Tentative de conciliation : 26 janvier 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 20/02233

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Tentative de conciliation : 26 janvier 2023 Cour d’appel de Pau RG n° 20/02233
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PS/SB

Numéro 23/326

COUR D’APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 26/01/2023

Dossier : N° RG 20/02233 – N° Portalis DBVV-V-B7E-HUUX

Nature affaire :

A.T.M.P. : demande relative à la faute inexcusable de l’employeur

Affaire :

S.A.S. [5]

C/

[S] [Z], CPAM PAU PYRENEES

Grosse délivrée le

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 26 Janvier 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 27 Octobre 2022, devant :

Madame SORONDO, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame BARRERE, faisant fonction de greffière.

Madame [L], en application de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame NICOLAS, Présidente

Madame SORONDO, Conseiller

Madame PACTEAU, Conseiller

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

S.A.S. [5] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représentée par Maître PIAULT, avocat au barreau de PAU et Me DE BALBY de VERNON, avocat au barreau de Bayonne

INTIMEES :

Madame [S] [Z]

36 Avenue du 8 mai 1945

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Maître TUGAS loco Me DELPECH, avocat au barreau de BAYONNE

CPAM PAU PYRENEES

[Adresse 1]

[Localité 2]

Comparante en la personne de Monsieur [U], muni d’un pouvoir régulier

sur appel de la décision

en date du 31 AOUT 2020

rendue par le POLE SOCIAL DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PAU

RG numéro : 18/10222

FAITS ET PROCEDURE

Mme [S] [Z] a été embauchée par la société [5] comme agent de propreté par contrat à durée déterminée à temps partiel du 8 mars au 31 mars 2016 aux fins de nettoyage du parc locatif avant réouverture.

La CPAM de Pau a été destinataire d’une déclaration de la société [5] en date du 31 mars 2016 relativement à un accident de travail survenu le 25 mars 2016 à 15 h à Mme [Z]. Cette déclaration mentionnait les éléments ci-après’:

– activité de la victime lors de l’accident’: «’nettoyait le mobil home n° 4’»

– nature de l’accident’: «’est montée sur un lit pour nettoyer en hauteur et a chuté’»

– éventuelles réserves motivées’: «’est montée sur un lit malgré les consignes’»

– siège des lésions’: pied gauche

– nature des lésions’: fracture spiroïde du 5ème métatarsien

– horaire de travail de la victime le jour de l’accident’: 9 h 30 à 12 h 30 et 14 h à 18 h

– accident connu le 26 mars 2016 à 11 h décrit par la victime

Elle était accompagnée d’un certificat médical établi le 26 mars 2016 et mentionnant une «’fracture spiroïde du 5ème métatarsien pied gauche (mauvaise réception après chute au cours du travail de ménage).»

Par courriers en date du 4 avril 2016, la CPAM de Pau a notifié à Mme [Z] et à la société [5] une décision de prise en charge de l’accident au titre de la législation sur les risques professionnels.

L’état de santé de Mme [Z] a été déclaré consolidé le 30 mars 2018, avec un taux d’incapacité permanente de 8 %.

Après échec de la tentative de conciliation, Mme [Z] a saisi le 4 janvier 2017 le tribunal des affaires de sécurité sociale de Pau, devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Pau, en recherche de la faute inexcusable de l’employeur.

Par jugement du 31 août 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Pau a’:

– dit que l’accident de travail dont Mme [Z] a été victime le 25 mars 2016 est dû à une faute inexcusable de son employeur, la SAS [5],

– fixé au maximum la majoration du capital versé à Mme [Z],

– dit que cette majoration du capital sera servie par la CPAM de Pau, à charge pour elle d’en récupérer le montant auprès de la SAS [5],

– avant dire droit sur la liquidation des préjudices de Mme [Z], ordonné une expertise médicale judiciaire confiée au docteur [X], avec mission de’:

. prendre connaissance du dossier,

. examiner Mme [Z]. Recueillir ses doléances,

. se faire communiquer autant que de besoin par tout tiers détenteur, avec l’accord de la victime, le dossier médical et administratif complet de celle-ci, en particulier le certificat médical initial et les documents relatifs à l’état antérieur,

. décrire en détail les lésions que la victime rattache à l’accident du 25 mars 2016, ainsi que leur évolution,

. dire quelles sont les lésions en relation directe et certaine avec l’accident,

. décrire les souffrances endurées du fait de l’accident en y incluant les douleurs postérieures à la consolidation dès lors qu’elles ne sont pas génératrices d’un déficit permanent, les évaluer selon une échelle allant de 0/7 à 7/7,

. donner son avis sur la nature et sur l’importance du préjudice esthétique temporaire et permanent après consolidation, l’évaluer selon une échelle de 0/7 à 7/7, indépendamment de l’éventuelle atteinte fonctionnelle prise en compte au titre du déficit, assortir si nécessaire la description de photographies datées et commentées,

. qualifier la nature et l’importance du préjudice d’agrément résultant pour la victime de l’impossibilité de continuer à se livrer, après consolidation de son état de santé, à ses activités sportives ou de loisirs qu’elle pratiquait avant l’accident,

. dire si Mme [Z] a subi un préjudice fonctionnel temporaire qui inclut, pour la période antérieure à la consolidation, l’incapacité fonctionnelle totale ou partielle ainsi que le temps d’hospitalisation et les pertes de qualité de vie et de joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique. Dans l’affirmative, le préciser,

. dire si l’état de santé de Mme [Z] a nécessité, avant la consolidation de ses blessures, l’assistance d’une tierce personne ou autres frais temporaires et dans l’affirmative préciser leur nature et leur durée,

. dire si Mme [Z] a subi des préjudices exceptionnels et dans l’affirmative préciser lesquels et dans quelle importance,

– dit que l’affaire sur la liquidation des préjudices sera fixée à la première audience utile après le dépôt du rapport d’expertise,

– dit que la CPAM de Pau fera l’avance des sommes allouées à Mme [Z] en réparation de ses préjudices en lien avec son accident du travail du 25 mars 2016, à charge pour elle de récupérer le montant auprès de l’employeur, la SAS [5],

– débouté la société [5] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Ce jugement a été notifié aux parties par courriers recommandés avec demandes d’avis de réception. L’avis de réception par la société [5] est signé mais non daté.

Le 30 septembre 2020, la société [5] en a interjeté appel par déclaration reçue au greffe de la cour.

Selon avis de convocation en date du 18 mai 2022, contenant calendrier de procédure, les parties ont été convoquées à l’audience du 27 octobre 2022, à laquelle elles ont comparu.

PRETENTIONS DES PARTIES

Selon ses conclusions communiquées par RPVA le 19 octobre 2022, reprises oralement à l’audience de plaidoirie, et auxquelles il est expressément renvoyé, la société [5], appelante, demande à la cour de :

– d’infirmer le jugement déféré,

– de dire et juger que l’accident dont a été victime Mme [Z] ne revêt pas de caractère professionnel,

– à titre subsidiaire, de dire qu’elle n’a commis aucune faute inexcusable,

– de dire qu’il n’y a pas lieu à majoration du capital,

– de débouter Mme [Z] de l’ensemble de ses demandes,

– de dire qu’il n’y a pas lieu à expertise,

– à titre infiniment subsidiaire, au cas où la cour confirmerait l’expertise médicale, de limiter la mission de l’expert aux seuls préjudices non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale à l’exclusion des préjudices d’agrément, de l’assistance d’une tierce personne et du déficit fonctionnel permanent,

– de «’la’» condamner à lui verser la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– de «’la’» condamner aux entiers dépens.

Selon ses conclusions communiquées par RPVA le 6 septembre 2022, reprises oralement à l’audience de plaidoirie, et auxquelles il est expressément renvoyé, Mme [Z], intimée, demande à la cour de :

– confirmer le jugement déféré,

Ce faisant,

– de la déclarer recevable en son recours,

– de reconnaître le caractère inexcusable de la faute commise par le [5],

– avant dire droit, d’ordonner une expertise judiciaire avec la mission suivante’:

. examiner la victime,

. décrire les lésions que celle-ci impute aux faits à l’origine des dommages survenus le 25 mars 2016,

. se faire communiquer tous documents relatifs aux examens, soins et interventions dont la victime a déjà fait l’objet, leur évolution et les traitements appliqués,

. fixer la date de consolidation des blessures,

1) Au titre des préjudices patrimoniaux

Au titre des préjudices patrimoniaux temporaires avant consolidation

Au vu des décomptes et des justificatifs fournis, donner son avis sur d’éventuelles dépenses de santé ou de transport exposées par la victime avant la consolidation de ses blessures qui n’auraient pas été prises en charge par les organismes sociaux ou par les tiers payeurs, en précisant le cas échéant si le coût ou le surcoût de tels frais se rapportent à des soins ou plus généralement à des démarches nécessitées par l’état de santé de la victime et s’ils sont directement en lien avec les lésions résultant des faits à l’origine du dommage

Au vu des justificatifs fournis et, si nécessaire, après recours à un sapiteur, donner son avis sur d’éventuels besoins ou dépenses telles que notamment des frais de garde d’enfant, de soins ménagers, d’assistance temporaire d’une tierce personne, pour les besoins de la vie courante, ou encore des frais d’adaptation temporaire, soit d’un véhicule soit d’un logement, en les quantifiant et, le cas échéant, en indiquant si ceux-ci sont directement en lien avec la lésion résultant des faits à l’origine du dommage,

Indiquer les périodes pendant lesquelles la victime a été avant sa consolidation, et du fait de son incapacité fonctionnelle résultant directement des lésions consécutives aux faits à l’origine des dommages, dans l’incapacité d’exercer totalement ou partiellement une activité professionnelle ou économique,

Au titre des préjudices patrimoniaux temporaires après consolidation,

Au vu des décomptes et des justificatifs fournis, donner son avis sur d’éventuelles dépenses de santé futures, y compris des frais de prothèses ou d’appareillages, en précisant s’il s’agit de frais hospitaliers, paramédicaux, pharmaceutiques et assimilés, même occasionnels mais médicalement prévisibles et rendus nécessaires par l’état pathologique de la victime après consolidation,

Au vu des justificatifs fournis et des constatations médicales réalisées, donner son avis sur la nécessité d’éventuelles dépenses liées à l’assistance permanente d’une tierce personne en précisant, le cas échéant, s’il s’agit d’un besoin définitif,

Au vu des justificatifs fournis, et, si nécessaire, après recours à un sapiteur, indiquer, si en raison de l’incapacité permanente dont la victime reste atteinte après sa consolidation, celle-ci a déjà subi et va subir une perte ou une diminution des gains ou des revenus résultant de son activité professionnelle, du fait soit d’une perte d’emploi soit d’une obligation d’exercer son activité professionnelle à temps partiel,

Au vu des justificatifs fournis et, si nécessaire, après recours à un sapiteur, indiquer si, en raison de l’incapacité permanente dont la victime reste atteinte après sa consolidation, celle-ci va subir des préjudices touchant à son activité professionnelle autres que celui résultant de la perte de revenus liée à l’invalidité permanente,

2) Au titre des préjudices extra patrimoniaux,

Au titre des préjudices extra patrimoniaux temporaires avant consolidation,

Indiquer si la victime a subi un déficit fonctionnel temporaire, en préciser sa durée, son importance et au besoin sa nature,

Décrire les souffrances physiques et psychiques endurées par la victime depuis les faits à l’origine des dommages jusqu’à la date de consolidation, du fait des blessures subies et les évaluer sur une échelle de 1 à 7 degrés,

Décrire la nature et l’importance du dommage esthétique subi temporairement jusqu’à la consolidation des blessures et l’évaluer sur une échelle de 1 à 7 degrés,

Au titre des préjudices patrimoniaux extra temporaires après consolidation,

Indiquer si la victime a subi un déficit fonctionnel permanent subsistant après la consolidation des lésions, en évaluer l’importance et au besoin en chiffrer le taux,

Au vu des justificatifs produits, donner son avis sur l’existence d’un préjudice d’agrément résultant de l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs,

Décrire la situation et l’importance du préjudice esthétique subi de façon définitive, après la consolidation des blessures et l’évaluer sur une échelle de 1 à 7 degrés,

Etablir un état récapitulatif de l’évaluation de l’ensemble des postes énumérés dans la mission et dire si l’état de la victime est susceptible de modifications en aggravation ou en amélioration,

Dans l’affirmative, fournir toutes précisions utiles sur cette évolution, son degré de probabilité et, dans le cas où un nouvel examen apparaît nécessaire, indiquer le délai dans lequel il devra être procédé,

– reconvoquer les parties à réception du rapport d’expertise.

Selon ses conclusions adressées au greffe par courrier le 13 octobre 2022, reprises oralement à l’audience de plaidoirie, et auxquelles il est expressément renvoyé, la CPAM de Pau, intimée, demande à la cour de :

– lui donner acte qu’elle s’en remet à la justice pour dire s’il y a faute inexcusable de l’employeur,

– condamner la société [5] à lui reverser les sommes dont elle aura à faire l’avance en vertu des articles L.452-2 et L.452-3 du code de la sécurité sociale et en réparation des préjudices non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale pouvant faire l’objet d’une indemnisation complémentaire, avec intérêts au taux légal à compter du jour du règlement.

SUR QUOI LA COUR

Sur le caractère professionnel de l’accident

La société [5] conteste le caractère professionnel de l’accident aux motifs que’:

– personne n’en a été témoin ;

– Mme [Z] a continué à travailler sans se plaindre de quoi que ce soit’;

– Mme [K], réceptionniste, a vu Mme [Z] quitter le camping en voiture, sans difficulté apparente’; elle ne lui a rien signalé’;

– les attestations de la personne qui hébergeait Mme [Z] et de sa mère sont sujettes à caution’;

– Mme [Z] n’a consulté un médecin que le lendemain de l’accident prétendu et n’a pareillement informé son employeur que le 26 mars.

Mme [Z] soutient que la preuve d’un fait accidentel survenu au temps et au lieu de travail est rapportée, au regard notamment du témoignage de Mme [R], sa binôme, de l’information donnée à Mme [K], responsable en l’absence de Mme [C], directrice, dès après l’accident, et de la consultation d’un médecin au service des urgences de l’hôpital d'[Localité 6] le 26 mars 2016, compte tenu d’un délai d’attente trop long le jour de l’accident.

Sur ce,

La recevabilité de la contestation de l’employeur n’est pas contestable. En effet, si la décision de prise en charge de l’accident du travail, de la maladie professionnelle ou de la rechute, motivée et notifiée dans les conditions prévues par l’article R.441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, revêt à l’égard de l’employeur, en l’absence de recours dans le délai imparti, un caractère définitif, elle ne fait pas obstacle à ce que celui-ci conteste, pour défendre à l’action en reconnaissance de la faute inexcusable, le caractère professionnel de l’accident ou de la maladie (Cour de cassation 2ème chambre civile 5 novembre 2015 n° 13-28373).

En application de l’article L.411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise.

Il appartient au salarié de rapporter la preuve de la matérialité de l’accident. Cette preuve peut être rapportée par tous moyens, notamment par témoignages ou présomptions graves, précises et concordantes. Pour autant, les déclarations de la victime doivent être corroborées par des éléments objectifs.

En l’espèce,

– suivant la déclaration d’accident du travail :

. Mme [Z] a déclaré avoir chuté et s’être blessée au pied gauche, alors que, juchée sur un lit, elle effectuait du nettoyage en hauteur, dans le mobil home n° 4 du camping, le 25 mars 2016 à 15 h, donc pendant son temps de travail et sur son lieu de travail ;

. l’accident a été connu de l’employeur dès le lendemain à 11 h, soit moins de 24 h après sa survenance ;

. l’employeur n’a émis de réserves que concernant sa responsabilité dans la survenance de l’accident, en invoquant un non-respect des consignes données par lui, et non relativement à la matérialité de l’accident,

– d’après le certificat médical du 26 mars 2016, Mme [Z] a consulté un médecin dès le lendemain de l’accident, lequel a constaté des lésions dont la nature et le siège, à savoir une fracture spiroïde du 5ème métatarsien du pied gauche, sont compatibles avec les circonstances de l’accident, à savoir une mauvaise réception après une chute lors du nettoyage d’une étagère en hauteur ;

– l’employeur soutient produire une attestation de Mme [A] [K], salariée en tant que réceptionniste, en pièces 5 et 6. La pièce 6 est un mail adressé par Mme [K] le 17 septembre 2016 à M. [C], président de la société [5] ; y figurent uniquement les mentions de l’expéditeur, de la date, du destinataire et de l’objet, à savoir “attestation” ; le reste de la page est blanche et rien n’établit que ce mail comportait une pièce jointe. La pièce 5 est un document intutilé “attestation”, ainsi rédigé “Je soussignée, Mle [K] [A], certifie que Mme [Z] [S] a bien quitté le camping le 25 mars 2016 avec son véhicule personnel sans aucune difficulté et sans boîter. Lors du point de fin de journée, elle n’a fait part en aucun moment d’un quelconque incident. Le premier jour de son contrat le 8 mars 2016 à 14 h, Mme [Z] a suivi une formation concernant les produits de nettoyage, leur utilisation, leur dosage, les méthodes de nettoyage et les gestes à éviter (ne pas monter en rebord de lit)”. Aucun élément ne caractérise que ce document est une pièce jointe au mail ci-dessus et il ne satisfait à aucune des prescriptions de l’article 202 du code de procédure civile : il n’est pas signé, il n’est pas permis de déterminer si Mme [K] a personnellement constaté ou non les faits relatés, ni qu’elle savait que ce document était sollicité d’elle en vue de sa production en justice ; au vu de ces éléments, il doit être considéré que cette pièce est dénuée de valeur probante ;

– Mme [Z] produit’:

. deux attestations de Mme [O] [R], du 2 juin 2016 et du 31 mai 2019 (pièces 21 et 22), et il résulte de la seconde qu’elle a été embauchée par la société [5] comme agent de propreté par contrat à durée déterminée à temps partiel du 8 mars au 31 mars 2016 et qu’elle a travaillé en binôme avec Mme [Z] au nettoyage des mobil home ; elle n’a pas été témoin de l’accident car elle était «’partie (deux minutes) chercher des alèses manquantes’», mais à son retour à 15 h, elle a trouvé Mme [Z] assise sur la chaise et le pied sur le lit, et celle-ci lui a expliqué «’qu’elle était montée sur le rebord du lit pour faire la poussière sur le haut du placard se trouvant au fond du lit et n’y arrivant pas elle a posé son pied sur le rebord du fond du lit et ce dernier a basculé, d’où l’accident’». Elle a constaté que le «’pied commençait à gonfler’» et elles l’ont passé sous l’eau froide. Elle poursuit que Mme [Z] est ensuite allée trouver Mme [K] à l’accueil, responsable en l’absence de Mme [C], pour l’informer et lui demander si elle avait quelque chose en pharmacie pour la soulager, qu’elle a dû terminer tous les sols y compris ceux qu’auraient dû nettoyer Mme [Z] qui ne pouvait pas se tenir ni accroupie ni à genoux, le pied blessé lui faisant très mal. Une fois le travail terminé, Mme [Z], «’marchant difficilement’» lui a dit de se rendre à la pharmacie et qu’elle verrait comment elle allait rentrer’; il est ainsi caractérisé que Mme [R] a constaté que Mme [Z] a travaillé normalement sans présenter ni lésion ni douleur la journée du 25 mars 2016 jusque les deux minutes pendant lesquelles elle s’est absentée, puis, qu’immédiatement postérieurement à celles-ci, elle s’est vue relater par Mme [Z] une chute et en a constaté les conséquences sur cette dernière, à savoir qu’elle se tenait assise, le pied gauche posé sur une chaise, que ce pied commençait à gonfler, qu’elle se plaignait de douleurs vives au pied gauche et qu’elle ne pouvait se tenir ni accroupie ni sur les genoux et marchait difficilement’;

. une attestation du 25 novembre 2017 de Mme [P] [N] (pièce 15), qui hébergeait Mme [Z] à [Localité 6] à l’époque de l’accident, suivant laquelle à l’issue de sa journée de travail le 25 mars 2016, cette dernière l’a informée par téléphone qu’elle avait chuté du rebord d’un lit et s’était blessée à un pied, qu’elle s’apprêtait à se rendre dans une pharmacie où elle lui demandait de la rejoindre pour la ramener à [Localité 6]’; qu’elle est allée chercher Mme [Z] à [Localité 4] après que celle-ci soit allée à la pharmacie, puis l’a accompagnée aux urgences de l’hôpital d'[Localité 6] où le délai d’attente était tel qu’elles ont préféré rentrer à [Localité 6] et revenir le lendemain’; que le 26 mars 2016, c’est la mère de Mme [Z] qui l’a accompagnée aux urgences’;

. une attestation du 26 décembre 2017 de sa mère, Mme [H] [Z], suivant laquelle le 25 mars 2016, sa fille l’a informée par téléphone qu’elle avait chuté du rebord d’un lit et s’était blessée à un pied’; elle lui a adressé une photo de «’l’hématome’» par téléphone, lui a dit avoir trop mal pour conduire jusqu’à [Localité 6] et avoir l’intention de se rendre à la pharmacie puis de solliciter sa logeuse, ce qu’elle a fait’; que le délai d’attente aux urgences de l’hôpital d'[Localité 6] étant trop long, sa fille et sa logeuse sont rentrées, et c’est elle qui, le lendemain, a conduit sa fille, qui ne pouvait plus poser le pied au sol, à l’hôpital.

. des photographies envoyées avec son téléphone le 25 mars 2016 d’un pied gauche dont le quintus présente une lésion ;

Il résulte de ces éléments que les déclarations de Mme [Z] sont corroborées par de nombreux éléments concordants. La matérialité de l’accident est donc établie et la présomption d’imputabilité de l’accident au travail doit s’appliquer. La société [5], qui n’apporte pas la preuve que l’accident découle d’un état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte sans aucune relation avec le travail ou d’une cause totalement étrangère au travail, ne renverse pas cette présomption. Sa contestation du caractère professionnel de l’accident est donc rejetée.

Sur la faute inexcusable

La société [5] soutient qu’il n’est pas établi qu’elle a commis une faute inexcusable aux motifs que :

– Mme [Z] prétend que l’accident est survenu parce qu’elle ne portait pas de chaussure mais des chaussons, alors qu’elle n’a pas glissé et que le lit a basculé parce qu’elle n’avait pas mis le pied où il fallait’;

– Mme [Z] a été responsable pendant 10 ans d’un camping à [Localité 6] et avait, suivant son CV, une compétence dans le nettoyage de chalets, bungalows, sanitaires, caravanes, chambres…’;

– les chaussons qu’elle fournit sont antidérapants’;

– en début de contrat à durée déterminée, il est fourni aux salariés une information sur les méthodes de travail dont Mme [Z] a accusé réception le 14 mars 2016 ; il lui a donc été indiqué de ne jamais monter sur le bord du sommier au risque qu’il bascule et de ne prendre appui que sur le pied’;

– la remise du guide de travail atteste que le salarié a pris connaissance du document unique d’évaluation des risques suivant lequel pour le nettoyage des points en hauteur des locatifs, il peut être utilisé une tête de loup’;

– il n’est pas établi qu’elle n’a pas mis de tête de loup à la disposition de Mme [Z]’;

– des escabeaux sont à la disposition pour le travail en hauteur’;

– Mme [Z], compte tenu de son expérience, pouvait penser que monter sur le bord d’un lit pouvait entraîner son basculement.

Mme [Z] soutient’:

– qu’il n’était pas mis à sa disposition de matériel adapté au nettoyage en hauteur’: le nettoyage des vitres et des portes fenêtres devait être fait depuis une chaise, sur laquelle devait être en outre posé le matériel de ménage’; la poussière devait être faite sur les placards dont certains en hauteur, tout en ayant interdiction formelle de monter sur les matelas et les alèses’; il convenait donc de mettre les pieds sur le rebord du lit ou du canapé’;

– que les mobil home étaient d’une configuration telle qu’il était impossible de positionner un escabeau pour nettoyer les placards situés au-dessus des lits’;

– qu’il lui a été remis des chaussons en feutrine et non des chaussons antidérapants, et qu’il ne lui a pas été remis de tête de loup’; la fiche de poste ne mentionne que l’usage d’une «’lavette’» pour dépoussiérer les étagères’;

– qu’il ne lui a été remis ni guide de travail ni document d’évaluation des risques, mais seulement la fiche de poste qu’elle produit’;

– qu’en l’état de la consigne donnée de monter sur le rebord d’un lit, ce qui n’est pas adapté à une situation de travail en hauteur, l’employeur ne pouvait qu’avoir conscience du danger auquel elle était exposée.

Sur ce,

En matière de sécurité, l’employeur est tenu à une obligation légale de sécurité et de protection de la santé, notamment en ce qui concerne les accidents du travail et les maladies professionnelles (Cour de cassation 2ème chambre civile 8 octobre 2020 18-25021 et 18-26677). Le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable au sens de l’article L.452-1 du code de la sécurité sociale lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l’employeur ait été la cause déterminante de l’accident ou de la maladie survenus au salarié, et il suffit qu’elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l’employeur soit engagée, alors même que d’autres fautes auraient concouru au dommage.

La faute de la victime n’est pas de nature à exonérer l’employeur de sa responsabilité, sauf si elle est la cause exclusive de l’accident du travail.

Il appartient au salarié de rapporter la preuve de l’existence d’une faute inexcusable de son employeur, à l’origine de l’accident du travail dont il a été victime.

En conséquence, le salarié doit faire la démonstration comme imputables à son employeur, de la conscience du danger, et du défaut de mesures appropriées.

En l’espèce, la société [5] produit’:

– en pièces 5 et 6, le mail reçu le 17 septembre 2016 de Mme [A] [K] et un document «’attestation’» censément établi par cette dernière : il a été déterminé que ces pièces sont sans valeur probante’;

– la fiche du document unique d’évaluation des risques en date du 4 mai 2015 relative au poste de personnel d’hygiène, dans lequel est identifié, concernant la tâche de nettoyage des points en hauteur des locaux communs et des locatifs, un risque de chute évalué à 3 compte tenu d’une fréquence cotée 1 et d’une gravité cotée 3′; il est mentionné que le moyen de prévention actuel est l’utilisation de balai perche tête de loup pour les accès aux points de nettoyage en hauteur’;

Il est ainsi caractérisé que la société [5] avait identifié le risque de chute inhérent au nettoyage d’éléments en hauteur. Elle ne fournit aucun élément démontrant que cette fiche a été portée à la connaissance de Mme [Z] ni qu’elle a mis à sa disposition un balai perche tête de loup.

– une pièce 9, composé de 6 pages volantes ; les 5 premières sont imprimées en mode paysage et consistent dans la copie d’un «’guide du salarié’» ; la 6ème page est imprimée en mode portrait et consiste en une copie d’un document comportant deux rubriques, la première attestant de la remise à Mme [Z] d’une notice d’information sur les textes conventionnels applicables à la branche et à l’entreprise, signée par elle et datée de sa main du 14 mars 2016, la seconde relative à la remise du «’guide du salarié’», non signée’; au vu de ces éléments, il est à conclure que la pièce 9 est la copie de deux documents différents, et que la société [5] ne démontre pas avoir remis à Mme [Z] le «’guide du salarié’».

Le «’guide du salarié’» mentionne’:

. à la rubrique «’recommandations instructions et obligations’»’:

«Je prends connaissance des modes opératoires propres à mon postes de travail,

Je prends connaissance des risques liés à mon activité (document unique d’évaluation et de prévention des risques dans l’entreprise),

Je respecte les comportements et les gestes qui protègent ma personne et sécurisent mon travail…’»

. à la rubrique «’mémo sur les bons réflexes de sécurité au travail’:

«’Travail temporaire en hauteur’: principales règles à respecter’: le matériel utilisé doit être sûr, correctement installé, sur un plan de travail stable’; utilisez des charges légères et peu encombrantes, quand vous travaillez en hauteur’; ne pas travailler seul afin de pouvoir être secouru par une autre personne, en cas de nécessité’»

Comme relevé ci-dessus, il n’est cependant pas établi que Mme [Z] a été destinataire ni de la fiche du document unique d’évaluation des risques relative au poste de personnel d’hygiène ni du guide du salarié.

– une photographie de chaussons qui seraient ceux fournis à Mme [Z] pour le nettoyage des locatifs’: il s’agit de chaussons chaussettes dont la semelle est garnie de pois en matériau antidérapant’;

Elle ne produit aucune pièce caractérisant qu’elle a mis un escabeau à la disposition de Mme [Z].

Mme [Z] produit’:

– en pièce 14′: une fiche «’nettoyage à deux’», relative au nettoyage des locaux locatifs, suivant laquelle la première personne assure le nettoyage de la cuisine et du séjour et la seconde, celui des chambres, de la salle de bains et des WC’; concernant les chambres, il est indiqué de «’dépoussiérer toutes les étagères, têtes de lit, rebords de fenêtres intérieurs et extérieurs avec la lavette poussière et produit sol’»’; il n’est pas prescrit de retirer les lits des chambres avant leur nettoyage et il n’est nulle part fait mention de l’usage d’un balai perche tête de loup ni d’un escabeau’;

– en pièce 4, des photos de chambres de mobil home’; au-dessus des lits, en hauteur, il existe des étagères et/ou placards et la taille des chambres est telle qu’une fois le ou les lits en place, il n’est manifestement pas possible de positionner un escabeau à proximité immédiate des étagères et/ou placards en hauteur ; outre qu’il n’est pas soutenu que ces photos ne sont pas celles des mobil home du camping exploité par la société appelante, une telle configuration est celle ordinaire des mobil home équipant les campings’;

– en pièces 21 et 22, deux attestations de Mme [R], des 2 juin 2016 et 31 mai 2019′;

Suivant la première, Mme [R] a travaillé en binôme avec Mme [Z] au nettoyage des locatifs’; elle qualifie les conditions d’exécution de cette tâche de «’difficiles’» et les décrit comme suit’:

«’Nous devions rentrer dans les mobil home et chalets pieds nus, avec de fines soquettes de feutrine fournies par l’employeur’; aucune chaussure, ni chaussures de sécurité n’étaient acceptées’;

Pour tout le nettoyage des stores et portes fenêtres, pas d’escabeau, juste une chaise où il nous fallait monter tout en faisant une place pour poser notre seau d’eau,

Pour le nettoyage des plinthes et des sols de la chambre adulte, je devais me mettre à genoux avec une lavette, faire d’abord les plinthes et ensuite laver le sol autour du grand lit en faisant des huit, puis prendre un balai lavette pour nettoyer sous le grand lit, seulement. Pour les chalets, nous devions faire de même sous les lits jumeaux (les déplacer et se coucher au sol pour faire les plinthes, et faire le sol à genoux avec une lingette en faisant des huit…),

Afin de faire la poussière sur les placards, interdiction de monter sur les matelas et les alèses, mettre toujours les pieds sur le rebord du lit ou du canapé. Idem pour les rideaux’».

Suivant la seconde, l’accident est survenu alors que Mme [R] avait dû s’absenter deux minutes, et dès son retour, Mme [Z] lui en a relaté les circonstances, à savoir que, comme prescrit par l’employeur, elle est montée sur le rebord d’un lit, et plus précisément sur le rebord du sommier, puisque monter sur les matelas et alèses était interdit, ce pour faire la poussière d’un placard situé en hauteur au-dessus de celui-ci et, n’y parvenant pas, a posé un pied sur la tête de lit lequel a basculé, entraînant sa chute’;

– les attestations de Mme [P] [N] du 25 novembre 2017 et de Mme [H] [Z] du 26 décembre 2017 suivant lesquelles’:

. elle leur a relaté des conditions de travail en tous points conformes à celles décrites par Mme [R]’: obligation du port de chaussons en feutrine dans les locatifs, travail à genoux autour des lits et pour les plinthes, interdiction de monter sur les matelas et obligation de se tenir sur le rebord des sommiers des lits pour nettoyer les étagères et placard situés en hauteur au-dessus des lits’;

. elle leur a relaté par téléphone le 25 mars 2016 sa chute et ses circonstances en ses termes’:

Mme [N] « elle m’a téléphoné pour me dire qu’elle était tombée en montant sur les rebords du lit’»’;

Mme [Z] [H]’: «’alors qu’elle voulait nettoyer une étagère en hauteur, elle a procédé comme il lui avait été indiqué, c’est à dire en montant sur le rebord du lit, sauf que n’y arrivant pas, elle dit qu’inconsciemment elle a posé le pied gauche sur le fond du lit pour s’étirer et ce dernier a basculé’»

– en pièces 3 et 23, des photographies de chaussons qui seraient ceux fournis pour le nettoyage des locatifs’: il s’agit de chaussons dont la semelle ne semble pas antidérapante.

Il résulte de ces éléments que’:

– l’employeur avait identifié le risque de chute inhérent au nettoyage d’éléments situés en hauteur’;

– l’employeur n’a pas, comme il l’allègue, prescrit à Mme [Z] de nettoyer les étagères situées en hauteur au moyen d’une tête de loup, ni mis à sa disposition un tel équipement’;

– il n’est pas établi que Mme [Z] disposait d’un escabeau et, sauf à retirer les lits des chambres, ce qui n’aurait pas été conforme aux consignes de l’employeur, le nettoyage des étagères et/ou placards situés en hauteur, au-dessus des lits, ne pouvait être réalisé au moyen d’un escabeau’;

– l’accident est survenu alors que Mme [Z] nettoyait une étagère située en hauteur, au-dessus d’un lit. Suivant en cela les consignes de l’employeur, elle a posé ses pieds sur le rebord du sommier, puis, faute de parvenir de la sorte à nettoyer l’étagère, elle a posé un pied sur la tête de lit, lequel a basculé’; il est indifférent qu’elle ait été chaussée de chaussons antidérapants ou non puisqu’elle n’a pas glissé’; en revanche, les consignes et le matériel fournis par l’employeur, à savoir se tenir un pied devant l’autre sur le rebord étroit d’un sommier et atteindre au moyen d’une lavette la totalité de la largeur de l’étagère, ne permettaient pas au salarié d’avoir la stabilité nécessaire à l’exécution de sa tâche et donc de travailler en sécurité.

Il s’ensuit que la société [5] avait identifié le risque de chute inhérent à la tâche de nettoyage d’une étagère en hauteur en cause dans le présent litige et n’a pas pris les mesures nécessaires pour en préserver Mme [Z]. Sa faute inexcusable est donc avérée et sa contestation doit être rejetée.

Sur les conséquences de la faute inexcusable

Sur la majoration de rente

En application des articles L.434-1 et R.434-1 du code de la sécurité sociale, une indemnité en capital est attribuée à la victime atteinte d’une incapacité permanente partielle inférieure à 10 %.

Suivant l’article L.452-2 du code de la sécurité sociale, lorsque l’accident du travail est dû à la faute inexcusable de l’employeur ou de ceux qu’il s’est substitué dans la direction, la victime reçoit une majoration des indemnités qui lui sont dues en vertu du livre IV du code de la sécurité sociale. Lorsqu’une indemnité en capital a été attribuée à la victime, le montant de la majoration ne peut dépasser le montant de ladite indemnité.

En application de l’article L.453-1 du code de la sécurité sociale, la majoration du capital peut être réduite lorsque la victime a commis une faute inexcusable, c’est à dire une faute volontaire d’une exceptionnelle gravité l’exposant sans raison valable à un danger dont il aurait dû avoir conscience.

En application de l’article L.452-3 al 3 du code de la sécurité sociale, la majoration du capital est versée par la caisse qui en récupère le montant auprès de l’employeur.

Le fait pour la salariée, en difficulté pour exécuter la tâche confiée eu égard aux consignes données par l’employeur et au matériel fourni, d’avoir posé un pied sur la tête de lit, n’est pas une faute inexcusable au sens des dispositions ci-dessus.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a fixé au maximum la majoration du capital versé à Mme [Z], et dit que cette majoration sera payée par la CPAM de Pau, et complété en ce que la société [5] sera condamnée à lui rembourser ladite majoration, avec intérêts au taux légal à compter du versement.

Sur les préjudices complémentaires de la victime et la mission de l’expert

La société [5] demande de modifier la mission de l’expert et s’oppose à la fixation d’une mission de droit commun aux motifs que’:

– Mme [Z] ne rapporte pas la preuve de l’existence d’un préjudice d’agrément,

– l’assistance d’une tierce personne est hors de propos pour un métatarsien cassé,

– les frais de prothèse et d’appareillage sont pris en charge forfaitairement de même que les frais d’hospitalisation, y compris à venir,

– il ne peut être invoqué de perte d’emploi dans la mesure où Mme [Z] était en contrat à durée déterminée,

– le déficit fonctionnel permanent ne peut être pris en compte.

Mme [Z] demande que soit ordonnée une expertise telle que proposée dans le dispositif de ses conclusions.

En application de l’article L.452-3 du code de la sécurité sociale, la victime d’un accident du travail imputable à la faute inexcusable de l’employeur est fondée à demander réparation, indépendamment de la majoration de la rente ou du capital, du préjudice causé par les souffrances physiques et morales endurées non comprises dans le préjudice fonctionnel permanent, des préjudices esthétique et d’agrément, ainsi que du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle.

Et il résulte de la réserve d’interprétation apportée par ce texte par le conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, que la victime est en droit de solliciter devant les juridictions de sécurité sociale la réparation de l’ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.

Eu égard aux renseignements médicaux (fracture spriroïde du 5ème métatarsien du pied gauche, incapacité permanente partielle non contestée de 8 % à la date de la consolidation le 30 mars 2018) et professionnels fournis (contrat à durée déterminée du 8 au 31 mars 2016 et au vu des dispositions ci-dessus, la mission d’expertise définie par le premier juge est pertinente. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

La société [5], qui succombe, sera condamnée aux dépens exposés en appel et déboutée de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Pau le 31 août 2020,

Y ajoutant :

Condamne la société [5] à rembourser la CPAM de Pau la majoration du capital, avec intérêts au taux légal à compter du versement,

Déboute la société [5] de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société [5] aux dépens exposés en appel.

Arrêt signé par Madame SORONDO, Conseiller, par suite de l’empêchement de Mme NICOLAS, Présidente, et par Madame LAUBIE, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, POUR LA PRÉSIDENTE EMPECHEE

 


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