Tentative de conciliation : 27 janvier 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/02489

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Tentative de conciliation : 27 janvier 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/02489
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27/01/2023

ARRÊT N°62/2023

N° RG 21/02489 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OGO4

FCC/AR

Décision déférée du 05 Mai 2021 – Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de TOULOUSE (18/11345)

PRIVAT F

[K] [S] div.[F]

C/

S.A.R.L. [3]

S.A. [5]

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA HAUTE GARONNE

CONFIRMATION TOTALE

Grosse délivrée le 27 01 23

à Me Renaud FRECHIN

Me Pascal BABY

Me Annie BERLAND

CPAM (lrar)

CCC délivrée (en lrar)

le 27 01 23

à Mme [S] DIV [F]

SARL [3]

SA [5]

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 2 – Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT SEPT JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

Madame [K] [S] divorcée [F]

[Adresse 1]

représentée par Me Renaud FRECHIN de la SCP CABINET DENJEAN ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEES

S.A.R.L. [3]

prise en la personne de son représentant légal domiciliée es qualités audit siège [Adresse 6]

représentée par Me Pascal BABY, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A. [5]

agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié es qualité audit siège: [Adresse 4]

représentée par Me Annie BERLAND de la SELARL RACINE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX substituée par Me Benoit PERINGUEY de la SELARL RACINE, avocat au barreau de BORDEAUX

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA HAUTE-GARONNE prise en la personne de son représentant légal domiciliée es qualités audit siège [Adresse 2]

représentée par Mme [W] [V] (Membre de l’établissement) en vertu d’un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 945.1 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 02 Décembre 2022, en audience publique, devant F. Croisille-Cabrol, conseillère, chargée d’instruire l’affaire, les parties ne s’y étant pas opposées. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

C. Brisset, présidente

A. Pierre-Blanchard, conseillère

F. Croisille-Cabrol, conseillère

Greffier, lors des débats : K. Souifa faisant fonction de greffier

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile

– signé par C. Brisset, présidente, et par A. Ravéane, greffièrer de chambre.

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [K] [S] divorcée [F] a été embauchée suivant contrat de travail à durée indéterminée à compter du 4 mars 2013 par la SARL [3], en qualité de responsable de magasin. Elle était la responsable de la boutique de [Localité 7].

Mme [F] a dit avoir été victime d’un accident de travail du 24 juin 2015. Le certificat médical du 24 juin 2015 établi par le Dr [D] mentionnait : ‘cervicalgies droites post-traumatiques + dorsalgies droites avec limitation douloureuse de la rotation latérale droite et de la flexion postérieure. Décompensation d’une scoliose antérieure’.

Le 3 juillet 2015, il a été effectué une déclaration d’accident du travail mentionnant : ‘la victime a déclaré être tombée dans l’escalier’. Par LRAR du 8 juillet 2015, la SARL [3] a émis des réserves sur cet accident auprès de la CPAM. Après enquête, par décision notifiée le 16 septembre 2015, la CPAM de la Haute-Garonne a reconnu le caractère professionnel de l’accident.

Mme [F] a été placée :

– en arrêt pour accident du travail du 24 au 29 juin 2015,

– en arrêt maladie du 30 juin 2015 au 17 mai 2016.

Le 12 octobre 2015, la CPAM a notifié à Mme [F] un taux d’IPP de 2 %, donnant droit à un capital de 668,88 € au 2 septembre 2015, l’intéressée ayant été déclarée consolidée de son accident du travail au 1er septembre 2015.

Mme [F] a été déclarée inapte par le médecin du travail suivant avis du 5 janvier 2016 et licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement par LRAR du 27 janvier 2016. La relation de travail a pris fin au 4 février 2016.

Mme [F] a adressé à la CPAM un courrier daté du 12 juillet 2016, envoyé le 15 juillet 2016 et reçu le 18 juillet 2016, aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.

Par courrier du 13 septembre 2016, la CPAM a invité Mme [F] à se rapprocher de la SARL [3] afin de connaître sa position : si ce dernier avait l’intention de reconnaître une faute inexcusable, Mme [F] devrait saisir de nouveau la CPAM aux fins de conciliation ; si l’employeur niait la faute inexcusable, Mme [F] devait saisir le tribunal des affaires de sécurité sociale.

Le 11 septembre 2018, Mme [F] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Garonne devenu ensuite le pôle du tribunal judiciaire de Toulouse aux fins de reconnaissance d’une faute inexcusable.

Par jugement du 5 mai 2021, rendu entre Mme [F], la SARL [3], la SA [5] assureur de la société, et la CPAM, le pôle social du tribunal judiciaire de Toulouse a :

– débouté Mme [F] de l’ensemble de ses demandes,

– condamné Mme [F] au paiement des dépens,

– débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires.

Mme [F] a relevé appel de ce jugement le 3 juin 2021, dans des conditions de forme et de délai non discutées, en énonçant dans sa déclaration d’appel les chefs critiqués.

Par conclusions n° 2 notifiées par voie électronique le 30 novembre 2022, auxquelles il est expressément fait référence à l’audience, Mme [F] demande à la cour de :

– juger recevables l’appel et l’action de Mme [F],

– infirmer la décision dont appel,

statuant à nouveau,

– reconnaître la faute inexcusable de la SARL [3],

– fixer au maximum la majoration de l’indemnité en capital allouée à Mme [F],

– fixer les dommages et intérêts à verser à Mme [F] aux sommes suivantes :

* 8.000 € au titre du préjudice d’agrément,

* 20.000 € au titre du préjudice professionnel,

* 8.000 € au titre du préjudice moral,

– à défaut et afin de déterminer l’importance de ces différents postes de préjudices, désigner un expert qui pourra s’adjoindre tout spécialiste de son choix,

– déclarer l’arrêt commun à la SARL [3], à la CPAM, et à la SA [5], et ce avec toutes ses conséquences légales,

– condamner la SARL [3], la CPAM et la SA [5] à verser à Mme [F] la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Par conclusions n° 2 notifiées par voie électronique le 4 novembre 2022, auxquelles il est expressément fait référence, la SARL [3] demande à la cour de :

– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Mme [F] de l’ensemble de ses demandes, débouté la SA [5] et la CPAM de leurs demandes à l’encontre de la SARL [3] et condamné Mme [F] aux dépens,

– réformer le jugement en ce qu’il a débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

Et statuant à nouveau :

– juger prescrite l’action de Mme [F] introduite le 11 septembre 2018 à l’encontre de la SARL [3],

– débouter Mme [F] de l’ensemble de ses demandes,

A titre infiniment subsidiaire, dans le cas extraordinaire où la faute inexcusable de l’employeur serait retenue :

– fixer le montant de l’indemnisation au titre des souffrances endurées à une somme de 500 €,

– fixer la majoration de la rente suivant les dispositions légales,

– débouter Mme [F] du surplus de ses demandes,

– débouter la CPAM de Haute-Garonne du surplus de ses demandes à l’encontre de la SARL [3],

– débouter la SA [5] du surplus de ses demandes à l’encontre de la SARL [3],

En tout état de cause :

– déclarer le jugement commun à la CPAM de Haute-Garonne et à la SA [5],

– condamner la CPAM et Mme [F] à verser chacune à la SARL [3] une somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 4 avril 2022, auxquelles il est expressément fait référence, la SA [5] demande à la cour de :

A titre principal :

– confirmer la décision dont appel sur l’ensemble de ses dispositions,

– débouter la CPAM Haute-Garonne, Mme [K] [F], et toute autre partie de leurs demandes, fins et conclusions,

– condamner Mme [F] à payer à la SA [5] la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens,

A titre subsidiaire :

si par extraordinaire la cour considérait que la SARL [3] commis une faute inexcusable :

– limiter l’indemnisation des souffrances endurées de Mme [F] à 500 €,

– fixer conformément aux dispositions de l’article L.452-2 du code de la sécurité sociale, le montant de la majoration du capital alloué sur la base d’un taux d’IPP de 2 %,

– débouter Mme [F] et la CPAM de Haute-Garonne du surplus de leurs demandes, fins et conclusions,

A titre infiniment subsidiaire :

si par extraordinaire la cour ne s’estimait pas suffisamment éclairée s’agissant de la liquidation des postes :

– donner acte à la SA [5] de ce qu’elle ne s’oppose pas à la mesure d’expertise sollicitée, sous réserve des seuls chefs de mission conformes aux postes de préjudice couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale,

– débouter Mme [F] de sa demande d’expertise judiciaire de type droit commun,

En tout état de cause :

– débouter toutes parties de ses demandes de condamnation à l’encontre de la SA [5],- déclarer l’arrêt à intervenir opposable la SA [5].

Par conclusions n° 3 notifiées par voie électronique le 2 décembre 2022, auxquelles il est expressément fait référence, la CPAM de la Haute-Garonne demande à la cour de :

– donner acte à la CPAM que la SARL [3] a abandonné toutes prétentions dans le cadre de la présente procédure visant à se voir reconnaître inopposable la décision de prise en charge de l’accident du travail déclaré par Mme [F],

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a considéré que l’action de Mme [F] est recevable,

dans l’hypothèse où la cour venait à retenir que la preuve de l’existence d’un accident du travail à la date du 24 juin 2015, n’est pas rapportée :

– débouter Mme [F] de sa demande en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur,

dans l’hypothèse où la cour venait à retenir que la preuve de l’existence d’un accident du travail à la date du 24 juin 2015 est rapportée :

– donner acte à la CPAM qu’elle s’en remet à justice en ce qui concerne l’appréciation de l’existence d’une faute inexcusable imputable à l’employeur,

dans l’hypothèse où la faute inexcusable serait retenue :

– dire que l’arrêt à intervenir sera déclaré commun à la CPAM de la Haute-Garonne, qui sera chargée de procéder auprès de la victime au paiement de la majoration de la rente et au versement des indemnités allouées en réparation des préjudices subis,

– fixer à son maximum la majoration de rente (soit la somme de 666,88 €),

– débouter Mme [F] de sa demande d’indemnisation directe du préjudice d’agrément, du préjudice moral, et du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de chance et de promotion professionnelle, tels que listés à l’article L.452-3 du code de la sécurité sociale,

– débouter Mme [F] de ses demandes d’indemnisation au titre de la perte de gains professionnels après consolidation, l’incidence professionnelle, et le déficit fonctionnel permanent,

– donner acte à la CPAM qu’elle s’en remet à l’appréciation souveraine de la cour en ce qui concerne la réparation du déficit fonctionnel temporaire de Mme [F],

– donner acte à la CPAM qu’elle ne s’oppose pas à la réalisation avant dire droit d’une expertise médicale, afin d’évaluer les postes de préjudices suivants :

* les souffrances physiques et morales endurées,

* le déficit fonctionnel temporaire,

* le préjudice d’agrément,

* le préjudice résultant de la perte ou de la diminution de chances de promotion professionnelle,

– dire que les frais d’expertise seront avancés par la CPAM, et récupérés par cette dernière auprès de la SARL [3],

– accueillir l’action récursoire de la CPAM à l’encontre de la SARL [3],

– dire en conséquence que la CPAM récupérera directement et immédiatement auprès de la SARL [3] le montant des sommes allouées au titre de la majoration de rente (soit la somme de 666,88 €) et de la réparation des préjudices subis par Mme [F],

– déclarer le jugement à intervenir commun et opposable à la SA [5], en sa qualité d’assureur de la SARL [3],

En tout état de cause :

– statuer ce que de droit sur les dépens,

– rejeter toute demande visant à voir condamner la CPAM au paiement d’une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

A l’audience du 2 décembre 2022, toutes les parties se sont accordées pour que toutes les conclusions échangées même tardivement soient recevables.

MOTIFS

1 – Sur la faute inexcusable :

Aux termes de l’article L 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l’accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur ou de ceux qu’il s’est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire.

Cette disposition est également applicable en cas de maladie professionnelle en application de l’article L 461-1.

Constitue une faute inexcusable le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat, lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Sur la prescription de l’action engagée par Mme [F] :

Aux termes de l’article L 431-2 du code de la sécurité sociale, les droits de la victime ou de ses ayants droit aux prestations et indemnités prévues par le présent livre se prescrivent par deux ans à dater :

1°) du jour de l’accident ou de la cessation du paiement de l’indemnité journalière ;

2°) dans les cas prévus respectivement au premier alinéa de l’article L. 443-1 et à l’article L. 443-2, de la date de la première constatation par le médecin traitant de la modification survenue dans l’état de la victime, sous réserve, en cas de recours préalable, de l’avis émis par l’autorité compétente pour examiner ce recours ou de la date de cessation du paiement de l’indemnité journalière allouée en raison de la rechute ;

3°) du jour du décès de la victime en ce qui concerne la demande en révision prévue au troisième alinéa de l’article L. 443-1 ;

4°) de la date de la guérison ou de la consolidation de la blessure pour un détenu exécutant un travail pénal ou un pupille de l’éducation surveillée dans le cas où la victime n’a pas droit aux indemnités journalières.(…)

Toutefois, en cas d’accident susceptible d’entraîner la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, ou de ceux qu’il s’est substitués dans la direction, la prescription de deux ans opposable aux demandes d’indemnisation complémentaire visée aux articles L. 452-1 et suivants est interrompue par l’exercice de l’action pénale engagée pour les mêmes faits ou de l’action en reconnaissance du caractère professionnel de l’accident.

Par ailleurs, lorsque la CPAM est saisie d’une demande de reconnaissance du caractère professionnel de l’accident, le délai ne peut commencer à courir avant la décision de reconnaissance.

C’est le point de départ le plus favorable au salarié qu’il convient de retenir.

Le tribunal judiciaire a écarté la prescription soulevée par la SARL [3] concernant l’action de Mme [F], aux motifs que le délai de 2 ans avait commencé à courir à la date de consolidation du 1er septembre 2015, avait été interrompu au 15 juillet 2016 par la saisine de la CPAM même si le courrier ne portait pas la signature manuscrite de Mme [F], puis par le procès-verbal de non-conciliation du 13 septembre 2016 (sic), de sorte qu’au jour de la saisine de la juridiction du 19 décembre 2017 (sic), Mme [F] n’était pas prescrite.

Sur ce, les indemnités journalières pour accident du travail ont été versées jusqu’au 29 juin 2015 ; toutefois, ce n’est que par décision du 16 septembre 2015 que la CPAM a reconnu l’existence d’un accident du travail. Le délai de 2 ans a donc commencé à courir au 16 septembre 2015. Ce délai a été interrompu par la demande de Mme [F] aux fins de reconnaissance d’une faute inexcusable reçue par la CPAM le 18 juillet 2016 ; en effet, ce courrier émanait de manière certaine de Mme [F], dont il portait en bas la signature dactylographiée même s’il ne portait pas sa signature manuscrite, et la CPAM y a apporté une réponse par courrier du 13 septembre 2016 en estimant ne pas avoir à organiser à ce stade de tentative de conciliation. C’est ce dernier courrier qui a fait courir un nouveau délai de 2 ans. Or, ce délai a été interrompu le 11 septembre 2018 par la saisine du tribunal des affaires de sécurité sociale aux fins de reconnaissance d’une faute inexcusable.

Mme [F] n’est donc pas prescrite en son action.

Sur le fond :

Initialement, la SARL [3] demandait que la décision de la CPAM du 16 septembre 2015 de prise en charge de l’accident du travail du 24 juin 2015 lui soit déclarée inopposable ; en cours de procédure d’appel, la société a abandonné cette demande ; toutefois, elle conteste toujours le caractère professionnel de l’accident aux motifs que les circonstances en seraient indéterminées ; cette contestation formée par voie d’exception dans le cadre d’une procédure de reconnaissance d’une faute inexcusable est recevable.

Le 24 juin 2015, jour de l’accident du travail allégué, Mme [F] a été placée en arrêt pour accident du travail en raison de cervicalgies post-traumatiques et de dorsalgies, et ce, jusqu’au 29 juin 2015. Le même jour, elle a prévenu la SARL [3] de l’accident, laquelle a effectué une déclaration d’accident du travail le 3 juillet 2015 mentionnant que la victime disait être tombée dans l’escalier. La SARL [3] émettant des réserves sur l’existence d’un accident du travail par courrier du 8 juillet 2015 aux motifs qu’il n’y avait pas de témoin, et que Mme [F] était dépressive et désireuse d’obtenir une rupture conventionnelle, la CPAM a mené une enquête qui l’a conduite à retenir l’existence d’un accident du travail par décision du 16 septembre 2015. Lors d’un questionnaire du 22 juillet 2015, Mme [F] a déclaré que, vers 17h15, alors qu’il n’y avait pas de client dans le magasin, elle était descendue à la réserve ranger 3 paires de chaussures non soldées qu’elle avait montées précédemment vers 16h pour une cliente ; que l’escalier était tournant, sans rampe, avec une première marche plus haute ; qu’elle avait glissé dans l’escalier ‘après la 3e marche’ ou ‘à partir de la 3e et 4e marche’, et s’était rattrapée avec la main droite qui était libre au poteau central et blessée à l’épaule et aux cervicales ; qu’elle avait prévenu par SMS sa directrice puis était partie voir un médecin. Dans son courrier aux fins de reconnaissance de faute inexcusable du 20 juin 2016 adressé à la CPAM, Mme [F] a indiqué qu’elle avait glissé dans l’escalier et s’était rattrapée avec la main droite au poteau central, se faisant mal au dos, sans prétendre qu’elle était tombée depuis la première marche. Contrairement à ce que soutiennent la SARL [3] et la SA [5], Mme [F] n’a pas varié dans sa version de l’accident.

Ni le fait qu’il n’y ait pas eu de témoin, ni celui que Mme [F] ait eu une santé fragile puisqu’elle souffrait de dépression et d’une scoliose préexistante, ni celui qu’elle ait précédemment souhaité une rupture conventionnelle, ne rendent les circonstances de l’accident du travail indéterminées : Mme [F] a glissé au début de sa descente de l’escalier, s’est rattrapée au poteau central et s’est cogné le dos. La SARL [3] et la SA [5] ne prétendent pas qu’une glissade et une chute seraient incompatibles avec les blessures constatées par le médecin liées à une décompensation traumatique de scoliose.

La cour estime que Mme [F] a bien été victime d’un accident du travail survenu le 24 juin 2015.

Mme [F] estime que la faute inexcusable résulte de l’absence de sécurisation de l’escalier (vétuste, en colimaçon, marches irrégulières, absence de rampe, fils électriques apparents, absence de moyen de montée des boîtes de chaussures) et du rythme important de travail surtout en ce premier jour de soldes.

S’agissant de l’escalier, Mme [F] produit uniquement une attestation dactylographiée d’une personne travaillant dans la boutique voisine et un mail d’un client affirmant que l’escalier menant à la réserve ne comportait pas de rampe. La cour se demande toutefois comment ces personnes auraient pu faire des constatations personnelles sur l’escalier qui est interdit au public. De son côté, la SARL [3] verse aux débats des photographies de l’escalier pourvu d’une balustrade sur les 4 dernières marches et de deux tronçons de rampes de l’autre côté, également en bas, Mme [F] affirmant que ces tronçons ont été rajoutés après l’accident.

Il demeure que Mme [F] qui supporte la charge de la preuve de la faute inexcusable ne produit aucune photographie de l’époque de l’escalier. Les photographies versées par l’employeur montrent un escalier tournant, plutôt large, avec des marches régulières pourvues d’arrêtoirs blancs au bout ; les fils électriques dans la cage d’escalier sont parfaitement collés aux murs, sans risque que l’utilisateur ne trébuche ; si cet escalier est ancien, pour autant sa dangerosité n’est pas démontrée. Par ailleurs, il ne saurait être exigé que l’employeur installe un monte-charge pour les boîtes de chaussures, d’ailleurs la faisabilité technique d’une telle installation est inconnue.

De plus, Mme [F] ne produit aucun élément démontrant une surcharge chronique de travail ayant généré une fatigue, la discussion entre les parties sur le nombre de chaussures vendues en ce premier jour de soldes – nombre nécessairement plus important que d’ordinaire – n’étant pas représentative d’une telle surcharge. Au surplus, elle indique elle-même qu’au moment de l’accident, il n’y avait pas de clients dans le magasin même s’il y en avait eu des dizaines au cours de la journée.

La cour estime donc qu’il n’est pas établi un danger auquel était exposé la salariée et dont l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience sans prendre les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Par confirmation, elle déboutera Mme [F] de sa demande de reconnaissance d’une faute inexcusable.

2 – Sur les frais et dépens :

Mme [F] qui succombe supportera les dépens de première instance et d’appel et ses frais irrrépétibles. La SARL [3] sera déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile dirigée contre Mme [F] et la CPAM, et la SA [5] de sa demande dirigée contre Mme [F].

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

Condamne Mme [K] [F] aux dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Catherine Brisset, présidente, et par Arielle Raveane, greffière.

La greffière La présidente

A. Raveane C. Brisset

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