Tentative de conciliation : 24 novembre 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/04657

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Tentative de conciliation : 24 novembre 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 21/04657
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CL/KG

MINUTE N° 23/804

Copie exécutoire

aux avocats

Copie à Pôle emploi

Grand Est

le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A

ARRET DU 24 NOVEMBRE 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : 4 A N° RG 21/04657

N° Portalis DBVW-V-B7F-HWQJ

Décision déférée à la Cour : 11 Octobre 2021 par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE STRASBOURG

APPELANTE :

Madame [E] [C]

[Adresse 2]

Représentée par Me Atika SIOUALA, avocat au barreau de STRASBOURG

INTIMEE :

S.A.R.L. TENOR

prise en la personne de son représentant légal

N° SIRET : 501 21 4 5 89

[Adresse 1]

Représentée par Me Gulay OZKAN-BAYRAKTAR, avocat au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 29 Septembre 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. LAETHIER, Vice-Président placé, chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme DORSCH, Président de Chambre

M. PALLIERES, Conseiller

M. LAETHIER, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffière, lors des débats : Mme ARMSPACH-SENGLE

En présence de : Mme Ophélie GRAMILLY, Greffier Stagiaire

ARRET :

– contradictoire

– prononcé par mise à disposition au greffe par Mme DORSCH, Président de Chambre,

– signé par Mme DORSCH, Président de Chambre et Mme  THOMAS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Mme [E] [C] a été embauchée par la Sarl Tenor en qualité de coordonatrice ressources humaines clientèle, statut non cadre, par contrat de travail à durée indéterminée du 4 décembre 2018.

Par courrier du 31 juillet 2019, Mme [C] s’est vue notifier un avertissement pour avoir insulté une collègue, le 26 juillet 2019, en faisant le rapprochement de sa personne avec ‘un singe’, et plus généralement en raison d’un comportement inadapté (agressivité verbale, harcèlement moral, provocations, non respect des consignes…) de nature à mettre en péril le fonctionnement de la société.

Par courrier du 5 août 2019, Mme [C] a contesté les griefs contenus dans la lettre d’avertissement.

Le même jour, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’à un licenciement fixé au 14 août 2019 et a été mise à pied à titre conservatoire jusqu’à la date de l’entretien préalable.

Mme [C] a été licenciée pour faute grave par lettre du 27 août 2019 pour des faits d’indiscipline et d’injures envers d’autres salariés et notamment pour avoir poursuivi son comportement fautif à la suite de l’avertissement du 31 juillet 2019 en s’en prenant à Mme [O] [D] et Mme [V] [B] en représailles aux agissements qu’elles avaient dénoncés et qui figuraient dans la lettre d’avertissement, et plus précisément en :

– proférant des insultes à Mme [O] [D] le 31 juillet 2019 peu après 17 heures en la qualifiant de ‘jalouse’ et en affirmant ‘qu’elle a une pauvre vie’ et qu’elle s’est liée ‘à un pauvre mec’,

– agressant verbalement Mme [V] [B] le 31 juillet 2019 après 17 heures en la pointant du doigt avec un stylo, en l’accusant d’avoir menti, en lui suggérant de ‘se laver les oreilles’.

Mme [C] a saisi la section activités commerce du conseil de prud’hommes de Strasbourg par acte introductif d’instance du 25 août 2020 afin de contester son licenciement ainsi que l’avertissement du 31 juillet 2019.

Par jugement contradictoire du 11 octobre 2021, le conseil de prud’hommes a :

– dit et jugé que la demande est recevable et bien fondée,

– dit et jugé que la procédure de licenciement est régulière,

– débouté Mme [C] de l’ensemble de ses demandes,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes,

– dit que l’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [C] aux entiers frais et dépens de l’instance.

Le jugement a été notifié à l’employeur le 12 octobre 2021 et à la salariée le 16 octobre 2021.

Mme [C] a interjeté appel à l’encontre de ce jugement par déclaration adressée au greffe par voie électronique le 10 novembre 2021.

Dans ses dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 9 février 2022, Mme [C] demande à la cour de :

– déclarer l’appel de Mme [E] [C] recevable et bien fondée,

– faire droit à l’intégralité des demandes, fins et prétentions de Mme [C],

– débouter l’intimée de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions, les déclarer irrecevables en tous les cas mal fondées, y compris s’agissant d’un éventuel appel incident,

en conséquence,

– infirmer le jugement du 11 octobre 2021 en toutes ses dispositions,

– statuant à nouveau,

s’agissant du licenciement,

– dire et juger que le licenciement de Mme [C] est abusif,

en conséquence,

– condamner la société Tenor à verser à Mme [C] un montant de 1 112,00 € à titre de rappel de salaires au titre de la mise à pied à titre conservatoire injustifiée ainsi qu’un montant de 11,12 € au titre des congés payés y afférents,

– condamner la société Tenor à verser à Mme [C] un montant de 2 370,00 € brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ainsi qu’un montant de 237,00 € brut au titre des congés payés y afférents,

– condamner la société Tenor à verser à Mme [C] un montant de 395,00 € brut au titre de l’indemnité légale de licenciement,

– condamner la société Tenor à verser à Mme [C] un montant de 1 500,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

s’agissant de l’avertissement,

– annuler l’avertissement notifié à Mme [C] le 31 juillet 2019,

en conséquence,

– condamner la société Tenor à verser à Mme [C] la somme de 2 000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi,

en tous les cas,

– condamner la société Tenor à verser à Mme [C] la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– la condamner aux éventuels frais et dépens.

S’agissant de l’avertissement du 31 juillet 2019, Mme [C] fait valoir qu’elle conteste les griefs qui lui sont reprochés qui sont en totale contradiction avec le comportement de Mme [D] qui est à l’origine de la discorde et qui avait un comportement provocateur, agressif et menaçant. Elle précise qu’elle a été insultée par Mme [D] le 26 juillet 2019, avec le soutien et la complicité de Mme [B] et Mme [T]. Mme [C] explique que Mme [D] lui a déclaré qu’elle était jalouse et qu’elle devait ‘arrêter d’aboyer comme un chien’, qu’elle a réitéré ses insultes dans un SMS adressé le même jour et qu’elle s’est présentée à son domicile, accompagnée de son compagnon, en se montrant agressive. L’appelante indique qu’elle a été placée en arrêt maladie car elle ne supportait plus les tensions et menaces exercées à son encontre, tant sur le lieu de travail qu’à l’extérieur, et qu’à son retour le 5 août 2019, M. [N], dirigeant de la société Tenor, l’a congédiée sans fondement.

En ce qui concerne la mesure de licenciement, Mme [C] fait valoir qu’en vertu du principe « non bis in idem », seuls les griefs postérieurs à l’avertissement du 31 juillet 2019 sont susceptibles de justifier la mesure.

L’appelante indique qu’elle conteste les injures qui lui sont reprochées, précisant qu’elle appréciait ses deux collègues de travail mais qu’elles se sont liguées contre elle très rapidement après leur embauche lorsque Mme [C] s’est vue proposer une évolution de poste. Mme [C] précise que Mme [D] s’est présentée, accompagnée de son mari, au domicile de ses parents pour la menacer et l’insulter et que son employeur, pourtant informé de cette situation, n’a pris aucune mesure. Elle reconnaît qu’il y a bien eu un échange avec ses collègues de travail mais que cet échange s’inscrit dans le contexte conflictuel précédemment décrit et initié par Mme [D].

Sur le grief tiré de l’indiscipline, Mme [C] soutient que l’employeur ne fait état d’aucun événement précis et daté. Elle indique également que ce grief a déjà été sanctionné par l’avertissement du 31 juillet 2019 puisqu’il lui était reproché de ‘camper sur ses positions’ et ‘une résistance aux orientations retenues par l’équipe’. L’appelante explique que ce grief est contradictoire avec les projets de son employeur à qui elle a toujours donné satisfaction et qui souhaitait qu’elle évolue rapidement vers un poste d’assistante de direction qui correspond davatange à sa formation, ses souhaits et aux besoins de la société Tenor.

Par dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 3 janvier 2023, la Sarl Tenor demande à la cour de :

– confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

– débouter Mme [C] de ses fins, moyens et prétentions,

– condamner Mme [C] à la somme de 2500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [C] aux éventuels frais de dépens y compris l’intégralité des frais, émoluments et honoraires liés à une éventuelle exécution de la décision à intervenir par voie d’huissier et en particulier tous les droits de recouvrement ou d’encaissement sans exclusion du droit de recouvrement ou d’encaissement à la charge du créancier (Articles 10 et 12 du décret du 12 décembre 1996, modifié par décret N° 2001-212 du 8 mars 2001).

Sur l’avertissement du 31 juillet 2019, la société fait valoir que le grief résultant des insultes et les violences verbales est matériellement établi par les témoignages des salariées présentes, Mme [D], Mme [B], Mme [T]. L’employeur soutient que les échanges de SMS entre Mme [C] et Mme [D] confirment la matérialité des griefs et que le comportement du conjoint de Mme [D] postérieurement à l’agression dont été victime son épouse est sans incidence.

Sur le licenciement, l’employeur indique qu’il a sanctionné des faits postérieurs à ceux qui ont justifié l’avertissement, Mme [C] ayant persisté dans son comportement fautif au lieu de tirer les conséquences de l’avertissement qui lui avait été notifié. La société explique que Mme [C] a réitéré le 31 juillet 2019 des propos injurieux et offensants et un comportement inadapté, en qualifiant Mme [D] de jalouse et en déclarant qu’elle a une « pauvre vie » et « qu’elle s’est liée à un pauvre mec » et en se montrant également agressive envers Mme [B], qui avait pourtant suggéré une réconciliation, en lui reprochant d’avoir menti et en lui suggérant de se « laver les oreilles ». L’intimée fait valoir que Mme [C] dégrade l’ambiance de travail par ses cris, ses pressions et ses menaces et que ce grief est établi par les témoignages concordants de Mme [C], Mme [B] et Mme [T].

Il est renvoyé aux conclusions précitées pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance en date du 27 juin 2023 et l’affaire a été fixée à l’audience de plaidoirie du 29 septembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

 

Au préalable, la cour rappelle que ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à « dire et juger » ou « constater », en ce qu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter de conséquences juridiques, mais constituent en réalité des moyens ou arguments, de sorte que la cour n’y répondra qu’à la condition qu’ils viennent au soutien de la prétention formulée dans le dispositif des conclusions.

Sur l’avertissement du 31 juillet 2019 :

 

Il résulte des dispositions des articles L. 1332-2 et L. 1332-4 du code du travail que la sanction disciplinaire notifiée au salarié par l’employeur doit être motivée et qu’aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance.

 

Le contrôle du juge porte sur la régularité de la procédure, le bien-fondé de la sanction et sa proportion par rapport à la faute commise, au regard des éléments produits par l’employeur et de ceux produits par le salarié à l’appui de sa contestation, en application des dispositions de l’article L. 1333-1 du code du travail qui dispose que le doute doit profiter au salarié.

En l’espèce, la lettre d’avertissement du 31 juillet 2019, qui fixe les limites du litige, est ainsi libellée :

« le 26.07.2019 vous avez insulté votre collègue Madame [O] [D] en faisant le rapprochement de sa personne avec « un singe ». Madame [O] [D] a été affectée aux larmes par vos propos. Vos collègues présents lors de cette scène, à savoir Madame [H] [T] et Madame [V] [B], confirment la situation. Madame [H] [T], choquée, a précisé que vous avez été très impolie et insultante également avec Madame [V] [B].

Madame [O] [D] et Madame [V] [B] se plaignent de manière générale :

– du ton avec lequel vous vous adressé à eux.

– de votre tendance à interrompre leurs conversations avec nos bénéficiaires et nos intervenants que ce soit au téléphone ou en direct.

– de votre manque de contribution dans vos fonctions de coordinatrice notamment pour la gestion des remplacements d’août.

Monsieur [M] [N], Monsieur [I] [N] ainsi que moi-même avons constaté votre tendance à camper sur vos positions sur les sujets de divergence : cela se traduit par une résistance aux orientations retenues par l’équipe.

Cette attitude nous est préjudiciable à différents niveaux :

Cela engendre des problèmes de communication entre les coordinatrices (dont vous faites partie) et à fortiori des dysfonctionnements en termes de planification des interventions auprès de bénéficiaires (qui je vous le rappelle sont pour la majorité en situation de dépendance).

Vous risquez de mettre à mal notre plan de développement : Madame [V] [B] a tendance à être démotivée en cette période d’essai (prévu dans son contrat suite à son embauche récente). Le départ éventuel et anticipé de Madame [V] [B] engendrerait du retard en terme de développement : nous serions dans l’obligation de reprendre le processus de recrutement.

Nous vous adressons un avertissement afin que ces faits ne se reproduisent plus.

En cas de nouvel incident, nous serions dans l’obligation de prendre des sanctions plus sévères à votre encontre ».

Pour démontrer la réalité de ces griefs, l’employeur produit les témoignages de Mme [D], Mme [B] et Mme [T].

Mme [D] indique que depuis qu’elle a été nommée coordinatrice référente, Mme [C] la traite de haut, ne lui dit plus bonjour et n’accepte plus aucune consigne de sa part, se bornant à communiquer par e-mail même en cas d’urgence alors que les deux salariées sont assises l’une à côté de l’autre. Elle précise que le 26 juillet 2019, durant la réunion hebdomadaire, Mme [C] s’est manifestée extrêmement violemment et l’a insultée devant Mme [B] et la comptable qui est intervenue pour y un terme.

Mme [B] confirme que Mme [C] a adopté un comportement injurieux envers Mme [D] lors de la réunion du vendredi 26 juillet 2019.

Mme [T], comptable, relate de façon détaillée la réunion du vendredi 26 juillet 2019, expliquant que suite au constat d’une incohérence dans le traitement d’un dossier, il s’est avéré que Mme [C] s’était trompée mais qu’elle ne l’a pas accepté et s’en est pris à Mme [D] dans les termes suivants : « maintenant tu te tais avec ta tête de singe ». Mme [T] indique que Mme [C] était transfigurée et qu’elle hurlait sur ses collègues, ce qui l’a amenée à intervenir pour ramener le calme. Elle ajoute qu’après le départ de Mme [C], Mme [D] s’est effondrée en larmes en affirmant qu’elle n’en pouvait plus.

Mme [T] décrit précisément l’origine et les circonstances de l’altercation et aucun élément du dossier ne permet de corroborer les dires de l’appelante selon lesquelles Mme [D] aurait adopté un comportement provocateur, agressif et menaçant.

Les SMS produits par l’appelante ont été échangés avec Mme [D] après la réunion et la journée de travail du 26 juillet 2019, entre 19H08 et 22H04, et ne permettent pas d’imputer la responsabilité de l’altercation à Mme [D] qui fait part dans ces SMS de son exaspération d’être rabaissée devant les gens.

S’agissant du déplacement effectué par Mme [D] et son mari au domicile de Mme [C] le 26 juillet 2019 dans la soirée, l’appelante n’est pas fondée à reprocher à son employeur de n’avoir pris aucune mesure à la suite de cet événement dès lors qu’elle ne justifie pas l’en avoir informé, notamment dans son courrier de contestation de l’avertissement du 5 août 2019.

Au regard de ces éléments, la cour retient que les témoignages précis, circonstanciés et concordants produits par l’employeur permettent d’établir la réalité du comportement agressif et insultant de Mme [C] à l’égard de Mme [D] le 26 juillet 2019, de sorte que le sanction disciplinaire apparaît justifiée par ce seul motif.

Mme [C] sera en conséquence déboutée de ses demandes d’annulation et de dommages et intérêts au titre de l’avertissement qui lui a été notifié. Le jugement est par conséquent confirmé sur ce point.

Sur le licenciement pour faute grave :

En application des articles L.1232-1, L.1232-6 et L.1235-1 du code du travail, lorsque l’employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception, qui doit comporter l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur.

 

Les motifs énoncés dans la let

tre de licenciement fixent les termes du litige, et il appartient au juge d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur en formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties.

 

Outre l’objectivité des griefs qui doivent être matériellement vérifiables, les faits allégués doivent être établis, être la cause exacte du licenciement et être suffisamment importants pour justifier la sanction.

 

La faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de l’intéressé dans l’entreprise.

 

Il appartient à l’employeur, qui invoque la faute grave pour licencier, d’en rapporter la preuve. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

 

En l’espèce, il résulte de la lettre de licenciement du 27 août 2019 que l’employeur reproche à la salariée d’avoir poursuivi son comportement fautif malgré l’avertissement du 31 juillet 2019 et en dépit d’un travail de médiation entrepris afin de repartir sur de nouvelles bases dans l’intérêt de toutes les parties.

La société Tenor explique que le gérant a détaillé à Mme [C] les griefs contenus dans la lettre d’avertissement, le 31 juillet 2019 à 16 heures, et que Mme [C] s’en est ensuite de nouveau prise à Mme [D] et à Mme [B] après le départ du gérant peu après 17 heures, en représailles à la révélation des faits contenus dans la lettre d’avertissement.

Plus précisément, il est reproché à Mme [C] d’avoir crié sur Mme [D] en lui disant ‘qu’elle est incapable de se défendre seule et qu’elle a besoin de ses parents et son mari’ et d’avoir proféré de nouvelles injures à son encontre en la qualifiant de ‘jalouse’ et en affirmant ‘qu’elle a une pauvre vie’ et qu’elle s’est liée ‘à un pauvre mec’.

Il est également reproché à Mme [C] d’avoir agressé verbalement Mme [B] en la pointant du doigt avec un stylo, en l’accusant d’avoir menti et en lui suggérant de ‘se laver les oreilles’.

Pour établir la réalité de ces griefs, l’employeur produit les témoignages de Mme [D] et Mme [B].

Mme [D] déclare que lorsque le gérant a évoqué les faits du 26 juillet 2019 avec Mme [C], cette dernière s’est fâchée et s’en est prise de nouveau à elle en lui disant qu’elle était ‘jalouse’, qu’elle avait une ‘pauvre vie’ et un ‘pauvre mec’. Elle ajoute que Mme [C] a refusé la réconciliation proposée par Mme [B] et qu’elle a crié : ‘je resterai jusqu’à ma mort’.

Quant à Mme [B], elle confirme que le 31 juillet 2019, après la tenue d’un entretien entre le gérant et Mme [C], cette dernière s’est montrée agressive en lui reprochant d’avoir menti, en l’apostrophant en colère avec son stylo et en lui suggérant de se ‘laver les oreilles’. Elle précise également que Mme [C] s’est attaquée à la vie privée de Mme [D] en lui criant qu’elle était ‘jalouse’ et incapable ‘de se défendre seule’ ayant ‘besoin de son mari’ qui était ‘un vieux gars’. Mme [B] ajoute qu’elle avait espéré que ses collègues puissent repartir sur de bonnes bases si Mme [C] s’excusait mais elle lui a répondu ‘jamais de la vie’.

Ces témoignages précis et concordants permettent d’établir que Mme [C] a persisté à adopter un comportement agressif, méprisant et irrespectueux envers ses collègues de travail après l’évocation par l’employeur des faits objets de l’avertissement du 31 juillet 2019.

En outre, elle a délibérement refusé l’apaisement alors qu’une tentative de conciliation avait été initiée par Mme [B].

Cet apaisement apparaissait pourtant indispensable au regard des répercussions potentielles de ses agissements sur la santé de sa collègue Mme [D] qui, selon les dires de Mme [T], s’était effondrée en larmes en disant qu’elle n’en pouvait plus après l’altercation du 26 juillet 2019.

Les griefs du 31 juillet 2019 sont donc caractérisés et constituent à eux seuls, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres griefs mentionnés dans la lettre de licenciement, une violation des obligations résultant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rendait impossible le maintien de la salariée dans l’entreprise.

Si le Conseil de prud’hommes a retenu dans sa motivation que le licenciement pour faute grave était fondé et a débouté Mme [C] de l’ensemble de ses demandes, le dispositif du jugement entrepris déclare cependant la demande de la salariée bien fondée, de telle sorte qu’il y a lieu de rectifier cette erreur matérielle des premiers juges.

Sur les dépens de la procédure et les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile :

 

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné Mme [E] [C] aux dépens et rejeté les demanes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Compte tenu de l’issue du litige, il convient de condamner Mme [E] [C] aux dépens de l’appel.

L’équité commande de mettre à la charge de Mme [E] [C] une indemnité de procédure pour frais irrépétibles de 1 000 euros au profit de la société Tenor.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Déclare recevable l’appel de Mme [E] [C],

Rectifie l’erreur matérielle affectant le jugement rendu le 11 octobre 2021 par le conseil de prud’hommes de Strasbourg ainsi qu’il suit :

Dit que dans le dispositif du jugement du 11 octobre 2021, la phrase « dit et juge que la demande est recevable et bien fondée » est remplacée par la phrase « déclare la demande de Mme [E] [C] recevable »,

Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Strasbourg du 11 octobre 2021 ainsi rectifié,

Y ajoutant,

Condamne Mme [E] [C] aux dépens de la procédure d’appel,

 

Condamne Mme [E] [C] à payer à la Sarl Tenor la somme de 1 000 € (mille euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

 

Rejette la demande présentée par la Mme [E] [C] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le 24 novembre 2023, signé par Madame Christine Dorsch, Président de Chambre et Madame Martine THOMAS, Greffier.

Le Greffier, Le Président,

 


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