Tentative de conciliation : 1 juin 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/10767

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Tentative de conciliation : 1 juin 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/10767
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 01 JUIN 2023

ph

N° 2023/ 229

Rôle N° RG 19/10767 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BERIB

[W] [U]

C/

[A] [C]

[G] [T] [X]

[I] [R] [G] [U]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON

SELARL GARRY ET ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 06 Mai 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01855.

APPELANT

Monsieur [W] [U] décédé le 20.11.2021

demeurant de son vivant [Adresse 14]

INTIMES

Madame [A] [C]

demeurant [Adresse 14]

représentée par la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Jean-Jacques DEGRYSE de la SELARL CABINET DEGRYSE, avocat au barreau de TOULON substituée par Me Florence HUMBERT, avocat au barreau de TOULON

Monsieur [G] [T] [X]

demeurant [Adresse 14]

représenté par la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Jean-Jacques DEGRYSE de la SELARL CABINET DEGRYSE, avocat au barreau de TOULON substituée par Me Florence HUMBERT, avocat au barreau de TOULON

PARTIE INTERVENANTE

Madame [I] [N] [G] [U] venant aux droits de Monsieur [W] [U], décédé le 20.11.2021

intervenante volontaire par conclusions du 10.03.2022

demeurant [Adresse 12]

représentée par Me Jean-Michel GARRY de la SELARL GARRY ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 14 Février 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Patricia HOARAU, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller faisant fonction de président de chambre

Madame Patricia HOARAU, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM, Vice Président placé

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Avril 2023. Le délibéré à été prorogé au 01 Juin 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 Juin 2023,

Signé par Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, faisant fonction de président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE – MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

Selon acte authentique de vente du 26 juin 1992 reçu par Me [Y] [Z], notaire à [Localité 11], M. [W] [U], Mme [N] [U], M. [B] [J] et M. [O] [K] ont acquis des consorts [H] [P], [M] et [L], la propriété d’un terrain situé Lieudit [Adresse 14] à [Localité 13] cadastré section D numéro [Cadastre 9] (devenu AB [Cadastre 6]).

Selon acte de partage des 27 et 28 septembre 1993 établi entre eux, par Me [F], notaire à [Localité 11], ce terrain a été divisé en trois lots dont l’un attribué à M. [W] [U], avec rappel notamment de la servitude de passage suivante :

« En conséquence, Madame [D] (née [H]) et, en tant que de besoin Monsieur [D], agissant solidairement entre eux, confèrent aux consorts [J] qui acceptent, le droit de passage sur les parcelles D [Cadastre 10] et [Cadastre 5] (fonds servant) au profit de la parcelle D [Cadastre 9] (fonds dominant) pour tous véhicules et canalisations aériennes ou souterraines. Cette servitude empruntera le tracé défini sur le plan ci-joint sur une largeur moyenne de quatre mètres.

La création du chemin et la réfection éventuelle du chemin déjà existant seront faites aux frais exclusifs des consorts [J] et ensuite son entretien, dans la partie traversant la propriété des époux [D], sera supporté par les époux [D] (ayants-droit) et les consorts [J] (ou ayants-droit) à raison de 1/2 chacun.

Toutefois cette servitude cesserait au cas où une nouvelle voie d’accès serait reconstituée permettant une meilleure desserte que celle résultant de la présente convention.

En ce cas les époux [D] (ou ayants-droit) profiteraient seuls du chemin présentement créé sans indemnités au profit des consorts [J] (ayants-droit).

La présente convention est consentie et acceptée sans indemnité de part, ni d’autre. »

Selon acte authentique du 3 mars 2011 reçu par Me [Y] [Z], notaire à [Localité 11], Mme [A] [C] et M. [G] [T] [X] ont acquis de Mme [L] [H] veuve [D] les parcelles cadastrées section AB numéros [Cadastre 2] et [Cadastre 8] sises Lieudit [Adresse 14] à [Localité 13].

Se plaignant d’un rétrécissement de l’assiette de la servitude de passage profitant à son fonds, M. [W] [U] a par exploit d’huissier du 22 mars 2016, assigné Mme [A] [C] et M. [G] [T] [X] devant le tribunal de grande instance de Toulon.

Par jugement du 6 mai 2019, le tribunal de grande instance de Toulon a statué ainsi :

– Rejette la fin de non-recevoir soulevée par Mme [A] [C] et M. [G] [T] [X],

– Déboute M. [W] [U] de sa demande de remise en état de la servitude de passage,

– Déboute M. [W] [U] de sa demande indemnitaire,

– Déboute M. [W] [U] de sa demande d’expertise judiciaire,

– Déboute Mme [A] [C] et M. [G] [T] [X] de leur demande indemnitaire,

– Condamne M. [W] [U] à payer à Mme [A] [C] et M. [G] [T] [X] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamne M. [W] [U] aux dépens de l’instance avec distraction de ceux-ci,

– Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

– Rejette le surplus des demandes.

Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu :

– qu’il n’est pas démontré par Mme [C] et M. [T] [X], que M. [U] ne dispose pas du droit d’agir en qualité de propriétaire relativement à la servitude de passage, que la question de la propriété du chemin n’intéresse pas le défaut d’intérêt à agir mais le fond du litige,

– que les plans produits par le demandeur ne permettent pas d’identifier clairement et objectivement la correspondance entre la parcelle D [Cadastre 10] et les parcelles des défendeurs AB [Cadastre 8] et AB [Cadastre 2] ni leurs étendues et qu’ainsi il n’est pas démontré que la servitude de passage instituée les 27 et 28 septembre 1993 ait pour assiette les parcelles AB [Cadastre 8] et AB [Cadastre 2],

– qu’une expertise ne peut suppléer la carence d’une partie dans l’administration de la preuve,

– que la demande indemnitaire ne peut prospérer faute de démontrer que la servitude de passage instituée au profit de son fonds a pour assiette les parcelles des défendeurs,

– que les défendeurs ne démontrent pas de faute du demandeur, ni le préjudice en résultant.

Par déclaration du 3 juillet 2019, M. [W] [U] a relevé appel de ce jugement.

M. [W] [U] a réitéré une déclaration d’appel le 10 juillet 2019 et les deux dossiers ont été joints.

Par ordonnance d’incident du 10 novembre 2020, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions déposées par M. [W] [U] le 14 février 2020, pour absence de réplique dans les trois mois aux conclusions d’intimés contenant appel incident.

Par ordonnance d’incident du 28 juin 2022, le conseiller de la mise en état a constaté le désistement de l’incident soulevé par les consorts [C] [T] [X], portant sur l’irrecevabilité des conclusions de [I] [U] venant aux droits de M. [W] [U] décédé le 20 novembre 2021.

Par conclusions d’intervention volontaires déposées et notifiées sur le RPVA le 10 mars 2022, Mme [I] [U] demande à la cour :

Vu les articles 637, 639, 686, 697 et 700 du code civil,

Vu l’article 724 du code civil,

Vu les articles 325 et suivants du code de procédure civile,

Vu l’article 144 du code de procédure civile,

– de juger recevable son intervention volontaire aux droits de M. [W] [U],

– de réformer le jugement entrepris des chefs appelés,

– de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par Mme [C] et M. [T] [X] et débouté ces derniers de leur demande indemnitaire,

Statuant à nouveau,

– de débouter les consorts [C]/[T] [X] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

– de condamner sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai d’un mois courant à compter de la signification de la décision à intervenir, Mme [C] et M. [T] [X] à remettre en état les lieux pour que la servitude de passage dont elle bénéficie soit conforme au plan annexé à l’acte du 28 septembre 1993,

– de condamner Mme [C] et M. [T] [X] au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,

– à titre subsidiaire et avant dire droit, de désigner tel expert qu’il plaira à la cour avec mission de dire si le chemin utilisé aujourd’hui pour desservir la propriété de M. [U] est conforme à la servitude prévue dans l’acte notarié du 28 septembre 1993,

En tout état de cause,

– d’ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir,

– de condamner Mme [C] et M. [T] [X] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– de condamner les mêmes aux dépens de première instance et d’appel, en ce compris les frais d’établissement des procès-verbaux d’huissier de justice des 20 novembre 2015 et 23 mai 2019, dont distraction au profit de la SELARL cabinet Garry et associés sur son affirmation de droit.

Mme [I] [U] fait valoir en substance :

A titre principal, sur l’aggravation de la servitude de passage,

– que selon l’acte d’acquisition de la parcelle D [Cadastre 9] aujourd’hui cadastrée AB [Cadastre 6] et l’acte de partage prévisionnel du 28 septembre 1993, M. [U] bénéficie pour son fonds d’un chemin d’accès en servitude de passage sur une bande de quatre mètres longeant les parcelles D [Cadastre 10] et D [Cadastre 5] appartenant à l’origine aux consorts [H]/[D],

– que l’acte de vente des consorts [C]/[T] [X] contient une servitude de passage grevant les parcelles AB [Cadastre 3] et AB [Cadastre 7] au profit de la parcelle AB [Cadastre 2] qui « s’exercera exclusivement sur le chemin existant et sous ledit chemin, en ce qui concerne la canalisation, soit une bande d’une largeur de 4 m », ce qui reprend très exactement les caractéristiques du chemin desservant le fonds dont est propriétaire M. [U], constaté aussi sur le plan annexé à l’acte,

– que sur le plan cadastral d’octobre 2015, on retrouve le tracé du chemin constituant l’assiette de la servitude avec la création des parcelles [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 7] en lieu et place des parcelles précédemment cadastrées D [Cadastre 10] et D [Cadastre 5],

– que c’est donc par une appréciation erronée des éléments probants soumis, que le premier juge a statué,

– qu’une modification de la configuration des lieux est intervenue au fil des années, contrairement à ce que les consorts [C]/[T] [X] prétendent,

– que le propriétaire du fonds servant est tenu de respecter l’article 701 du code civil,

– qu’en raison du rétrécissement de la route et du déplacement de l’assiette constaté par huissier, le chemin permettant d’accéder à son fonds est purement et simplement impraticable pour certains types de véhicules,

– que M. [U] n’a pas pu vendre sa propriété en raison de la modification de l’assiette de la servitude de passage, rendant l’accès difficile,

A titre subsidiaire, si la cour s’estimait insuffisamment éclairée,

– qu’une mesure d’instruction peut être ordonnée en application de l’article 144 du code de procédure civile,

Sur la demande reconventionnelle,

– que les consorts [C]/[T] [X] échouent dans la démonstration de l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité, imputable à M. [U].

Dans leurs derniers conclusions déposées et notifiées par le RPVA le 15 août 2022, Mme [C] et M. [T] [X] demandent à la cour :

Vu les articles 6, 9, 31 et 145 du code de procédure civile,

Vu les articles 686, 697, 701, 1315 et 1240 du code civil,

A titre principal :

– de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté feu M. [W] [U] de sa demande de remise en état de la servitude de passage, de sa demande indemnitaire et de sa demande aux fins d’expertise judiciaire,

– de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné feu M. [W] [U] à leur payer la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

– de les recevoir en leur appel incident,

– d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il les a déboutés de leur demande indemnitaire,

Statuant de nouveau,

– de condamner Mme [I] [U] à leur payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi,

A titre subsidiaire, si par impossible la cour faisait droit à la mesure d’instruction sollicitée par l’appelante,

– de juger que la mesure d’instruction se déroulera aux frais avancés de Mme [I] [U],

En tout état de cause,

– de condamner Mme [I] [U] à leur payer la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’appel dont distraction au profit de la SCP Tollinchi Vigneron Tollinchi, avocat aux offres de droit.

Mme [C] et M. [T] [X] soutiennent pour l’essentiel :

Sur l’assiette du passage,

– que Mme [I] [U] est défaillante dans l’administration de la preuve de la modification de l’assiette de la servitude de passage par eux,

– qu’ils sont propriétaires de la parcelle AB [Cadastre 2] qui provient de la division de la parcelle AB [Cadastre 1], qu’il a été procédé à la constitution d’une servitude de passage grevant les parcelles AB [Cadastre 3] et AB [Cadastre 7] (fonds servants) au profit de la parcelle AB [Cadastre 2] (fonds dominant),

– que selon le plan géoportail daté du 22 juillet 2019, on voit l’assiette du chemin créée sur la parcelle AB [Cadastre 3] qui n’est pas leur propriété, et non pas sur la parcelle AB [Cadastre 2],

– qu’ils rapportent la preuve que l’assiette de servitude n’a pas été modifiée, par comparaison entre le procès-verbal de constat du 4 avril 2016 et lors de l’acquisition, puisque les bornes précisées sur le plan de division sont toujours présentes, de même que le chêne,

– qu’il n’est justifié d’aucun motif légitime à voir ordonnée une mesure d’instruction in futurum,

– qu’ils forment les plus expresses protestations et réserves d’usage pour le cas où une expertise serait ordonnée.

Sur le caractère abusif de l’instance,

– que feu M. [U] a participé financièrement aux travaux d’enrobés réalisés sur le chemin le 23 octobre 1993,

– que le chemin est facilement emprunté par des véhicules sans difficulté,

– que le caractère vexatoire de la procédure ressort aussi du témoignage de M. et Mme [E], qui dénoncent des faits totalement étrangers au litige.

L’instruction a été clôturée par ordonnance du 31 janvier 2023.

L’arrêt sera contradictoire puisque toutes les parties sont représentées.

MOTIFS DE LA DECISION

Il convient de déclarer recevable l’intervention volontaire de Mme [I] [U], en sa qualité de seule héritière de M. [W] [U], décédé.

Sur l’étendue de la saisine de la cour

Aux termes de l’article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.

Il est constaté que le dispositif des conclusions des intimés comporte une demande de « juger » qui ne constitue manifestement pas une prétention, si bien que la cour n’en est pas saisie.

Mme [U] agit en rétablissement de l’assiette d’une servitude conventionnelle de passage tandis que les intimés opposent l’absence de modification de l’assiette de la servitude, qui ne se situe pas sur leur parcelle.

Il est relevé que la fin de non-recevoir soulevée par Mme [C] et M. [T] [X] en première instance, n’est plus soutenue en cause d’appel, si bien que le jugement doit être confirmé sur ce point.

Sur la demande de rétablissement de l’assiette de la servitude conventionnelle de passage

Selon les dispositions de l’article 701 du code civil, le propriétaire du fonds débiteur de la servitude ne peut rien faire qui tende à en diminuer l’usage, ou à la rendre plus incommode, qu’il ne peut changer l’état des lieux, ni transporter l’exercice de la servitude dans un endroit différent de celui où elle a été primitivement assignée.

En l’espèce, Mme [U] venant aux droits de son père décédé, soutient que l’usage de la servitude de passage est devenu plus difficile du fait de la destruction d’un talus par M. [T] [X], ce qui lui reproché depuis l’année 2015, comme entraînant une diminution du rayon de braquage pour certains véhicules.

Sont produites notamment, des attestations de la direction départementale des services d’incendie et de secours du Var du 26 octobre 2015 et d’un agent immobilier relatant les difficultés d’accès du fait de l’étroitesse du chemin d’accès et du virage en épingle, cause de l’absence de suite donnée aux visites dans le cadre de la mise en vente de la villa de M. [U].

Il ressort des actes de propriété et des plans versés aux débats que les fonds servants tels que définis en 1993, sont les parcelles cadastrées section D numéros [Cadastre 10] et [Cadastre 4].

Mme [C] et M. [T] [X] sont propriétaires depuis le 3 mars 2011, des parcelles cadastrées AB numéros [Cadastre 2] et [Cadastre 8], avec la précision que la parcelle cadastrée section AB numéro [Cadastre 2] provient de la division en septembre 2010 de la parcelle cadastrée section AB numéro [Cadastre 1] en deux parcelles cadastrées section AB numéros [Cadastre 2] et [Cadastre 3], cette dernière demeurant la propriété de la venderesse, à savoir Mme [L] [H] veuve [D]. L’acte de vente comporte constitution d’une servitude dont le fonds dominant est la parcelle cadastrée section AB numéro [Cadastre 2] vendue, et les fonds servants les parcelles cadastrées section AB [Cadastre 3] et [Cadastre 7] appartenant à Mme [L] [H] veuve [D] en vertu d’une donation-partage du 23 octobre 1975, s’agissant d’une servitude de passage en tous temps et heure et avec tous véhicules qui s’exercera sur le chemin existant sur une bande de largeur de quatre mètres, ce qui correspond à la servitude de passage dont bénéficie le fonds de Mme [U].

Ainsi, il peut être conclu qu’il n’est pas démontré que la parcelle cadastrée section AB numéro [Cadastre 2] appartenant à Mme [D] et M. [T] [X], fonds dominant, est débitrice de la servitude de passage profitant à la parcelle cadastrée section AB numéro [Cadastre 6] appartenant à Mme [U]. A cet égard, il est observé que c’est ce que Mme [A] [C] a répondu à M. [W] [U] par courrier du 24 avril 2015 en ces termes : « Je ne suis pas propriétaire de ce chemin (‘) Vous êtes vous-même, responsable du tracé de ce chemin que vous empruntez chaque jour depuis plus de vingt ans ! ».

Reste à savoir si l’assiette de la servitude a été modifiée par Mme [D] et M. [T] [X], comme prétendu.

On comprend à la lecture d’un courrier adressé par M. [U] au maire [Localité 13] le 23 septembre 2015, que M. [U] souhaite revenir au tracé initial, en précisant : « ‘ lorsque ce tracé passait derrière un gros chêne (toujours existant). En 1995, nous n’avions pas voulu couper ce chêne ([V] tenait à cet arbre) et avions rectifié officiellement ce tracé qui est trop juste. Mais ceci implique que la servitude passe chez Madame [C] sur quelques 70 cm sur 10 mètres ».

Cependant, il n’est produit aucune pièce permettant d’établir le tracé initial de la servitude de passage, imposé aux fonds dominants anciennement cadastrés section D numéros [Cadastre 10] et [Cadastre 5], aujourd’hui cadastrés section AB numéros [Cadastre 3] et [Cadastre 7], ni d’ailleurs le tracé prétendument modifié en 1995.

Sur les quatre procès-verbaux de constats produits de part et d’autre datés de novembre 2015 à juillet 2022, on relève la présence d’un chemin bétonné matérialisant l’assiette de la servitude de passage, d’un chêne qui se situe sur un talus en terre bordant le chemin en pente descendante, puis l’installation de leur clôture par Mme [C] et M. [T] [X] englobant le chêne, laissant une bande de terre en pente le long du chemin.

En considération de ces éléments, il n’est pas démontré que Mme [D] et M. [T] [X] ont modifié l’assiette de la servitude de passage bénéficiant au fonds de Mme [U].

Mme [U] sera donc déboutée de sa demande de remise en état des lieux, de même que de sa demande d’indemnisation fondée sur la modification de l’assiette de la servitude de passage.

Une mesure d’instruction ne pouvant être ordonnée pour suppléer la carence d’une partie dans l’administration de la preuve qui lui appartient, Mme [U] sera également déboutée de sa demande subsidiaire, tendant à ce que soit ordonnée une expertise.

Le jugement appelé sera ainsi confirmé sur chacun de ces points.

Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts

Il est constant que l’exercice d’une action en justice constitue un droit, qui ne peut dégénérer en abus que s’il est démontré une volonté de nuire de la partie adverse ou sa mauvaise foi ou une erreur ou négligence blâmable équipollente au dol, ce qui suppose de rapporter la preuve de ce type de faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre les deux, dans les conditions prévues par l’article 1240 du code civil.

En l’espèce, il n’est pas démontré que Mme [U] venant aux droits de son père décédé, a abusé de son droit d’agir en justice, dans une intention de nuire à Mme [D] et M. [T] [X].

En effet, le fait que M. [U] ait participé à l’enrobage du chemin, assiette de la servitude, ne permet pas de conclure au caractère abusif de son action. De même, il ne peut être reproché à Mme [U] de produire le témoignage de personnes évoquant d’autres contentieux que celui lié au présent litige, étant vérifié que d’autres servitudes grèvent les parcelles litigieuses, ainsi qu’il ressort de la tentative de conciliation opérée, terminée par une non conciliation en décembre 2017.

Mme [C] et M. [T] [X] seront donc déboutés de leur demande de dommages et intérêts et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les demandes accessoires

En application des articles 696 à 700 du code de procédure civile et au regard de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement appelé sur les dépens et les frais irrépétibles.

Mme [U] qui succombe, sera condamnée aux dépens avec distraction au profit du conseil de Mme [D] et M. [T] [X] qui le réclame, et aux frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Déclare recevable l’intervention volontaire de Mme [I] [U], en sa qualité de seule héritière de M. [W] [U], décédé ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions appelées ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [I] [U] aux dépens d’appel, qui seront distraits au profit de la SCP Tollinchi Vigneron Tollinchi ;

Condamne Mme [I] [U] à verser à Mme [A] [C] et M. [G] [T] [X], la somme de 4 000 euros (quatre mille euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ

 


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