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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 2
ARRET DU 28 JUIN 2023
(n° , 23 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/06610 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDOLV
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Mars 2021 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS – RG n° 17/15796
APPELANTE
Société EUROFINS ANALYSES POUR LE BATIMENT ILE DE FRANCE
SAS immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 529 293 912
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Aude GONTHIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0634
Ayant pour avocat plaidant : Me David PINET de l’ASSOCIATION LEBRAY & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : R189
INTIMES
Monsieur [V] [M]
né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 8] (13)
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représenté par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034
ayant pour avocat plaidant : Me Giany ABBE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0560
Société TERREIS
SA immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 431 413 673
[Adresse 7]
[Localité 5]
Représentée par Me Valérie FIEHL, avocat au barreau de PARIS, toque : E1294
Société IMODAM
SAS immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 408 825 636
[Adresse 7]
[Localité 5]
Représentée par Me Valérie FIEHL, avocat au barreau de PARIS, toque : E1294
Société PARIS PRIME OFFICE 1
SAS immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 849 866 181
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Valérie FIEHL, avocat au barreau de PARIS, toque : E1294
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Nathalie BRET, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre
Mme Muriel PAGE, Conseillère
Mme Nathalie BRET, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Dominique CARMENT
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre, et par Mme Dominique CARMENT, Greffière présente lors du prononcé.
* * * * * * * * * * *
FAITS & PRÉTENTIONS
M. [V] [M] est propriétaire d’un appartement dans l’immeuble d’habitation situé [Adresse 3] à [Localité 10].
L’immeuble voisin situé [Adresse 2] était initialement la propriété de la société anonyme Terreïs et, depuis le 28 mai 2019, de la société par actions simplifiée [Localité 9] Prime Office 1.
La société Terreïs puis la société [Localité 9] Prime Office 1 ont confié un mandat de gérance à la société Imodam Property.
Cet immeuble est à usage d’activité et a été occupé par divers professionnels notamment la société par actions simplifiée Eurofins Analyses pour le bâtiment Île-de-France (ci-après: Eurofins Analyses), la société par actions simplifiée Un Jour Ailleurs (UJA) et la société anonyme Société Générale. Un restaurant inter-entreprises (ou RIE) a également été exploité dans l’immeuble jusqu’au 30 juin 2018.
Par courriel du 13 mars 2013, un membre du conseil syndical de l’immeuble situé [Adresse 3] a signalé à la société Imodam Property que les résidents de l’immeuble du [Adresse 3], qui ont leur appartement à proximité des ventilations installées à l’arrière de l’immeuble du [Adresse 2], se plaignaient des nuisances sonores occasionnées par ces ventilations.
À partir de 2014, M. [V] [M] s’est plaint de nuisances sonores provenant de l’immeuble du [Adresse 2], en raison du bruit occasionné par le fonctionnement de plusieurs installations de climatisation, de chauffage et d’extraction d’air utilisées par les locataires professionnels, faisant valoir que ces nuisances étaient principalement ressenties dans sa chambre à coucher et qu’elles se traduisaient par un bruit permanent (24 heures sur 24), particulièrement gênant la nuit.
Entre le mois d’octobre 2015 et le mois de juillet 2019, M. [M] a saisi, à plusieurs reprises, le bureau des actions contre les nuisances sonores de la préfecture de police de [Localité 9], par voie de plaintes. Ce service a constaté l’existence de nuisances sonores susceptibles de constituer des infractions pénales ; l’un de ses rapports daté du 5 novembre 2015 a mis en évidence l’implication de deux climatiseurs réversibles utilisés par la société Un Jour Ailleurs, un autre daté du 31 janvier 2017 a mis en cause les installations de la société Eurofins Analyses et plus précisément un extracteur de sorbonne installé sur toute la hauteur du bâtiment, ainsi qu’un chauffage et une climatisation situés dans la cour de l’immeuble, à côté de l’appartement de M. [M].
Diverses mises en demeure ont été adressées par M. [M] à la société Imodam Property en vue de faire cesser définitivement les troubles, notamment le 23 février 2017.
Courant juillet 2017, M. [M] a informé le gestionnaire de l’immeuble et ses locataires de la persistance de ces nuisances, et ce, malgré le fait que les sociétés locataires soutenaient avoir remédié à ces désordres.
Les tentatives de règlement amiable de ce litige se sont avérées vaines, M. [M] faisant valoir la persistance des nuisances et, en outre, indiquant que la nouvelle locataire de la société [Localité 9] Prime Office 1, la société Allan, procédait à l’utilisation bruyante d’une terrasse extérieure, de jour comme de nuit, ce qui a conduit M. [M] à déposer une nouvelle plainte auprès de la direction de la prévention de la sécurité et de la protection de la ville de Paris, le 26 juin 2020.
M. [V] [M] a assigné devant le tribunal de grande instance de Paris :
– par acte d’huissier délivré le 4 avril 2017, la société Imodam Property, en responsabilité pour troubles anormaux du voisinage,
– par acte du 27 septembre 2017, la société Terreïs.
La société Terreïs a assigné en garantie, par acte d’huissier du 26 janvier 2018 :
– la société Eurofins Analyses,
– la société Un Jour Ailleurs,
– la Société Générale.
Les trois affaires ont été jointes.
La société [Localité 9] Prime Office 1 est intervenue volontairement à la procédure.
L’ordonnance de clôture, initialement rendue le 23 octobre 2019, a été révoquée le 9 décembre 2020 pour mise en cause du liquidateur judiciaire de la société Un Jour Ailleurs, ou pour disjonction d’instance concernant les demandes formées par la société Terreïs à l’encontre de cette société.
Par jugement contradictoire du 16 mars 2021, le tribunal judiciaire de Paris a :
– constaté la clôture de l’instruction au 6 janvier 2021, préalablement à l’ouverture des débats,
– reçu M. [V] [M] en son action,
– reçu la société [Localité 9] Prime Office 1 en son intervention volontaire,
– ordonné, au vu des jugements d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire de la société Un Jour Ailleurs (UJA) du 29 mai 2020, puis d’une procédure de liquidation judiciaire du 14 août 2020, et de l’absence d’intervention volontaire ou forcée du liquidateur judiciaire, la disjonction de l’instance enrôlée sous le n°17-15796 des demandes opposant la société Un Jour Ailleurs (UJA) à la société Terreïs, à la société [Localité 9] Prime Office 1 et à toutes autres parties,
– dit que l’affaire portant sur ces demandes fera l’objet d’un nouveau numéro de rôle,
– jugé, en conséquence, irrecevables toutes demandes formées contre ou par la société Un Jour Ailleurs dans la présente instance numérotée 17/15796,
– jugé la société Eurofins Analyses pour le bâtiment Ile-de-France, la société Imodam Property, la société Terreïs et la société [Localité 9] Prime Office 1 responsables in solidum des préjudices subis par M. [V] [M] pour troubles anormaux du voisinage,
– condamné in solidum la société Imodam Property, la société Terreïs et la société [Localité 9] Prime Office 1 à payer à M. [V] [M] la somme de 37.000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice de jouissance et le préjudice moral,
– condamné la société Eurofins Analyses pour le bâtiment Ile-de-France à faire réaliser les travaux de traitement acoustique suivants :
‘ doublage de la gaine existante de l’extracteur de sorbonne,
‘ mise en place du support anti-vibratile,
‘ isolation acoustique des unités de climatisation déplacées en toiture,
le tout, dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement et ce, sous astreinte provisoire de 1.000 € par jour de retard pendant deux mois, passé ce délai,
– condamné in solidum la société Imodam Property et la société [Localité 9] Prime Office 1 à prendre toutes mesures nécessaires à la cessation des nuisances sonores et à en justifier dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement et, passé ce délai, sous astreinte de 1.000 € par nuisance sonore constatée par un acousticien, les services de la ville de Paris ou par un huissier de justice muni d’un appareil de mesure acoustique,
– enjoint aux sociétés [Localité 9] Prime Office 1, Imodam Property et Eurofins Analyses de mettre à l’arrêt chaque nuit de 22 heures à 7 heures du matin, à compter de la signification du présent jugement, les installations critiquées, à savoir :
‘ le condenseur de chambre froide de la restauration collective de l’immeuble,
‘ les climatiseurs extérieurs situés dans les locaux loués par la société Un Jour Ailleurs,
‘ les installations de la société Eurofins Analyses : l’extracteur de sorbonne, les installations de chauffage et de climatisation,
– dit que cette injonction est ordonnée sous astreinte de 1.000 € par nuisance sonore nocturne constatée par un acousticien, les services de la ville de [Localité 9] ou par un huissier de justice muni d’un appareil de mesure acoustique et ce, jusqu’à la production de deux rapports distincts de mesures acoustiques établis de manières concertée entre les parties, attestant que le bruit ambiant dans la chambre de M. [V] [M] n’excède pas un niveau global de 37 dB(A) lorsque tout ou partie des appareils (ventilation, extraction d’air, climatisation) sont en état de fonctionnement,
– dit n’y avoir lieu à se réserver la liquidation de l’astreinte,
– débouté la société Terreïs, la société Imodam Property et la société [Localité 9] Prime Office 1 de l’ensemble de leurs demandes, notamment en garantie, en ce qu’elles sont formées contre la Société Générale,
– condamné la société Terreïs à payer, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, 3.000 € à la Société Générale,
– condamné in solidum la société Terreïs, la société Imodam Property et la société [Localité 9] Prime Office 1 à payer, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, 20.000 € à M. [V] [M],
– condamné in solidum la société Terreïs, la société Imodam Property et la société [Localité 9] Prime Office 1 et la société Eurofins Analyses pour le bâtiment Ile-de-France aux entiers dépens, avec autorisation de recouvrer ceux de ces dépens dont ils ont fait l’avance sans avoir reçu provision, par application de l’article 699 du code de procédure civile,
– condamné la société Eurofins Analyses pour le bâtiment Ile-de-France à relever et garantir les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam Property à hauteur de 80 % des condamnations en principal, intérêts, frais, dépens et astreintes, prononcées à leur encontre,
– ordonné l’exécution provisoire du jugement,
– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
La société Eurofins Analyses pour le bâtiment Ile-de-France a relevé appel de cette décision par déclaration remise au greffe le 7 avril 2021, à l’encontre de M. [V] [M], la société Terreïs, la société Imodam Property, la société [Localité 9] Prime Office 1.
Le 11 août 2021, la société Imodam Property a changé de dénomination pour devenir la société Imodam.
Par ordonnance du 7 septembre 2022, le conseiller de la mise en état a :
– débouté M. [V] [M] de sa demande de radier l’affaire du rôle,
– condamné M. [V] [M] aux dépens de l’incident,
– rejeté toute autre demande.
La procédure devant la cour a été clôturée le 15 février 2023.
La société Un Jour Ailleurs et la Société Générale ne sont pas parties en appel.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu les conclusions notifiées le 6 février 2023 par lesquelles la société Eurofins Analyses pour le bâtiment Ile-de-France, appelante, invite la cour, au visa des articles 1240 du code civil, L. 1312-1, R. 1312-3 et R. 1312-5, R 1334-30 à R. 1334-37 du code de la santé publique, et des dispositions de l’arrêté du 5 décembre 2006 ‘relatif aux modalités de mesurage des bruits de voisinage’, à :
à titre principal,
– réformer la décision entreprise en ce qu’elle l’a condamnée à réaliser les travaux de traitement acoustique de doublage de la gaine existante de l’extracteur de sorbonne, de mise en place du support anti-vibratile, et d’isolation acoustique des unités de climatisation déplacées en toiture, a fortiori sous astreinte,
– réformer la décision entreprise en ce qu’elle l’a condamnée à relever et garantir les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam Property à hauteur de 80 % des condamnations en principal, intérêts, frais, dépens et astreintes, prononcées à leur encontre,
statuant à nouveau,
– à titre principal, dire que ni le plaignant, ni la demanderesse à l’intervention forcée Terreïs ne rapportent la preuve d’un fait dommageable anormal (nuisances sonores) excédant les normes légales et réglementaires qui soit imputable à Eurofins,
– en conséquence, débouter les intimées de l’intégralité de leurs demandes, fins et prétentions envers elle,
– subsidiairement, dire et juger que ni le plaignant, ni la société Terreïs ne rapportent la preuve d’un fait dommageable anormal (nuisances sonores) excédant les normes légales et réglementaires qui soit imputable à elle, au titre de la période antérieure au 20 janvier 2017 ou postérieure au 10 juillet 2019,
– en conséquence, cantonner sa condamnation à garantir le bailleur uniquement à concurrence d’un tiers (1/3) des condamnations en principal, frais et intérêts prononcées à l’encontre des propriétaires et occupants de l’immeuble relatives au préjudice subi par le plaignant au titre de la seule période comprise entre le 20 janvier 2017 et le 10 juillet 2019,
– cantonner sa garantie au titre des condamnations en principal prononcées à l’encontre des sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam Property à hauteur d’un montant maximum de 3.960 €,
en tout état de cause,
– condamner la société Terreïs à lui rembourser le trop-perçu des condamnations de ce chef,
– débouter les parties au litige de leurs demandes fins et prétentions formées à son encontre,
– dire n’y avoir lieu à article 700 ;
Vu les conclusions notifiées le 7 février 2023 par lesquelles M. [V] [M], intimé, invite la cour, au visa des articles 66, 68, 325, 331, 515 et 700 du code de procédure civile, 544, 651, 1240 et 1729 du code civil, des dispositions du code de la santé publique et du principe selon lequel nul ne peut causer à autrui un trouble anormal du voisinage, à :
– juger qu’il est recevable et bien fondé en ses demandes et prétentions,
– donner acte aux parties de ce que postérieurement au jugement entrepris, il a été justifié de la pose des supports anti-vibratile et de l’isolation acoustique des unités de climatisation
déplacées en toiture et qu’il n’y a dès lors plus lieu de statuer sur les demandes de réformation du jugement formés à ce titre par les appelantes,
– donner acte aux parties de ce que la dépose de la gaine d’extracteur de sorbonne, intervenue au mois d’août 2022, constitue une mesure équivalente à son isolation et qu’il n’y a dès lors plus lieu de statuer sur les demandes de réformation du jugement formés à ce titre par les appelantes,
– confirmer le jugement entrepris en toute ses dispositions,
en conséquence,
– rejeter l’intégralité des demandes formées en cause d’appel par les sociétés Eurofins pour le bâtiment Ile-de-France, Imodam Property, Terreïs et [Localité 9] Prime Office 1,
y ajoutant,
– condamner in solidum les sociétés [Localité 9] Prime Office 1, Terreïs et Imodam Property à lui payer la somme de 6.500 € en réparation du trouble anormal de voisinage dont il a été victime entre le mois de mars 2020 et d’avril 2021,
– condamner in solidum les sociétés [Localité 9] Prime Office 1, Terreïs et Imodam Property à lui payer la somme de 22.020 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, à parfaire le cas échéant,
– condamner in solidum les sociétés [Localité 9] Prime Office 1, Terreïs et Imodam Property aux entiers dépens de l’instance avec distraction au profit de Maître Giany Abbe en application de l’article 699 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions notifiées le 7 février 2023 par lesquelles les sociétés Terreïs, Imodam et [Localité 9] Prime Office 1, intimées ayant formé appel incident, invitent la cour, au visa des articles 1103, 1104 et 1240 et suivants du code civil, à :
– confirmer le jugement en ce qu’il a :
‘ reçu la société [Localité 9] Prime Office 1 en son intervention volontaire,
‘ ordonné la disjonction d’instance concernant la société UJA,
‘ jugé la société Eurofins pour le bâtiment Ile-de-France responsable des préjudices subis par M. [V] [M] pour troubles anormaux du voisinage, et condamné celle-ci à les garantir de toutes les condamnations prononcées au bénéfice de M. [V] [M] en principal, intérêts, frais, dépens et astreintes,
– infirmer le jugement en ce qu’il :
‘ les a jugées responsables in solidum des préjudices subis par M. [V] [M] pour troubles anormaux de voisinage,
‘ les a condamnées in solidum à payer à M. [V] [M] la somme de 37.000 € à titre de dommages-intérêts pour le préjudice de jouissance et le préjudice moral,
‘ a condamné in solidum les sociétés Imodam Property et [Localité 9] Prime Office 1 à prendre toutes mesures nécessaires à la cessation des nuisances sonores et à en justifier dans un délai de six mois à compter de la signification du jugement, et passé ce délai, sous astreinte de 1.000 € par nuisance sonore constatée par un acousticien, les services de la ville de Paris ou un huissier de justice,
‘ a enjoint aux sociétés [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam Property de mettre à l’arrêt chaque nuit de 22h00 à 7h00 du matin, à compter de la signification du jugement, le condenseur de chambre froide de la restauration collective de l’immeuble et les climatiseurs extérieurs des locaux loués à la société UJA, sous astreinte de 1.000 € par nuisance sonore nocturne constatée, jusqu’à la production de deux rapports distincts de mesures acoustiques établis de manière concertée attestant que le bruit ambiant dans la chambre de M. [V] [M] n’excède pas un niveau global de 37dB(A) lorsque tout ou partie des appareils fonctionnent,
‘ les a condamnées in solidum à payer la somme de 20.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile à M. [V] [M] et aux dépens,
‘ a limité la condamnation à garantie de la société Eurofins pour le bâtiment Ile-de-France à hauteur de 80 % des condamnations prononcées à leur encontre,
et statuant à nouveau,
– juger que la société Imodam Property n’a pas engagé sa responsabilité délictuelle et n’est pas responsable des préjudices subis par M. [V] [M] pour troubles anormaux du voisinage,
– débouter M. [V] [M] de toutes demandes formées à son encontre,
– juger que les sociétés Terreïs et [Localité 9] Prime Office 1 ne sont pas responsables des troubles anormaux de voisinage subis par M. [V] [M],
– débouter M. [V] [M] de toutes demandes formées à leur encontre,
à titre subsidiaire, si la cour confirmait le jugement en ce qu’il a retenu leur responsabilité,
– juger que M. [V] [M] n’a pas apporté la preuve de troubles anormaux de voisinage certains et constants sur toute la période allant de mars 2014 à avril 2021,
– limiter en conséquence considérablement toutes condamnations financières prononcées au bénéfice de M. [V] [M] à ce titre,
– débouter M. [V] [M] de toute demande de dommages-intérêts pour préjudice moral,
– infirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la condamnation de la société Imodam Property in solidum avec les sociétés Eurofins, Terreïs et [Localité 9] Prime Office 1 et limiter sa condamnation au seul préjudice résultant de la faute retenue,
– infirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la condamnation des sociétés Terreïs et [Localité 9] Prime Office 1 in solidum et limiter leurs condamnations respectives aux seules périodes durant lesquelles elles ont été effectivement propriétaires,
– débouter la société Eurofins pour le bâtiment Ile-de-France de ses demandes de réformation du jugement relativement à sa condamnation à garantie et de ses demandes de cantonnement de sa garantie, de remboursement du trop versé et de débouté,
– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Eurofins pour le bâtiment Ile-de-France à les garantir pour toutes condamnations en principal, intérêts, frais, dépens et astreintes prononcées au bénéfice de M. [V] [M] à hauteur de 80% pour la période antérieure à août 2016, mais infirmer pour la période postérieure la limitation de
80% et porter cette garantie à 90% d’août 2016 à janvier 2018, puis à 100% à compter de février 2018 et jusqu’à son départ des lieux loués,
– condamner M. [V] [M] et la société Eurofins pour le bâtiment Ile-de-France in solidum, ou l’un à défaut de l’autre, à leur payer à chacune la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [V] [M] et la société Eurofins pour le bâtiment Ile-de-France in solidum, ou l’un à défaut de l’autre, aux dépens d’appel, dont distraction au profit de Maître Valérie Fiehl, avocat aux offres de droit, conformément à l’article 699 du code de procédure civile ;
SUR CE,
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;
En application de l’article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;
Au préalable, il y a lieu de préciser que le jugement n’est pas contesté en ce qu’il a :
– constaté la clôture de l’instruction au 6 janvier 2021, préalablement à l’ouverture des débats,
– reçu M. [V] [M] en son action,
– reçu la société [Localité 9] Prime Office 1 en son intervention volontaire,
– ordonné, au vu des jugements d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire de la société Un Jour Ailleurs (UJA) du 29 mai 2020, puis d’une procédure de liquidation judiciaire du 14 août 2020, et de l’absence d’intervention volontaire ou forcée du liquidateur judiciaire, la disjonction de l’instance enrôlée sous le n°17-15796 des demandes opposant la société Un Jour Ailleurs (UJA) à la société Terreïs, à la société [Localité 9] Prime Office 1 et à toutes autres parties,
– dit que l’affaire portant sur ces demandes fera l’objet d’un nouveau numéro de rôle,
– jugé, en conséquence, irrecevables toutes demandes formées contre ou par la société Un Jour Ailleurs dans la présente instance numérotée 17/15796,
– rejeté les demandes d’expertises judiciaires,
– enjoint à la société Eurofins Analyses de mettre à l’arrêt chaque nuit de 22 heures à 7 heures du matin, à compter de la signification du présent jugement, les installations critiquées, à savoir :
‘ le condenseur de chambre froide de la restauration collective de l’immeuble,
‘ les climatiseurs extérieurs situés dans les locaux loués par la société Un Jour Ailleurs,
‘ les installations de la société Eurofins Analyses : l’extracteur de sorbonne, les installations de chauffage et de climatisation,
– dit que cette injonction est ordonnée sous astreinte de 1.000 € par nuisance sonore nocturne constatée par un acousticien, les services de la ville de [Localité 9] ou par un huissier de justice muni d’un appareil de mesure acoustique et ce, jusqu’à la production de deux rapports distincts de mesures acoustiques établis de manières concertée entre les parties, attestant que le bruit ambiant dans la chambre de M. [V] [M] n’excède pas un niveau global de 37 dB(A) lorsque tout ou partie des appareils (ventilation, extraction d’air, climatisation) sont en état de fonctionnement,
– dit n’y avoir lieu à se réserver la liquidation de l’astreinte,
– débouté la société Terreïs, la société Imodam Property et la société [Localité 9] Prime Office 1 de l’ensemble de leurs demandes, notamment en garantie, en ce qu’elles sont formées contre la Société Générale,
– condamné la société Terreïs à payer, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, 3.000 € à la Société Générale,
– condamné la société Eurofins Analyses pour le bâtiment Ile-de-France aux entiers dépens, avec autorisation de recouvrer ceux de ces dépens dont ils ont fait l’avance sans avoir reçu provision, par application de l’article 699 du code de procédure civile,
– ordonné l’exécution provisoire du jugement ;
Sur les nuisances sonores au préjudice de M. [V] [M]
M. [M] estime que les nuisances sonores proviennent des diverses installations de la société Eurofins Analyses, des climatiseurs extérieurs de la société Un Jour Ailleurs et du condensateur de chambre froide du restaurant inter-entreprises ;
En l’espèce, les premiers juges ont exactement retenu que ‘Le demandeur verse aux débats six plaintes déposées auprès des services de la préfecture de [Localité 9], datées des 9 juin 2015, 29 novembre 2016, 12 juin 2017, 28 août 2017, 16 juillet 2018 et 26 juin 2020, relatant les nuisances sonores suivantes, provenant toutes de l’immeuble situé [Adresse 2] :
– des bruits de ventilation venant d’une gaine d’aération courant sur la façade nord côté cour du bâtiment, perdurant 24 heures sur 24 et particulièrement gênants la nuit,
– des nuisances quasi permanentes causées par l’installation en octobre 2016 de plusieurs climatiseurs et condensateurs,
– le bruit provoqué par le condensateur de la chambre froide du restaurant,
– le bruit causé par des appareils de type climatiseurs ou de contrôle du traitement de l’air, entraînant une gêne permanente plus accentuée à partir de 4 heures du matin depuis trois ans (plainte du 28 août 2017),
– des bruits liés au fonctionnement de divers appareils d’extraction d’air, de climatiseurs, de CTA interne et externe à l’immeuble, et d’une fréquence permanente, l’ensemble de ces nuisances étant supporté depuis 2014 (plainte du 16 juillet 2018),
– des bruits liés à la création d’une terrasse utilisée comme annexe de la cantine de l’entreprise, utilisée matin, midi et parfois le soir et la nuit, du lundi au vendredi, cette terrasse étant exploitée par une société Allan (plainte du 26 juin 2020).
Surtout, M. [V] [M] produit de nombreux rapports de mesures acoustiques établis par l’inspecteur de la salubrité de la Ville de [Localité 9], les 2 novembre 2015, 4 octobre 2017, 8 février 2018, 12 juillet 2019 et 16 décembre 2019, ainsi qu’un rapport établi par un bureau d’études acoustique Réson’Air ; les niveaux d’émergence tolérée ont été calculés en tenant compte de la durée cumulée d’apparition du bruit particulier, supérieure à 8 heures.
Dans deux rapports du 2 novembre 2015 portant sur des relevés de mesures effectués le 8 octobre 2015 entre 22 et 23 heures, des nuisances sonores sont constatées, en lien avec le fonctionnement du condenseur d’une chambre froide du restaurant inter-entreprises, et sont perceptibles depuis le domicile du plaignant ; il existe un bruit ambiant qui cumule les niveaux sonores du condenseur de chambre froide et de deux climatiseurs réversibles appartenant à une société locataire dans l’immeuble (la société Un Jour Ailleurs) ; ce bruit ambiant cumulé est de 43 dbA notamment en période nocturne et il est relevé un niveau
d’émergence de + 5,5 alors que l’émergence tolérée en période nocturne ne peut excéder + 3, soit un dépassement des niveaux sonores réglementaires de +2,5 dB.
Dans le deuxième rapport du 2 novembre 2015 relatif aux nuisances liées au fonctionnement des deux climatiseurs réversibles appartenant à la société Un Jour Ailleurs, l’inspecteur relève un bruit ambiant cumulé de 43 dbA notamment en période nocturne et un niveau d’émergence de + 4,5 alors que l’émergence tolérée en période nocturne ne peut excéder + 3, soit un dépassement des niveaux sonores réglementaires de +1,5 dB.
Dans un rapport du 24 janvier 2017 relatif à des relevés du 20 janvier 2017, l’inspecteur de salubrité constate des nuisances sonores dues aux installations situées dans la cour de l’immeuble [Adresse 2], à côté du bâtiment, à savoir, l’extracteur de sorbonnes et l’installation de chauffage et de climatisation du 1er étage, tous équipements de la société Eurofins Analyses ; des émergences sont mises en évidence en global, de +4,5 dB pour l’extracteur de sorbonnes et de +8 pour le chauffage et la climatisation, soit un dépassement des niveaux sonores réglementaires, respectivement, de 1,5 dB et + 5 dB ; la durée d’apparition du bruit est supérieure à 8 heures.
Dans la nuit du 2 au 3 mars 2017, la société Eurofins Analyses a fait intervenir un bureau d’études acoustiques Reson’Air afin de procéder, de façon concertée, à des mesures acoustiques sur ses propres équipements entre 19 h et 1h30 du matin ; ce rapport a mis en évidence le fait que le fonctionnement des appareils de la société Eurofins Analyses induisait des émergences sonores excédant les seuils réglementaires, à savoir : + 6 dB pour l’extracteur de sorbonnes (soit un dépassement non réglementaire de +3 dB) et + 11 dB pour les deux groupes de chauffage et de climatisation (soit un dépassement de +8 dB non réglementaire).
La préfecture de police de [Localité 9], à la suite de nouvelles mesures effectuées le 8 juin 2017 entre 22 h et 22 h 30 sur les installations de cette société, a confirmé également à la persistance des nuisances sonores, soit : + 4,5 dB pour l’extracteur (d’où un dépassement de 1,5 dB) et + 7 db pour le chauffage et la climatisation (d’où un dépassement de + 3dB).
Le 2 août 2017, des mesures acoustiques réalisées à l’initiative de la société Un Jour Ailleurs ont fait état de niveaux sonores très élevés en provenance d’appareils non identifiés provenant de l’immeuble ; cette persistance a été confirmée par des mesures concertées réalisées amiablement le 14 septembre 2017 entre toutes les parties.
Des mesures réalisées par l’inspecteur de la Ville de [Localité 9] au domicile du requérant, le 3 octobre 2017 entre 6 et 7 heures du matin (de manière inopinée), puis le 22 février 2018 de 22 heures à 1 heure du matin (de manière concertée), ont permis de relever une émergence de +4.
Dans un rapport du 8 février 2018 (pièce 27 en demande), portant sur l’ensemble des équipements critiqués, l’inspecteur de la Ville de [Localité 9] n’a pas constaté de nuisances sonores, le niveau sonore n’excédant pas la valeur de l’émergence tolérée en période nocturne, entre +3 et +4 en niveau global suivant la durée cumulée d’apparition du bruit particulier (supérieure à 8 heures ou n’excédant pas cette durée).
Des mesures réalisées par l’inspecteur de la Ville de [Localité 9] au domicile du requérant, le 10 juillet 2019 entre 2 h et 3 h 30 du matin, ont conduit à un relevé d’émergences de +6,5 dB pour l’extracteur de sorbonnes (soit un dépassement de +3,5 dB non conforme).
Enfin, un nouveau rapport établi par ces services le 16 décembre 2019 suite à des relevés effectués le 19 novembre 2019 au domicile du demandeur entre 1h30 et 2h ont permis de constater que le moteur de l’extracteur de sorbonnes de la société Eurofins Analyses fonctionnait en continu, en pleine nuit ; ce constat a donné lieu à un procès-verbal de contravention.
L’inspecteur a constaté, s’agissant du fonctionnement de cet équipement, un niveau global d’émergences de bruit de 4 dB(A) alors que la valeur admise est de 3 ; il ajoute qu’avant d’entreprendre les mesures acoustiques au domicile du plaignant, il s’est rendu sur le toit
de son immeuble qui jouxte celui où se trouve l’installation en cause et qu’il a pu constater que ce moteur était en activité et correspondait bien au bruit que l’on entend, notamment dans la chambre d’enfant.
Dans l’ensemble de ces rapports, excepté celui du 8 février 2018, les services administratifs ont constaté que les émergences sonores relevées excédaient les normes réglementaires, les responsables se voyant laisser un délai de 2 à 3 mois pour la mise en conformité de leurs équipements avec la réglementation en vigueur, prévue par les articles R.1334-30 à R.1334-37 du code de la santé publique relatifs à la lutte contre le bruit.
Les parties versent par ailleurs aux débats un rapport de mesures acoustiques d’une société Arema acoustique du 4 octobre 2017, confirmant, après relevé de mesures concernant l’ensemble des installations dont s’agit et effectué le 15 septembre 2017, des dépassements des émergences autorisées ; les installations les plus gênantes semblent être les suivantes :
– société UJA : la climatisation de confort génère des dépassements et doit être à traiter ou à mettre sur horloge pour couper le fonctionnement nocturne, la climatisation informatique est audible et, afin de limiter le cumul des sources, un traitement sera probablement nécessaire,
– société Eurofins Analyses : l’extracteur est à traiter, afin de limiter le cumul des sources, la climatisation sera peut-être à traiter, la CTA (centrale de traitement d’air) est normalement sur horloge et doit le rester pour ne pas fonctionner la nuit,
– pour les installations de Société Générale, toutes les installations sont normalement sur horloge et doivent le rester pour ne pas fonctionner la nuit.
Ces multiples relevés de mesures acoustiques effectués par les services administratifs établissent, à l’exception de ceux du 8 février 2018, la réalité et la durée des nuisances sonores, alléguées en demande et se poursuivant en 19 novembre 2019, des dépassements d’émergences sonores par rapports aux normes réglementaires, de 1,5 dB(A) à 8 dB(A), ayant été constatés suivant les installations contrôlées’ ;
Les premiers juges ont aussi à juste titre relevé que ‘Il résulte des explications des parties que l’immeuble [Adresse 2] disposait d’un restaurant inter-entreprises qui a été définitivement fermé le 30 juin 2018″ ;
Les premiers juges ont en sus justement mentionné que ‘Des nuisances ont été provoquées par le condenseur de chambre froide de la restauration collective de l’immeuble, et constatées par l’inspecteur de salubrité dans les rapports des 8 octobre et 2 novembre 2015 avec un niveau sonore excessif de 2,5 dB (sur un total relevé de 5,5 dB).
Des nuisances ont également pour origine le fonctionnement des climatiseurs extérieurs situés dans les locaux loués par la société Un Jour Ailleurs, ces climatiseurs ayant servi pour son installation informatique et la régulation thermique de la partie de ses locaux situés sur la cour intérieure ; les nuisances en provenance de ces appareils de climatisation ont été notamment relevées par les services de la préfecture dans le rapport du 2 novembre 2015, avec un niveau sonore excessif de 1,5 dB (sur un total relevé de 4,5 dB).
Les nuisances ont également pour origine les installations de la société Eurofins Analyses, locataire d’un local d’activité et de bureaux situés au rez-de-chaussée au 1er étage de l’immeuble selon les baux versés aux débats, et qui exploite jour et nuit dans ses locaux un laboratoire d’analyses spécialisées, notamment sur des matériaux contenant de l’amiante ; il ressort des documents susvisés que ce laboratoire fonctionne également la nuit’ ;
Les premiers juges ont encore exactement relevé que ‘Il est constant, ce qui est également démontré par les photographies des lieux versées aux débats, que les nuisances sonores provoquées par les équipements de la société Eurofins Analyses ont pour origine, d’une part et pour l’essentiel, l’extracteur de sorbonne dont la gaine située sur la façade passe à quelques mètres de la fenêtre de la chambre de M. [V] [M], et d’autre part, l’installation de chauffage et de climatisation, ainsi que reconnu par l’inspecteur le 24 janvier 2017.
De surcroît, le rapport d’étude acoustique de la société Réson’Air souligne, s’agissant de l’impact du fonctionnement de l’extracteur de sorbonnes, une émergence non réglementaire de +3 dB (A) en global, soit une différence de 6 dB (A) avec le bruit résiduel, et pour l’impact du fonctionnement des unités de climatisation ou VRV (volume de réfrigérant variable), une émergence non réglementaire de plus 8 dB (A) en global, soit une différence de 11 dB (A) avec le bruit résiduel.
Ces nuisances ont à nouveau été constatées dans les rapports de l’administration du 29 juin 2017, du 12 juillet 2019 et du 19 novembre 2019, et dans un rapport de mesures acoustiques effectuées amiablement et contradictoirement le 15 septembre 2017 par une société Arema Acoustique, à la demande de la société Terreïs, et qui a également conclu à des dépassements importants des seuils autorisés.
La persistance des niveaux d’émergences sonores, constatée en novembre 2019, confirme le fait que la société Eurofins Analyses n’a pas réalisé les mesures correctives qui s’imposaient.
La société Eurofins Analyses ne rapporte pas la preuve de ce que les relevés de mesures conduisant à mettre en cause ses installations auraient été effectuées en contravention avec les prescriptions de l’article R.1334-33 du code de la santé publique et de l’arrêté du 5 décembre 2006 ; ses appareils ont été arrêtés et l’émergence résultant de la différence entre le bruit ambiant et le bruit résiduel a permis d’isoler le bruit provenant de ses équipements.
De surcroît, les mesures concertées effectuées le 15 septembre 2017 avec tous les locataires et les services techniques de la société Imodam Property ont corroboré l’implication exclusive de l’immeuble de la société Terreïs dans la production des nuisances sonores ainsi que le fait que des émergences sonores anormales provenaient bien des appareils de la société Eurofins Analyses : le rapport de la société Réson’Air de mars 2017 produit par cette société atteste que sans le fonctionnement de ses propres appareils, le bruit résiduel en global ne dépasse pas les 37,5 dB et que le fonctionnement de ses climatiseurs et de son extracteur de sorbonnes générait des émergences non réglementaires, respectivement, de plus 8 dB et de plus 3 dB ; cette société a reconnu en outre qu’à partir d’avril 2017, l’heure limite de son activité nocturne était passée de minuit à 4h30 du matin ; enfin, il est établi que les rapports de l’administration constatent des infractions aux limitations d’émergences sonores commises entre le 24 janvier 2017 et le 16 décembre 2019, le dernier ayant donné lieu à l’établissement d’un procès-verbal de contravention, mettant directement en cause les équipements de la société Eurofins Analyses.
S’agissant des équipements des autres locataires, le rapport susvisé de la société Arema Acoustique, ainsi qu’un rapport d’une société Acouconcept du 3 août 2017 produit par la société UJA, confirment l’existence de dépassements des émergences autorisées, par le
fonctionnement cumulé des systèmes de climatisation des sociétés UJA et Société Générale, et par l’extracteur de sorbonnes de la société Eurofins Analyses.
Ces nuisances sonores en global ont également été constatées par l’inspecteur de salubrité de la Ville de [Localité 9] lors des mesures inopinées réalisées le 3 octobre 2017″ ;
Les premiers juges ont aussi retenu que ‘Les multiples rapports décrits plus haut établissent que, du mois d’octobre 2015 au 19 novembre 2019, date à laquelle des dépassements d’émergence de décibels étaient encore relevés par la ville de [Localité 9] sur l’extracteur de sorbonne de la société Eurofins Analyses, M. [V] [M] a subi des troubles graves et persistants, dus au fonctionnement d’appareils non conformes, s’agissant plus particulièrement de ceux de la société Eurofins Analyses ; à ces dépassements se sont ajoutés des négligences dans l’utilisation et la maintenance des appareils, du fait d’erreurs de programmation répétées, également attestées par les pièces versés aux débats, notamment un rapport de la société Hervé Thermique.
Ces fonctionnements anormaux, aggravés par les erreurs et oublis de programmation de sorte que l’ensemble de ces équipements fonctionnait à plein régime y compris pendant la nuit, ont été aggravés par le fonctionnement cumulé de tous les appareils de l’immeuble : ainsi, le 2 novembre 2015, le cumul des niveaux sonores s’élevait à 43 dB en niveau global entre 22 heures et 22h30, à 44 dB le 24 janvier 2017 et, dans la nuit du 2 au 3 mars 2017 de 19 heures à 1h30 du matin, à 48,5 dB en contrebas de la chambre de M. [V] [M].
À l’inverse, le rapport contradictoirement établi par la société Arema Acoustique le 15 septembre 2017 en présence de toutes les parties, a montré que lorsque tous les appareils de l’immeuble sont éteints, le bruit résiduel ressenti dans la chambre du demandeur ne s’élève plus qu’à 32,4 dB A.
En application des articles R.1336-6 et R.1336-8 du code de la santé publique, les nuisances sonores sont établies dès lors qu’il est constaté une émergence supérieure aux valeurs limite fixées dans ce dernier article, et ce que la mesure soit réalisée fenêtres ouvertes ou fenêtres
fermées.
Selon les recommandations de l’organisation mondiale de la santé, également communiquées, au-delà de 42 dB les nuisances sonores sont susceptibles de perturber gravement la qualité du sommeil et ce, alors que les niveaux de décibels du bruit ambiant de référence, relevé lors des différentes prises de mesure, a atteint 44 dB le 20 janvier 2017, 43,5 dB le 2 mars 2017 et 48,5 dB le 2 mars 2017 et que ces nuisances ont été subies en pleine nuit, depuis la chambre à coucher du demandeur, laquelle donne sur une cour calme, non exposée au bruit de circulation et qui, sur les photographies produites aux débats, montre notamment la présence de terrains de tennis évidemment inoccupés pendant la nuit.
Quatre rapports d’infraction mettant en cause les seuls équipements de la société Eurofins Analyses ont été établis par les autorités administratives, cette société ayant fait fonctionner ces équipements 24 heures sur 24 sans égard pour le voisinage ; par ailleurs, et contrairement aux assertions des défenderesses, le quartier du [Adresse 3] est un quartier mixte composé à la fois de bâtiments d’activités et de bâtiments d’habitation, comme le montre le plan local d’urbanisme de [Localité 9] produit aux débats par le demandeur, de sorte que les activités professionnelles sont autorisées à condition qu’elles ne nuisent pas à la tranquillité des riverains.
M. [V] [M] justifie enfin que l’immeuble situé [Adresse 3] se trouve dans une zone urbaine générale (UG) du plan local d’urbanisme, lequel interdit les installations classées pour la protection de l’environnement présentant un danger grave ou des risques d’insalubrité pour le voisinage’ ;
L’argument de la société Euroflins selon lequel l’inspecteur de la salubrité se serait trompé en concluant que les normes étaient dépassées alors qu’il aurait omis d’appliquer le coefficient correcteur de l’article R1336-7 alinéa 2 du code de la santé publique est à écarter ; en effet, il ressort des articles R1334-30s devenus R1336-4s du code de la santé publique que lorsque les bruits sont engendrés par des équipements d’activité professionnelle, ce qui est le cas en l’espèce, les valeurs limites sont celles définies à l’article R1336-8 et non celles définies à l’article R1336-7 ;
Le fait que M. [F] [S], acousticien mandaté par la société Eurofins Analyses, ait contesté la conformité des relevés effectués par l’inspecteur de la salubrité le 10 juin 2021, sera analysé ci-après et est, en tout état de cause, sans incidence sur l’analyse des premiers juges puisque ces relevés ont été effectués postérieurement au jugement du 16 mars 2021 ;
Il convient donc de considérer qu’il est établi, au préjudice de M. [M], entre 2014 et 2020 (jusqu’au 30 juin 2018 pour le condensateur de la chambre froide du restaurant inter-entreprises), l’existence de nuisances sonores dont les relevés d’émergences dépassent les normes réglementaires de 1,5 dBA à 8 dBA, en provenance :
– de l’extracteur de sorbonne de la société locataire Eurofins Analyses situé dans la cour de l’immeuble [Adresse 2], fonctionnant en continu, en pleine nuit, avec un dépassement de relevé d’émergences de + 1,5 dB à +3,5 dB,
– des bruits de la ventilation venant de la gaine d’aération de l’extracteur de sorbonne de la société locataire Eurofins Analyses, courant sur la façade nord côté cour du bâtiment, à quelques mètres de la fenêtre de la chambre de M. [M], 24h sur 24, particulièrement gênant la nuit,
– des deux groupes de chauffage et de climatisation de la société locataire Eurofins Analyses, situés au 1er étage, avec un dépassement de relevé d’émergences de +5dB à +8dB, le laboratoire fonctionnant jour et nuit,
– du condensateur de la chambre froide du restaurant inter-entreprises, jusqu’au 30 juin 2018,
– des climatiseurs de la société locataire Un Jour Ailleurs,
avec un dépassement de relevé d’émergences pour ce condensateur et ces climatiseurs de +2,5 dB ;
Il en ressort que ces nuisances sonores subies par M. [M], en provenance des installations de la société locataire Eurofins Analyses, du restaurant inter-entreprises et de la société locataire Un Jour Ailleurs, par leur intensité dépassant les seuils réglementaires, par leur amplitude s’étendant sur la journée et la nuit et par leur durée sur plusieurs années, constituent un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage ;
Il en ressort aussi que les nuisances sonores en provenance des installations de la société Eurofins Analyses, qui fonctionnent jour et nuit, avec des dépassements d’émergences élevés constituent à elles seules un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage à l’égard de M. [M] ;
Il y a lieu d’ajouter que l’existence de ces nuisances sonores en provenance des installations de la société Eurofins Analyses est démontrée, sur la période de mars 2014 au 20 janvier 2017 et sur la période du 10 juillet 2019 à mars 2020, par les rapports acoustiques entre le 2 novembre 2015 et le 19 novembre 2019, corroborés par le courriel du 13 mars 2013 d’un membre du conseil syndical du [Adresse 3] (pièce 20 Imodam), le courriel du 11 avril 2014 du syndic de l’immeuble du [Adresse 3] (pièce 20), les courriels de M. [M] entre le 11 avril 2014 et le 10 juillet 2018 et ses plaintes déposées auprès de la préfecture entre le 9 juin 2015 et le 26 juin 2020 ;
Sur les responsabilités à l’égard de M. [M] des sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1, Eurofins Analyses et Imodam anciennement Imodam Property
M. [V] [M] agit à l’encontre de la société Terreïs, propriétaire de l’immeuble avant sa cession le 28 mai 2019, de la société [Localité 9] Prime Office 1nouvelle propriétaire de l’immeuble, de la société Eurofins Analyses locataire dans l’immeuble, et de la société Imodam Property, gestionnaire de l’immeuble et des appareils du restaurant inter-entreprises ;
Sur la responsabilité des sociétés Terreïs et [Localité 9] Prime Office 1 à l’égard de M. [M]
M. [M] agit à l’encontre des sociétés Terreïs et [Localité 9] Prime Office 1, propriétaires successives de l’immeuble à l’origine des troubles, sur le fondement du trouble anormal de voisinage ;
Aux termes de l’article 544 du code civil, ‘La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements’ ;
Il est de principe que nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage ; il s’agit d’une responsabilité objective qui ne nécessite pas la preuve d’une faute ;
Lorsque le trouble de voisinage émane d’un immeuble donné en location, la victime de ce trouble peut en demander réparation au propriétaire ;
L’actuel propriétaire du bien est responsable de plein droit des troubles excédant les inconvénients normaux de voisinage, dont son auteur est à l’origine ;
En l’espèce, il ressort des éléments du dossier que les nuisances sonores, qui selon l’analyse ci-avant constituent un trouble anormal de voisinage, ont pour origine :
– le fonctionnement de l’extracteur de sorbonnes et de l’installation de chauffage et de climatisation de la société Eurofins Analyses, sis dans l’immeuble du [Adresse 2],
– le fonctionnement du condenseur de la chambre froide du restaurant inter-entreprises, sis dans l’immeuble du [Adresse 2],
– le fonctionnement du système de climatisation de la société UJA, sis dans l’immeuble du [Adresse 2] ;
Ainsi il en ressort que le trouble anormal de voisinage a son origine dans l’immeuble du [Adresse 2] ;
Le propriétaire de l’immeuble du [Adresse 2] est donc responsable, sur le fondement de la théorie du trouble anormal de voisinage, des dommages ayant leur origine dans son immeuble, à l’égard de M. [M], demeurant dans l’immeuble voisin ;
Ce propriétaire étant responsable du trouble anormal de voisinage causé par ses locataires, ne peut pas s’exonérer de sa responsabilité au motif que les installations litigieuses appartiendraient à ses locataires, la société Eurofins Analyses ou la société UJA ;
D’autre part, la société [Localité 9] Prime Office 1, actuel propriétaire du bien, est responsable de plein droit des troubles excédant les inconvénients normaux de voisinage, dont son auteur, la société Terreïs, ancienne propriétaire du bien, est à l’origine ;
En conséquence, la société [Localité 9] Prime Office 1 et la société Terreïs sont responsables des dommages causés à M. [M], sur le fondement de la théorie des troubles anormaux de voisinage ;
Sur la responsabilité de la société Eurofins Analyses à l’égard de M. [M]
M. [M] agit à l’encontre de la société Eurofins Analyses sur le fondement du trouble anormal de voisinage ;
Aux termes de l’article 544 du code civil, ‘La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements’ ;
Il est de principe que nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage ; il s’agit d’une responsabilité objective qui ne nécessite pas la preuve d’une faute ;
Lorsque le trouble de voisinage émane d’un immeuble donné en location, la victime de ce trouble a une action directe contre le locataire ;
En l’espèce, il ressort de l’analyse ci-avant que des nuisances sonores, qui selon l’analyse ci-avant constituent un trouble anormal de voisinage, ont pour origine notamment le fonctionnement de l’extracteur de sorbonnes et de l’installation de chauffage et de climatisation de la société Eurofins Analyses, locataire dans l’immeuble du [Adresse 2] ;
Ce trouble anormal de voisinage a donc son origine dans les locaux loués par la société Eurofins Analyses et M. [M] a une action directe à l’encontre du locataire ;
En conséquence, la société Eurofins Analyses est responsable des dommages causés à M. [M], sur le fondement de la théorie des troubles anormaux de voisinage ;
Sur la responsabilité de la société Imodam Property à l’égard de M. [M]
M. [M] agit à l’encontre de la société Imodam Property sur le fondement de la responsabilité délictuelle ;
Aux termes de l’article 1240 du code civil, ‘Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer’ ;
Le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement peut s’analyser en une faute délictuelle ;
En l’espèce, il ressort des baux commerciaux à l’égard de la société locataire Eurofins Analyses que la société Imodam Property représentait le bailleur (pièces 12 et 13) et disposait des moyens pour faire respecter par la locataire ses obligations relatives à ‘la règlementation administrative des installations ou équipements utilisés par elle’ et ‘l’absence de nuisances à la tranquillité des voisins’ ;
Concernant le restaurant inter-entreprises, selon la convention de mise à disposition des locaux et installations de ce restaurant au profit des membres du groupement constitué pour la gestion de ce restaurant, les locaux, installations, matériel, mobilier et équipements de restauration mis à la disposition des entreprises utilisatrices par le propriétaire restaient la propriété exclusive de celui-ci (pièce 16) ; et il ressort de la convention de groupement pour la gestion du restaurant (pièce 15), de la convention de mise à disposition des locaux et installations du restaurant (pièce 16) et de la convention de mission du mandataire unique (pièce 17) que la société Imodam Property était la mandataire unique des membres du groupement, et était notamment chargée de ‘vérifier le bon usage des équipements’ ;
Les premiers juges ont exactement retenu que ‘M. [V] [M] verse aux débats, outre les diverses plaintes susvisées au service de la préfecture, des courriels envoyés à la société Imodam Property par lui-même ou d’autres occupants de l’immeuble du [Adresse 3], depuis le 14 avril 2014.
Si les sociétés Imodam Property, Terreïs et [Localité 9] Prime Office 1 ont sollicité un acousticien aux fins de vérification du condenseur du restaurant inter-entreprises, le 10 novembre 2015, et dont elles produisent le rapport, cette initiative a été prise postérieurement à la première intervention de l’inspecteur de salubrité de la préfecture de police de Paris en octobre 2015 ; s’agissant des autres appareils, les défenderesses ne justifient pas être intervenues auprès des locataires de l’immeuble, nonobstant l’envoi, par le conseil de M. [V] [M], d’une mise en demeure du 23 février 2017 (pièce 10 en demande) demandant à la société Imodam Property de désigner un expert acousticien et un bureau d’études pour déterminer précisément les causes des nuisances au sein de l’immeuble et les mesures à mettre en oeuvre pour les faire cesser.
La société Imodam Property s’est prévalue de constatations des sociétés Fracim et Hervé Thermique, en charge de la maintenance des installations de l’immeuble, contestant l’existence de nuisances liées au fonctionnement des installations du restaurant inter-entreprises ; toutefois, ces constatations ont été démenties par le rapport d’enquête de la préfecture du 24 janvier 2017, qui a conclu à la persistance des nuisances provenant notamment de l’extracteur de sorbonnes installée par la société Eurofins Analyses.
C’est donc à bon droit que M. [V] [M] se prévaut d’une carence fautive de la société Imodam Property, laquelle s’est abstenue de réaliser l’ensemble des diligences nécessaires pour faire cesser les nuisances, notamment en intervenant auprès des locataires de l’immeuble pour faire cesser rapidement les troubles et en faisant réaliser toutes études
nécessaires’ ;
Les premiers juges ont aussi à juste titre relevé que ‘cette société (Eurofins Analyses) a mis en place un extracteur de sorbonnes bruyant en façade de l’immeuble sans l’autorisation du bailleur ni celle des services d’urbanisme de la ville de Paris, en méconnaissance des dispositions de l’article L.480-4 du code de l’urbanisme, ce qui a été reconnu par les sociétés Imodam Property, Terreïs et [Localité 9] Prime Office 1 dans leurs écritures’ ;
Et les premiers juges ont justement relevé que ‘Force est de constater, notamment, que la société Imodam Property n’a pas engagé d’action contre ses locataires avant leur appel en garantie le 28 janvier 2018, soit près de quatre ans après les premières réclamations du demandeur et ce, alors que, pourtant la société Imodam Property a admis, notamment par lettre recommandée du 4 avril 2017 envoyée à la société Eurofins Analyses, qu’elle n’avait jamais autorisé cette dernière à installer la gaine murale de son extracteur de sorbonnes, de sorte qu’il lui appartenait, dès l’information donnée sur l’existence des nuisances sonores en avril 2014 par le demandeur, d’intervenir auprès de la locataire en vue de faire cesser les troubles, ceux-ci émanant à plus forte raison d’un matériel irrégulièrement installé’ ;
Ainsi la société Imodam Property a commis des fautes d’une part en tardant à exercer les diligences nécessaires, qui relevaient de ses missions contractuelles, afin que les entreprises locataires, notamment la société Eurofins Analyses et Un Jour Ailleurs, respectent la règlementation administrative des installations ou équipements utilisés par elles et l’absence de nuisances à la tranquillité des voisins et d’autre part en ne respectant pas son obligation contractuelle de vérifier le bon usage des équipements relatifs au restaurant d’entreprises ;
En conséquence, la responsabilité délictuelle de la société Imodam Property est engagée à l’égard de M. [M], relativement au préjudice subi en conséquences des nuisances sonores ;
Sur la demande de M. [M] de retenir la responsabilité in solidum des sociétés Eurofins Analyses, Imodam Property, Terreïs et [Localité 9] Prime Office 1
En l’espèce, il convient de considérer que la responsabilité de plein droit des sociétés Terreïs et [Localité 9] Prime Office 1, en leur qualité de propriétaires successifs de l’immeuble, et de la société Eurofins Analyses, en sa qualité de locataire, à l’égard de M. [M] sur le fondement de la théorie des troubles anormaux de voisinage, et les fautes commises par la société Imodam Property, en qualité de mandataire des propriétaires et de responsable du bon usage des équipements du restaurant inter-entreprises, à l’égard de M. [M], ont concouru de manière indissociables à la production des nuisances sonores constitutives de troubles anormaux du voisinage ;
Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a déclaré la société Eurofins Analyses, la société Imodam Property, la société Terreïs et la société [Localité 9] Prime Office 1, responsables in solidum des préjudices subis par M. [M] pour troubles anormaux du voisinage ;
Sur les demandes de M. [M] au titre de ses préjudices
M. [M] sollicite la condamnation in solidum des sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam Property à lui verser la somme de 37.000 € au titre de son préjudice de jouissance sur la base de 400 € par mois et au titre de son préjudice moral sur la base de 100 € par mois, de mars 2014 à mars 2020 ; il actualise sa demande en appel et sollicite leur condamnation in solidum à lui payer la somme de 6.500 €, au titre de son préjudice de jouissance sur la base de 400 € par mois, et au titre de son préjudice moral, sur la base de 100 € par mois, pour les préjudices subis de mars 2020 à avril 2021 ;
En l’espèce, les premiers juges ont justement estimé que ‘Au regard de l’ensemble de ces éléments, M. [V] [M] a subi un trouble majeur au regard, tant des niveaux d’émergences sonores que de la durée de ces troubles, les nuisances sonores étant ressenties 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, notamment dans sa chambre à coucher.
Sur le montant du préjudice, M. [V] [M] verse aux débats de multiples courriels envoyés à la société Imodam Property d’avril 2014 à septembre 2017, outre une mise en demeure valant tentative de conciliation préalable de son avocat, datée du 23 février
2017 ; force est de constater qu’aucune de ces tentatives de résolution amiable du litige n’a été véritablement suivie d’effet, ce qui a encore contribué à aggraver le préjudice par sa durée.
Il s’ensuit que M. [V] [M] justifie subir des nuisances sonores depuis mars 2014 jusqu’au 3 mars 2020 soit 74 mois, constitutives à la fois d’un trouble de jouissance et d’un préjudice moral’ ;
Il y a lieu d’ajouter que M. [M] justifie avoir subi un préjudice moral distinct du préjudice de jouissance en ce qu’il ressort des pièces produites qu’il a reçu à de très nombreuses reprises des acousticiens et des techniciens à son domicile, y compris la nuit, dans la chambre à coucher, et a dû se rendre disponible pour les démarches relatives à cette affaire ;
En conséquence, le jugement est confirmé :
– en ce qu’il a apprécié le trouble de jouissance à la somme de 400 € par mois, sur la période de début mars 2014 au 3 mars 2020,
– en ce qu’il a apprécié le préjudice moral à la somme de 100 € par mois, sur la période de début mars 2014 au 3 mars 2020 ;
Le jugement est infirmé :
– en ce qu’il a retenu 74 mois sur la période de début mars 2014 au 3 mars 2020 alors que cette période ne compte que 72 mois (6 x 12),
– en ce qu’il a apprécié le trouble de jouissance à la somme de 29.600 € (400 x 74 = 29.600),
– en ce qu’il a apprécié le préjudice moral à la somme de 7.400 € (100 x 74 = 7.400),
– en ce qu’il a retenu un total de 37.000 € ( 29.600 + 7.400),
– en ce qu’il a condamné in solidum les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam Property à payer à M. [M] la somme de 37.000 €, au titre de son préjudice de jouissance et de son préjudice moral, subis sur la période de mars 2014 à mars 2020 ;
Il y a lieu de condamner in solidum les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam Property à payer à M. [M] :
– la somme de 28.800 € (400 x 72), au titre de son préjudice de jouissance, subi sur la période de début mars 2014 au 3 mars 2020,
– la somme de 7.200 € (100 x 72), au titre de son préjudice moral, subi sur la période de début mars 2014 au 3 mars 2020 ;
Concernant la demande d’actualisation sur la période du 4 mars 2020 à fin avril 2021, la seule production du rapport de l’inspecteur de salubrité du 21 juin 2021 (pièce 5.10), et des constats du 7 février 2022 (pièce 35) et du 16 février 2022 (pièce 36), dans lesquels l’huissier constate l’existence d’installations de ventilation et précise qu’il ‘distingue un bruit de moteur assimilé à un bruit de ventilation en marche’, est insuffisante à justifier que M. [M] a subi des nuisances sonores, constitutives d’un trouble anormal de voisinage, sur toute la période du 4 mars 2020 à fin avril 2021 ;
En conséquence, M. [M] est débouté de sa demande en appel de condamner in solidum les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam Property à lui verser la somme de 6.500 € au titre de son préjudice de jouissance et de son préjudice moral subis sur la période du 4 mars 2020 à fin avril 2021 ;
Sur la demande de M. [M] de condamner la société Eurofins Analyses à des travaux
En cas de troubles anormaux du voisinage et plus particulièrement de nuisances sonores, le juge peut ordonner toutes mesures nécessaires à la suppression des troubles, mettre un terme aux activités bruyantes et suspendre l’activité tant que la mise aux normes n’a pas été effectuée ;
En l’espèce, l’analyse ci-après démontre qu’à la date du jugement du 16 mars 2021, la société Eurofins Analyses n’avait pas mis en oeuvre des travaux suffisants pour mettre fin aux troubles anormaux du voisinage causés par ses installations et qu’à cette date, les émergences sonores continuaient de dépasser les normes réglementaires ;
En effet, les premiers juges ont justement retenu que ‘La société Eurofins Analyses verse aux débats (sa pièce 27) un rapport de M. [F] [S], expert judiciaire, du 2 juillet 2020, selon lequel cette société a effectué des travaux d’insonorisation (remplacement du moteur par un nouveau moteur plus silencieux, poses de plots antivibratiles sous le caisson d’extracteur, pose de berceau de maintien du conduit horizontal et d’une manchette souple anti-vibratoire en sortie du caisson d’extracteur), qui font apparaître une atténuation importante du bruit de l’extracteur situé en toiture de l’immeuble’ ;
Dans son rapport du 2 juillet 2020 (pièce 8.1), M. [F] [S], acousticien mandaté par la société Eurofins Analyses, estime que ‘l’atténuation du bruit de l’extracteur à la source, mesurée en toiture, fait apparaître une diminution importante du bruit de 10 à 12 dBA, comparée au niveau de bruit avant travaux d’insonorisation … l’atténuation de 10dBA à 12dBA résultant des travaux à la source du bruit constitué par l’extracteur est de nature à caractériser un non dépassement de l’émergence de bruit fixée par la législation … et à rendre l’installation conforme en matière de bruit de voisinage’ ;
Toutefois dans son rapport du 21 juin 2021, l’inspecteur de salubrité expose avoir réalisé des mesures le 10 juin 2021 ‘entre 22h et 23h30, dans la chambre, côté cour, portes fermées, fenêtres ouvertes, au centre de la pièce à environ 1m30 du sol et à au moins 1m des parois’ et conclut que ‘Les émergences sonores constatées sont au-delà des normes réglementaires, notamment sur les bandes d’octaves de 125Hz ainsi que sur un niveau global. Par conséquence, la plainte pour nuisances sonores est donc fondée’ ;
Le fait que M. [F] [S] relève dans son rapport du 13 juin 2021 que les relevés effectués par l’inspecteur de la salubrité le 10 juin 2021 ne seraient pas conformes, en ce que celui-ci les aurait effectués au droit du garde-corps de la fenêtre de la chambre de M. [M] alors que la mesure devait être effectuée à 1,50m des fenêtres, au centre de la chambre, est insuffisant à remettre en cause le rapport de l’inspecteur de la salubrité du 21 juin 2021, qui précise expressément que les mesures ont été prises ‘au centre de la pièce’ ;
Ainsi le fait que les émergences sonores constatées le 10 juin 2021 par l’inspecteur de salubrité dépassent les normes réglementaires démontre que les travaux réalisés par la société Eurofins Analyses décrit par M. [F] [S] dans son rapport du 2 juillet 2020 sont insuffisants à mettre fin au trouble anormal de voisinage ;
Il ressort des éléments du dossier qu’à la date du jugement, la société Eurofins Analyses n’avait pas mis en oeuvre la totalité des préconisations énoncées par ses acousticiens, la société Réson’Air, dans le rapport du 9 mars 2017 (pièce 6.2) et la société Air Technology dans son rapport du 24 avril 2017 (pièce 6.7), à savoir :
– le doublage de la gaine existante de l’extracteur de sorbonne,
– la mise en place d’un support anti-vibratile,
– l’isolation acoustique des unités de climatisation déplacées en toiture ;
Concernant le doublage de la gaine existante de l’extracteur en sorbonne, le fait que la société Eurofins Analyses ait, postérieurement au jugement critiqué du 16 mars 2021, estimé ces travaux trop coûteux et ait choisi de cesser d’exploiter la gaine d’extraction de 22h à 6h et le fait que M. [M] considère que la dépose de la gaine d’extracteur de sorbonne, intervenue au mois d’août 2022, constitue une mesure équivalente à son isolation ne saurait entraîner la réformation du jugement puisque la décision du tribunal était justifiée et le reste devant la cour ;
Concernant la mise en place d’un support anti-vibratile et l’isolation acoustique des unités de climatisation déplacées en toiture, leur préconisation par la société Air Technology ressort des conclusions de première instance de la société Euroflins (pièce 45) ‘Déplacement des systèmes de climatisation : Eurofins a en troisième lieu mandaté la société Air Technology à l’effet de procéder à la vérification du groupe de climatisation ; Air Technology est intervenue sur site le 14 février 2017 puis a estimé suivant rapport en date du 24 avril 2017 qu’il était possible de minimiser les émissions sonores en déplaçant les unités concernées en toiture, tout en mettant un support anti-vibratile ainsi qu’une isolation acoustique de l’ensemble des unités concernées’ ;
La société Eurofins Analyses ne justifie pas que les plots antivibratil sous le caisson d’extracteur constatés par M. [S] dans son rapport du 2 juillet 2020 soient conformes au support anti-vibratile préconisé par la société Air Technology ; le procès-verbal du 19 avril 2021 (pièce 2.11) dans lequel l’huissier constate que ‘les trois groupes de climatisation, sur la toiture de l’immeuble, présentant le nom Eurofins, sont disposés sur des supports anti-vibratiles’ ne permet pas de déterminer si ces supports anti-vibratiles étaient présents avant le jugement du 16 mars 2021 et s’ils correspondent aux préconisations de la société Air Technology ;
Le fait que M. [M] considère qu’il a été justifié de la pose de supports anti-vibratiles et de l’isolation acoustique des unités de climatisation déplacées en toiture postérieurement au jugement ne sauraient entraîner la réformation du jugement puisque la décision du tribunal était justifiée et le reste devant la cour ;
Le fait que postérieurement au jugement, la société Eurofins Analyses ait délivré congé des locaux et quitté les lieux en janvier 2022 ne saurait entraîner la réformation du jugement puisque la décision du tribunal était justifiée et le reste devant la cour ;
Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a condamné la société Eurofins Analyses pour le bâtiment Ile-de-France à faire réaliser les travaux de traitement acoustique suivants conformément aux préconisations du bureau d’études Réson’Air (rapport du 9 mars 2017) et de la société Air Technology (rapport du 24 avril 2017) :
‘ doublage de la gaine existante de l’extracteur de sorbonne,
‘ mise en place du support anti-vibratile,
‘ isolation acoustique des unités de climatisation déplacées en toiture,
le tout, dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement et ce, sous astreinte provisoire de 1.000 € par jour de retard pendant deux mois, passé ce délai ;
Sur la demande de M. [M] de condamner les société [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam Property à faire cesser les troubles
En l’espèce, les premiers juges ont à juste titre mentionné que ‘Il est constant que les troubles sont imputables aux activités de l’ensemble des défenderesses, notamment en ce que leurs installations critiquées ont continué de fonctionner en période nocturne, soit après 22 heures.
Si aucune demande de condamnation n’est recevable contre la société UJA à défaut d’appel en la cause de son liquidateur judiciaire, la société [Localité 9] Prime Office 1, propriétaire actuelle de l’immeuble sis [Adresse 3], et la société Imodam Property en qualité de gestionnaire de cet immeuble, sont responsables in solidum de toutes nuisances occasionnées par les installations de l’immeuble, y compris celles utilisées par la société liquidée’ ;
Le fait que postérieurement au jugement, la société Eurofins Analyses ait délivré congé des locaux et quitté les lieux en janvier 2022 ne saurait entraîner la réformation du jugement puisque la décision du tribunal était justifiée et le reste devant la cour pour les motifs exposés plus haut ;
Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a condamné in solidum la société [Localité 9] Prime Office et la société Imodam Property à prendre toutes mesures nécessaires à la cessation des nuisances sonores et à en justifier dans un délai de six mois à compter de la signification du présent jugement et, passé ce délai, sous astreinte de 1.000 € par nuisance sonore constatée par un acousticien, les services de la ville de Paris ou par un huissier de justice muni d’un appareil de mesure acoustique ;
Sur la demande de M. [M] de condamner les sociétés [Localité 9] Prime Office 1, Imodam Property et Eurofins Analyses à arrêter les installations la nuit
En l’espèce, les premiers juges ont exactement relevé que ‘Les très nombreuses pièces analysées ci-dessus établissent l’existence de nuisances majeures survenues pendant cette période nocturne, de sorte que cette demande est évidemment justifiée, et ce jusqu’à ce que la mise en conformité des installations critiquées soit constatée’ ;
En conséquence, sachant que la condamnation sur ce point n’est pas contestée par la société Eurofins Analyses, le jugement est confirmé en ce qu’il a :
– enjoint aux sociétés [Localité 9] Prime Office 1, Imodam Property et Eurofins Analyses de mettre à l’arrêt chaque nuit de 22 heures à 7 heures du matin, à compter de la signification du présent jugement, les installations critiquées, à savoir :
‘ le condenseur de chambre froide de la restauration collective de l’immeuble,
‘ les climatiseurs extérieurs situés dans les locaux loués par la société Un Jour Ailleurs,
‘ les installations de la société Eurofins Analyses : l’extracteur de sorbonne, les installations de chauffage et de climatisation,
– dit que cette injonction est ordonnée sous astreinte de 1.000 € par nuisance sonore nocturne constatée par un acousticien, les services de la ville de [Localité 9] ou par un huissier de justice muni d’un appareil de mesure acoustique et ce, jusqu’à la production de deux rapports distincts de mesures acoustiques établis de manières concertée entre les parties, attestant que le bruit ambiant dans la chambre de M. [V] [M] n’excède pas un niveau global de 37 dB(A) lorsque tout ou partie des appareils (ventilation, extraction d’air, climatisation) sont en état de fonctionnement,
– dit n’y avoir lieu à se réserver la liquidation de l’astreinte ;
Sur les appels en garantie formées par les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1et Imodam Property, à l’encontre de la société Eurofins Analyses
Les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam Property sollicitent de condamner la société Eurofins Analyses à les garantir des condamnations en principal, intérêts, frais, dépens et astreintes, prononcées à leur encontre, sur le fondement contractuel, à hauteur de 80 % pour la période antérieure à août 2016, à hauteur de 90% d’août 2016 à janvier 2018 et à hauteur de 100% à compter de février 2018 jusqu’à son départ des lieux loués ; elles estiment que le problème du bruit du condensateur du restaurant a été solutionné le 2 novembre 2015 et que la société UJA a mis en place un écran acoustique début 2018 ;
En l’espèce, les premiers juges ont exactement retenu que ‘S’agissant du contrat de bail signé le 6 janvier 2012 contre la société Terreïs et la société Eurofins Analyses, celui-ci stipule en son article II que :
‘Le preneur devra exercer son activité de manière à ne donner lieu à aucune contravention ni à aucune plainte ou réclamation de la part de qui que ce soit, et notamment des voisins, et dans le cas où des réclamations seraient exercées pour toute cause quelconque qui lui serait imputable, le bailleur entend dès à présent décliner toute responsabilité à cet égard et être garanti par le preneur de toutes les conséquences qui pourraient résulter et de tous frais et honoraires qu’il pourrait débourser à ce sujet. Le preneur dégage en conséquence le bailleur de toute poursuite ou frais judiciaires qui pourraient être engagés par les avoisinants pour toute cause qui lui serait imputable”.
Le même acte stipule que le preneur doit assurer l’exercice de son activité en conformité rigoureuse avec les prescriptions légales et administratives et exécuter à ses frais tous travaux pouvant être demandés ou imposés par les administrations concernées ; en vertu de son article VI-I, le preneur fait son affaire personnelle de tous travaux et formalités prescrits par l’administration aux réglementations quelconques ; selon l’article VI-5, il ne pourra installer aucune machine ou moteur sans l’autorisation écrite du bailleur et fera supprimer sans délai ceux qui seraient installés après autorisation, si leur fonctionnement venait à motiver des réclamations justifiées des locataires et voisins.
Selon l’article VI- 6 enfin, tous les travaux exécutés par les preneurs le sont sous sa responsabilité et à ses risques et périls ; le preneur s’engage à ne rien faire qui puisse nuire à la tranquillité à la jouissance paisible des voisins et fera son affaire personnelle de toute réclamation qui serait faite (article VI-12) ; enfin, des obligations similaires sont prévues à l’article VI-14 pour le fonctionnement du restaurant inter-entreprises, les locataires assurant la gestion du restaurant inter-entreprises et faisant leur affaire personnelle de ses conditions d’exploitation et de toutes nuisances causées au voisinage.
Un second contrat de bail conclu avec la société Eurofins Analyses le 12 novembre 2012 sur les bureaux du rez-de-chaussée comporte des clauses identiques’ ;
Ainsi par la commission de nuisances sonores constituant un trouble anormal de voisinage au préjudice de M. [M] et l’absence de déclaration de travaux de la gaine d’extraction de sorbonnes en façade de l’immeuble transmise au bailleur et à la ville de Paris en méconnaissance des termes de l’article R421-17 du code de l’urbanisme, la société Eurofins Analyses n’a pas respecté les dispositions contractuelles ci-avant et a engagé sa responsabilité contractuelle à l’égard des sociétés successivement propriétaires de l’immeuble et bailleurs, Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1, et de la société gestionnaire Imodam Property ;
Il y a lieu d’ajouter qu’il est justifié selon l’analyse ci-avant, d’une part que les installations de la société Eurofins Analyses sont à l’origine de nuisances sonores constitutive de troubles anormaux de voisinage sur la période de 2014 à mars 2020, et d’autre part que le condensateur de la chambre froide du restaurant inter-entreprise et les climatiseurs de la société locataire Un Jour Ailleurs n’ont contribué que dans une moindre mesure aux nuisances sonores subies par M. [M] en comparaison des nuisances produites par les installations de la société Eurofins Analyses ;
Il est justifié que les nuisances en provenance du condensateur du restaurant inter-entreprises ont pris fin le 30 décembre 2015 (pièces 26-1 à 28) mais aucune pièce ne démontre que les nuisances en provenance des installations de la société UJA aient été solutionnées avant la liquidation judiciaire de la société le 14 août 2020 ;
Il convient d’estimer que les nuisances sonores en provenance des installations de la société Eurofins Analyses ont constitué 80% des nuisances sonores totales constitutives d’un trouble anormal de voisinage jusqu’au 30 décembre 2015 puis 90% des nuisances sonores totales constitutives d’un trouble anormal de voisinage à compter du 1er janvier 2016 ;
Il y a donc lieu de faire droit à la demande des sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam Property de condamner la société Eurofins Analyses à les garantir à hauteur de 80 % pour la période antérieure à août 2016, à hauteur de 90% à partir d’août 2016 ;
En conséquence, le jugement est infirmé en ce qu’il a condamné la société Eurofins Analyses à garantir les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam Property à hauteur de 80 % des condamnations en principal, intérêts, frais, dépens et astreintes, prononcées à leur encontre ;
Il convient de condamner la société Eurofins Analyses à garantir les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam à hauteur de 80 % pour la période antérieure à août 2016 et à hauteur de 90% à partir d’août 2016 des condamnations en principal, intérêts, frais, dépens et astreintes, prononcées à leur encontre en première instance ;
Et il y a lieu d’ajouter au jugement de condamner la société Eurofins Analyses à garantir les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam à hauteur de 80 % des condamnations en frais et dépens, prononcées à leur encontre en appel ;
Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l’application qui y a été équitablement faite de l’article 700 du code de procédure civile ;
La société Eurofins Analyses, la société [Localité 9] Prime Office 1, la société Terreïs et la société Imodam, anciennement Imodam Property, parties perdantes, doivent être condamnées in solidum aux dépens d’appel ;
La société [Localité 9] Prime Office 1, la société Terreïs et la société Imodam sont condamnées in solidum à payer à M. [M] la somme supplémentaire de 15.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
La société Eurofins Analyses est condamnée à payer à la société [Localité 9] Prime Office 1, la société Terreïs et la société Imodam la somme unique de 7.500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,
Confirme le jugement excepté en ce qu’il a :
– condamné in solidum les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam Property à payer à M. [M] la somme de 37.000 €, au titre de son préjudice de jouissance et de son préjudice moral, subis sur la période de mars 2014 à mars 2020,
– condamné la société Eurofins Analyses à garantir les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam Property à hauteur de 80 % des condamnations en principal, intérêts, frais, dépens et astreintes, prononcées à leur encontre ;
Statuant sur les chefs réformés et y ajoutant,
Condamne in solidum les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam, anciennement Imodam Property, à payer à M. [V] [M] :
– la somme de 28.800 €, au titre de son préjudice de jouissance, subi sur la période de début mars 2014 au 3 mars 2020,
– la somme de 7.200 €, au titre de son préjudice moral, subi sur la période de début mars 2014 au 3 mars 2020 ;
Condamne la société Eurofins Analyses pour le bâtiment Île-de-France à garantir les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam à hauteur de 80 % pour la période antérieure à août 2016 et à hauteur de 90% à partir d’août 2016 des condamnations en principal, intérêts, frais, dépens et astreintes, prononcées à leur encontre en première instance ;
Déboute M. [V] [M] de sa demande en appel de condamner in solidum les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam, anciennement Imodam Property, à lui verser la somme de 6.500 € au titre de son préjudice de jouissance et de son préjudice moral subis sur la période du 4 mars 2020 à fin avril 2021 ;
Condamne la société Eurofins Analyses pour le bâtiment Île-de-France à garantir les sociétés Terreïs, [Localité 9] Prime Office 1 et Imodam, anciennement Imodam Property, à hauteur de 80 % des condamnations en frais et dépens, prononcées à leur encontre en appel ;
Condamne in solidum la société Eurofins Analyses pour le bâtiment Île-de-France, la société [Localité 9] Prime Office 1, la société Terreïs et la société Imodam, anciennement Imodam Property, aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum la société [Localité 9] Prime Office 1, la société Terreïs et la société Imodam, anciennement Imodam Property, à payer à M. [V] [M] la somme supplémentaire de 15.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
Condamne la société Eurofins Analyses pour le bâtiment Île-de-France à payer à la société [Localité 9] Prime Office 1, la société Terreïs et la société Imodam, anciennement Imodam Property, la somme unique de 7.500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
Rejette toute autre demande.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT