Tentative de conciliation : 3 novembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/05972

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Tentative de conciliation : 3 novembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/05972
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT AU FOND

DU 03 NOVEMBRE 2023

N°2023/ 874

Rôle N° RG 22/05972 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJI6F

CPAM DES ALPES DE HAUTE PROVENCE

S.A.R.L. [4]

C/

[Y] [J]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

– Me Stéphane CECCALDI

– Me Denis FERRE

– Me Arnault CHAPUIS

N° RG 22/05972 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJI6F

Arrêt prononcé sur saisine de la Cour suite à l’arrêt rendu par la Cour de Cassation le 13 Novembre 2019.

DEMANDEUR SUR RENVOI DE CASSATION

CPAM DES ALPES DE HAUTE PROVENCE, demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Stéphane CECCALDI, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A.R.L. [4], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Denis FERRE de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Vanessa DIDIER, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

DEFENDEUR SUR RENVOI DE CASSATION

Monsieur [Y] [J], demeurant [Adresse 2]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/006076 du 09/09/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE),

représenté par Me Arnault CHAPUIS de la SELARL SELARL D’AVOCATS ARNAULT CHAPUIS, avocat au barreau d’ALPES DE HAUTE-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 Septembre 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre, chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre,

Mme Isabelle PERRIN, Conseiller

Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Isabelle LAURAIN.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Novembre 2023.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Novembre 2023

Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [Y] [J], embauché le 1er octobre 2010, en qualité de serveur dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel (27 heures de travail effectif hebdomadaire), par la société [4], a saisi le 12 novembre 2015 un tribunal des affaires de sécurité sociale aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, dans sa pathologie des membres inférieurs ayant donné lieu à plusieurs interventions chirurgicales en 2014 et, lors de la dernière, à une imputation de la jambe droite.

Par jugement en date du 29 juin 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale des Alpes de Haute-Provence, a:

* dit que la société [4] a commis une faute inexcusable à l’encontre de son salarié M. [Y] [J],

* ordonné, avant dire droit sur l’indemnisation de ses préjudices, une expertise,

* condamné la société [4] à payer à M. [Y] [J] la somme de 6 000 euros à titre de provision,

* débouté les parties du surplus de leurs demandes.

La société [4] a relevé régulièrement appel le 13/08/2018 dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées. Cette procédure a été enregistrés sous la référence RG 18/08989.

La caisse primaire d’assurance maladie des Alpes de Haute-Provence a également relevé appel le 16/08/2018 dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées. Cette procédure a été enregistrée sous la référence RG 18/13893.

Par ordonnance en date du 18 janvier 2019, l’instance RG 18/13893 a été jointe à celle portant le numéro RG 18/08989.

Par arrêt en date du 13 novembre 2019, la cour d’appel d’Aix-en Provence a:

* infirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions,

* débouté M. [Y] [J] de toutes ses demandes,

* dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamné M. [Y] [J] aux dépens.

Par arrêt en date du 7 avril 2022 (pourvoi n°20-21.906) la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions l’arrêt précité, remis l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant celui-ci et les a renvoyées devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence autrement composée.

Le motif de cassation est le suivant:

*il résulte de l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale que la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, qui est indépendante de la prise en charge au titre de la législation professionnelle, n’implique pas que l’accident ou la maladie ait été préalablement déclaré à la caisse par la victime, la juridiction de sécurité sociale étant en mesure, après débat contradictoire, de rechercher si l’accident ou la maladie présente un caractère professionnel, et si l’assuré établit avoir été victime d’une faute inexcusable de l’employeur,

* la cour a violé le texte susvisé en retenant qu’à défaut d’avoir sollicité auprès de la caisse la reconnaissance d’une maladie professionnelle, sinon d’un accident du travail, afin que cette demande soit instruite conformément aux règles édictées par le code de la sécurité sociale, il appartenait à l’assuré de saisir une juridiction de droit commun d’une action en responsabilité civile contractuelle de son employeur.

La présente cour, prise en sa qualité de cour de renvoi a été saisie:

* par la société [4], le 22 avril 2022, et cette procédure a été enregistrée sous la référence RG 22/05972.

* par la société [4], à nouveau, le 17 mai 2022, et cette procédure a été enregistrée sous la référence RG 22/07147

Par ordonnance en date du 8 novembre 2022, l’instance RG 22/07147 a été jointe à celle portant le numéro RG 22/05972.

En l’état de ses conclusions réceptionnées par le greffe le 8 novembre 2022, reprises oralement à l’audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé plus ample de ses moyens et arguments, la société [4] sollicite la réformation du jugement entrepris et demande à la cour statuant à nouveau de :

* déclarer l’action en recherche de la faute inexcusable de l’employeur irrecevable,

* condamner M. [Y] [J] au paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

A titre infiniment subsidiaire, elle lui demande :

* dire que la preuve n’est pas rapportée de sa faute inexcusable,

* condamner M. [Y] [J] au paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

A titre plus subsidiaire encore, elle lui demande de réformer la décision en ce qu’elle a ordonné une expertise de droit commun et de rejeter toute demande de provision.

En l’état de ses conclusions remises par voie électronique le 12 décembre 2022, reprises oralement à l’audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé plus ample de ses moyens et arguments, la caisse primaire centrale d’assurance maladie des Alpes-de-Haute-Provence sollicite l’infirmation du jugement entrepris.

Elle demande à la cour de:

* débouter M. [Y] [J] de toutes ses demandes,

* condamner la partie succombante aux dépens et à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

En l’état de ses conclusions remises par voie électronique le 13 décembre 2022, reprises oralement à l’audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé plus ample de ses moyens et arguments, M. [Y] [J] sollicite la confirmation du jugement entrepris et demande en outre à la cour de:

* ordonner la majoration de la rente,

* condamner la caisse primaire d’assurance maladie des Alpes-de-Haute-Provence et la société [4] dénommée désormais la société [5] à lui payer la somme de 6 000 euros à titre de provision.

A défaut d’ordonner une expertise, il lui demande de condamner solidairement la caisse primaire d’assurance maladie des Alpes-de-Haute-Provence et la société [4] dénommée désormais la société [5] à lui payer la somme de 300 000 euros en réparation des préjudices subis.

Il sollicite enfin la condamnation solidaire de la caisse primaire d’assurance maladie des Alpes-de-Haute-Provence et la société [4] dénommée désormais la société [5] :

* à verser à Me Arnault Chapuis la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 2°du code de procédure civile et de constater que ce dernier entend renoncer au bénéfice de l’aide juridictionnelle,

* aux entiers dépens.

MOTIFS

1- sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable :

Exposé des moyens des parties:

L’employeur soutient que l’action aux fins de reconnaissance de sa faute inexcusable est prescrite le certificat du Dr [W] en date du 26 janvier 2015 indiquant que la pathologie a été diagnostiquée dés le 2 avril 2013 alors que la demande engageant la procédure de conciliation aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable, adressée à la caisse primaire d’assurance maladie, est en date du 3 septembre 2015.

Arguant que cette demande est sans effet interruptif de la prescription il en tire la conclusion que celle-ci est acquise et que M. [J] est irrecevable en son action.

Il relève que le salarié n’a jamais fait état de la survenance d’un quelconque fait accidentel et soudain sur son lieu de travail, ce qui ne permet pas de retenir la présomption d’imputabilité, alors qu’il ne rapporte pas la preuve de l’existence d’un tel événement et conteste par ailleurs que la thrombose présente un lien avec l’emploi occupé.

La caisse ne conclut pas sur la prescription et par suite sur la fin de non-recevoir mais uniquement sur l’absence d’accident du travail comme de maladie professionnelle, relevant que M.[J] n’a jamais prétendu ni établi que sa thrombose aortique avait un caractère professionnel.

Elle soutient qu’il appartient à la victime ou à ses ayants-droit de rapporter la preuve de la matérialité de l’accident et qu’une affection pathologique ne peut être rattachée à un accident du travail. Elle ajoute que si une maladie est le résultat d’une série d’événements à évolution lente, elle ne peut relever de la qualification d’accident du travail que si elle trouve sa source dans un événement ou une série d’événements précis survenus à des dates certaines, et souligne que les arrêts de travail prescrits depuis le 17 mars 2014 l’ont tous été au titre du régime maladie.

Elle relève enfin que M. [J] n’a jamais prétendu que la thrombose de l’artère poplitée de deux membres inférieurs, dont il est affecté, relevait de la législation sur les maladies professionnelles, soulignant qu’une maladie professionnelle est la conséquence de l’exposition du travailleur à un risque physique, chimique, biologique ou résulte des conditions dans lesquelles il exerce son activité professionnelle alors que sa pathologie résulte d’une évolution lente liée au dépôt d’athérome dans les artères.

Reprenant à son compte la motivation du jugement entrepris ayant retenu que toute lésion survenue au temps et lieu du travail constitue un accident du travail présumé imputable au travail, et soutenant qu’il incombait à l’employeur de déclarer la thrombose de l’artère poplitée mentionnée sur le protocole opératoire du 21 mai 2014 auprès de la caisse primaire d’assurance maladie, M. [J] soutient qu’il ne peut lui reprocher cette absence de déclaration, pour en tirer la conséquence que cette pathologie bénéficie de la présomption d’imputabilité au travail, et que la caisse aurait dû retenir lors de sa saisine que le litige portait également sur la reconnaissance de la maladie professionnelle ou de l’accident du travail et ne peut lui opposer la prescription de son action.

Réponse de la cour:

Il résulte des dispositions de l’article 122 du code de procédure civile que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

L’article L.431-2 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2022, dispose que les droits de la victime ou de ses ayants droit aux prestations et indemnités prévues par le présent livre se prescrivent par deux ans à dater du jour de l’accident ou de la cessation du paiement de l’indemnité journalière.

Le point de départ de la prescription biennale de l’action du salarié en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur dans sa maladie professionnelle est la date de reconnaissance du caractère professionnel de cette maladie ou celle de la cessation de paiement des indemnités journalières versées à ce titre.

Il résulte à la fois des conclusions de la caisse et de celles de M. [J] qu’il a été placé uniquement en arrêt maladie à compter du 17 mars 2014, cette mention étant du reste celle mentionné sur les bulletins de paye qu’il verse aux débats (sa pièce 2).

M. [J] allègue une faute de son employeur dans son obligation de sécurité, résultant d’une absence de visite médicale préalable à l’embauche depuis la date de celle-ci, soit le 1er octobre 2010, comme de l’absence de visite médicale périodique, alors qu’il a été placé en arrêt maladie à compter du 17 mars 2014, puis amputé de la jambe droite le 20 août 2014.

Pour autant, l’absence de visite médicale d’embauche comme de visite médicale périodique, si elles peuvent constituer un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité sont insuffisante à caractériser la survenance d’un accident du travail comme à établir le caractère professionnel d’une maladie.

Or le point de départ de la prescription biennale de l’action du salarié en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur dans son accident du travail est soit la date de survenance de celui-ci soit de la fin du versement des indemnités journalières.

Le point de départ de la prescription biennale de l’action du salarié en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur dans sa maladie professionnelle est la date de reconnaissance du caractère professionnel de cette maladie ou celle de la cessation de paiement des indemnités journalières versées à ce titre.

M. [J] ne date pas un quelconque accident du travail dont il aurait été victime et il ne résulte pas certificat du Dr [W] en date du 06 janvier 2015 que M. [J] ait été informé en 2013 d’un lien possible entre sa pathologie et le travail.

Il justifie cependant par ses attestations de paiement des indemnités journalières avoir perçu du 20 mars 2014 au 31 décembre 2014 et du 1er janvier 2015 au 29 mai 2015 des indemnités journalières au titre du régime maladie, et que la caisse lui a attribué à compter du 1er juin 2015 une pension d’invalidité à titre temporaire de catégorie2.

Il ne peut donc être considéré qu’il était forclos à solliciter le 3 septembre 2015 une tentative de conciliation ni le 12 novembre 2015 en son action aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

La fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale doit donc être rejetée.

2- sur la faute inexcusable:

Dans le cadre de l’obligation de sécurité pesant sur l’employeur destinée, notamment, à prévenir les risques pour la santé et la sécurité des salariés, les dispositions des articles L.4121-1 et suivants du code du travail lui font obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

L’employeur a, en particulier, l’obligation d’éviter les risques et d’évaluer ceux qui ne peuvent pas l’être, de planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions du travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants.

Le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable au sens de l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Il suffit que la faute inexcusable de l’employeur soit une cause nécessaire de l’accident du travail pour engager sa responsabilité.

Ainsi, la faute inexcusable implique un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité présentant un lien avec un fait accidentel ou une maladie ayant un caractère professionnel.

Si la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, qui est indépendante de la prise en charge au titre de la législation professionnelle, n’implique pas que l’accident ou la maladie ait été préalablement déclaré à la caisse, pour autant il incombe en pareille hypothèse qu’il soit démontré, que ledit accident ou ladite maladie présente un caractère professionnel.

S’il est exact que l’employeur a l’obligation de procéder à une déclaration d’accident du travail lorsqu’il a connaissance de la survenance d’un fait accidentel à l’un de ses salariés, celui-ci peut, ainsi que le souligne avec pertinence la caisse, en application des dispositions de l’article L.441-2 du code de la sécurité sociale, procéder à une telle déclaration à la caisse.

Les premiers juges ont uniquement retenu que la lésion mentionnée sur le protocole opératoire du 21 mai 2014 (thrombose complète de l’artère poplitée) est apparue alors que M. [J] était employé de la société, et après avoir rappelé que toute lésion survenue au temps et lieu du travail constitue une accident présumé imputable au travail ont jugé que l’absence de visite d’embauche caractérise la faute inexcusable de l’employeur.

Ce faisant les premiers juges ont omis de se prononcer sur le caractère professionnel de l’accident ou de la maladie, préalable nécessaire à l’examen de la faute inexcusable.

Il résulte de l’article L.411-1 du code de la sécurité sociale qu’est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise.

Ainsi, constitue un accident du travail, un événement ou une série d’événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l’occasion du travail dont il est résulté une lésion corporelle.

Il incombe au salarié d’établir les circonstances exactes de l’accident et son caractère professionnel.

Force est de constater que M. [J] ne décrit aucun fait soudain survenu au temps et lieu du travail permettant de retenir une présomption d’imputabilité au travail de la lésion mentionnée sur le protocole opératoire du 21 mai 2014.

Il ne décrit pas davantage une série d’événements précis, survenus à des dates certaines, et ne soumet à l’appréciation de la cour aucun élément de nature à établir qu’il a pu être victime d’un accident du travail, la seule circonstance que la lésion ait été constatée alors qu’il était toujours dans les liens du travail avec son employeur, mais alors que son contrat de travail était suspendu, depuis le 17 mars 2014, en raison de l’arrêt de travail prescrit au titre du régime maladie, est inopérante établir un lien entre son activité professionnelle et sa pathologie.

Dans son certificat en date du 06 janvier 2015, le Dr [W] qui y atteste suivre son état de santé depuis le 02 avril 2013, écrit qu’il a été découvert à M. [J], sans précision de date ‘une pathologie des membres inférieurs très évoluée, nécessitant une prise en charge rapide,’ qu’il a été opéré en mai 2014 et que son état ‘s’est aggravé progressivement nécessitant une reprise chirurgicale et une amputation de sa jambe gauche du fait de l’évolution de ses lésions’.

Le protocole opératoire pour intervention au 21 mai 2014, mentionne ‘patient porteur d’une thrombose complète de l’artère poplitée avec une fémorale superficielle’.

Ces certificats médicaux ne corroborent donc pas l’hypothèse d’un accident du travail. Ils mettent au contraire en évidence une pathologie diagnostiquée en 2013 qui a continué à évoluer négativement, ce qui est incompatible avec la notion d’accident du travail.

De plus, le certificat du Dr [U] en date du 29 janvier 2015, mentionne que M. [J] ‘était porteur d’une thrombose des deux artères fémorales avec des lésions des artères de jambes dont l’évolution et le point de départ peuvent remonter à plusieurs années’.

Ces éléments médicaux conduisent la cour à retenir que la lésion dont il est fait état, est manifestement la conséquence d’une évolution lente de l’état de santé M. [J] exclusive de la qualification d’un accident du travail, et qui est une maladie.

Il résulte des dispositions de l’article L.461-1 du code de la sécurité sociale qu’est présumée d’origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d’exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu’elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d’origine professionnelle lorsqu’il est établi qu’elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Peut être également reconnue d’origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu’il est établi qu’elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu’elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d’un taux évalué dans les conditions mentionnées à l’article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.

L’article L.461-5 du code de la sécurité sociale dan sa rédaction applicable dispose que toute maladie professionnelle dont la réparation est demandée en vertu du présent livre doit être, par les soins de la victime, déclarée à la caisse primaire dans un délai déterminé, même si elle a déjà été portée à la connaissance de la caisse en application de l’article L. 321-2. (…)

Le praticien établit en triple exemplaire et remet à la victime un certificat indiquant la nature de la maladie, notamment les manifestations mentionnées aux tableaux et constatées ainsi que les suites probables. Deux exemplaires du certificat doivent compléter la déclaration mentionnée au premier alinéa dont la forme a été déterminée par arrêté ministériel.(…)

Sans préjudice des dispositions du premier alinéa de l’article L. 461-1, le délai de prescription prévu à l’article L. 431-2 court à compter de la cessation du travail.

M. [J] n’a jamais déclaré de maladie professionnelle et ne précise pas davantage de quel tableau de maladie professionnelle devrait relever sa pathologie.

Il n’est pas davantage étabi que lors de la prise en charge de sa pathologie, l’un des médecins ait estimé qu’elle pouvait présenter un lien avec son activité professionnelle.

Il s’ensuit que faute pour M. [J] de rapporter la preuve qu’il a été victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, il ne peut utilement agir en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

Par infirmation du jugement entrepris, il doit être débouté de l’ensemble de ses prétentions et condamné aux dépens, ce qui fait obstacle à ce qu’il puisse utilement soliciteor le bénéfice des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Compte tenu de la disparité de situation, il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de la caisse primaire d’assurance maladie Alpes-de-Haute-Provence comme de la société [4] les frais exposés pour leur défense.

PAR CES MOTIFS,

– Rejette la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable,

– Infirme le jugement entrepris en ses dispositions soumises à la cour,

Statuant à nouveau des chefs infirmés y ajoutant,

– Déboute M. [Y] [J] de l’intégralité de ses prétentions,

– Dit n’y avoir lieu à application au bénéfice de la société [4] et de la caisse primaire d’assurance maladie Alpes-de-Haute-Provence des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamne M. [Y] [J] aux dépens, lesquels seront recouvrés conformément à la réglementation en vigueur en matière d’aide juridictionnelle.

Le Greffier Le Président

N° RG 22/05972 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJI6F

 


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