Tentative de conciliation : 21 avril 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 19/05232

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Tentative de conciliation : 21 avril 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 19/05232
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 13

ARRÊT DU 21 AVRIL 2023

(n° , 16 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/05232 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B72V5

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 mars 2019 par le Tribunal de Grande Instance d’EVRY RG n° 13/01300

APPELANT

Monsieur [V] [A]

[Adresse 2]

[Localité 5]

comparant en personne, assisté de Me Iréna AZAR, avocat au barreau de PARIS, toque : P0335, substituée par Me Soizic NADAL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0452

INTIMÉES

LA [10] (RATP)

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Marie-Hélène BENSADOUN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0438, substituée par Me Marie HUARD, avocat au barreau de PARIS

CAISSE DE COORDINATION AUX ASSURANCES SOCIALES DE RATP (CCAS)

[Adresse 8]

[Localité 4]

représentée par Me Catherine LANFRAY MATHIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : C1354

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 05 Janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Laurence LE QUELLEC, présidente de chambre

Monsieur Gilles REVELLES, conseiller

Madame Natacha PINOY, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Alice BLOYET, lors des débats

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé

par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, initialement prévu le 10 mars 2023, prorogé au 14 avril 2023 puis au 21 avril 2023 , les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Laurence LE QUELLEC, présidente de chambre et Madame Alisson POISSON, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l’appel régulièrement interjeté par [V] [A] (l’assuré) d’un jugement rendu le 28 mars 2019 par le tribunal de grande instance d’Évry dans un litige l’opposant à la [9] (la société) et la caisse de coordination aux assurances sociales de la [9] (la caisse).

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard.

Il convient toutefois de rappeler que l’assuré a été embauché le 3 septembre 1990 par la société en qualité d’agent de sécurité au sein du groupe de protection et de sécurité des réseaux (G.S.P.R.) du département de la sécurité ; qu’il a été délégué syndical du 14 septembre 2009 au 27 novembre 2012 ; que le 28 février 2012, l’assuré a eu un entretien, pendant son temps de travail, dans des locaux de [Localité 7], avec l’un de ses responsables relatif à une mesure disciplinaire à l’issue duquel, s’étant levé de sa chaise, il est tombé et a perdu connaissance ; qu’il a été conduit à l’hôpital par les pompiers ; qu’il n’a pas repris le travail après cette date ; que l’accident a été pris en charge au titre de la législation professionnelle par décision du tribunal des affaires de sécurité sociale du 16 avril 2013, confirmée par arrêt, sur renvoi après cassation, du 4 mai 2018 ; que le 19 septembre 2013, l’assuré a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d’Évry d’une action en reconnaissance de la faute inexcusable de la société ; que le dossier a été transmis au tribunal de grande instance d’Évry le 1er janvier 2019.

Par jugement du 28 mars 2019, le tribunal de grande instance d’Évry a :

– Déclaré recevable l’assuré en son recours mais l’a dit mal fondé ;

– Débouté l’assuré de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur et de l’ensemble de ses demandes tirées du fait du 28 février 2012 ;

– Dit le jugement commun et opposable à la caisse ;

– Débouté l’assuré et la société de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamné l’assuré aux dépens ;

– Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire ;

– Rejeté tout autre demande plus ample ou contraire.

L’assuré a le 24 avril 2019 interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 1er avril 2019.

Par ses conclusions écrites soutenues oralement et déposées à l’audience par son conseil, l’assuré demande à la cour, au visa des articles L. 452-1 et suivants du code de la sécurité sociale, L. 4131-1 et suivants et en particulier l’article L. 4131-4 du code du travail, 88 et 89 du règlement intérieur de la CCAS-RATP et des dispositions du décret n° 2004-174 du 23 février 2004, de :

– Le déclarer recevable et bien-fondé en son appel ;

– Infirmer le jugement du tribunal de grande instance d’Évry du 28 mars 2019 en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

– Reconnaître et déclarer que l’accident du travail dont il a été victime est dû à la faute inexcusable de son employeur ;

En conséquence

– Fixer au maximum la majoration de la rente ;

– Commettre tel expert qui plaira au tribunal lequel aura pour mission de :

1. Convoquer l’assuré, dans le respect des textes en vigueur, et recueillir ses observations ;

2. Se faire communiquer tous documents médicaux relatifs aux faits

3. À partir des déclarations de la victime, au besoin de ses proches et de tout sachant et des documents médicaux fournis, décrire en détail les lésions imputables à l’accident du travail du 28 février 2012 ;

4. Examiner l’assuré et décrire les lésions imputables à l’accident du 28 février 2012 ; indiquer l’évolution des lésions, et préciser si celles-ci sont bien en relation directe et certaine avec ledit accident ;

5. Fixer la date de consolidation et évaluer le taux d’incapacité permanente de l’assuré et si celle-ci n’est pas encore acquise, indiquer le délai à l’issue duquel, un nouvel examen devra être réalisé et évaluer les seuls chefs de préjudice qui peuvent l’être en l’état ;

Sur les préjudices temporaires (avant de consolidation) :

1) Déterminer la durée du déficit fonctionnel temporaire (gêne dans les actes de la vie courante), en indiquant s’il a été total et/ou partiel ;

2) Déterminer, également, la durée de l’incapacité professionnelle en précisant également si elle a été totale ou si une reprise partielle est intervenue et dans ce cas, en préciser les conditions et la durée et indiquer, le cas échéant, les pertes de revenus subies ;

3) Dégager en les spécifiant les éléments propres à justifier une indemnisation au titre de la douleur en prenant en compte toutes les souffrances physiques et psychiques ainsi que les troubles associés que la victime a dû endurer du jour de l’accident à celui de sa consolidation ;

4) Déterminer le préjudice d’agrément ; préciser notamment si la victime subit une gêne dans sa vie affective et familiale ainsi que dans ses activités de sport et de loisirs ;

5) Déterminer tout autre préjudice d’ordre patrimonial ou extrapatrimonial invoqué par l’assuré ;

Sur les préjudices permanents (après consolidation) :

1) Déterminer et chiffrer le déficit fonctionnel permanent en prenant, notamment, en compte la réduction définitive du potentiel psychosensoriel ou intellectuel et les répercussions psychologiques ainsi que les conséquences liées à cette atteinte dans la vie de tous les jours ;

2) Dégager en les spécifiant les éléments propres à justifier l’indemnisation au titre de la douleur en prenant en compte toutes les souffrances physiques et psychiques ainsi que les troubles associés que la victime a dû endurer du jour de l’accident à celui de sa consolidation ;

3) Déterminer le préjudice d’agrément ; préciser notamment si la victime subit une gêne dans sa vie affective et familiale ainsi que dans ses activités de sport et de loisirs ;

4) Dire si l’état de la victime est susceptible de modification en aggravation ou en amélioration ; dans l’affirmative, fournir toutes précisions utiles sur cette évolution ainsi que la nature des soins, traitements et interventions éventuellement nécessaires dont le coût prévisionnel sera alors chiffré et les délais dans lesquels il devra y être procédé précisés ;

5) Déterminer tous les préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux subis par l’assuré et notamment l’incidence professionnelle de son accident s’agissant de la perte de possibilité de promotion professionnelle ;

– Dire que l’expert désigné pourra en cas de besoin s’adjoindre le concours de tout spécialiste de son choix, dans un domaine distinct du sien et après en avoir simplement avisé les conseils des parties ;

– Dire que l’expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu’il déposera son rapport au secrétariat greffe du tribunal des affaires de sécurité sociale d’Évry qui en assurera la transmission aux parties ;

– Dire que les frais d’expertise seront supportés par l’employeur ;

– Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir ;

– Condamner in solidum l’employeur et la caisse à la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Les condamner in solidum aux entiers dépens de l’instance.

Par ses conclusions écrites soutenues oralement et déposées à l’audience par son conseil, la société demande à la cour, au visa des articles L. 323-6, L. 411-1 et L. 452-1 du code de la sécurité sociale, L. 2411-3, L. 2251-1, L. 2251-2, L. 1132-1, L. 1152-1 et L. 4121-2 du code du travail, du statut du personnel de la [9], de :

– Confirmer le jugement du tribunal de grande instance d’Évry du 28 mars 2019 en ce qu’il a :

* Dit mal fondé le recours de l’assuré ;

* Débouté l’assuré de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur et de l’ensemble de ses demandes tirées du fait du 28 février 2012 ;

* Débouté l’assuré de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

* Condamné l’assuré aux dépens ;

– Infirmer le jugement du tribunal de grande instance d’Évry du 28 mars 2019 en ce qu’il a débouté l’employeur de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

En conséquence,

– Juger que l’employeur n’a commis aucune faute inexcusable dans l’accident dont l’assuré a été victime ;

– Débouter l’assuré de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions comme étant infondées ;

– Condamner l’assuré au paiement d’une somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner l’assuré aux entiers dépens.

Par ses conclusions écrites soutenues oralement et déposées à l’audience par son conseil, la caisse demande à la cour, de :

– Confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

À titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour infirmait le jugement et reconnaissait la faute inexcusable,

– Ordonner une expertise en demandant à l’expert de limiter l’évaluation des éventuels préjudices aux seules lésions survenues le 28 février 2012.

Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions déposées le 5 janvier 2023, visées par le greffe à cette date, qui ont été oralement soutenues.

SUR CE :

Sur la mise en ‘uvre de l’action en recherche de la faute inexcusable de l’employeur :

L’assuré soutient que le règlement de la caisse est clair et impose à cette dernière une obligation de mettre en ‘uvre une tentative de conciliation mais qu’au cas d’espèce elle n’a pas cru devoir la mettre en ‘uvre et n’a même jamais répondu à la lettre recommandée qui la saisissait pour tentative de conciliation, le privant ainsi des voies de recours. L’assuré conclut que la caisse n’ayant pas respecté la procédure relative à la faute inexcusable, cette faute devra donc être d’emblée reconnue à son bénéfice.

Il soutient en outre que la caisse n’ayant pas de personnalité morale distincte de la société, c’est bien la société qui est juge et partie dans les décisions de la caisse et que c’est donc la société qui a refusé de reconnaître l’accident du travail en bâclant l’enquête et en violant son statut personnel en son article 77 et en violant ensuite la procédure de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.

La société répond que la phase de conciliation n’est pas obligatoire et que le défaut de mise en ‘uvre de la procédure de conciliation ne saurait entraîner, de manière automatique, une reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur qui n’est pas à l’initiative de la mise en ‘uvre de cette procédure de conciliation.

La caisse réplique qu’il n’existe en aucun cas une reconnaissance automatique de la faute inexcusable de l’employeur même si la matérialité de l’accident a été finalement reconnue après un long processus judiciaire.

L’article 89 du règlement intérieur de la caisse de coordination aux assurances sociales de la RATP prévoit que :

« Lorsque la victime ou ses ayants droit demande la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, la Caisse met en ‘uvre la tentative de conciliation afin de rapprocher l’employeur en cause, la victime et la Caisse.

« Lors de la réunion de conciliation, en l’absence d’accord des parties concernant la faute inexcusable, un procès-verbal de non-conciliation est établi. Il permet à la victime ou ses ayants droit de saisir la juridiction de sécurité sociale compétente. »

Au cas d’espèce, quand bien même la caisse n’aurait pas répondu à la demande de mise en ‘uvre d’une tentative de conciliation entre la société et l’assuré, ce qui n’est pas établi en l’état, ou aurait refusé de mettre en ‘uvre une tentative de conciliation, ce qui n’est pas davantage établi, ces situations ne sont pas prévues à peine de reconnaissance automatique de la faute inexcusable de l’employeur qui ne peut être que présumée ou prouvée.

De même, il est constant qu’en l’absence de tentative de conciliation ou de réponse à la demande de mise en ‘uvre de la procédure de conciliation, qui n’est pas obligatoire, l’assuré n’est pas privé des voies de recours et de la possibilité de saisir directement la juridiction de sécurité sociale d’une action en faute inexcusable à laquelle aucune exception d’irrecevabilité ne pourrait être opposée.

Il s’ensuit que la demande en reconnaissance d’emblée de la faute inexcusable ne saurait être accueillie.

Sur la recherche de la faute inexcusable :

À titre liminaire, il convient de rappeler au regard des éléments de l’espèce d’une part que la cour est saisie d’une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur dans l’accident du travail du 28 février 2012, et d’autre part que, contrairement à ce que soutient l’assuré, la société ne se confond pas avec la caisse qui lui est juridiquement distincte.

En conséquence, le fait que l’accident du travail ait été tardivement pris en charge au titre de la législation professionnelle par décision de justice n’établit pas une faute inexcusable en raison d’une connivence de l’employeur avec la caisse dans le cadre d’un harcèlement moral allégué.

De même, les développements relatifs au harcèlement moral antérieur et postérieur à cet accident sont sans effet sur la solution du litige qui ne peut trouver sa réponse que dans les seuls faits du 28 février 2012 et la conscience qu’avait ou aurait dû avoir la société d’un danger auquel l’assuré était exposé et les mesures, le cas échéant, prises pour préserver l’assuré de ce danger. Il n’y a donc pas lieu de dire s’il existait ou non un harcèlement moral entre 2009 et 2017 au regard des nombreux événements dont il est fait état. En effet, il convient de rappeler que le harcèlement moral suppose une répétition de faits qui est incompatible avec la notion d’accident du travail qui doit être caractérisé par un fait soudain ayant entraîné une lésion au temps et au lieu du travail. Toutefois, un accident du travail peut s’inscrire dans un continuum de faits constitutifs d’un harcèlement moral.

Les développements sur la situation d’autres salariés de la société pour des faits antérieurs ou postérieurs à l’accident du 28 février 2012 sont sans emport sur la solution du litige relatif à cet accident dont seul l’assuré a été victime.

Ensuite, sont sans effet sur la solution du litige les déclarations d’accident du travail de l’assuré postérieures à cette date, notamment l’accident du 23 novembre 2017, et les développements des parties à cet égard, peu important que les circonstances alléguées de l’accident, à savoir le harcèlement moral, soient similaires à l’accident dont la cour a à connaître. De même, la tentative de suicide de l’assuré du 13 janvier 2013, intervenue sur son ancien lieu de travail mais dont le caractère professionnel est contesté, est également sans effet sur la question de la faute inexcusable de l’employeur dans les faits du 28 février 2012.

Enfin, les développements relatifs à l’exécution du contrat de travail et aux manquements de la société dans le cadre de la relation contractuelle ne relèvent pas de l’action aux fins de recherche de la faute inexcusable de l’employeur.

A/ Sur la présomption de faute inexcusable :

Sur le fondement de l’article L. 4131-4 du code du travail, l’assuré soutient que le bénéfice de la faute inexcusable de l’employeur est de droit pour le salarié qui est victime d’un accident du travail, alors que lui-même ou un membre du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) avait signalé à l’employeur le risque qui s’est matérialisé. L’assuré rappelle qu’il s’agit d’une présomption irréfragable et qu’en l’espèce il a informé son supérieur hiérarchique, par lettres recommandées avec accusé de réception en date des 1er juin 2010 et 14 février 2011, des agissements de harcèlement moral et de discrimination syndicale dont il était victime depuis sa nomination, le 2 septembre 2009, aux fonctions de délégué syndical par le syndicat CFDT-RATP. L’assuré conclut que la cour ne peut que constater d’emblée que l’accident du travail dont il a été victime relève de la présomption de faute inexcusable de l’employeur.

La société réplique qu’elle a toujours répondu à l’assuré, lequel n’a fait l’objet d’aucun retard à l’avancement ou de discrimination.

La caisse ne répond pas à ce moyen.

L’article L. 4131-4 du code du travail dans sa version applicable au litige énonce que :

« Le bénéfice de la faute inexcusable de l’employeur prévue à l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale est de droit pour le ou les travailleurs qui seraient victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors qu’eux-mêmes ou un représentant du personnel au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail avaient signalé à l’employeur le risque qui s’est matérialisé. »

La présomption prévue par ce texte est irréfragable.

Au cas d’espèce, le CHSCT n’a pas été saisi de la situation de l’assuré avant l’accident et aucun de ses membres n’a alerté la société sur ce point. L’avis sur un danger grave et imminent du 9 mars 2012 concernant trois salariés, dont l’assuré, est postérieur à l’accident, de sorte qu’il est sans effet sur la présomption de faute inexcusable.

Les lettres des 25 mai 2010 (pièce n°53 de la société), 1er juin 2010 et 14 février 2011 (pièces n° 16 et 49 de l’assuré) ne démontrent pas que l’assuré ait alerté la société sur un harcèlement moral précis et circonstancié qui serait en lien direct et certain avec l’accident dont il a été victime le 28 février 2012.

La lettre du 25 mai 2010 est strictement identique à la lettre du 1er juin 2010. Elle a pour objet « harcèlement moral, discrimination et entrave syndicale ».

Dans cette lettre envoyée à deux reprises, l’assuré fait état d’un incident survenu lors d’un « CRC » (i.e. un compte-rendu contradictoire) d’un salarié le 10 mars 2010 et de ses relations avec le responsable du khéops 1. Il attribue « l’animosité soudaine » et les « propos agressifs, menaces, entrave syndicale et discrimination syndicale » à sa nomination de délégué syndical le 2 septembre 2009 en affirmant que, par ailleurs, sa carrière était depuis à l’arrêt. Il écrit notamment que :

« Je demande une explication tant sur les pratiques de harcèlement et de discrimination à mon égard, que sur le frein mis à ma carrière et surtout, d’y mettre un terme.

« Je vous rappelle que vous êtes tenu à une obligation de sécurité de résultat, ce qui implique nécessairement la mise en ‘uvre de mesures effectives ; dont vous aurez la gentillesse de me tenir informé.

« Compte tenu des nombreuses condamnations survenues dans ce département pour, harcèlement moral, discrimination syndicale, violence volontaire, et violation de l’obligation de sécurité, il est urgent que vous preniez au plus vite conscience de la gravité de ma situation, et que vous sanctionnez les auteurs de ces actes, comme le prévoit le règlement intérieur de l’établissement.

« Permettez-moi tout de même de remarquer une certaine concomitance, entre l’aggravation de ma situation et ma position en faveur de monsieur V. lors du Conseil de discipline du 25 janvier 2010 et surtout suite à mon attestation relatant les dysfonctionnements auxquels j’ai assisté. Attestation fournie par l’intéressé devant le Conseil des prud’hommes

« Des remarques m’ont déjà été adressées par l’encadrement. Sachez que je siège au Conseil de discipline et mon rôle est de faire respecter les droits des salariés. Donc si des procédures n’ont pas été respectées, mon devoir et de le signaler. Je ne dois pas pour autant en subir les conséquences. »

Pour autant, si l’assuré affirme avoir été victime de faits discriminatoires, il ne précise pas lesquels. Il ne se fonde que sur un état général du département dans lequel il travaille et du déroulé des conseils de discipline où il a pu intervenir pour former un avertissement comminatoire à la société.

La société a répondu à cette double lettre le 16 juillet 2010 (pièce n°54 de la société) en ces termes :

« Par courrier, en date du 25 mai 2010, vous m’interpellez sur votre situation personnelle depuis votre désignation récente comme délégué d’établissement CFDT le 2 septembre 2010.

« Dans un premier temps, en ce qui concerne le CRC de monsieur [E], dont vous étiez l’assistant, cet entretien a été très tendu du fait de vos interventions qui sortaient largement du périmètre des faits reprochés. M. [D] a effectivement fait remarquer que vous conseillez mal M. [E] et que celui-ci pourrait en subir les conséquences.

« C’est d’ailleurs ce que vous a fait remarquer M. [Z] qui, à aucun moment ne vous a signifié que vous n’aviez pas à intervenir lors de cet entretien, il vous a simplement demandé de recadrer votre discours sur les faits reprochés, objet de l’entretien.

« Dans un deuxième temps, vous évoquez un frein mis à votre carrière depuis votre désignation comme représentant syndical. Or, cette remarque semble très prématurée dans la mesure où depuis votre récente désignation en septembre 2009, une seule commission de classement s’est tenue en décembre 2009. À toutes fins utiles, je tiens à vous rappeler que vous n’étiez pas éligible lors de cette commission puisque vous n’aviez pas les conditions administratives pour obtenir une promotion.

« Concernant une éventuelle promotion comme agent de maîtrise, je vous confirme que vous avez fait l’objet d’une proposition de votre encadrement de proximité, mais qui, à l’heure actuelle, n’a pas été validée par vos responsables de khéops, ni même validée dans la consolidation des potentiels maîtrise au niveau de l’unité.

« Enfin, en ce qui concerne vos prises de position en faveur de tel ou tel agent dans le cadre de vos missions syndicales, celles-ci ne regardent que vous et n’appellent aucune remarque de l’encadrement qui conserve un regard objectif sur le travail de chacun. »

Dans la lettre du 14 février 2011, l’assuré écrit :

« Le 25 mai 2010 je vous ai sollicité sur les faits d’entrave syndicale, de discrimination et de harcèlement moral dont je faisais l’objet.

« Vous n’avez pas cru indispensable de me répondre ni de prendre les mesures nécessaires afin de faire cesser ces faits répréhensibles.

« Je reviens donc vers vous, aujourd’hui dans la continuité de mes avertissements.

« En effet, en sus des faits précédemment évoqués, je constate que l’accès à la fonction de maîtrise m’a bloqué, alors que mes supérieurs hiérarchiques directs (trois maîtrises différents) m’y proposent systématiquement depuis quatre ans.

« Si mes différents supérieurs jugent mon travail satisfaisant et compatible avec la fonction de maîtrise, pouvez-vous m’expliquer les raisons pour lesquelles vous me refusez l’accès à ce poste ‘

« Je constate un lien direct entre mon engagement syndical et mon activité de délégué et ce frein mis à mon déroulement de carrière en me bloquant l’accès au poste d’agent de maîtrise.

« Il a été demandé par les commissaires classeurs lors des commissions de classement 2008, 2009 et 2010 les raisons pour lesquelles je n’étais pas proposé à l’accès à la fonction d’agent de maîtrise et que ce soit inscrit au procès-verbal de séance.

« La direction n’a donné aucune explication aux commissaires classeurs, de plus elle ne nous a ni remis, ni proposé de signer les PV de séance.

« Sur ce refus de communication, j’entends là encore vos explications.

« Quoi qu’il en soit, vous aurez l’obligeance de me communiquer ces derniers dans les meilleurs délais.

« Par ailleurs, je constate que ma situation s’est d’autant plus détériorée depuis que j’ai défendu le cas de monsieur [T] V. lors de son conseil de discipline et que j’ai témoigné en sa faveur en justice. Laquelle vient de prononcer sa réintégration, pour preuve que mon témoignage était bien-fondé.

« Monsieur le directeur, je vous rappelle l’engagement pris par la RATP au travers du protocole sur le droit syndical, pour lutter contre toutes les discriminations. Je vous invite donc, une nouvelle fois à mettre tout en ‘uvre pour veiller à ce qu’aucun acte de discrimination, harcèlement ou d’entrave syndicale ne soit engagé à mon égard.

« Sachez monsieur que pour ma part, je vous réitère ma volonté déterminée à l’accès au poste d’agent de maîtrise. »

La société a répondu à cette lettre le 7 avril 2011 (pièce n° 57 de la société) en ces termes :

« Pour faire suite à votre courrier du 14 février 2011, je vous informe avoir répondu à votre correspondance du 25 mai 2010, par lettre recommandée en date du 16 juillet 2010 (voir photocopie ci-jointe).

« Aussi, concernant une éventuelle promotion en tant qu’agent de maîtrise, je vous réitère ma réponse faite le 16 juillet 2010, à savoir que si vous avez bien fait l’objet d’une proposition de votre encadrement de proximité, celle-ci n’a pas été validée ni par vos responsables de khéops, ni dans le cadre de processus de consolidation des potentiels maîtrises, au niveau de l’unité opérationnelle.

« Pour ce qui est des débats tenus lors des commissions de classement, ils doivent rester confidentiels et ne peuvent donc faire l’objet d’une transmission ou diffusion.

« Je vous confirme, une nouvelle fois, que vos prises de position en faveur de tel ou tel agent dans le cadre de vos missions syndicales ne regardent que vous et n’appellent aucune remarque de votre encadrement.

« Vous m’interpellez également par courrier du 1er mars 2011 sur votre date de nomination à l’échelle E10. Vous avez accédé à l’échelle E9 le 01 mars 2003 ; votre nomination à la E10 a donc été effectuée à la date anniversaire des 5 ans soit le 01 mars 2008. »

Il ressort de ces lettres l’existence d’une situation tendue entre l’assuré et la société au sujet d’une part de son activité syndicale et d’autre part du déroulement de sa carrière. Néanmoins, si l’assuré invoque un lien de causalité en termes de discrimination et de harcèlement entre son activité syndicale et sa participation à la défense d’un salarié et un « frein » mis à sa carrière, il ne verse aucun élément au soutien de ses allégations, l’envoi de multiples lettres répétant les mêmes allégations ne suffisant pas à leur donner force probante, étant observé que l’assuré invoque lui-même un frein dès 2008 alors même qu’il n’était pas encore délégué syndical et que la société a toujours apporté des réponses à ses questions précises et détaillées.

En revanche, il ne résulte de ces deux lettres aucune information claire et précise sur un risque particulier et sérieux qui se serait matérialisé le 28 février 2012, soit un an plus tard, et contre lequel la société aurait dû ou pu prendre des mesures préventives avant cette date.

En conséquence, la présomption de faute inexcusable doit être écartée.

B/ Sur la preuve de la faute inexcusable :

L’assuré soutient que selon la jurisprudence, la conscience du danger ne vise pas la connaissance effective de la situation créée mais la conscience que l’employeur devait ou aurait dû avoir du danger et que l’employeur ne peut exclure le cas non exceptionnel d’une réaction à la pression ressentie par un salarié.

Il fait valoir que :

– Les pièces qu’il verse démontrent que depuis qu’il est délégué syndical, il fait l’objet, d’une part, d’un harcèlement moral de plusieurs agents d’encadrement notamment au cours de procédures disciplinaires où il assiste des salariés et, d’autre part, d’une discrimination syndicale établie par la lenteur de son ascension professionnelle en dépit de ses bonnes évaluations. Il fait valoir qu’il n’a pas bénéficié d’une évaluation professionnelle chaque année depuis qu’il est entré dans la société en 1990 et qu’on ne lui a jamais notifié des motifs risquant d’entraîner un avis défavorable pour sa promotion. Il rappelle qu’il n’a pu accéder aux fonctions de pilote qu’en 2006 alors que d’autres salariés ont connu une évolution plus favorable ;

– Il a averti son supérieur hiérarchique par lettres des 1er juin 2010 et 14 février 2011 des agissements de harcèlement moral et de discrimination syndicale dont il était victime depuis sa nomination aux fonctions de délégué syndical, sans réponse ;

– Lors de l’accident du 28 février 2012, la société ne pouvait donc pas ignorer que son état psychologique s’était dégradé compte tenu du harcèlement moral et de la discrimination dont il était l’objet et dont elle avait été dûment informée ;

– Il n’a appris que lors de l’entretien du 28 février 2012 qu’il ne bénéficierait pas de l’accord d’entreprise du 24 juin 2002 et que ce n’était pas à l’entreprise de lui faire des propositions de reclassement mais à lui de rechercher une mobilité et ce malgré son ancienneté et ses résultats, le tout sans explication sur le refus d’appliquer l’accord du 24 juin 2002 ;

– Il était persuadé qu’à la suite de l’entretien du 11 janvier 2012, en apportant l’accord d’entreprise du 24 juin 2002, la société reconnaîtrait qu’elle devait effectuer une recherche de reclassement dans tous les postes de l’entreprise après un entretien approfondi avant de mettre en ‘uvre une éventuelle procédure de révocation ; or, le 28 février 2012, la société a refusé d’appliquer les dispositions de l’accord, ce qui lui a provoqué un choc psychologique soudain.

Il fait valoir que cette cour a décidé que la convocation systématique d’un agent devant le conseil de discipline qui repose sur le seul motif de la décision du préfet est irrégulière dans ce qu’elle ne comporte pas de motifs précis sur lesquels l’agent peut s’expliquer et le conseil de discipline donner un avis sur la sanction adaptée au regard de l’échelle fixée par l’article 149 du statut ;

– La société a engagé une procédure disciplinaire à son encontre sans organiser une évaluation préalable à sa situation. Ainsi, la société n’a jamais transmis de proposition de poste de reclassement comme elle y était tenue par son constat d’accord du 24 juin 2002. Or, il avait fait savoir à la société par écrit à plusieurs reprises qu’il était volontaire à tout poste dans l’entreprise, de sorte qu’il est démontré que la société souhaitait simplement le révoquer et se débarrasser de lui sans respecter ses droits ;

– Le malaise dont il a été victime à l’annonce de sa révocation n’est autre qu’une réaction à la pression ressentie au cours de son entretien, dès lors qu’il était déjà fragilisé par le harcèlement moral qu’il subissait depuis plusieurs années. Compte tenu de sa fragilité psychologique provoquée par le harcèlement moral et la discrimination subis au sein de son lieu de travail, sa vive réaction face à la pression au cours de l’entretien précité était parfaitement prévisible pour la société. La conscience du danger par la société est donc parfaitement caractérisée ;

– La société aurait dû prendre des mesures de prévention nécessaires afin de l’en préserver et ne l’a pas fait. Il explique qu’il était persuadé que M. [W] appliquerait le constat d’accord du 24 juin 2002 et qu’il serait immédiatement mis fin à la procédure disciplinaire totalement infondée et poursuivie en violation évidente de ses droits. Il fait valoir que c’est pour cette raison qu’il a dit à l’enquêteur de la caisse qu’il ne soupçonnait pas une telle mesure ;

– Le fait que l’entretien ne se soit pas déroulé de manière brutale ou injurieuse est sans incidence sur l’accident de travail et la conscience du danger auquel la société l’exposait en poursuivant une procédure disciplinaire infondée sans respecter le constat d’accord en violation de ses droits ;

– La société n’a pris aucune mesure afin de faire cesser le harcèlement moral et la discrimination dont il était victime sur son lieu de travail en sa qualité de délégué syndical, et ce en dépit des requêtes formulées dans la lettre du 1er juin 2010 et les nombreuses lettres envoyées de 2010 à 2012. Au contraire, en violation de l’accord du 24 juin 2002, la société a mis en ‘uvre une mesure de procédure disciplinaire à son encontre en ayant nécessairement conscience que ses actes nuiraient à la santé de son salarié ;

– La société est donc à l’origine de son état de fragilité psychologique ayant conduit à son malaise lors de son entretien du 28 février 2012. L’annonce par la société du maintien de la procédure disciplinaire à son encontre et du refus d’appliquer le constat d’accord du 24 juin 2002 n’a fait que porter son état d’angoisse à son paroxysme, provoquant sa chute et son choc psychologique. Le malaise n’est donc que le résultat de la défaillance de la société à mettre en ‘uvre des mesures indispensables pour que cesse le harcèlement moral et la discrimination syndicale subie par son employé, lesquelles auraient permis de prévenir sa vive réaction à l’annonce de la poursuite disciplinaire à son encontre laquelle ne pouvait qu’aboutir à sa révocation compte tenu du refus de la société d’appliquer l’accord du 24 juin 2002. L’absence de motif précis invoqué par la société pour engager une mesure disciplinaire est parfaitement irrégulier comme l’a jugé la cour d’appel de Paris au terme de son arrêt du 16 février 2018 (RG n° 16/53610 ‘ contentieux prud’homal) et ce alors que cette dernière avait parfaitement conscience du danger auquel ce dernier était exposé. En refusant d’appliquer une obligation qui s’imposait à elle, dans le cadre de la procédure disciplinaire qu’elle avait décidé d’engager, la société a manqué à son obligation de sécurité à l’encontre de l’assuré dont elle ne pouvait ignorer le choc psychologique que ce dernier subirait à l’annonce du refus d’appliquer l’accord du 24 juin 2002, qui était une obligation de l’employeur ;

– La société devait, en application des articles L. 4121-1 à 3 du code du travail, élaborer et tenir à jour un document unique d’évaluation des risques professionnels, or la société ne verse pas au débat ce document.

La société réplique que :

– L’assuré n’a jamais été discriminé ni harcelé ;

– Il n’a jamais fait l’objet d’aucun retard à l’avancement ; les règles de déroulement de carrière applicables ont été respectées et l’accession au niveau supérieur est toujours intervenue dans la moyenne de la fourchette de l’ancienneté, à l’exception d’un avancement très rapide sur le dernier niveau E11XP alors qu’il venait d’être désigné délégué syndical peu de temps avant ; le juge départiteur a retenu que l’assuré n’apportait aucun élément de nature à laisser présumer l’existence d’une discrimination ;

– Elle est seule, en sa qualité d’employeur, compétente pour apprécier les aptitudes professionnelles de ses agents ; le statut du personnel de la société ne prévoit aucunement un droit à l’avancement lié uniquement à l’ancienneté ; elle a donc promu l’assuré, par son pouvoir d’appréciation et en application des règles statutaires, en adéquation avec ses compétences et ses résultats professionnels ; le passage au grade de « pilote » ou à la catégorie « agent de maîtrise » n’est pas dû, l’agent doit faire ses preuves ; l’accès aux métiers de développement se fait au choix de la hiérarchie ; l’assuré ne peut pas prétendre à un changement de catégorie au seul motif que d’autres agents y ont accédé ; l’assuré n’a pas eu une attitude professionnelle irréprochable entre 1996 et 2003 et omet de préciser qu’avant la loi d’amnistie de 2002, cinq faits fautifs ont été relevés à son égard ;

– Des réponses ont été apportées à ses lettres et interrogations ; dès mai 2010, l’assuré a estimé être victime d’un retard dans sa carrière en raison de son engagement syndical, alors qu’il n’avait été désigné délégué syndical qu’en septembre 2009 ; à cette date, l’assuré ne remplissait pas les conditions d’ancienneté pour pouvoir obtenir un niveau supérieur ; l’assuré n’a fait l’objet d’aucun retard à l’avancement ni d’aucune discrimination ;

– L’assuré n’a pas été agressé verbalement lors de l’entretien disciplinaire du 10 mars 2010 où il assistait l’agent [E] ; l’entretien n’a pas pu aller jusqu’à son terme en raison seulement de l’attitude de l’assuré qui n’était pas un simple assistant mais se comportait comme un représentant de l’agent mis en cause et répondait et s’expliquait à la place du salarié pendant l’entretien ; il en a été de même lors de l’entretien de Madame [D] ; les entretiens disciplinaires ne sont pas des tribunes syndicales ; le supérieur hiérarchique de l’assuré lui a simplement rappelé qu’il était là « pour assister M. [E] et non le représenter » ; l’assuré manie facilement « l’invective et la menace de plaintes diverses » selon une ancienne responsable des ressources humaines ;

– Le refus de renouvellement de port d’armes par la préfecture entraîne automatiquement une procédure disciplinaire qui est arrêtée si l’agent fait une mobilité ; l’assuré a fait l’objet d’un refus de renouvellement de port d’armes par la préfecture en décembre 2011 ; l’assuré a été reçu le 11 janvier 2012 par le responsable des ressources humaines adjoint (Monsieur [Z]) et son responsable hiérarchique (Monsieur [W]) ; l’assuré était accompagné de deux responsables syndicaux (MM. [D] et [D]) ; il lui a été expliqué qu’il ne pouvait plus exercer le métier d’agent GPSR mais qu’il pouvait opter pour une mobilité ; il lui a été également précisé qu’une procédure disciplinaire pouvant aller jusqu’à révocation allait en parallèle être engagée, laquelle serait arrêtée s’il trouvait une mobilité ;

– Par lettre du 10 février 2012, l’assuré a été convoqué à un entretien préalable devant avoir lieu le 21 février 2012 ; l’assuré ne s’est pas présenté et n’a pas demandé de report de l’entretien ; l’assuré a quand même réussi à obtenir une copie du compte-rendu de l’entretien sur lequel il est clairement indiqué « la procédure disciplinaire pouvant aller jusqu’à la révocation » et il a désiré signer ce compte-rendu ; en outre la convocation à l’entretien du 11 janvier 2012 indiquait déjà qu’il était envisagé à son égard une mesure disciplinaire pouvant aller jusqu’à la révocation ;

– L’information donnée au salarié de l’engagement d’une procédure ne peut en elle-même être considérée comme constitutive de harcèlement moral ;

– En retenant le caractère professionnel de l’accident en cause, la cour d’appel a précisé qu’il n’était pas établi que l’entretien se serait déroulé de manière violente, brutale ou injurieuse ou que le supérieur hiérarchique aurait excédé les limites des pouvoirs qui lui sont conférés dans le cadre de son pouvoir de direction ;

– Il faut que l’agent concerné s’investisse dans la recherche d’un poste sur un nouveau métier, qu’un poste soit disponible, que le département d’accueil l’accepte et qu’il réussisse une formation correspondante ; l’assuré ne s’est pas investi dans la recherche d’une mobilité ; il ne s’est manifesté qu’au bout de trois mois sur un poste unique ;

– L’assuré n’ayant pas souhaité une mobilité, la société a été contrainte de poursuivre la procédure disciplinaire ; la mise à la retraite de l’assuré a été initiée par lui-même par voie de réforme médicale ; la procédure disciplinaire est donc devenue caduque ;

– Le constat d’accord du 24 juin 2002 ne porte que sur l’objet de l’alarme sociale mais n’enregistre aucune obligation ferme de reclassement des agents concernés ou de modalités de ce reclassement ; ce constat ne fixe qu’un cadre général aux discussions sur la mobilité des agents concernés par la perte de leur autorisation de port d’arme ; ces discussions n’ont abouti qu’à deux constats de désaccord sur les modalités de la mobilité, les 11 septembre 2007 et 4 juin 2012 ;

– L’assuré a chuté au sol dans le bureau de son supérieur hiérarchique sans que personne ne puisse se l’expliquer ; l’entretien n’a pas été violent, ce que le témoin désigné a confirmé ; le témoin explique que l’assuré « a dû heurter le pied du bureau et s’est cogné la tête par terre » ;

– Saisi le 7 mars 2012 au regard des faits litigieux, le CHSCT, dans son avis du 9 mars 2012, a constaté une divergence sur le caractère de danger grave et imminent ;

– Ni le conseil des prud’hommes, ni la cour d’appel n’ont reconnu de harcèlement moral institutionnalisé au sein de la société.

La caisse fait valoir qu’elle s’associe aux conclusions de la société et ajoute qu’un accident du travail dont la matérialité était établie n’entraînait pas automatiquement la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur. Elle fait valoir qu’il convient de s’attacher aux faits du 28 février 2012, lesquels ne démontraient pas l’existence d’un danger ou la nécessaire conscience d’un danger de la part de la société.

Selon l’article 75 du règlement intérieur de la caisse de coordination aux assurances sociales de la RATP, est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu, par le fait ou a’ l’occasion du travail, à tout agent du cadre permanent.

Aux termes de l’article 88 de ce règlement, lorsque l’accident est dû à’ la faute inexcusable de l’employeur, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions légales et réglementaires.

Il résulte de l’application combinée de ces articles du règlement de la caisse et des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, dans leur version applicable aux faits, que le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver. Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l’employeur ait été la cause déterminante de l’accident survenu au salarié ou de la maladie l’affectant. Il suffit qu’elle en soit une cause nécessaire, même non exclusive ou indirecte, pour que la responsabilité de l’employeur soit engagée.

Il incombe cependant au salarié qui invoque la faute inexcusable de son employeur de rapporter la preuve d’une part de ce que celui-ci avait ou devait avoir conscience du danger auquel il était exposé, et de ce qu’il n’avait pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver, d’autre part que ce manquement tenant au risque connu ou ayant dû être connu de l’employeur est une cause certaine, et non simplement possible, de l’accident ou de la maladie.

En l’espèce, l’assuré, agent de sécurité pour la société, a déclaré avoir été victime d’un accident le 28 février 2012. Le même jour, la société a établi une déclaration d’accident du travail faisant mention d’un accident survenu à l’assuré le jour même à 11h15, dans les locaux du khéops à [Localité 7], en indiquant que l’assuré avait déclaré : « Lors d’un entretien avec ma hiérarchie dans le bureau du cadre, responsable du khéops, sur motif de la procédure de révocation engagée à mon encontre, le cadre Monsieur [W], m’informe que Monsieur [Z], ira au terme de cette procédure, alors qu’il constate lui-même qu’il n’y a aucune infraction au règlement interne de la RATP. Suite à ses propos, je suis pris d’un malaise, et chute brutalement, engageant une perte de connaissance. Les sapeurs-pompiers sont de suite commandés, et je suis transporté à l’hôpital privé d'[Localité 6]. De ce fait je ressens un profond mal-être et suis profondément choqué psychologique . J’ai également une cervicalgie », les horaires de travail de la victime étant de 07h30 à 16h30, l’accident ayant été connu de l’employeur le jour même et faisant mention d’un témoin en la personne de M. [R] [E] (pièces n° 1 et 2 recto de la caisse et n° 20 de l’assuré). Il est fait état d’entorses et foulure au titre de la nature des lésions et du rachis et des vertèbres cervicales au titre du siège des lésions.

Le certificat médical initial établi le 28 février 2012 constate des « cervicalgies + choc psychologique » et prescrit des soins avec arrêts de travail jusqu’au 2 mars 2012 (pièce n° 2 verso de la caisse).

La caisse a diligenté une mesure d’instruction. L’assuré a été entendu par l’enquêteur le 21 mars 2012 (pièce n° 4 de la caisse). L’assuré a déclaré :

« Le 28.02.2012 j’ai été reçu à ma demande par M. [W] (cadre de GPSR) en compagnie de M. [L] et M. [E] vers 11h ; j’ai pris mon service à 7h30 ce jour-là. Cette demande était justifiée pour avoir des explications sur un compte-rendu contradictoire (CRC) au motif du refus du préfet de renouveler mon port d’arme dont je ne m’explique pas le motif que je conteste devant le tribunal administratif. Avant l’entretien je n’avais aucune raison morale ou physique de me faire des soucis.

« Lors de l’entretien il m’est indiqué qu’une mesure de sanction est en cours contre moi, mesure que je n’avais pas soupçonnée avant d’en être informé. Je demande alors si la procédure sera conduite jusqu’à son terme et il m’est répondu que cela ne fait aucun doute. Devant cette attitude qui est visiblement discriminatoire envers moi car dans cette affaire la direction aurait dû me proposer un reclassement après entretien comme prévu dans l’accord direction/syndicat du 24.06.2002 (pièces jointes). Mr [W] me confirme que si je ne fais pas de demande de mutation et de toute manière ils ne tiendront pas compte de cet accord et que la révocation est fermement envisagée dans mon cas. Je redemande que cet accord me soit appliqué et dans cette optique je suis d’accord pour un reclassement et face à leur refus obstiné j’ai été choqué je tremblais et en me levant j’ai cogné le bureau avec la jambe gauche et j’ai perdu l’équilibre. Dans la chute j’ai cogné le bureau et ma tête a touché violemment le sol et je ne me souviens plus des faits à partir de ce moment. Les pompiers m’ont ranimé et j’ai pris connaissance étant toujours allongé au sol. J’ai ensuite été conduit par les pompiers à l’hôpital d'[Localité 6]. »

À une date qui n’est pas précisée, la société a émis des réserves en répondant à la caisse en ces termes :

« Par la présente, je tiens à vous faire part de mes réserves quant au caractère professionnel de l’accident survenu à [l’assuré], matricule 207275, en date du 28 février 2012.

« Il me paraît indispensable de vous éclairer sur les circonstances ayant conduit à cette déclaration.

« Pour ce faire, il convient de vous relater les faits ayant précédé cette déclaration.

« La préfecture de police a informé le département SEC que [l’assuré] faisait l’objet d’un refus de renouvellement de port d’arme ; outil inhérent à son contrat de travail. En conséquence, et comme pour tout agent se retrouvant dans cette situation, l’agent a été convoqué à un entretien avec [I] [Z] (adjoint RRH de département) afin de discuter des suites de ce refus.

« Cet entretien a eu lieu le 11 janvier dernier en présence de deux élus.

« Il lui a été expliqué d’une part, qu’une mesure conservatoire devait être prise puisqu’il ne pouvait plus être mis sur le terrain sans son arme et d’autre part, qu’il pouvait faire acte de mobilité afin de se réorienter vers un autre métier.

« Il lui a également dit qu’une procédure disciplinaire allait être mise en place en parallèle comme pour tout agent n’ayant plus son permis de port d’armes ; procédure qui s’arrêterait en cas de mobilité.

« L’assuré a déclaré à l’issue de l’entretien qu’il réfléchissait à une mobilité lui permettant de conserver son grade de métier de développement.

« Par la suite, [l’assuré] a été en arrêt maladie du 30 janvier au 23 février 2012.

« Le 28 février 2012 au matin, l’agent s’est présenté à son attachement, au khéops 1, et a sollicité un entretien avec son responsable, Monsieur [N] [W], en présence d’un témoin, Monsieur [R] [E]

« Lors de cet entretien, [l’assuré] a demandé quelles étaient les suites qui allaient être données à la procédure disciplinaire en cours à son encontre suite au refus de renouvellement de port d’armes de la préfecture de police.

« Plus précisément, il a demandé à ce que soit retiré du compte-rendu d’entretien préalable (entretien auquel il ne s’est pas rendu) la mention « pouvant aller jusqu’à révocation ».

« Monsieur [N] [W] lui a rappelé d’une part, les termes de son entretien avec Monsieur [I] [Z] en date du 11 janvier 2012, à savoir qu’il pouvait faire une mobilité au sein de la RATP et ainsi se réorienter vers un autre métier, ce qui aurait pour conséquence d’arrêter la procédure disciplinaire à son encontre suite à son retrait de permis de port d’arme.

« Et d’autre part, Monsieur [N] [W] lui a expliqué que la phrase figurant dans son compte-rendu d’entretien préalable « compte tenu de la gravité des faits, [l’assuré] est susceptible de faire l’objet d’une mesure disciplinaire pouvant aller jusqu’à la révocation » est une phrase figurant dans tout compte-rendu d’entretien lorsque l’encadrement estime que les faits fautifs sont avérés et qu’ils souhaitent que la procédure disciplinaire continue.

« C’est à ce moment que [l’assuré], assis devant le bureau de son responsable, a quitté sa chaise, s’est énervé, s’est allongé sur le sol et s’est plaint de douleurs à la tête. Il est à préciser que la jambe n’a heurté aucun meuble ni objet.

« Monsieur [N] [W] a fait demander les pompiers. Ces derniers ont porté les premiers soins à [l’assuré], ils ont noté une tension correcte. L’agent a été amené à l’hôpital.

« À la suite des examens médicaux, Monsieur [B] [L], témoin de l’entretien, accompagné d’un agent de maîtrise, Monsieur [Y] [E], a ramené [l’assuré] à l’attachement, lui a proposé de le conduire à son domicile et de prendre contact avec son épouse. [L’assuré] a refusé.

« Ainsi, au vu des éléments dont nous disposons et sous réserve d’explications complémentaires de la part de l’agent, nous estimons que l’accident de [l’assuré] n’a pas de caractère professionnel. »

Le 18 mai 2012, au terme de son instruction la caisse a refusé de prendre en charge l’accident du 28 février 2012 au titre de la législation sur les risques professionnels.

L’assuré a contesté cette décision et l’accident du 28 février 2012 a été pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels par un arrêt de cette cour du 4 mai 2018 rendu sur renvoi après cassation.

La matérialité de l’accident est donc établie. Il est donc certain que l’assuré s’est rendu, accompagné, à un entretien le 28 février 2012 relatif à la procédure disciplinaire ouverte à son encontre à la suite du refus de la préfecture de renouveler son autorisation de port d’arme. Le refus de renouveler l’autorisation de port d’arme par la préfecture est constant au jour de l’accident, peu important que l’assuré ait pu obtenir ensuite une décision du tribunal administratif annulant cette décision.

La société expose que dans ce cas de figure elle engage une procédure disciplinaire qui ne peut être arrêtée que si l’intéressé fait une mobilité dans l’entreprise et qu’il revient à celui-ci de rechercher sa mobilité.

Il importe peu, dans le cadre d’une action en faute inexcusable, de savoir si cette procédure est régulière ou non, si la société aurait dû renoncer à cette procédure, et si elle serait infondée en droit ou bien contraire à des accords syndicaux. Il convient seulement de rechercher si, l’assuré étant fragile psychiquement, cet entretien qui lui a causé un choc psychologique est à l’origine d’une faute inexcusable.

Il résulte des explications de l’intéressé et du témoin désigné, Monsieur [E] (pièce n° 79 de la société), que l’assuré a réagi vivement à la confirmation que la procédure disciplinaire serait menée jusqu’à son terme et pouvait aller jusqu’à sa révocation, qu’il s’est levé, était « très affecté et très agité », qu’il « a dû heurter le pied du bureau et s’est cogné la tête par terre ».

L’assuré ne peut pas sérieusement soutenir qu’il a découvert la procédure disciplinaire au cours de cet entretien pour avoir déjà été informé de la mise en ‘uvre de cette procédure à plusieurs reprises, notamment par sa convocation pour l’entretien du 11 janvier 2012, par cet entretien du 11 janvier 2012 et par le compte-rendu de l’entretien 21 février 2012 auquel il ne s’est pas rendu mais dont il n’est pas contesté qu’il s’en est procuré une copie avant le 28 février 2012 pour la signer. L’entretien du 28 février 2012, intervenu à sa demande, avait ainsi pour principal objet de voir retirer de ce compte-rendu la mention d’une procédure disciplinaire pouvant aller jusqu’à la révocation. L’assuré était donc parfaitement informé en allant à l’entretien et pendant l’entretien de son enjeu. C’est au contraire quand il a acquis la certitude que sa demande de retrait de la mention relative à la révocation ne serait pas satisfaite qu’il s’est levé et que l’accident s’est produit.

Le fait pour un employeur d’informer son salarié qu’il engage une procédure pouvant aller jusqu’à la révocation ne peut en lui-même, sans autres éléments, être considéré comme la preuve que l’employeur ne pouvait qu’avoir conscience de la vulnérabilité de l’intéressé à ce moment-là.

S’il est établi que l’accident trouve son origine dans un choc psychologique au moment où l’assuré prend conscience que la procédure disciplinaire sera poursuivie, rien ne vient établir pour autant que l’entretien, qui n’avait pas pour objet, contrairement à ce qu’affirme l’assuré, de lui annoncer sa révocation mais de lui expliquer la procédure en cours, aurait été brutal ou injurieux, que les interlocuteurs de l’assuré auraient excédé les limites des pouvoirs qui leurs sont conférés dans le cadre de leurs fonctions et que l’assuré manifestait des signes pouvant alerter ses interlocuteurs avant sa chute et son malaise.

De plus, une procédure disciplinaire relève de la libre appréciation de l’employeur. Rien ne vient établir que cette procédure participerait à un plan délibéré pour révoquer et « se débarrasser » de l’assuré sans respecter ses droits.

Ensuite, contrairement à ce que soutient l’assuré, la société a répondu à ses lettres, et il ne résulte pas de ces échanges examinés dans le cadre de la présomption de faute inexcusable la preuve de l’existence avant l’accident d’un harcèlement moral et d’une discrimination syndicale, peu important le caractère tendu des relations entre les parties relativement à la manière dont l’assuré remplissait sa fonction de délégué syndical lors des entretiens disciplinaires. Il n’en ressort également aucune preuve d’un ralentissement de la carrière de l’intéressé. Il ne ressort pas non plus de l’enquête de la caisse lors de l’instruction de la déclaration d’accident du travail l’existence d’un harcèlement moral et d’une discrimination syndicale ayant eu des effets dommageables sur la santé psychique de l’assuré avant le fait accidentel du 28 février 2012 qui auraient été connus ou auraient dû l’être par la société.

Aucun élément n’a attiré l’attention de la société sur l’état psychique de l’assuré, l’existence de différends professionnels sur la manière d’exercer une fonction syndicale n’emportant pas nécessairement la révélation d’un état psychique altéré et fragile de l’assuré. En outre, le contexte général de la société et l’existence éventuelle de harcèlement moral pour d’autres salariés ne sont pas de nature à rapporter la preuve au cas concret de l’assuré qu’il a été personnellement victime de harcèlement et de discrimination syndicale.

Il ne résulte donc des pièces du dossier aucune preuve que les agissements des supérieurs hiérarchiques de l’assuré auraient causé la fragilisation de l’état de santé psychique de l’assuré ou participé à cette fragilisation psychologique dont la société avait ou aurait dû avoir conscience avant l’accident, ni même qu’ils aient volontairement diligenté la procédure disciplinaire et refusé d’appliquer un accord, dans le seul but de le révoquer au mépris de ses droits.

Il ne peut donc pas être reproché à la société de ne pas avoir pris les « mesures indispensables » pour faire cesser le harcèlement moral et la discrimination syndicale allégués un an avant l’accident pour prévenir la vive réaction de l’assuré à l’annonce de la poursuite disciplinaire à son encontre laquelle pouvait aller jusqu’à sa révocation.

Il résulte de l’ensemble de ces considérations que, si la matérialité de l’accident et le lien entre le choc psychologique et l’entretien disciplinaire en cause sont certains, pour autant, rien ne vient établir que la société connaissait ou aurait dû connaître l’altération de l’état de santé psychique de l’assuré avant l’accident et il ne peut pas lui être reproché en conséquence de ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour préserver l’assuré contre un danger dont elle ne pouvait pas avoir objectivement conscience.

Dans ces conditions, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté la société de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’assuré sera condamné aux dépens d’appel et à payer la somme de 500 euros à la société au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

DÉCLARE l’appel recevable ;

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté la société de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Et statuant à nouveau sur ce seul chef ;

CONDAMNE [V] [A] à payer à la [9] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE [V] [A] aux dépens d’appel.

La greffière La présidente

 


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