Tentative de conciliation : 19 janvier 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 20/03018

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Tentative de conciliation : 19 janvier 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 20/03018
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MINUTE N° 23/70

NOTIFICATION :

Copie aux parties

– DRASS

Clause exécutoire aux :

– avocats

– parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE – SECTION SB

ARRET DU 19 Janvier 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 20/03018 – N° Portalis DBVW-V-B7E-HNG5

Décision déférée à la Cour : 30 Septembre 2020 par le pôle social du Tribunal Judiciaire de MULHOUSE

APPELANTE :

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU HAUT-RHIN

[Adresse 1]

[Localité 3]

Comparante en la personne de Mme [M] [F], munie d’un pouvoir

INTIMEE :

Association DE SOINS ET D’AIDE A DOMICILE

CENTRE ALSACE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Vanessa PARISOT de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 Octobre 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, chargée d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,

Mme GREWEY, Conseiller

M. LAETHIER, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier

ARRET :

– contradictoire

– prononcé par mise à disposition au greffe par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre,

– signé par Mme FERMAUT, Magistrat honoraire, faisant fonction de Président de chambre, et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCÉDURE

Le 9 avril 2019, l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace établissait une déclaration d’accident du travail concernant Mme [G] [V], directrice auprès de l’association, en mentionnant que l’accident avait eu lieu à [Localité 4] le 16 juin 2018 et en précisant « Faute d’élément factuel, impossibilité de remplir correctement le formulaire ‘ cf courrier joint ».

Le certificat initial daté du 18 juin 2018 et établi par le docteur [N] [U] mentionnait un « malaise avec chute de sa hauteur lors d’un congrès professionnel » avec le 16 juin 2018 comme date de l’accident.

Par courrier du 8 avril 2019, l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace a émis des réserves sur le caractère professionnel de l’accident, relevant qu’elle ne savait toujours pas où avait eu lieu l’accident, ni à quelle heure, ni quelle avait été la nature du malaise de sa salariée.

La caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin a diligenté une instruction et à son terme, a reconnu, par décision du 12 juin 2019, le caractère professionnel de l’accident du travail survenu le 16 juin 2018 à Mme [G] [V].

L’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace a saisi la commission de recours amiable en date du 25 juillet 2019 qui a implicitement rejeté la demande de l’employeur.

L’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace a saisi la commission de recours amiable en date du 25 juillet 2019 qui a implicitement rejeté la demande de l’employeur.

L’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace a donc saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Mulhouse en date du 13 novembre 2019 aux fins de contestation de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable.

Par jugement du 30 septembre 2020, le pôle social du tribunal, devenu tribunal judiciaire de Mulhouse, a :

– déclaré recevable le recours introduit par l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace à l’encontre de la décision de rejet implicite de la commission de recours amiable de la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin ;

– constaté l’absence de preuve de la matérialité de l’accident du 16 juin 2018 ;

– déclaré la décision de la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin du 12 juin 2019 concernant la prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels de l’accident du travail qui serait survenu à Mme [G] [V] le 16 juin 2018 inopposable à l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace ;

– condamné la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin aux dépens ;

– condamné la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin à payer à l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 14 octobre 2020, la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin a interjeté appel de la décision du 30 septembre 2020.

Vu les conclusions de la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin visées le 3 juin 2021, reprises oralement à l’audience, aux termes desquelles la caisse sollicite de la cour de :

– infirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions ;

– dire et juger que c’est à bon droit qu’elle a reconnu le caractère professionnel de l’accident survenu le 16 juin 2018 à Mme [G] [V] ;

– dire et juger que sa décision de prendre en charge au titre de la législation professionnelle l’accident survenu le 16 juin 2018 à Mme [G] [V] est opposable à l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace ;

– débouter l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace de l’ensemble de ses prétentions ;

– condamner l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace à lui verser la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions visées le 10 novembre 2021, aux termes desquelles l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace demande à la cour de :

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Pôle social du tribunal judiciaire de Mulhouse le 30 septembre 2020 ;

y ajoutant :

– ordonner à la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin de procéder à la désimputation de l’accident du travail du 16 juin 2018 de son compte AT/MP et d’en justifier par écrit auprès de l’intimée dans un délai de trente jours calendaires à compter de la notification de l’arrêt à intervenir ;

– condamner la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin à lui verser la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin aux entiers frais et dépens ;

Vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé, en application de l’article 455 du code de procédure civile, pour l’exposé de leurs moyens et prétentions ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l’appel :

Interjeté dans les forme et délai légaux, l’appel est recevable.

Sur le caractère professionnel de l’accident et l’opposabilité de la prise en charge :

La caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin rappelle que la salariée se trouvait au moment des faits en mission pour le compte de son employeur et que l’absence de témoins alors qu’elle résidait dans un logement loué pour assister à un congrès ne saurait lui être reprochée.

Elle estime que dans le cadre de l’instruction qu’elle a menée, les éléments recueillis aussi bien par ses soins que par l’employeur permettent de démontrer que le malaise de Mme [G] [V] avait pour cause le travail de la victime. La caisse rappelle également que l’employeur ne doit pas confondre les procédures, notamment celle diligentée par Mme [G] [V] pour la prise en charge d’une maladie professionnelle qui est sans emport sur la question de l’opposabilité à l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace de la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l’accident survenu le 16 juin 2018. Elle précise qu’aucune condition particulière n’est requise quant à la rédaction du certificat médical initial, pas plus que le fait de déclarer plusieurs mois après l’accident en question puisque l’assuré dispose d’une durée de deux ans pour ce faire.

L’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace soutient que les preuves d’un malaise donnant lieu à prise en charge d’un accident du travail telles qu’avancées par la salariée dans un contexte particulier où elle était seule et assistait pendant une semaine à un congrès à [Localité 4], et ce à l’issue d’un arrêt maladie, sont inexistantes. Elle fait valoir que les circonstances d’établissement de deux certificats médicaux et arrêts de travail, l’un pour maladie professionnelle et l’autre pour accident du travail, ont donné lieu à une plainte qui a abouti à une tentative de conciliation au cours de laquelle le médecin prescripteur a reconnu ses manquements et a admis qu’il avait rédigé lesdits certificats sur la base des seules déclarations de Mme [G] [V] et qu’ils ne sauraient en aucune façon démontrer la réalité des conditions de travail, l’origine professionnelle de l’épuisement ou la survenance d’un malaise le 16 juin 2018. Elle estime qu’il n’existe aucun élément probant justifiant de la matérialité de l’accident du travail. L’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace déplore en outre le caractère lacunaire de la procédure qui a mis en avant des mensonges de la salariée à plusieurs reprises et des man’uvres qu’elle a pu opérer pour se voir reconnaître ses droits issus du supposé accident. Elle en déduit que l’imputabilité au travail des lésions prises en charge par la caisse est contestable, aucun lien de causalité n’étant établi entre le soi-disant malaise dont fait état Mme [G] [V] et son activité professionnelle.

Aux termes de l’article L411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise.

L’accident du travail se définit comme un événement soudain survenu au temps et au lieu de travail et à une date certaine, dont il est résulté une lésion, de nature corporelle ou caractérisée par des troubles psychiques, si leur apparition est brutale et liée au travail, quand bien même elle ne surviendrait pas concomitamment à l’accident.

S’il existe une contestation, il appartient au salarié ou à la caisse, substituée dans les droits de la victime, d’apporter la preuve d’un fait précis survenu soudainement ou accidentellement par le fait ou à l’occasion du travail et qui est à l’origine de la lésion corporelle en application de l’article L411-1 du code de la sécurité sociale, les déclarations du salarié devant ainsi être corroborées par des éléments objectifs.

Dans les relations entre l’employeur et la caisse primaire d’assurance maladie, la preuve de la matérialité de l’accident incombe à cette dernière.

En l’espèce et à hauteur de cour, les parties concèdent que Mme [G] [V] était bien, durant la semaine du 11 au 16 juin 2018, en mission pour son employeur comme s’étant rendue à [Localité 4] pour assister à un congrès. Il y a lieu de préciser que ce séjour a immédiatement suivi une période d’arrêt maladie et que la salariée n’avait donné aucune nouvelle à son employeur quant à la reprise de son travail avant le 11 juin 2018 à 11h, où elle était déjà en route pour [Localité 4].

A titre liminaire, il y a lieu de préciser que la présente procédure est circonscrite aux seules questions liées à l’accident du travail du 18 juin 2018 et non pas à celles relevant de la déclaration antérieure de maladie professionnelle.

Les faits tels que décrits par Mme [G] [V] sont survenus le samedi matin du retour à son domicile alors qu’elle se trouvait encore dans l’appartement qu’elle avait loué pour la semaine du congrès ; Mme [V] a déclaré par courriel le jour même à son employeur à 8h12 « j’ai encore fait un malaise ce matin, heureusement le taxi était commandé. J’irai voir le médecin lundi et je vous tiendrai informé ».

Mme [G] [V] s’est rendue chez son médecin le lundi suivant et le certificat médical initial établi par le docteur [U] le 18 juin 2018 mentionne « malaise avec chute de hauteur lors d’un congrès professionnel ».

Malgré l’établissement de ce certificat, Mme [G] [V] ne déclarera cet accident du travail qu’en date du 14 janvier 2019 (cf courrier de Mme [V] à la caisse du 14 janvier 2019). Parallèlement, il y a lieu de relever que malgré l’information donnée de son état au président de la structure qu’elle dirige, cette dernière n’établira aucune déclaration d’accident du travail mais émettra des réserves sur le caractère professionnel de l’accident. A ce titre, il est relevé que l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace soutient qu’elle n’a découvert l’existence d’une telle déclaration qu’à l’occasion d’une instance prud’homale initiée par sa salariée.

S’il est exact qu’une victime d’un accident du travail dispose d’un délai de deux ans pour formaliser sa déclaration, il n’en demeure pas moins que la cour observe qu’un réel imbroglio a vu le jour entre la chronologie des évènements, l’absence de perception par l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace de ce que le malaise de sa salariée aurait pu être un accident du travail, et les certificats médicaux de l’appelante déposés à la fois au titre d’une maladie professionnelle et d’un accident du travail et tardivement pour ce dernier.

En l’espèce, Mme [G] [V] aurait ressenti un malaise à 5h du matin, seule, dans sa chambre louée pour sa semaine passée à un congrès. Aucun témoin n’a assisté à ce malaise. En outre, la cour relève que s’il existe bien un certificat initial établi le 18 juin 2018 par le docteur [U], ce dernier a reconnu dans le cadre d’une plainte initiée à son encontre, qu’il n’avait rien pu constater et qu’il a bien établi le certificat sur les seuls dires de sa patiente. Enfin, après le malaise dont a fait état Mme [G] [V], cette dernière a pris le train pour rentrer de [Localité 4] à son domicile, tout en y rédigeant une synthèse de sa mission à l’attention de son président, où elle formule des propositions et semble par ailleurs totalement persuadée qu’elle mènera à bien divers projets qu’elle a découverts lors de ce congrès. Elle a donc continué normalement sa journée après le malaise.

Il s’ensuit que la survenance de l’événement accidentel au temps et au lieu du travail résulte de la seule déclaration de la salariée et n’est nullement corroborée par un faisceau d’éléments objectifs précis, graves et concordants. D’autre part, faute de réelle lésion corporelle et d’imputabilité directe à l’emploi de Mme [G] [V], l’évènement, qui est survenu peu après 5 heures du matin, n’est nullement établi.

En l’absence d’élément nouveau à hauteur d’appel, c’est donc par des motifs pertinents et adoptés par la cour que les premiers juges ont retenu que la matérialité de l’accident n’était pas établie au temps et au lieu du travail, et qu’ils ont fait droit à la demande d’inopposabilité de l’employeur.

En conséquence, le jugement est confirmé et la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin déboutée de sa demande.

Enfin, l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace demande à la cour de se prononcer sur la désimputation de l’accident à son compte de cotisations AT/MP et de lui en justifier par écrit dans un délai de 30 jours calendaires à compter de la notification de l’arrêt à intervenir.

Cette question relève du contentieux de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale n’étant pas compétentes pour connaître de ces demandes, l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace sera déboutée de sa demande formulée à hauteur d’appel et visant à la désimputation de l’accident du travail de son compte AT/MP.

Sur le surplus :

Les dispositions du jugement déféré quant aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile seront confirmées.

Succombant en ses prétentions, la caisse primaire d’assurance maladie du Haut -Rhin sera condamnée aux dépens d’appel. Ses prétentions au titre de l’article 700 du code de procédure civile devant la cour sont rejetées.

L’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace qui elle-même succombe partiellement sera déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile à hauteur de cour.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la Loi,

DÉCLARE l’appel recevable ;

CONFIRME dans toutes ses dispositions le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Mulhouse en date du 30 septembre 2020 ;

Y ajoutant :

SE DÉCLARE incompétente pour connaître des questions relatives à la tarification des accidents du travail et en conséquence, déboute l’Association de Soins et d’Aide à Domicile Centre Alsace de sa demande à ce titre ;

CONDAMNE la caisse primaire d’assurance maladie du Haut-Rhin aux dépens d’appel ;

REJETTE les demandes des parties fondées devant la cour sur l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,

 


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