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ORDONNANCE
N°
du 19 Janvier 2023
A l’audience publique des référés tenue le 08 Décembre 2022 par Mme Odile GREVIN, Président de chambre délégué par ordonnance de Mme la Première Présidente de la Cour d’Appel d’AMIENS en date du 1er juillet 2022,
Assistée de Madame PILVOIX, Greffier.
Dans la cause enregistrée sous le N° RG 22/00100 – N° Portalis DBV4-V-B7G-IRJY du rôle général.
Après communication du dossier au ministère public.
ENTRE :
S.A.S. EJPP
[Adresse 5]
[Localité 8]
Assignant en référé suivant exploit de la SAS CG2M, Commissaire de Justice, en date du 7 Septembre 2022, en révision d’une ordonnance rendue par le délégué du premier président de la Cour d’Appel d’AMIENS le 07 Juillet 2022.
Représentée, concluant et plaidant par Maître MALIK FAZAL, de la SELARL BIBARD avocats, avocat au barreau d’Amiens.
ET :
Maître [C] [J], mandataire judiciaire, de la SAS CRPI
[Adresse 1]
[Localité 6]
S.E.L.A.R.L. FHB – Me [B] [Z]
[Adresse 2]
[Localité 4]
S.A.R.L. CRPI
[Adresse 3]
[Localité 7]
DÉFENDERESSE au référé.
Représentées, concluant et plaidant par Maître de COLNET de la SELARL GOMOND Avocats au barreau de Rouen.
Madame la Présidente après avoir constaté qu’il s’était écoulé un temps suffisant depuis l’assignation pour que la partie assignée puisse se défendre.
Après avoir entendu :
– en ses assignation et plaidoirie : Maître MALIK FAZAL, conseil de la SAS EJPP,
– en ses conclusions et plaidoirie : Maître de COLNET, conseil de Me [J], de la SELARL FHB et de la SARL CRPI.
L’affaire a été mise en délibéré au 19 Janvier 2023 pour rendre l’ordonnance par mise à disposition au Greffe de la copie.
La SAS EJPP a été créée le 1er juillet 2013 aux fins de satisfaire à une activité de «’restauration-hébergement’» qu’elle a étendue en 2017 à celles de conciergerie et de location d’engins de tourisme.
Parallèlement à l’acquisition du fonds de commerce de restauration-hébergement le 12 juillet 2013, la SAS EJPP s’est engagée à acquérir l’immeuble au 1er juillet 2016.
Le 8 mars 2014, l’immeuble a été partiellement détruit par un incendie, sa reconstruction s’est achevée à la fin de l’année 2018.
Ledit immeuble a, malgré le sinistre, été acquis par la SAS EJPP.
Dans le cadre de cette acquisition, la somme de 40 000 € a été remise à la SAS EJPP par la SAS CRPI. Les parties sont en désaccord sur la nature de ces fonds.
Saisi par la SAS CRPI par acte d’huissier en date du 24 septembre 2019, d’une demande en paiement de la somme de 40 000 € au titre d’un prêt consenti, le tribunal de commerce d’Amiens, par jugement rendu le 14 octobre 2021, a :
– joint les instances 2019 J 174 et 2020 J 81 ;
– déboutant les parties de toutes demandes plus amples ou contraires de celles auxquelles le dispositif avait fait droit, condamné pour les causes sus-énoncées la SAS EJPP :
– à restituer à la SAS CRPI la somme de 40 000 € avec intérêts au taux légal à compter seulement du jugement ;
– à payer à la SAS CRPI la somme de 4 000 € restant due sur la facture du 7 avril 2016 avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;
– à payer à la société CRPI la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la SAS EJPP aux entiers dépens liquidés pour frais de greffe à la somme 94,34 € dont TVA à 20 % en ce compris les frais de jonction et de tentative de conciliation ;
– dit toutefois que la SAS EJPP pourrait se libérer de la condamnation de 40 000 € en 10 versements mensuels et consécutifs pour le 1er versement à intervenir le 15 novembre 2011, et que faute pour elle de satisfaire à l’un des termes sus-visés le tout deviendrait de plein droit immédiatement exigible ;
– ordonné, à raison des délais accordés, et vu les circonstances de la cause, l’exécution provisoire en qu’elle portait par ailleurs sur les autres condamnations, et ce nonobstant appel et sans caution.
La SAS EJPP a relevé appel de ce jugement par déclaration d’appel en date du 19 novembre 2021.
Par acte d’huissier du 28 février 2022, la SAS EJPP a fait assigner la SAS CRPI devant Mme la première présidente de la cour d’appel d’Amiens, au visa de l’article 517-1 du code de procédure civile, aux fins de voir :
– dire la demande de la SAS EJPP recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions.
En conséquence,
– arrêter l’exécution provisoire du jugement du tribunal de commerce d’Amiens en date du 14 octobre 2021 ;
– condamner la SAS CRPI à verser à la SAS EJPP la somme de 1 000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner également la SAS CRPI aux entiers dépens.
Maître [C] [J] a été nommée mandataire judiciaire de la SAS CRPI par jugement du tribunal de commerce de Rouen en date du 21 juin 2022.
Par ordonnance de référé du 7 juillet 2022, Mme la présidente de chambre déléguée a :
– débouté la SAS EJPP de sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire attachée au jugement rendu le 14 octobre 2021 par le tribunal de commerce d’Amiens ;
– condamné la SAS EJPP à payer à la SAS CRPI la somme de 1 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la SAS EJPP au entiers dépens.
Par acte d’huissier du 7 septembre 2022, la SAS EJPP a fait assigner Maître [C] [J] devant Mme la première présidente de la cour d’appel d’Amiens, au visa des articles 524 ancien et suivants du code de procédure civile, aux fins de voir :
– rétracter l’ordonnance en date du 7 juillet 2022 ;
– statuer à nouveau sur les éléments de fait et de droit, et en conséquence arrêter l’exécution provisoire du jugement du tribunal de commerce d’Amiens en date du 14 octobre 2021 ;
– débouter la société CRPI de l’ensemble de ses demandes ;
En tout état de cause,
– condamner la société CRPI à verser à la société EJPP la somme de 2 500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la société CRPI aux entiers dépens.
Par conclusions en date du 19 septembre 2019 Mme [C] [J] a soulevé l’irrecevabilité du recours formé par la société EJPP au regard de son défaut d’intérêt à agir à son encontre et du défaut d’assignation de la société débitrice et de son administrateur judiciaire mais également en raison de sa tardiveté. Elle a conclu enfin au débouté de la demande et à titre subsidiaire a demandé que les condamnations dues au titre du jugement du 14 octobre 2021 soient placées en séquestre sur un compte CARPA dans l’attente de la décision de la cour. Elle a demandé une somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et la condamnation de la société EJPP aux entiers dépens.
Par avis en date du 19 septembre 2022 le ministère public a fait observer que le recours ne lui a pas été dénoncé et a conclu à l’absence de fraude et à l’irrecevabilité du recours.
Par exploits d’huissier en date des 27 octobre et 7 novembre 2022 la société EJPP a assigné en intervention forcée la société CRPI et la SELARL FHB prise en la personne de maître [B] [Z] son administrateur judiciaire.
Par exploit d’huissier en date du 8 novembre 2022 la société EJPP a fait signifier les trois assignations à M. le procureur général près la cour d’appel d’Amiens.
Par conclusions du 25 novembre 2022 la société EJPP a maintenu ses demandes.
Par conclusions en date du 6 décembre 2022 auquelles se sont associées la société CRPI et son administrateur judiciaire Mme [C] [J] a également maintenu ses demandes.
A l’audience en date du 8 décembre 2022 la SAS EJPP fait valoir en premier lieu qu’elle a bien assigné Maître [C] [J] en qualité de mandataire judiciaire de la société CRPI et non à titre personnel. Elle ajoute qu’elle a bien régularisé la procédure en appelant en la cause la société CRPI et son administrateur judiciaire.
Elle ajoute que l’assignation intervenue a joué le rôle de la citation et que son recours a été dénoncé au ministère public.
Par ailleurs elle soutient que le délai pour exercer un recours en révision est de deux mois et court à compter du jour où la partie a eu connaissance de la cause de révision qu’elle invoque. Elle fait valoir qu’en l’espèce elle a eu connaissance de la cause de révision le 7 juillet 2022 date de la décision de débouté de la première présidente et qu’ainsi son assignation en date du 7 septembre 2022 n’est pas tardive et son recours est recevable.
Sur le fond elle soutient que la société CRPI a frauduleusement dissimulé au premier président sa situation financière fragile qui l’a conduite à se retrouver en redressement judiciaire le 21 juin 2022 la date de cessation des paiements ayant été fixée au 1er mai 2022 alors que l’affaire a été appelée pour être plaidée devant la première présidente à l’audience du 19 mai 2022. Elle considère que la société CRPI a induit la première présidente en erreur sur sa situation financière en dissimulant sciemment ses difficultés financières alors même que celle-ci étaient évoquées à l’audience.
Elle soutient que l’exécution provisoire aurait pour elle des conséquences manifestement excessives alors que la preuve d’un prêt consenti par la société CRPI n’est nullement établie, l’absence de formalisation écrite établissant au contraire l’intention libérale et qu’il ne saurait y avoir un indû sans erreur et la créance résultant de la facture de 2016 étant prescrite.
Elle fait valoir qu’elle n’est pas en mesure de satisfaire au paiement de la somme de 40000 euros sans devoir initier une procédure collective et qu’en outre la société CRPI placée en redressement judiciaire pourra échapper au règlement de son passif ce qui rendrait l’exécution de la décision irrémédiable.
Au soutien de leurs demandes, Mme [C] [J], la société CRPI et son administrateur judiciaire ont fait valoir que la SAS EJPP a assigné maître [J] personnellement et non en sa qualité de mandataire liquidateur de la société CRPI’alors qu’elle n’a aucun intérêt à agir à son encontre et qu’en outre ne représentant en sa qualité de mandataire judiciaire que les créanciers de la société CRPI qui est créancière et non débitrice de la société EJPP, cette dernière ne pouvait se contenter de l’assigner faute d’intérêt à agir même ès qualités.
Sur le fond elles font valoir que le recours en révision a été introduit par voie d’assignation en référé et non par citation plus de deux mois après la publicité au BODACC de l’ouverture de la procédure collective de la société CRPI seule cause de la révision sollicitée et donc hors du délai de deux mois
Au demeurant elles contestent l’existence d’une fraude rappelant que la charge de la preuve de circonstances manifestement excessives appartenait à la SAS EJPP, de sorte qu’il ne peut être reproché à la société CRPI de ne pas avoir communiqué d’éléments sur sa situation financière’ et faisant valoir que l’ouverture de la procédure collective a été prononcée plus d’un mois après l’audience de plaidoirie.
Enfin elles soutiennent que la preuve de circonstances manifestement excessives n’est toujours pas rapportée par la société EJPP alors que le risque entraîné par les conséquences manifestement excessives doit être avéré et ne doit pas résulter de simples allégations hypothétiques et que la société EJPP a obtenu des délais de paiement et se refuse toujours à communiquer le moindre élément financier sérieux
À l’audience du 8 décembre 2022, il a été donné connaissance de l’avis du ministère public les parties représentées par leur conseil ont développé oralement leurs conclusions et l’affaire a été mise en délibéré au 19 janvier 2023
SUR CE,
En application de l’article 593 du code de procédure civile le recours en révision tend à faire rétracter un jugement passé en force de chose jugée pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit.
Il relève de la compétence du juge qui a rendu la décision attaquée.
Selon l’article 595 du même code le recours en révision n’est ouvert que s’il se révèle après le jugement que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ou si depuis le jugement il a été recouvré des pièces décisives qui avaient été retenues par le fait d’une partie.
En application de l’article 596 du code de procédure le délai pour exercer un recours en révision est de deux mois et court à compter du jour où la partie a eu connaissance de la cause de révision.
De plus en application de l’article 597 du même code toutes les parties au jugement attaqué doivent être appelées à l’instance en révision par l’auteur du recours à peine d’irrecevabilité.
Il résulte de la combinaison de ces deux textes qu’à peine d’irrecevabilité du recours, l’auteur du recours doit appeler en la cause dans le délai de deux mois de la découverte de la cause de révision toutes les parties à la décision dont la révision est sollicitée.
En l’espèce l’ouverture d’une procédure collective à l’égard de la société CRPI a fait l’objet d’une publicité le 24 juin 2022 et en conséquence la société EJPP disposait à compter de cette date d’un délai de deux mois pour faire citer l’ensemble des parties.
A supposer même que soit retenue comme point de départ du délai, la décision intervenue qui rejetait la requête de la société EJPP aux fins de voir arrêter l’exécution provisoire faute de justification de l’existence de circonstances manifestement excessives, il sera observé que l’ensemble des parties à la décision du premier président n’ont pas été appelées à la procédure de révision dans un délai de deux mois dès lors que seul le mandataire judiciaire de la société CRPI a été appelé ès qualités en la cause dans ce délai mais non pas la société CRPI créancière en redressement judiciaire ni son administrateur.
Il convient dès lors de déclarer irrecevable le recours en révision formé par la société EJPP hors délai.
Il convient de condamner la société EJPP aux entiers dépens et de la condamner à payer à la société CRPI la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement contradictoirement et par mise à disposition de la décision au greffe,
Disons irrecevable le recours en révision formé par la société EJPP ;
Condamnons la société EJPP aux entiers dépens ;
La condamnons à payer à la société CRPI la somme de 2000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
A l’audience du 19 Janvier 2023, l’ordonnance a été rendue par mise à disposition au Greffe et la minute a été signée par Mme Odile GREVIN, Présidente et Mme PILVOIX, Greffier.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,