Tentative de conciliation : 18 septembre 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 22/01001

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Tentative de conciliation : 18 septembre 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 22/01001
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MINUTE N° 23/388

Copie exécutoire à :

– Me Laetitia RUMMLER

– Me Xavier ANDRE

Le

Le greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

TROISIEME CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 18 Septembre 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : 3 A N° RG 22/01001 – N° Portalis DBVW-V-B7G-HZHH

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 14 février 2022 par le tribunal de proximité de Sélestat

APPELANT :

Monsieur [R] [D] [O] [Y]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Laetitia RUMMLER, avocat au barreau de COLMAR

INTIMÉE :

S.A. ORANGE

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Xavier ANDRE, avocat au barreau de COLMAR

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 22 mai 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme MARTINO, Présidente de chambre

Mme FABREGUETTES, Conseiller

M. LAETHIER, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme HOUSER

ARRET :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Annie MARTINO, président et Mme Sylvie SCHIRMANN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

Monsieur [R] [Y] a souscrit un abonnement ligne fixe ‘Mon Optimale 4 heures’ au prix de 29,99 euros par mois, portant le numéro d’appel 03 88 85 44 50, auprès de la Sa Orange.

Faisant valoir que diverses factures sont restées impayées, malgré relances, la sa Orange a procédé à la suspension de la ligne téléphonique le 26 octobre 2020, puis l’a résiliée le 30 octobre 2020.

Le 18 novembre 2020, Monsieur [Y] a acquitté par Tip la somme de 78,55 euros dont il était redevable.

Par déclaration en date du 9 décembre 2020, Monsieur [R] [Y] a fait citer la Sa Orange devant le tribunal de proximité de Sélestat, aux fins de la voir condamner à lui payer un montant en principal d’un euros et une somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts et de la voir condamner à rétablir sa ligne téléphonique avec respect de son droit au numéro de téléphone, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

La Sa Orange a conclu au rejet des demandes, ainsi qu’à la condamnation du demandeur aux dépens et à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 14 juin 2021, une tentative de conciliation a été ordonnée, qui a donné lieu à un constat de non-conciliation le 16 août 2021.

Par jugement du 14 février 2022, le tribunal de proximité de Sélestat a :

-condamné la Sa Orange à payer à Monsieur [R] [Y] la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts,

-débouté Monsieur [R] [Y] de ses autres demandes,

-débouté la Sa Orange de sa demande d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-condamné la Sa Orange aux dépens,

-constaté que le jugement est exécutoire par provision.

Pour se déterminer ainsi, le premier juge a notamment retenu que la société Orange ne démontrait pas l’existence d’une dette supérieure à 0,96 euros ; qu’elle ne démontre pas avoir mis régulièrement en ‘uvre la clause résolutoire figurant dans les conditions spécifiques du contrat d’abonnement la liant à Monsieur [Y], ni un manquement de son client suffisamment grave pour justifier la résiliation du contrat ; qu’elle doit répondre de sa faute contractuelle envers le demandeur ; que ce dernier a nécessairement subi un préjudice justifiant l’allocation de dommages et intérêts, en ce qu’il réside dans un endroit isolé et difficilement desservi en liaisons téléphoniques ; qu’il ne justifie par ailleurs pas que la société Orange a opposé un refus à sa demande de rétablissement de sa ligne ou à l’attribution d’un numéro de téléphone, de sorte que sa demande de condamnation sous astreinte doit être rejetée.

Monsieur [R] [Y] a interjeté appel de ce cette décision le 9 mars 2022.

Par écritures notifiées le 19 octobre 2022, il conclut à l’infirmation du jugement déféré en ce qu’il a limité la condamnation en dommages et intérêts à la somme de 800 euros et l’a débouté de ses autres demandes.

Il demande à la cour de :

-condamner la Sa Orange à lui payer la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts,

-condamner la Sa Orange à rétablir sa ligne téléphonique sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

-débouter la Sa Orange de l’intégralité de ses fins et conclusions,

-débouter la Sa Orange de son appel incident,

-la condamner aux entiers frais et dépens ainsi qu’à lui payer une somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir que son préjudice a été sous-estimé, en ce qu’il réside dans une maison isolée située dans le massif vosgien, ce qui a empêché son raccordement à la fibre optique ; que lors de la souscription de son offre ‘Mon Optimal’, il a demandé que les factures lui soient transmises par courrier ; qu’il n’a jamais été destinataire d’une facture portant sur une somme de 47,40 euros, dont le non-paiement a entraîné la résiliation du contrat par la société Orange ; que sa dernière facture du 25 septembre 2020 ne portait que sur une somme de 0,93 euros ; que conformément aux clauses contractuelles, la résiliation de la ligne ne pouvait intervenir au plus tôt que le 19 novembre 2020, alors même qu’il avait régularisé la situation le 18 novembre 2020.

Il soutient que la société Orange n’a jamais donné suite à sa demande de rétablissement de sa ligne téléphonique, de sorte qu’il est fondé à obtenir sa condamnation sous astreinte de ce chef.

Il maintient n’avoir commis aucun manquement contractuel envers la société Orange.

Par écritures notifiées le 22 juillet 2022, la Sa Orange a formé appel incident pour voir infirmer le jugement déféré en ce qu’il l’a condamnée au paiement d’une somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts, n’a rejeté que les autres demandes de Monsieur [Y], l’a déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile et l’a condamnée aux dépens de l’instance.

Elle demande à la cour de :

-débouter Monsieur [Y] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

-condamner Monsieur [R] [Y] à lui payer la somme de 2 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,

-condamner Monsieur [Y] aux entiers dépens, qui seront recouvrés par Maître Xavier André, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Elle maintient que Monsieur [Y] a réceptionné des factures, qu’il a systématiquement payées avec retard ; qu’il a acquitté un arriéré au titre de juillet 2020 par un chèque de 47,40 euros, qui se révélera ultérieurement être sans provision ; qu’avant de pouvoir imputer le rejet de ce chèque le 28 septembre 2020, elle avait fait apparaitre sur la facture d’août un solde créditeur ; que cependant, elle a bien averti et relancé le client dès le 13 octobre 2020 de l’impayé en raison du non-paiement du chèque ; qu’elle a justifié des impayés, qui n’ont pas été contestés, par les pièces produites.

Elle fait valoir que l’appelant a commis des manquements contractuels répétés en ne payant pas les factures à leur échéance ; qu’elle a respecté les délais prévus au contrat pour la suspension et la résiliation du contrat ; que les manquements reprochés sont suffisamment graves pour justifier la résiliation de la convention ; que l’appelant ne peut se prévaloir de paiements réalisés systématiquement après l’échéance ; que contrairement à ses affirmations, l’adresse de son domicile bénéficie d’une couverture mobile en 3G et qu’il pouvait parfaitement recevoir les Sms de relance.

Elle soutient en tout état de cause que l’appelant ne justifie pas d’un préjudice réel et sérieux, ni de son quantum, pas plus que d’un lien de causalité avec une faute de sa part ; que le montant alloué par le premier juge équivaut à plus de vingt-six mois d’abonnement, ce qui est considérable.

Elle rappelle que ni l’opérateur, ni le client ne sont propriétaires du numéro d’appel ; qu’elle n’est nullement opposée à fournir un accès téléphonique à Monsieur [Y], mais que ce dernier n’a entrepris aucune démarche en ce sens.

MOTIFS

L’article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

En vertu des dispositions de l’article 1220 du même code, une partie peut suspendre l’exécution de son obligation dès lors qu’il est manifeste que son cocontractant ne s’exécutera pas à l’échéance et que les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour elle. Cette suspension doit être notifiée dans les meilleurs délais.

L’article 1224 prévoit que la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.

Il est constant en l’espèce que Monsieur [Y] a souscrit à une offre d’abonnement à un service téléphonique de la société Orange intitulée Mon Offre Optimale, stipulant, pour la formule choisie de 4 heures, paiement d’une somme mensuelle de 29,99 euros.

Le 26 mars 2020, la société Orange a édité une facture de 31 euros, au titre de l’abonnement et autres usages.

Le 27 avril 2020, elle a émis une facture de 76,52 euros, au titre de l’abonnement mensuel, d’une somme de 15,53 euros au titre d’autres usages, ainsi que du solde débiteur précédent de 31 euros.

L’intimée produit un historique des mouvements du compte auxiliaire, portant sur le compte correspondant au numéro de client de l’appelant, dont il ressort que la somme de 76,52 euros a été acquittée le 25 mai 2020.

Le 27 mai 2020, une facture de 38,84 euros a été émise au titre de l’abonnement pour 30 euros et d’autres usages pour un montant de 8,84 euros.

Le 27 juillet 2020, une facture de 31,94 euros a été émise, dont 29,98 euros pour l’abonnement et 1,96 euros pour les autres usages. Le Titre universel de paiement de 31,94 euros s’est révélé impayé à son échéance le 19 août 2020.

Le 21 août 2020, Monsieur [Y] a remis un chèque de 47,40 euros, dont l’appelante indique qu’il a été rejeté pour insuffisance de provision le 28 septembre 2020.

Avant d’avoir connaissance du non-paiement du chèque, la société Orange a émis le 26 août 2020 une facture de 30,06 euros au titre de l’abonnement de 29,99 euros et autres usages de 0,07 euros. Il est précisé un montant à payer de 14,60 euros, en raison d’un solde créditeur de 15,46 euros au 25 août 2020, après déduction du montant du chèque de 47,40 euros et paiement de la facture de juillet de 31,94 euros.

Le 25 septembre 2020, une facture de 32,90 euros a été émise, au titre de l’abonnement mensuel et d’autres usages pour un montant de 2,91 euros. Il est mentionné un solde à payer de 0,96 euros, après imputation d’un solde créditeur de 31,94 euros au 24 septembre 2020.

La facture du 27 octobre 2020 porte sur un montant de 29,99 euros plus 0,20 euros et mentionne un montant à régler de 78,55 euros, au titre de la facture de 30,19 euros et d’un solde débiteur de 48,36 euros au 25 octobre 2020.

Il sera relevé que Monsieur [Y] ne verse aux débats aucune pièce de nature à remettre en cause les paiements et impayés résultant des pièces produites par l’intimée, alors que la preuve du paiement des prestations issues du contrat lui incombe, conformément aux dispositions de l’article 1353 du code civil.

L’appelant ne conteste pas plus le solde à payer de 78,55 euros, puisqu’il indique s’en être acquitté le 18 novembre 2020, de sorte que la réalité du non-paiement du chèque de 47,40 euros est acquise.

Pour autant, les conditions spécifiques de l’offre Mon Optimale stipulent, aux termes de l’article 8.1, qu’Orange pourra suspendre la fourniture de ses prestations si le client ne respecte pas l’une des obligations nées, après mise en demeure, par lettre recommandée avec avis de réception, restée sans effet pendant un délai de quinze jours après la date de présentation ou de dépôt de l’avis de mise en instance ; qu’Orange pourra ensuite résilier de plein droit les conditions spécifiques, si la mise en demeure est toujours restée sans effet à l’issue d’un délai de quinze jours après la suspension des prestations.

Il a été retenu à juste titre par le premier juge que ces conditions spécifiques à l’offre, qui sont plus favorables au consommateur, priment sur les conditions générales d’abonnement au service téléphonique fixe dont se prévaut la société Orange et qui prévoient en leur article 13-2 qu’Orange peut suspendre tout ou partie de ses prestations dans un délai minimum de dix jours à

compter de la date limite de paiement indiquée sur la facture, après relance restée sans effet… que si la cause de suspension n’a pas disparu, Orange peut résilier de plein droit le contrat après mise en demeure du client restée sans effet pendant un délai de dix jours.

Il résulte en effet des dispositions de l’article 1119 du code civil dernier alinéa qu’en cas de discordance entre des conditions générales et des conditions particulières, les secondes l’emportent sur les premières.

Au regard des stipulations contractuelles applicables, imposant l’envoi de courriers recommandés, l’intimée n’est pas fondée à se prévaloir des Sms de relance qu’elle dit avoir adressés à Monsieur [Y], insuffisants à lui permettre de se prévaloir de la suspension et de la résiliation du contrat, ce d’autant que l’appelant soutient ne les avoir jamais reçus et que le simple relevé de messages versé aux débats par l’intimée ne permet pas de démontrer le contraire.

Ce n’est que par lettre du 19 octobre 2020 que la société Orange a mis en demeure Monsieur [Y] de payer la somme de 47,40 euros dans un délai de dix jours, sous peine de résiliation du contrat.

Monsieur [Y] a bien reçu cette lettre, qu’il a contestée par courrier recommandé distribué le 30 octobre 2020.

Au regard des délais impartis pour la suspension, puis la résiliation de l’offre, l’appelant est fondé à soutenir que la société Orange ne pouvait mettre fin au contrat au plus tôt que le 19 novembre 2020.

La résiliation effectuée dès le 30 octobre 2020 à la suite de la suspension des prestations le 26 octobre 2020, est donc irrégulière au regard des clauses contractuelles.

Le premier juge a par ailleurs exactement retenu que la société Orange ne justifiait pas d’un manquement suffisamment grave pour justifier la résiliation du contrat en vertu des dispositions légales précitées. En effet, les retards de paiement n’ont porté que sur trois mois, l’appelant n’a pas été destinataire de relances démontrées avant la lettre du 19 octobre 2020 et il a réglé le solde débiteur le 18 novembre 2020.

L’appelant ayant justifié habiter dans une zone isolée et avoir perdu le bénéfice de son numéro de téléphone, ce qui l’a contraint à souscrire une autre forme d’abonnement et d’informer ses interlocuteurs de son nouveau numéro, le jugement déféré sera confirmé quant à la responsabilité contractuelle de la société Orange, en lien de causalité avec le préjudice que le premier juge a adéquatement réparé par l’allocation d’une somme de 800 euros, qu’il n’y a pas lieu de majorer en l’absence de justificatifs propres à en caractériser l’insuffisance.

La décision déférée sera en revanche infirmée en ce qu’elle a rejeté la demande de Monsieur [Y] tendant au rétablissement de sa ligne téléphonique, dont la résiliation était injustifiée.

Cependant, le délai écoulé depuis la fermeture de la ligne ne permet pas de garantir que le numéro qui était attribué à Monsieur [Y] est toujours disponible, de sorte que la Sa Orange sera condamnée à remettre à disposition de l’appelant une ligne téléphonique fixe, conforme aux caractéristiques contractuelles de l’offre qu’il avait souscrite.

Il n’apparaît pas nécessaire d’assortir immédiatement cette condamnation d’une astreinte.

Sur les frais et dépens :

Les dispositions du jugement déféré quant aux frais et dépens seront confirmées.

Partie perdante, la Sa Orange sera condamnée aux dépens de l’instance d’appel, conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile et sera déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du même code.

Il sera fait droit à la demande de l’appelant au titre des frais non compris dans les dépens, exposés pour faire valoir ses droits en appel, à hauteur de la somme de 1 200 euros.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

INFIRME le jugement déféré en ce qu’il a rejeté la demande de Monsieur [Y] portant sur le rétablissement d’une ligne téléphonique,

Statuant à nouveau de ce chef,

CONDAMNE la Sa Orange à remettre à disposition de Monsieur [R] [Y] une ligne téléphonique fixe, conforme aux caractéristiques contractuelles de l’offre qu’il avait souscrite,

DIT n’y avoir lieu d’assortir immédiatement cette condamnation d’une astreinte,

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus,

Y ajoutant,

CONDAMNE la Sa Orange à payer à Monsieur [R] [Y] la somme de 1 200 € par application de l’article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE la Sa Orange de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la Sa Orange aux dépens de l’instance d’appel.

La Greffière La Présidente

 


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