Tentative de conciliation : 17 octobre 2023 Cour d’appel de Metz RG n° 21/02456

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Tentative de conciliation : 17 octobre 2023 Cour d’appel de Metz RG n° 21/02456
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° RG 21/02456 – N° Portalis DBVS-V-B7F-FTAL

Minute n° 23/00219

[H]

C/

[Adresse 4]

Jugement Au fond, origine Tribunal de proximité de SAINT-AVOLD, décision attaquée en date du 18 Août 2021, enregistrée sous le n° 20/00330

COUR D’APPEL DE METZ

1ère CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 17 OCTOBRE 2023

APPELANT :

Monsieur [A] [H]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par Me David ZACHAYUS, avocat au barreau de METZ

INTIMÉS :

Monsieur [I] [G]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Yves ROULLEAUX, avocat au barreau de METZ

Madame [T] [V] épouse [G]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Yves ROULLEAUX, avocat au barreau de METZ

DATE DES DÉBATS : A l’audience publique du 23 Mai 2023 tenue par Mme Anne-Yvonne FLORES, Magistrat rapporteur, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés et en a rendu compte à la cour dans son délibéré, pour l’arrêt être rendu le 17 Octobre 2023.

GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Cindy NONDIER

COMPOSITION DE LA COUR :

PRÉSIDENT : Mme FLORES, Présidente de Chambre

ASSESSEURS : Mme MLYNARCZYK, Présidente de Chambre

M. MICHEL, Conseiller

ARRÊT : Contradictoire

Rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme FLORES, Présidente de Chambre et par Mme Saida LACHGUER, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE’:

Par acte d’huissier du 3 août 2020, M. [I] [G] et Mme [T] [V] épouse [G] ont fait assigner devant le tribunal de proximité de Saint Avold leur voisin, M. [A] [H]. Au dernier état de la procédure, ils ont demandé au tribunal de’:

– condamner M. [H] à procéder à la suppression, à défaut la coupe à 50 cm, du bouleau implanté à proximité de leur propriété qui dépasse les 2 mètres et est distant de 30 50 cm de la limite de propriété dans un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à partir de l’expiration du délai jusqu’à leur abattage

– les autoriser à mandater une entreprise afin de procéder à l’abattage des arbres sur la propriété de M. [H] s’il ne procède pas à l’abattage des arbres, dans un délai de 15 jours à compter de la signification de la décision

– autoriser l’entreprise ou le pépiniériste chargé de ces travaux à accéder sur la propriété de M. [H] pour abattre ces arbres et évacuer les branches et gros bois à l’issue du délai de 15 jours à compter de la signification de la décision

– condamner M. [H] à leur payer le coût de cet abattage s’ils mandatent une entreprise pour procéder à l’abattage, la somme de 3.000 euros de dommages et intérêts pour trouble du voisinage outre 1.000 euros par an jusqu’à ce que les arbres soient supprimés et à défaut coupés

– le condamner au paiement de la somme de 4.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

M. [H] a demandé au tribunal de déclarer l’action de M. et Mme [G] prescrite et par conséquent dire qu’ils sont irrecevables à agir, les débouter de l’intégralité de leurs demandes et les condamner à lui payer la somme de 4.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par jugement contradictoire du 18 août 2021, le tribunal a’:

– déclaré les demandes formées par M. et Mme [G] recevables

– condamné M. [H] à procéder à la coupe des arbres présents sur son terrain en les réduisant à une hauteur maximale de deux mètres, et ce au plus tard à la date du 31 mars 2022

– dit que passé ce délai expirant le 31 mars 2022, il sera condamné à régler une astreinte de 30 euros par jour de retard, pendant un délai de deux mois passé lequel il devra être procédé à la liquidation de l’astreinte provisoire

– débouté M. et Mme [G] du surplus de leurs demandes

– condamné M. [H] à payer la somme de 800 euros à M. et Mme [G] au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par déclaration d’appel déposée au greffe de la cour le 5 octobre 2021, M. [H] a interjeté appel du jugement en toutes ses dispositions hormis celle ayant débouté M. et Mme [G] du surplus de leurs demandes.

Aux termes de ses dernières conclusions du 13 mars 2023, l’appelant demande à la cour d’infirmer le jugement et de :

– ordonner la nullité du jugement

– ordonner l’irrecevabilité de l’action comme étant prescrite

– débouter M. et Mme [G] de leurs demandes

– en tout état de cause confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. et Mme [G] de leur demande de dommages et intérêts

– condamner M. et Mme [G] aux dépens de première instance et d’appel et au paiement d’une somme de 3.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur la nullité du jugement, au visa des articles 4, 5 et 768 du code de procédure civile, il soutient que le tribunal a statué ultra petita en ordonnant la coupe des arbres de son jardin alors que seule celle d’un bouleau était visée au dispositif des conclusions adverses et en modifiant le fondement juridique de leurs demandes puisque les dispositions applicables au trouble de voisinage n’étaient pas mentionnées au dispositif des conclusions.

Sur la prescription des demandes, au visa des dispositions de l’article 2224 du code civil, l’appelant conteste la motivation du jugement aux motifs qu’il n’est pas démontré que la perte d’ensoleillement a débuté au moment du courrier de 2017, que l’action fondée sur les articles 678 et suivants du code civil ou sur les troubles du voisinage est soumise à la prescription quinquennale de droit commun, que les intimés se sont installés plus de cinq ans avant l’introduction de l’instance et qu’ils n’établissent pas la date à laquelle le trouble qu’ils invoquent a commencé alors que les arbres n’ont pas atteint cette hauteur en peu de temps. Il en déduit que l’action est irrecevable.

Sur le fond, il soutient que le premier juge ne pouvait ordonner la coupe des arbres sans précision alors que les intimés n’établissent pas à quelle distance de la limite séparative les arbres ont été plantés. Sur le trouble du voisinage, il estime que la preuve n’est pas rapportée d’une perte d’ensoleillement, alors que la photographie produite a été prise en novembre, ni de la présence de feuilles s’agissant de conifères à feuillage persistant et conteste la valeur probante des attestations produites. Il indique produire des pièces démontrant que les plantations de son jardin sont situées à plus de deux mètres du fonds voisin et qu’il a procédé à un nettoyage sur une bande de 2 à 3 mètres de large de la limite de propriété, concluant au rejet des demandes.

Aux termes de leurs dernières conclusions du 29 mars 2022, M. et Mme [G] demandent à la cour de’:

– dire n’y avoir lieu à annulation du jugement

– confirmer le jugement

– condamner M. [H] aux dépens ainsi qu’au paiement d’une somme de 2.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

– subsidiairement, statuant par l’effet dévolutif de l’appel en cas d’annulation du jugement, condamner M. [H] à procéder à la coupe des arbres de grande hauteur présents sur son terrain en les réduisant à une hauteur maximale de 2 mètres dans le mois de la signification de l’arrêt à intervenir et ce, passé ce délai, sous astreinte de 50 euros par jour de retard

– condamner M. [H] aux dépens de première instance et d’appel et au paiement d’une somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Ils s’opposent à la nullité du jugement aux motifs qu’en vertu du principe de l’oralité des débats, le premier juge a statué sur les demandes complétées lors des débats et sur les demandes implicites et pouvait en application de l’article 12 du code de procédure civile, requalifier l’objet du litige en fonctions des faits invoqués.

Sur la prescription, ils exposent que l’appelant s’est engagé lors de l’audience de conciliation du 27 octobre 2017 à se mettre en conformité aux règles de voisinage avant le 1er juin 2018, qu’ils ont dénoncé les premiers troubles du voisinage en 2017 et que leur action introduite le 3 août 2020 n’est pas prescrite. Ils soutiennent que les arbres de M. [H] leur causent par leur nombre, leur amplitude et leur hauteur un trouble anormal de voisinage en ce qu’ils réduisent notablement l’ensoleillement de leur propriété et l’éclairement de leur maison. Subsidiairement ils demandent à la cour de statuer sur leurs demandes par effet dévolutif de l’appel en cas d’annulation du jugement.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 9 mars 2023.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la nullité du jugement

L’article 4 du code de procédure civile dispose que l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Ces prétentions sont fixées par l’acte introductif d’instance et par les conclusions en défense. Toutefois l’objet du litige peut être modifié par des demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

L’article 5 du code de procédure civile précise que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.

En l’espèce, il ressort du dispositif des conclusions déposées en première instance par M. et Mme [G] qu’ils ont sollicité la condamnation de M. [H] ‘à procéder à la suppression, à défaut la coupe à 50 cm, du bouleau implanté à proximité de leur propriété qui dépasse les 2 mètres et est distant de 30 50 cm de la limite de propriété dans un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement à intervenir’. Il est constant que dans le dispositif du jugement, le tribunal de proximité de Saint Avold a condamné M. [H] à procéder à la coupe des arbres présents sur son terrain en les réduisant à une hauteur maximale de deux mètres, au plus tard à la date du 31 mars 2022.

Il est relevé que le jugement indique que les parties ont maintenu à l’audience du 10 juin 2021 les demandes contenues dans leurs dernières conclusions, qu’il ressort des motifs exposés dans ces conclusions, reprises oralement à l’audience, que M. et Mme [G] ont sollicité la suppression des arbres voisins les privant de lumière et qu’ils se sont fondés sur l’article 671 du code civil et à défaut sur le trouble anormal de voisinage. Il s’ensuit que le premier juge n’a pas statué ultra petita, ni modifié le fondement juridique des demandes. En conséquence, il convient de rejeter la demande de nullité du jugement.

Sur la prescription

L’article 122 du code de procédure civile dispose que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

L’action en trouble anormal du voisinage est une action en responsabilité extra-contractuelle soumise aux dispositions de droit commun de l’article 2224 du code civil qui prévoit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

En l’espèce, il ressort du rapport d’expertise privée, établi le 24 mars 2020 à la demande de l’assureur de M. et Mme [G], qu’ils ont acquis le terrain et fait construire leur maison en 2011, et du courrier qu’ils ont adressé le 2 juin 2017 à M. [H] qu’ils sont voisins depuis plusieurs années et qu’ils lui ont demandé à plusieurs reprises de faire cesser les nuisances occasionnées par ses arbres de très grande hauteur, notamment un manque de luminosité. C’est à tort que le premier juge a dit que le délai de prescription avait commencé à courir à compter de ce courrier alors qu’il est fait état de plaintes antérieures et récurrentes des intimés dans ce courrier.

L’appelant produit les attestations de M. [B] [P] indiquant que les sapins et autres arbres qui se situent à l’arrière de la maison de M. [H] existent depuis 1985, de M. [L] [K] précisant que ces arbres ont été plantés en 1978 et de Mme [M] [J] indiquant qu’à son arrivée dans le quartier en 1989 les arbres de M. [H] étaient tous présents et déjà bien grands tant à l’avant qu’à l’arrière de la maison. Il résulte en outre du constat d’huissier dressé le 23 novembre 2021 que les arbres dépassant la hauteur de 2 mètres sont anciens et implantés à plus de 2 mètres de la limite de propriétaire avec M. et Mme [G] et les photographies annexées permettent de constater que les arbres sont anciens vu leur hauteur excédant 10 mètres.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, il apparaît que le trouble du voisinage lié à la réduction de l’ensoleillement et de l’éclairement de leur maison invoquée par les intimés en raison de la hauteur des arbres voisins, n’a pas été découvert par eux en 2017 comme allégué, alors que les arbres ont été plantés en 1978 et avaient atteint une grande hauteur dès 1989, de sorte que la perte d’ensoleillement due à ces arbres pouvait être constatée dès leur installation dans leur maison en 2011. Ils ont donc nécessairement eu connaissance du trouble invoqué ou auraient dû en avoir connaissance dès leur emménagement. Il s’ensuit que leur action introduite le 3 août 2020 est prescrite, l’engagement de M. [H] mentionné dans un constat d’échec d’une tentative de conciliation non signé par les parties ne pouvant par ailleurs pas constituer un acte interruptif de prescription.

En conséquence, il convient de déclarer irrecevable l’action de M. et Mme [G] et d’infirmer le jugement.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

M. et Mme [G], parties perdantes, devront supporter les dépens de première instance et d’appel et il est équitable qu’ils soient condamnés à verser à M. [H] la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Il convient en outre de les débouter de leur propre demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Rejette la demande en nullité du jugement’;

Infirme le jugement en ce qu’il a déclaré recevables les demandes formées par M. [I] [G] et Mme [T] [V] épouse [G], et statuant à nouveau,

Déclare irrecevable l’action de M. [I] [G] et Mme [T] [V] épouse [G] sur le fondement du trouble de voisinage ;

Déboute M. [I] [G] et Mme [T] [V] épouse [G] de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile, tant en première instance qu’en appel ;

Condamne M. [I] [G] et Mme [T] [V] épouse [G] aux dépens’d’instance et d’appel ;

Condamne M. [I] [G] et Mme [T] [V] épouse [G] à verser à M. [A] [H] la somme de 800 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Le Greffier La Présidente de Chambre

 


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