Tentative de conciliation : 22 juin 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 22/06528

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Tentative de conciliation : 22 juin 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 22/06528
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N° RG 22/06528 – N° Portalis DBVX-V-B7G-ORAQ

Décision du Juge de la mise en état du TJ de LYON

du 13 septembre 2022

RG : 21/01591

[F]

C/

[G]

[Z]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

6ème Chambre

ARRET DU 22 Juin 2023

APPELANTE :

Mme [D] [F] épouse [G]

née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 8] (ARMENIE)

[Adresse 12]

[Localité 5]

Représentée par Me Emmanuelle POHU, avocat au barreau de LYON, toque : 764

assistée de Me Thierry DUMOULIN, avocat au barreau de LYON

INTIMES :

M. [N] [G] représenté par son tuteur [Y] [U], TUTEL'[Localité 10] – [Adresse 4]

né le [Date naissance 2] 1972 à [Localité 9] (ARMENIE)

[Adresse 3]

[Localité 5]

défaillant

M. [R] [Z]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représenté par Me Denis WERQUIN de la SAS TUDELA WERQUIN & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1813

assisté de la SCP MONTOYA PASCAL-MONTOYA DORNE GOARANT, avocat au barreau de GRENOBLE

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 09 Mai 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 16 Mai 2023

Date de mise à disposition : 22 Juin 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

– Evelyne ALLAIS, conseiller faisant fonction de président

– Raphaël FAIVRE, vice-présidente placée en application d’une ordonnance de la première présidente de la cour d’appel de Lyon du 30 Mars 2023

– Stéphanie ROBIN, conseiller

assistées pendant les débats de Fabienne BEZAULT-CACAUT, greffier

A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Evelyne ALLAIS, conseiller faisant fonction de président, et par Fabienne BEZAULT-CACAUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

Faits, procédure et demandes des parties

M. [N] [G] et Mme [D] (auparavant [H])[F] se sont mariés devant l’officier d’état civil de [Localité 10] le 28 octobre 2002, après avoir opté pour le régime de la séparation de biens par acte authentique régularisé par maître [R] [Z], notaire, le 30 septembre 2002.

Le 11 septembre 2003, ils ont signé avec la SCI [Adresse 12], un contrat préliminaire de réservation pour un appartement, une cave et un garage situés dans l’ensemble immobilier ‘côté parc tête d’or’ [Adresse 12] à [Localité 5], en l’état futur d’achèvement.

Par acte authentique du 18 décembre 2003, devant maître [A], avec le concours de maître [Z], la SCI [Adresse 12] a vendu à M. [N] [G], seul, le lot n° 40 au sein du bâtiment B correspondant à l’appartement, les lots n°146 et 288 dans le bâtiment en sous sol, correspondant à une cave et un garage de l’ensemble immobilier ‘côté parc tête d’or’ [Adresse 12] à [Localité 5], moyennant le prix de 225.000 euros.

Par requête du 5 décembre 2019, M. [N] [G] a saisi le juge aux affaires familiales d’une demande en divorce.

Dans le cadre de cette procédure Mme [D] [F], indiquant découvrir qu’elle n’était pas propriétaire de l’appartement familial a, par acte d’huissier du 25 février 2021, fait assigner M. [N] [G], M. [R] [Z], notaire, devant le tribunal judiciaire de Lyon, aux fins de les voir condamner in solidum à lui payer les sommes suivantes :

– 287.500 euros au titre de son préjudice matériel,

– 20.000 euros au titre de son préjudice moral,

– 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l’instance.

M. [R] [Z], notaire a saisi le juge de la mise en état d’un incident, invoquant la prescription de l’action formée à son égard.

Aux termes de ses dernières conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 8 avril 2022, il a demandé au juge de la mise en état :

– à titre principal de :

– constater que Mme [G] n’était pas partie à l’acte authentique du 18 décembre 2003, en qualité d’acquéreur du bien immobilier,

– constater que Mme [G] a régularisé le 28 décembre 2004 un acte de prêt avec la société crédit mutuel Saint Etienne Fourneyron, aux termes duquel les époux [G] empruntaient la somme de 23.380 euros et qu’en procédant à la régularisation de cet acte, elle savait pertinemment que le bien immobilier financé appartenait en propre à M. [G], pour l’avoir acquis seul en l’état futur d’achèvement, par acte authentique du 18 décembre 2003 régularisé par maître [A],

– constater qu’à compter de cette date, Mme [G] se devait d’agir à l’encontre de M. [G] et des notaires ayant instrumenté l’acte de vente, si elle estimait être convaincue d’être propriétaire indivise des biens immobiliers situés à [Localité 5],

– constater que Mme [G] a sollicité au mois de mai 2015 d’être désignée en qualité de tutrice de son époux,

– constater que par jugement du 2 juillet 2015, Mme [G] était désignée en qualité de tutrice de son époux,

– constater qu’à compter de cette date, Mme [G] disposait de toutes les informations utiles pour assurer la gestion et l’administration des biens et intérêts de son époux, de sorte qu’elle était en mesure de constater qu’elle n’était pas propriétaire du bien immobilier situé à [Localité 5],

– constater que Mme [G] n’a engagé aucun contentieux judiciaire en ce sens, dans le délai de cinq ans,

en conséquence :

– juger Mme [G] irrecevable en ses prétentions formées à l’encontre de maître [Z], celles-ci étant prescrites,

– condamner Mme [G] à verser à maître [Z] une indemnité de 3.000 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [G] aux dépens de l’instance,

– à titre subsidiaire

– constater qu’il existe un litige pendant devant le juge aux affaires familiales près le tribunal judiciaire de Lyon ayant déjà donné lieu à une ordonnance sur tentative de conciliation le 20 octobre 2020,

– constater que dans le cadre de cette procédure de divorce et de liquidation du régime matrimonial, il appartiendra à Mme [G] de faire connaître ses prétentions à l’encontre de M. [G], si elle estime avoir participé au financement de l’acquisition du bien immobilier par M. [G] le 18 décembre 2003,

– constater que Mme [G] ne sollicite en aucun cas d’être titrée sur le bien immobilier situé à [Localité 5],

– constater que les prétentions financières de Mme [G] sont seulement indemnitaires,

– constater que ces difficultés juridiques devront faire l’objet d’un règlement dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial des époux [G],

en conséquence,

– ordonner le sursis à statuer concernant l’action en responsabilité engagée à l’encontre de maître [Z], dans l’attente de l’issue définitive du sort du litige opposant les époux [G] devant le juge aux affaires familiales concernant tant la procédure de divorce que la liquidation de leur régime matrimonial,

– réserver les dépens.

M. [N] [G], représenté par son tuteur M. [Y] [U] exerçant à Tutel [Localité 10] et désigné en remplacement de Mme [G], par ordonnance du juge des tutelles du tribunal d’instance de Villeurbanne du 13 mars 2019, a demandé au juge de la mise en état de :

– déclarer la juridiction de céans incompétente pour connaître des demandes de Mme [H] [F] au profit du juge aux affaires familiales de Lyon, estimant que les demandes relèvent du règlement des créances entre époux,

– condamner Mme [H] [F] au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Mme [D] [F] a quant à elle demandé de :

– déclarer recevable, car non prescrite son action,

– déclarer irrecevable et infondée l’exception d’incompétence soulevée par M. [G], comme ne respectant pas les dispositions des articles 74 et 75 du code de procédure civile,

– déclarer irrecevable l’ensemble des prétendues demandes de maître [Z] tendant à ‘constater’,

– débouter maître [Z] de sa demande de sursis à statuer et de l’ensemble de ses autres prétentions,

– débouter M. [G] et maître [Z] de l’ensemble de leurs prétentions,

– condamner maître [Z] à lui payer la somme de 1.500 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par ordonnance du 13 septembre 2022, le juge de la mise en état a :

– déclaré irrecevable l’exception d’incompétence soulevée par M. [N] [G],

– déclaré irrecevable pour prescription l’action en responsabilité de Mme [D] [F] contre maître [R] [Z],

– condamné Mme [D] [F] aux dépens de l’instance dans ses liens avec maître [R] [Z],

– réservé le surplus des dépens,

– condamné Mme [D] [F] à verser à maître [R] [Z] la somme de 1.000 euros, au titre de l’article 700 du code de procédure civile dans le cadre de l’incident,

– renvoyé l’affaire à l’audience de mise en état électronique du 17 novembre 2022 pour les conclusions au fond de M. [N] [G],

– rappelé que les conclusions et messages devront être adressés au plus tard trois jours avant cette date à peine de rejet,

– rejeté le surplus des demandes.

Par déclaration du 29 septembre 2022, Mme [D] [F] a formé appel de l’ordonnance précitée.

L’affaire a été fixée à l’audience du 16 mai 2023 par ordonnance du président de la chambre du 3 octobre 2022, en application des articles R.121-20 alinéa 2 du code des procédures civiles d’exécution et 905 du code de procédure civile.

Par des conclusions régulièrement notifiées par voie électronique à M [R] [Z], notaire, le 1er février 2022 et signifiées à M. [N] [G] représenté par son tuteur le 8 février 2022, Mme [D] [F] demande à la Cour :

– d’infirmer l’ordonnance du juge de la mise en état de la 9ème chambre du tribunal judiciaire de Lyon du 13 septembre 2022 en ce qu’elle a :

– déclaré irrecevable pour prescription l’action en responsabilité de Mme [D] [F] contre maître [R] [Z],

– condamné Mme [D] [F] aux dépens de l’instance dans ses liens avec maître [R] [Z],

– réservé le surplus des dépens,

– condamné Mme [D] [F] à verser à maître [R] [Z] la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile dans le cadre de l’incident,

– rejeté ses demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile dans le cadre de l’incident,

– renvoyé l’affaire à l’audience de mise en état électronique du 17 novembre 2022 pour les conclusions au fond de M. [N] [G].

Et statuant à nouveau,

– de déclarer recevable car non prescrite l’action intentée par Mme [D] [F] épouse [G],

– de débouter maître [Z] et M. [N] [G] de l’ensemble de leurs prétentions,

– de condamner solidiairement maître [Z] et M. [N] [G] à lui payer la somme de 3.500 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l’instance.

A l’appui de ses prétentions, elle fait valoir que :

– la precription n’est pas acquise, le point de départ du délai ne pouvant se situer qu’au moment de la procédure de divorce soit en 2020, date à laquelle elle a compris qu’elle n’était pas propriétaire du logement,

– elle est arrivée en France en septembre 2002, ne maîtrisait pas la langue française, ayant suivi une formation entre 2004 et 2005. Elle ne côtoyait que peu de monde, se consacrant à ses enfants et n’ayant aucune connaissance des termes juridiques,

– elle a cru acquérir l’appartement, par la signature du contrat préliminaire d’acquisition, étant précisé que son époux s’occupait de la gestion administrative et financière, croyance corroborée par la signature d’un prêt remboursé avec son époux pendant 60 mois, le faible montant de ce prêt par rapport au prix d’acquisition étant sans incidence. Elle estime que le financement du bien est intervenu par l’intermédiaire de prêts d’un montant de 153.681 euros remboursés par les deux époux,

– elle n’a jamais signé de désistement de l’acquisition de l’appartement, ce courrier ayant été produit pour la première fois par M. [G] dans le cadre de la procédure de divorce, ce document étant un faux, comme le révèle l’expertise qu’elle a fait réaliser, le notaire se montrant taisant sur les conditions dans lequel ce document a été remis

– elle n’était pas en mesure de comprendre l’acte de prêt qu’elle signait le 28 décepbre 2004 et que cette date ne peut constituer le point de départ de la prescription, contrairement à ce que soutient maître [R] [Z].

– Il ne peut davantage être considéré que sa désignation en qualité de tutrice le 2 juillet 2015 lui aurait permis de connaître toutes les informations sur la gestion des biens de son époux et notamment le fait qu’il était propriétaire du bien immobilier à [Localité 5].

Elle n’a en effet réalisé aucun acte concernant ce bien et n’avait pas de motifs de suspecter qu’elle n’était pas propriétaire de ce bien.

Par des conclusions régulièrement notifiées par voie électronique le 21 novembre 2022 à Mme [D] [F] et régulièrement signifiées à M. [N] [G] le 22 novembre 2022, maître [R] [Z] demande à la Cour de :

– juger que Mme [G] n’était pas partie à l’acte authentique du 18 décembre 2003, en qualité d’acquéreur du bien immobilier,

– juger que Mme [G] a régularisé le 28 décembre 2004 un acte de prêt avec la société crédit Mutuel Saint Etienne Fourneyron, aux termes duquel les époux [G] empruntaient la somme de 23.380 euros,

– juger que Mme [G], en procédant à la régularisation de cet acte de prêt, savait pertinemment que le bien immobilier financé appartenait en propre à M. [G] pour l’avoir acquis, en l’état futur d’achèvement par acte authentique du 18 décembre 2003 régularisé par maître [A],

– juger qu’à compter de cette date, Mme [G] se devait d’agir à l’encontre de M. [G] et des notaires ayant instrumenté l’acte de vente, si elle estimait être convaincue d’être propriétaire indivise des biens immobiliers situés à [Localité 5],

– juger que Mme [G] a sollicité au mois de mai 2015 d’être désignée en qualité de tutrice de son époux,

– juger que par jugement du 2 juillet 2015, Mme [G] était désignée en qualité de tutrice de son époux,

– juger qu’à compter de cette date au plus tard, elle disposait de toutes les informations utiles pour assurer la gestion et l’administration des biens et intérêts de son époux, de sorte qu’elle était en mesure de constater qu’elle n’était pas propriétaire du bien immobilier situé à [Localité 5],

– juger que Mme [G] n’a engagé aucun contentieux judiciaire en ce sens dans le délai de cinq ans,

en conséquence,

– confirmer l’ordonnance du 13 septembre 2022 rendue par le juge de la mise en état, en ce qu’il a jugé prescrite Mme [G] en son action engagée à l’encontre de maître [Z],

– confirmer l’ordonnance du 13 septembre 2022 en ce qu’elle a condamné Mme [G] à verser à maître [Z] une indemnité de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

y ajoutant,

– condamner Mme [G] à verser à maître [Z] une somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [G] aux dépens de l’instance d’appel.

Il soutient que :

– Mme [D] [F] ne peut valablement indiquer qu’elle était persuadée d’être devenue propriétaire par la signature du contrat de réservation, ce dernier ne constituant qu’un préalable à la vente et les termes de l’acte étant particulièrement clairs sur ce point, la vente devant être régularisée devant maître [A],

– elle n’a régularisé aucun acte juridique pouvant lui conférer la qualité de propriétaire sur le bien situé à [Localité 5],

– l’attestation de remboursement intégral du prêt versée aux débats ne présente aucune valeur probante, en l’absence de production de l’offre de prêt,

– elle a signé une offre préalable de prêt le 15 décembre 2004 pour financer le solde du prix d’acquisition de l’appartement, prêt régularisé par acte authentique du 28 décembre 2004 pour un montant de 23.380 euros, ce prêt mentionnant sans ambiguité l’origine de propriété et la qualité de bien propre de M. [G].

A cette date, elle avait parfaitement connaissance de ce que l’appartement était un bien propre de son époux et disposait des éléments pour engager une action judiciaire, tant à l’encontre de son époux que du notaire le cas échéant.

Son action étant engagée en 2021, la prescription est nécessairement acquise,

– elle ne peut invoquer une difficulté de compréhension de la langue française, la seule attestation produite en cause d’appel ne pouvant suffire et Mme [F] ne pouvant, sans se contredire, prétendre à la fois qu’elle avait la conviction de devenir propriétaire de l’appartement en signant le contrat de réservation, mais qu’elle ne pouvait comprendre en signant l’acte de prêt le 28 décembre 2004 qu’elle n’était pas propriétaire.

Elle n’a d’ailleurs jamais sollicité l’intervention d’un traducteur.

– Subsidiairement, si la date du 28 décembre 2004 n’était pas retenue, comme point de départ de la prescription, elle a été désignée en qualité de tutrice de son époux le 2 juillet 2015, a réglé dans ce cadre les taxes foncières, les appels de charge de copropriété libellés au nom de M. [G], seul propriétaire. Le point de départ de la prescription ne saurait débuter après le 2 juillet 2015 et l’action serait en tout état de cause également prescrite.

M. [N] [G] n’a pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 2 mai 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Il convient préalablement de rappeler que la cour n’a pas à statuer sur des demandes tendant à ‘juger que’, lorsque celles-ci ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile.

– Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action

Aux termes de l’article 789 6° du code de procédure civile, le juge de la mise en état est jusqu’à son dessaisissement, seul compétent à l’exclusion de toute autre formation du tribunal pour statuer sur les fins de non recevoir.

En application de l’article 122 du code précité, constitue une fin de non recevoir tout moyen qui tend à déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir.

Aux termes de l’article 2270-1 ancien du code civil, les actions en responsabilité extracontractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation. La prescription d’une action en responsabilité ne court qu’à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il a été révélé à la victime, si celle-ci établit qu’elle n’en avait pas eu précédemment connaissance.

L’article 2224 du code civil prévoit que les actions mobilières ou personnelles se prescrivent par cinq ans, à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. Le délai quinquennal est applicable à compter de l’entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 soit le 19 juin 2008, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

En l’espèce, Mme [D] [F] recherche la responsabilité de M. [R] [Z], notaire, pour défaut de conseil et d’information sur le fait qu’elle n’était pas propriétaire du bien immobilier situé à [Localité 5].

Il importe ainsi de déterminer à quelle date elle a eu connaissance de ce que l’appartement et la cave et le garage acquis l’avaient été seulement par son époux et qu’il s’agissait d’un bien propre de ce dernier.

Il est constant que les deux époux ont signé le 11 septembre 2003 un contrat intitulé ‘contrat préliminaire de réservation, vente en l’état futur d’achèvement’.

Cet acte mentionne expressement au paragraphe V que la réalisation de la vente aura lieu au plus tard fin novembre 2020 par devant maître [A], notaire, [Adresse 7].

Il est également mentionné les modalités de paiement échelonnées et la condition suspensive liée à l’obtention d’un prêt pour le financement.

Il résulte de ces éléments et de la nature même de l’acte conclu uniquement entre le réservant soit la SCI ‘[Adresse 12]’ et les réservataires M. et Mme [G] qu’il ne s’agit que d’un préalable à la vente et Mme [D] [F] ne peut valablement prétendre qu’elle pensait être propriétaire de l’appartement dès cette date.

Elle n’a ensuite pas signé l’acte authentique de vente devant le notaire maître [A] le 18 décembre 2003.

Ses observations relatives à l’attestation de désistement d’achat, attestation qu’elle présente comme un faux relèvent d’une question de fond, qu’il n’est pas nécessaire d’aborder pour trancher la question de la prescription.

En effet, Mme [D] [F] a signé avec M. [N] [G] un contrat de prêt avec la banque du crédit mutuel Saint Etienne Fourneyron le 28 décembre 2004, pour un montant de 23.380 euros, aux fins de financer le solde de l’achat dudit appartement, étant rappelé que le prix de l’appartement, de la cave et du garage s’élèvaient à une somme très nettement supérieure, soit la somme de 225.000 euros.

Ce contrat de prêt, passé devant notaire, mentionne l’origine de propriété du bien financé et énonce que le bien appartient ‘en propre à M. [G] par suite de l’acquisition qu’il en a faite par acte acte de vente du 18 décembre 2003″.

Il résulte en outre de ce document que la lecture du présent acte a été donnée aux parties, qui l’ont signé.

Mme [D] [F] a, par la signature de ce contrat de prêt, la connaissance de ce que le logement acheté est un bien propre de son époux et qu’elle n’en est donc pas propriétaire.

Si elle invoque être arrivée en France en 2022, ne maîtrisant pas la langue française, ni les termes juridiques, faisant toute confiance à son mari pour la gestion, et invoquant à l’appui de ses affirmations une attestation de formation du 30 septembre 2022 intitulée ‘MAPI Fle illétrisme’ dans le cadre des actions financées par la région [Localité 11], cette attestation ne respecte pas les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile et n’est pas probante, d’autant plus que l’acte notarié lui a été lu. En apposant sa signature et en paraphant chacune des pages du contrat de prêt, Mme [D] [F] a nécessairement validé celui-ci et il lui appartenait alors, le cas échéant, de demander des informations supplémentaires ou de solliciter une traduction.

Cet argument ne peut donc prospérer.

En outre, si elle fait état d’une gestion des tâches administratives exclusivement par son époux, conformément, selon elle, à leurs références culturelles, elle ne démontre aucunement cette simple allégation.

Par ailleurs, elle affirme qu’elle croyait être propriétaire de l’appartement ayant réglé les prêts. Toutefois, la pièce émanant du crédit mutuel versée au soutien de cette affirmation, intitulée attestation de remboursement intégral d’un prêt immobilier n° 20562203 pour un montant initial de 153.681 euros, accordé à M. et Mme [G] ne présente aucun caractère probatoire, dans la mesure où ce document n’est pas accompagné de l’offre de prêt et qu’aucune vérification ne peut dès lors être opérée sur l’affectation des crédits, l’identité des emprunteurs et les modalités de remboursement.

Cette pièce ne peut ainsi suffire à démontrer que Mme [D] [F] pouvait se croire propriétaire du bien.

Au regard de ces éléments, Mme [D] [F] avait connaissance de ce qu’elle n’était pas propriétaire de l’appartement dès le 28 décembre 2004, date de la signature du contrat de prêt indiquant explicitement que le bien immobilier était un bien propre de son époux. Elle disposait dès lors de tous les éléments lui permettant d’engager une action. Or, elle n’a fait délivrer son assignation que le 21 février 2021, de sorte que l’action à l’égard de M. [R] [Z] notaire est prescrite, le délai de prescription expirant le 19 juin 2013, en application de la loi du 17 juin 2008, ayant réduit les délais de prescription.

En conséquence, il convient de confirmer l’ordonnance déférée sur ce point

Surabondamment, Mme [D] [F] a sollicité sa désignation en qualité de tutrice de son époux en mai 2015 et a été désignée par le juge des tutelles du tribunal d’instance de Villeurbanne pour exercer cette mission par décision du 2 juillet 2015. Elle ne peut sérieusement arguer qu’elle n’effectuait aucun acte de gestion, alors qu’elle réglait notamment les charges de copropriété et les taxes d’habitation, libellées au seul nom de M. [N] [G] et ne pouvait ignorer qu’elle n’était pas propriétaire de l’appartement. Même en décalant la date de point de départ du délai de prescription à 2015, son action à l’égard de maître [Z] demeurerait prescrite.

II/ Sur les demandes accessoires

Il convient de confirmer les dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile, le premier juge ayant fait une juste appréciation.

En outre, Mme [D] [F] n’obtenant pas gain de cause en appel, il convient de la condamner aux dépens d’appel en application de l’article 696 du code de procédure civile.

Enfin, Mme [D] [F] est condamnée à payer à M. [R] [Z], notaire, la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour

Confirme l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Condamne Mme [D] [F] aux dépens de la procédure d’appel,

Condamne Mme [D] [F] à payer à M. [R] [Z] la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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