’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail et veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations.

Il peut également proposer des formations qui participent au développement des compétences.

Cette obligation relève de l’initiative de l’employeur, sans que les salariés n’aient à émettre une demande de formation au cours de l’exécution de leur contrat de travail.

L’employeur doit être en capacité de démontrer qu’il s’est libéré de son obligation de formation et d’adaptation à l’égard de M. [M] [R].

En l’espèce, la SELAS MJS PARTNERS, en qualité de liquidateur judiciaire de la société IMPRIMERIE CHARTREZ ne justifie d’aucune formation suivie ou proposée à l’appelant au cours de la relation contractuelle.

Cela étant, M. [M] [R] ne justifie d’aucun préjudice causé par cette absence de suivi de formation.

Il ne verse, en effet, aucune pièce à cet égard, ne démontrant ni difficultés particulières liées à l’absence de formation ou d’adaptation ni difficultés pour retrouver un emploi, ni durée de chômage importante.

Force est, dès lors de constater que l’intéressé ne justifie d’aucun préjudice et doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts pour non respect de l’obligation de formation et d’adaptation.

Le jugement entrepris est confirmé à cet égard.

Sur les visites médicales périodiques :

Conformément aux dispositions des articles L4624-1 et suivants et R4624- du code du travail, il appartient à l’employeur d’organiser au bénéfice de chaque travailleur l’ensemble des visites médicales obligatoires.

A défaut, le manquement à cette obligation peut justifier de l’octroi au salarié de dommages et intérêts, dès lors que ce dernier justifie d’un préjudice à cet égard.

En l’espèce, la SELAS MJS PARTNERS, liquidateur judiciaire de l’employeur, ne produit aucune pièce de nature à démontrer la mise en oeuvre des visites médicales périodiques.

Cela étant, là encore, M. [M] [R] ne justifie d’aucun préjudice lié à l’absence de suivi médical au travail, ne démontrant ni les conditions d’exercice de son travail ni de quelconques difficultés de santé.

Le salarié est, par conséquent, débouté de sa demande formée à cet égard et le jugement entrepris est confirmé sur ce point.

Sur les minimas conventionnels et le rappel de salaire et des congés payés y afférents :

– Sur la prescription :

Conformément aux dispositions de l’article L3245-1 du code du travail, «L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat».

Ainsi, en l’espèce, compte tenu de la rupture du contrat de travail en date du 1er juillet 2019, M. [M] [R] est recevable à solliciter un rappel de salaires et de congés payés au titre de la période couvrant les trois années précédant cette rupture soit les sommes dues à compter du 1er juillet 2016.

Par conséquent, les demandes formulées par le salarié qui portent sur la période d’avril 2010 à juin 2016 sont prescrites.

– Sur le rappel de salaire au titre des minimas conventionnels :

En premier lieu, il est relevé que M. [M] [R] ne produit aucun bulletin de salaire au titre de la période de juillet 2016 à décembre 2017, de sorte qu’il ne fournit aucun élément concernant le montant du salaire mensuel perçu au titre de cette période.

Il ne démontre, dès lors, nullement n’avoir pas été rémunéré au niveau des minimas conventionnels au cours de cette période.

A l’inverse, concernant la période de janvier 2018 à son licenciement, l’intéressé produit les bulletins de salaire de cette période et démontre que :

– l’accord du 15 janvier 2018 relatif à la politique salariale de l’année 2018 fixait un salaire minima pour la classification IIIA dont relevait M. [R] à hauteur de 1988 euros alors que l’intéressé a perçu un salaire brut mensuel de 1800 euros,

– l’accord du 22 février 2019 relatif à la politique salariale de l’année 2019 fixait un salaire minima pour la classification IIIA dont relevait M. [R] à hauteur de 2020 euros alors que l’intéressé n’a perçu comme salaire brut mensuel que la somme de 1800 euros au cours des trois premiers mois puis 2000 euros.

L’appelant démontre, ainsi, n’avoir pas été rémunéré à hauteur des minimas conventionnels lesquels ne prennent pas en compte les primes ou commissions.

La cour fixe, par suite, à 2688 euros le montant du rappel de salaire dû au titre des années 2018 et 2019, outre 268,80 euros au titre des congés payés y afférents.

Le jugement entrepris est confirmé sur ce point.

Sur le travail dissimulé :

Conformément aux dispositions de l’article L. 8221-5 2°du code du travail, ‘Est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d’un bulletin de paie ou d’un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales».

En l’espèce, il n’est pas démontré que l’employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur les bulletins de salaire de M. [R] un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué.

Le jugement déféré qui a débouté M. [M] [R] de sa demande indemnitaire au titre du travail dissimulé est donc confirmé.

Sur le licenciement et l’obligation de reclassement :

M. [M] [R] soutient que le licenciement dont il a fait l’objet est dépourvu de cause réelle et sérieuse, en ce que la rupture du contrat de travail a été notifiée avant le jugement de liquidation judiciaire, en ce que le CSE n’a pas été consulté, en ce qu’il n’est pas justifié d’une convocation à entretien préalable et en ce qu’aucune recherche de reclassement n’a été réalisée.

– Sur la date du licenciement et la liquidation judiciaire :

Contrairement aux allégations de l’appelant, il résulte des pièces produites que son licenciement est intervenu le 1er juillet 2019 soit postérieurement à la liquidation judiciaire de la société IMPRIMERIE CHARTREZ prononcée le 29 mai 2019.

Ce grief est, par conséquent, écarté.

– Sur l’irrégularité de la procédure de licenciement :

Concernant l’irrégularité de la procédure de licenciement économique du fait de l’absence de convocation à entretien préalable, il est constant que l’absence d’entretien préalable n’a pas pour effet de priver la cause du licenciement de son caractère réel et sérieux mais ouvre droit au paiement au salarié de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier.

Or, en l’espèce, M. [M] [R] ne formule aucune demande à ce titre.

De la même façon, concernant le défaut de consultation du CSE, l’article L1235-12 du code du travail prévoit qu’en cas de non respect par l’employeur des procédures de consultation des représentants du personnel, le juge accorde au salarié compris dans un licenciement collectif pour motif économique une indemnité à la charge de l’employeur calculée en fonction du préjudice subi.

Or, là encore, aucune demande de dommages et intérêts ne se trouve formulée à ce titre, le salarié se contentant de solliciter des dommages et intérêts pour licenciement abusif c’est à dire sans cause réelle et sérieuse.

Ce moyen ne saurait, dès lors, prospérer sur ce point.

– Sur les recherches de reclassement :

Même s’il est justifié par une cause économique avérée, le licenciement d’un salarié ne peut être légitimement prononcé que si l’employeur a préalablement satisfait à son obligation générale de reclassement.

Ainsi, conformément aux dispositions de l’article L1233-4 du code du travail, «Le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l’entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l’entreprise fait partie et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l’application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L233-1, aux I et II de l’article L233.3 et à l’article L233-16 du code de commerce.

Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d’une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure. L’employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l’ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret. Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises».

L’obligation de reclassement préalable concerne tout salarié menacé d’être licencié économiquement et doit être mise en oeuvre, de façon loyale et sérieuse.

L’obligation de reclassement étant individuelle à chaque salarié, l’employeur est tenu de rechercher, pour chacun des salariés dont le licenciement est envisagé, en considération de sa situation particulière, avant la notification du licenciement ou l’adhésion au CSP, toutes les possibilités de reclassement envisageables au sein de l’entreprise ou du périmètre de reclassement, et il lui appartient de justifier, par des éléments objectifs, des recherches qu’il a effectuées en ce sens et de l’impossibilité dans laquelle il s’est trouvé de procéder au reclassement du salarié dans un emploi équivalent, de même catégorie, voire de catégorie inférieure.

En l’espèce et concernant le reclassement interne, la recherche d’un tel reclassement ne s’appliquait pas compte tenu de la cessation totale d’activité de la société IMPRIMERIE CHARTREZ dont la liquidation judiciaire avait été prononcée.

Concernant le reclassement externe, il n’est pas contesté que la société IMPRIMERIE CHARTREZ appartenait au groupe MTI TILINVEST, lequel comportait 5 sociétés d’imprimerie implantées dans les Hauts de France et en Normandie.

Et nonobstant l’activité de fonds de placement et d’entités financières mentionnée au registre du commerce pour le groupe TILINVEST, il s’avère que l’ensemble des sociétés détenues par ledit groupe en Normandie et dans les Hauts de France exerçaient une activité d’imprimerie sur un lieu d’exploitation proche voire très proche de la société IMPRIMERIE CHARTREZ, de sorte que le reclassement de M. [M] [R] pouvait être envisagé sur d’éventuels emplois disponibles au sein de ces entreprises du groupe dont l’organisation, les activités mais également le lieu d’exploitation permettaient la permutation de tout ou partie du personnel.

Or, la SELAS MJS PARTNERS ne produit aucune pièce ni aucun courrier de nature à justifier d’une quelconque recherche de reclassement opérée au sein du groupe. Elle ne justifie pas non plus qu’aucun poste ne se trouvait disponible au cours de la période de recherche de reclassement.

Et si le mandataire liquidateur disposait d’un délai restreint pour procéder au licenciement économique de l’ensemble des salariés de la société IMPRIMERIE CHARTREZ, il n’en reste pas moins qu’il lui incombait, toutefois, de rechercher des possibilités de reclassement, parmi les autres sociétés du groupe dont les activités étaient identiques et pour lesquelles il n’est pas démontré qu’elles se trouvaient également, pendant la période de recherche de reclassement, en redressement ou en liquidation judiciaire.

A cet égard, il est relevé qu’aucune pièce ne se trouve produite justifiant du placement en redressement ou en liquidation judiciaire des autres sociétés détenues par le groupe ou encore de leur rachat total ou partiel, cette preuve ne pouvant résulter des deux articles de presse produits qui ne mentionnent, par ailleurs, aucune date précise.

En outre, il est constant que la société-mère MTI TILINVEST n’a été placée en liquidation judiciaire qu’à compter du 24 juillet 2019 soit plus de deux mois après la société IMPRIMERIE CHARTREZ, de sorte qu’au jour de la mise en oeuvre de la procédure de licenciement de M. [M] [R], l’activité du groupe perdurait et pouvait laisser envisager l’existence de postes disponibles pour un reclassement.

Par conséquent, au regard de l’ensemble de ces éléments, l’employeur n’a pas respecté son obligation de recherche de reclassement, de sorte que le licenciement de M. [M] [R] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris est infirmé sur ce point.

Sur les conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuse :

En application de l’article L1235-3 du code du travail dans sa version applicable à l’espèce, si un licenciement intervient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse et qu’il n’y a pas réintégration du salarié dans l’entreprise, il est octroyé à celui-ci, à la charge de l’employeur, une indemnité dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés, dans le cadre des tableaux repris auxdits articles.

Ainsi, compte tenu de l’effectif supérieur à 11 salariés de la société IMPRIMERIE CHARTREZ, de l’ancienneté de M. [M] [R] (pour être entré au service de l’entreprise à compter du 19 avril 2010), de son âge (pour être né le 22 novembre 1970), ainsi que du montant de son salaire brut mensuel et de l’absence de justificatifs postérieurs à son licenciement, le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est fixé à 13 500 euros.

Le jugement entrepris est infirmé à cet égard.

Sur la demande de remise sous astreinte des documents de fin de contrat :

Il convient d’ordonner à la SELAS MJS PARTNERS de délivrer à M. [M] [R] les documents de fin de contrat conformes à la présente décision, sans qu’il soit nécessaire de prononcer une astreinte.

Sur la garantie de l’AGS :

Il résulte des dispositions de l’article L 3253-8 du Code du travail que lorsque l’employeur fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire, l’assurance de garantie des salaires couvre les sommes dues au salarié à la date du jugement d’ouverture de ladite procédure, de même que les créances résultant de la rupture du contrat de travail, à la condition que celle-ci intervienne dans les 15 jours suivant ce jugement.

En l’espèce, il est constant que les sommes dues à M. [M] [R] (à l’exception de celles afférentes à l’indemnité procédurale et aux dépens) sont nées antérieurement à la procédure collective et résultent de l’inexécution par la société de ses obligations contractuelles, il conviendra de ce fait d’en fixer le montant au passif de la procédure collective et de constater qu’elles entrent dans le champs de la garantie de l’AGS.

Le présent arrêt sera déclaré opposable à l’Unédic agissant sur délégation de l’AGS-CGEA d'[Localité 4] dans les limites prévues aux articles L 3253-1 et suivants du Code du travail et des plafonds prévus aux articles L 3253-17 et D 3253-5 du même code.

Sur les autres demandes :

Les dispositions du jugement entrepris afférentes aux dépens et aux frais irrépétibles exposés sont infirmées.

Le liquidateur est condamné aux dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés selon les règles applicables en matière de liquidation judiciaire, et la somme de 2 000 euros est fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société IMPRIMERIE CHARTREZ en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La COUR,

DIT que la demande de dommages et intérêts pour résiliation prématurée de la mutuelle est irrecevable ;

CONFIRME le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Arras le 30 juin 2021, sauf en ce qu’il a dit que le licenciement de M. [M] [R] repose sur une cause réelle et sérieuse, en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif, en ce qu’il a laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens et en ce qu’il a fixé à 200 euros le montant de l’indemnité due au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,

DIT que la demande de rappel de salaires et des congés payés y afférents pour la période d’avril 2010 à juin 2016 est prescrite ;

DIT que le licenciement économique de M. [M] [R] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

FIXE les créances de M. [M] [R] au passif de la liquidation judiciaire de la société IMPRIMERIE CHARTREZ, représentée par la SELAS MJS PARTNERS, de la façon suivante :

– 13 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 2 000 euros à titre d’indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

ORDONNE à la SELAS MJS PARTNERS de remettre à M. [M] [R] les documents de fin de contrat établis conformément au dispositif du présent arrêt ;

REJETTE la demande d’astreinte ;

DIT que l’arrêt à intervenir ne sera opposable à l’UNEDIC Délégation AGS d'[Localité 4] que dans la limite de sa garantie légale telle que fixée par les articles L3253-6 et suivants du code du travail lesquels excluent la créance d’indemnité procédurale et les dépens, et des plafonds prévus à l’article D3253-5 du code du travail, et ce toutes créances du salarié confondues ;

DIT que l’obligation du CGEA AGS d'[Localité 4] de faire l’avance de la somme à laquelle sera évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement, conformément aux dispositions de l’article L3253-20 du code du travail ;

CONDAMNE la SELAS MJS PARTNERS, en qualité de liquidateur de la société IMPRIMERIE CHARTREZ, aux dépens de première instance et d’appel, qui seront recouvrés selon les règles applicables en matière de liquidation judiciaire ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires.

LE GREFFIER

Valérie DOIZE

LE PRESIDENT

Pierre NOUBEL

 


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