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ARRET
N°
[L]
C/
[P]
[C]
S.E.L.A.R.L. EVOLUTION
VA/DK/VB
COUR D’APPEL D’AMIENS
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU VINGT SIX SEPTEMBRE
DEUX MILLE VINGT TROIS
Numéro d’inscription de l’affaire au répertoire général de la cour : N° RG 22/00897 – N° Portalis DBV4-V-B7G-ILQG
Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL DE PROXIMITE D’ABBEVILLE DU TRENTE ET UN DECEMBRE DEUX MILLE VINGT ET UN
PARTIES EN CAUSE :
Monsieur [S] [L]
né le 07 Juin 1953 à [Localité 6]
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 4]
Représenté par Me Marie-Christine MISSIAEN, avocat au barreau d’AMIENS
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/002336 du 24/03/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle d’AMIENS)
APPELANT
ET
Monsieur [R] [K] [N] [P]
né le 30 Juin 1990 à [Localité 3]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 5]
Madame [B] [S] [G] [C]
née le 07 Avril 1986 à [Localité 3]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentés par Me SCHULLER substituant Me Naldi VARELA FERNANDES, avocats au barreau d’AMIENS
INTIMES
La SELARL EVOLUTION, inscrite au RCS de Saint Quentin sous le n° 504 058421, agissant ès qualités de Mandataire Judiciaire de Monsieur [S] [C] [L], inscrit au Répertoire SIREN sous le n° 378 184 840, dont l’adresse est [Adresse 7] [Localité 4], suite à jugement prononçant l`ouverture d’une procédure de redressement judiciaire ouverte par décision du Tribunal de Commerce d’Amiens en date du 08 avril 2022
[Adresse 2]
[Localité 3]
Assignée à personne morale le 10/01/2023
PARTIE INTERVENANTE
DEBATS :
A l’audience publique du 06 juin 2023, l’affaire est venue devant M. Pascal BRILLET, Président de chambre, et M. Vincent ADRIAN, conseiller, magistrats rapporteurs siégeant sans opposition des avocats en vertu de l’article 786 du Code de procédure civile. Le Président a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 19 septembre 2023.
La Cour était assistée lors des débats de Madame Diénéba KONÉ, greffier.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Les magistrats rapporteurs en ont rendu compte à la Cour composée de M. Pascal BRILLET, Président, M. Vincent ADRIAN et Mme Myriam SEGOND, Conseillers, qui en ont délibéré conformément à la Loi.
PRONONCE DE L’ARRET :
Les parties ont été informées par voie électronique du prorogé du délibéré au 26 septembre 2023 par sa mise à disposition au greffe.
Le 26 septembre 2023, l’arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par M. Pascal BRILLET, Président de chambre, et Mme Vitalienne BALOCCO, greffier.
*
* *
DECISION :
M. [S] [L] est propriétaire du château de [Localité 4] sur la commune du même nom (80).
Selon acte du 12 janvier 2020, il a été convenu de la location du château, du chapiteau et du grand salon à M. [R] [P] et à Mme [B] [C] pour la réception de leur mariage, le week-end du 30 juillet 2021, 16 h, au 2 août 2021, 16 h, pour le prix de 5 000 euros, un premier acompte de 1 500 euros étant versé.
Le 5 septembre 2020, M. [P] et Mme [C] ont réclamé la restitution des acomptes versés, soit 3 060 euros, suite à l’effondrement du chapiteau et aux renseignements pris selon lesquels le château n’aurait pas reçu l’autorisation de recevoir du public et aurait même fait l’objet d’un arrêté municipal interdisant la réception du public dans le chapiteau et le grand salon. ‘Vous étiez donc dans l’illégalité’.
Une tentative de conciliation a échoué le 24 février 2021 en l’absence de M. [L].
Par acte du 12 juillet 2021, M. [P] et Mme [C] ont assigné M. [L] devant le tribunal de proximité d’Abbeville aux fins de le voir condamné à leur restituer les acomptes versés, 3 060 euros, et le voir condamné à leur payer des dommages et intérêts, 88,32 euros pour les faire-part inutiles, 2 000 euros pour un préjudice moral et 500 euros au titre d’une résistance abusive.
M. [L] a comparu et s’est opposé à ces demandes.
Par jugement du 31 décembre 2021, dont M. [L] a relevé appel, le tribunal de proximité d’Abbeville a prononcé la résolution du contrat, a ordonné la restitution de l’acompte de 3 060 euros et a condamné M. [L] à payer à M. [P] et Mme [C] les sommes de 88,32 euros au titre d’un préjudice financier, 1 000 euros au titre du préjudice moral et 300 euros au titre de la résistance abusive.
M. [L] a été placé en redressement judiciaire le 8 avril 2022 selon jugement du tribunal de commerce d’Amiens, la Selarl Evolution (Maître [T]) étant désignée comme mandataire judiciaire.
La cour se réfère aux dernières conclusions des parties par visa.
Vu les conclusions notifiées par M. [S] [L] le 24 mai 2022 visant à l’infirmation entière du jugement.
M. [L] soutient que M. [P] et Mme [C] ont eu peur de ‘l’événement sanitaire’ et ont fait le choix d’un autre site pour leur mariage.
Vu les conclusions notifiées par M. [P] et Mme [C] le 15 juillet 2022 visant à la confirmation du jugement sauf à le voir réformé pour obtenir les montants de leurs demandes initiales s’agissant du préjudice moral (2 000 euros) et des dommages et intérêts pour résistance abusive (500 euros).
La Selarl Evolution a fait l’objet d’une assignation en intervention forcée le 10 janvier 2023 à la suite de laquelle elle a écrit qu’elle n’interviendrait pas faute de disponibilité suffisante dans ce dossier et actant une déclaration de créances pour un montant de 5 709, 39 euros. L’arrêt sera réputé contradictoire.
L’instruction a été clôturée le 15 février 2023.
MOTIFS
Aux termes de l’article 1217 du code civil :
‘La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :
– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;
– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
– obtenir une réduction du prix ;
– provoquer la résolution du contrat ;
– demander réparation des conséquences de l’inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.’
L’existence du contrat de location est établie (pièce 1), non contestée, ainsi que le versement d’acomptes pour un montant de 1 500 euros d’abord, complété par versements mensuels pour un total de 3 060 euros.
Les pièces versées aux débats ne laissent aucun doute sur le fait que M. [L] savait pertinemment en janvier 2020 qu’il ne pouvait accueillir du public dans son château à moyen terme, ni sur le fait que cet état perdurerait en juillet 2021 en l’absence de toute action de sa part pour régulariser sa situation.
Les établissements qui se destinent à recevoir du public (ERP) doivent se plier à certains aménagements dans le but de prévenir le risque d’incendie et de panique et obtenir l’aval d’une commission de sécurité qui ouvre l’obtention de l’autorisation municipale prévue par l’article R.* 123-46 du code de la construction et de l’habitation.
Le maire de [Localité 4], ayant appris les locations pratiquées par M. [L], a fait venir la commission de sécurité de l’arrondissement d'[Localité 6], qui, après une visite le 4 avril 2018, a émis un avis défavorable, faute de tout dossier d’aménagement; avis réitéré le 27 février 2019, faute de toute initiative de M. [L] pour régulariser la situation, suivi, pour le même motif, d’un arrêté municipal du 17 avril 2019 prononçant explicitement ‘l’interdiction d’exploiter le chapiteau et de recevoir dans le grand salon du public hors le contexte de chambres d’hôtes’ (pièces 2, 3, 4 et 5).
La réception était impossible dès 2019.
M. [L], qui ne soutient pas avoir déposé un dossier d’aménagement ou avoir attaqué ces actes, savait donc pertinemment en janvier 2020 qu’il n’était pas en mesure d’exécuter le contrat.
En outre le chapiteau a connu un deuxième effondrement en mars 2020 (pièce 6, lettre du maire au sous préfet du 1er avril 2020) et M. [L] ne donne aucun renseignement sur une remise des lieux en état de réception, ni d’ailleurs, d’une manière générale, aucun renseignement factuel.
C’est de manière totalement gratuite que M. [L] impute l’attitude des locataires à un événement sanitaire imprécis ou à une volonté de changer de site.
Le contrat a été conclu de mauvaise foi et ne pouvait être exécuté. L’inexécution est flagrante.
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a prononcé la résolution du contrat de location, a ordonné la restitution de l’acompte et a indemnisé l’impression de faire-parts inutiles (88,32 euros).
L’octroi de dommages et intérêts pour préjudice moral est également justifié. M. [P] et Mme [C] ont appris la situation et demandé à l’amiable l’annulation de la réservation et la restitution de l’acompte par un courrier du 5 septembre 2020 que M. [L] ne conteste pas avoir reçu, et auquel il n’a même pas répondu, de même qu’il ne s’est pas déplacé pour la tentative de conciliation, qu’il ne conteste pas non plus, du 4 février 2021.
Après les avoir trompés, il laissait ainsi les futurs mariés dans un grand embarras, dans l’incertitude sur un sujet sensible, ayant des invitations à lancer, une autre réservation à faire, un autre acompte à régler. Cette attitude inadmissible a mis M. [P] et Mme [C] dans un embarras très réel à proximité de leur mariage, qu’il convient d’indemniser par l’octroi d’une somme de 1 500 euros.
Le jugement sera réformé en ce sens.
L’action en justice est un droit et l’appréciation inexacte qu’une partie fait de ses droits n’est pas en soi constitutive d’une faute.
Toutefois, l’exercice d’une action en justice – ou la résistance à une demande qui ne pourra se trouver satisfaite que par la saisine de la justice- peut dégénérer en abus lorsqu’ils constituent un acte de malice ou de mauvaise foi ou s’il s’agit d’une erreur grossière incompréhensible sans intention de nuire. Ainsi, aux termes de l’article 32-1 du code de procédure civile ‘Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut-être condamné à une amende civile d’un maximum de 10 000 euros sans préjudice des dommages et intérêts qui seraient réclamés’.
En l’espèce, le grief de procédure abusive sous la forme d’une résistance abusive à une demande manifestement justifiée est également fondé, et aggravé par l’appel de M. [L] qui n’apporte aucune raison pour voir la décision être infirmée. Il sera alloué 500 euros de ce chef, le jugement étant dans cette mesure réformé.
M. [P] et Mme [C] justifient d’une déclaration de créance admise (pièce 14) à la procédure de redressement judiciaire. Tenant compte de cette procédure excluant toute condamnation à paiement, la cour ordonnera l’inscription des différentes créances au passif de M. [L].
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu par le tribunal de proximité d’Abbeville sur le principe et le montant des créances indemnitaires, sauf à porter leur montant s’agissant du préjudice moral à la somme de 1 500 euros et s’agissant des dommages et intérêts pour résistance abusive à la somme de 500 euros.
Dit que lesdites créances seront inscrites au passif de M. [L] conformément aux règles prévues par les dispositions applicables du code du commerce,
Condamne M. [S] [L] aux dépens d’appel et à payer une somme de 1 500 euros à M. [R] [P] et à Mme [B] [C] en application de l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT