Your cart is currently empty!
5 avril 2023
Cour d’appel de Bordeaux
RG n°
19/05556
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
CHAMBRE SOCIALE – SECTION A
————————–
ARRÊT DU : 05 AVRIL 2023
PRUD’HOMMES
F N° RG 19/05556 – N° Portalis DBVJ-V-B7D-LI24
Monsieur [N] [E]
c/
Etablissement Public PÔLE EMPLOI NOUVELLE AQUITAINE
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
à :
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 octobre 2019 (R.G. n°F 18/00188) par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d’appel du 18 octobre 2019,
APPELANT :
Monsieur [N] [E]
né le 01 Décembre 1960 à [Localité 6] de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
assisté et représenté par Me MONTET loco Me Magali BISIAU, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine, pris en la personne de son Directeur domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 2]
N° SIRET : 130 005 481
assisté et représenté par Me Carole MORET de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 février 2023 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Sylvie Tronche,Conseiller, chargé d’instruire l’affaire,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Sylvie Hylaire, présidente
Madame Sylvie Tronche, conseillère
Madame Bénédicte Lamarque, conseillère
Greffier lors des débats : Florence Chanvrit
Greffier lors du prononcé : A.-Marie Lacour-Rivière,
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
Monsieur [N] [E], né en 1960, a été engagé en qualité d’agent de bureau temporaire par l’Agence Nationale pour l’Emploi (ANPE) pour une période d’un mois à compter du 1er août 1984, renouvelé pour une nouvelle période d’un mois à compter du 1er septembre 1984, avant d’être recruté par contrat à durée indéterminée à compter du 1er octobre 1984 en qualité d’agent contractuel.
En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute moyenne de M. [E] s’élevait à la somme de 3.307,12 euros.
M. [E] a travaillé par la suite au sein de la Délégation Régionale Aquitaine puis d’agences locales pour l’emploi et a occupé plusieurs postes.
A compter du 1er janvier 1988, M. [E] a été muté à sa demande à la Délégation Régionale Aquitaine au sein de laquelle il a travaillé en qualité d’agent administratif puis en qualité d’agent de gestion. Il a ensuite été reclassé prospecteur placier.
D’avril 1992 à septembre 1993, M. [E] a géré les antennes saisonnières de [Localité 5] et [Localité 7] avant d’être muté à sa demande le 1er septembre 1993, à l’agence locale pour l’emploi du [Localité 4] en qualité de conseiller auprès des demandeurs d’emploi et des entreprises.
De 1996 à 1999, M. [E] a occupé le poste d’animateur d’équipe à l’agence du [Localité 4].
A compter du 17 juillet 2000, il a été muté au sein de la Direction régionale ANPE à [Localité 3] aux fonctions de technicien supérieur de gestion.
Suite à la création en 2008 de la nouvelle institution nationale Pôle Emploi, née de la fusion de l’ANPE et de l’ASSEDIC, le contrat de travail de M. [E] s’est poursuivi à l’identique au sein de Pôle Emploi dans l’établissement Aquitaine.
A compter du 1er novembre 2010, M. [E] a opté pour le statut d’agent contractuel de droit privé soumis aux dispositions particulières de la convention collective nationale de Pôle Emploi.
Aux termes du contrat de travail signé entre les parties le 12 octobre 2010, M. [E] a été positionné dans la catégorie employé au coefficient 230, base 210, échelon 2 dans l’emploi générique ‘technicien hautement qualifié’ de la fonction allocataires et affecté à la direction régionale Aquitaine sous l’autorité hiérarchique du responsable de service gestion immobilière et logistique de l’établissement de Pôle Emploi Aquitaine.
Par avenant du 20 décembre 2010, il a été affecté au poste de technicien réseau de la fonction informatique exerçant au sein du service CRSI de la direction régionale Aquitaine, à compter du 1er janvier 2011.
Le 10 janvier 2011, le salarié a demandé un réexamen de sa situation et par courrier en date du 7 février 2012, la direction régionale lui a confirmé la revalorisation de son coefficient devenu coefficient de base 230, échelon 0.
A compter du 15 avril 2013, M. [E] a été affecté à la direction maîtrise des risques au sein du pôle environnement de travail.
Le 1er janvier 2014, M. [E] a été promu au coefficient 245, échelon 1.
Au cours de l’année 2016, l’emploi de M. [E] a été rattaché au service systèmes d’information de la direction maîtrise des risques et systèmes d’information.
Le 4 janvier 2017, M. [E] a été informé qu’il se voyait attribuer une promotion à compter du 1er juillet 2017 au coefficient 260, échelon 2, catégorie agent de maîtrise.
Par courrier en date du 18 avril 2017, M. [E] a sollicité un réexamen de sa situation auprès du directeur régional Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine, lequel, par courrier du 29 juin 2017, a maintenu la position au motif qu’il n’y avait pas de raison de revoir le niveau de classification du salarié.
Le 13 septembre 2017, un avenant a été signé entre les parties de passage partiel en télétravail jusqu’au 31 août 2018.
Une nouvelle classification a entraîné un changement de coefficient.
A compter du 1er juillet 2018, M. [E] a bénéficié du coefficient 675, niveau E, échelon 2.
Demandant le classement au coefficient base 250, échelon 265, du 1er février 2015 au 30 juin 2017, au coefficient base 280 à compter du 1er juillet 2017 et au coefficient 702 E3 à compter du 1er juillet 2018 et les rappels de salaires correspondants outre des indemnités et la remise des bulletins de paie rectifiés tenant compte des condamnations prononcées sous astreinte, M. [E] a saisi le 9 février 2018 le conseil de prud’hommes de Bordeaux qui, par jugement rendu le 4 octobre 2019, a :
– dit qu’il était correctement classé au coefficient 245, échelon 1 de la convention collective nationale de Pôle Emploi antérieurement au 1er juillet 2017,
– dit qu’il était correctement classé au coefficient 260, échelon 2 de la convention collective nationale de Pôle Emploi du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018,
– dit qu’il est correctement classé au coefficient 675 niveau E, échelon 2 de l’accord de classification Pôle Emploi depuis le 1er juillet 2017,
– l’a débouté de l’ensemble de ses demandes,
– débouté le Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine de sa demande reconventionnelle,
– laissé les dépens à la charge du demandeur.
Par déclaration du 18 octobre 2019, M. [E] a relevé appel de cette décision.
Il a fait valoir ses droits à la retraite le 1er avril 2022.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 29 septembre 2022, M. [E] demande à la cour de le recevoir en son appel, le juger recevable et bien fondé en toutes ses demandes, de réformer le jugement dans l’ensemble de ses dispositions et, statuant à nouveau, de :
1°) Sur l’exécution du contrat de travail,
– juger qu’il devait être classé :
* au coefficient base 250 échelon 265 du 01/02/2015 au 30/06/2017,
* au coefficient base 280 du 01/07/2017 au 30/06/2018,
* au coefficient 702 E3 à compter du 01/07/2018,
Par conséquent,
– condamner le Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine à lui payer :
* 8 .443,50 euros bruts au titre du rappel de salaire de février 2015 à décembre 2020,
* 844,35 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés afférente au rappel de salaire,
2°) Sur les autres demandes,
– ordonner la remise à M. [E] des bulletins de paie rectifiés, tenant compte des condamnations prononcées, sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard, à compter du prononcé de l’arrêt à intervenir,
– condamner le Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine à lui payer la somme de 2.500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens et frais éventuels d’exécution,
– juger que les condamnations porteront intérêts à compter de la saisine du conseil de prud’hommes de Bordeaux,
– débouter le Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine de l’ensemble de ses demandes.
Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 10 janvier 2023, l’établissement public Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine demande à la cour de’:
– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Bordeaux du 4 octobre 2019,
– dire que M. [E] était correctement classé au coefficient 245, échelon 1 de la convention collective nationale de Pôle Emploi antérieurement au 1er juillet 2017,
– dire que M. [E] était correctement classé au coefficient 260, échelon 2 de la convention collective nationale de Pôle Emploi du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018,
– dire que M. [E] était correctement classé au coefficient 675, niveau E, échelon 2 de l’accord de classification Pôle Emploi depuis le 1er juillet 2018,
– dire que M. [E] était correctement classé au coefficient 702, niveau E, échelon 3 de l’accord de classification Pôle Emploi depuis le 1er janvier 2021,
– débouter M. [E] de ses demandes de rappel de salaire aux coefficients 265 puis 280 depuis le 1er juillet 2017 puis au coefficient 702, E3 à compter du 1er juillet 2018,
– débouter, en conséquence, M. [E] de ses demandes de rappel de salaire et de congés payés afférents,
– débouter M. [E] du surplus de ses demandes,
– condamner M. [E] au paiement d’une indemnité de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [E] aux dépens.
La médiation proposée aux parties le 1er juin 2022 n’a pas abouti.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 janvier 2023 et l’affaire a été fixée à l’audience du 14 février 2023.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ainsi qu’à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la classification de M. [E] et ses conséquences financières
Pour voir infirmer la décision des premiers juges, M. [E] soutient avoir été «’sous-classé’» depuis 2010 et pouvoir dès lors prétendre à une reclassification, dans la limite de la prescription triennale, pour les périodes comprises entre février 2015 et juin 2017, juillet 2017 et juin 2018 et à partir du 1er juillet 2018 entraînant ainsi un rappel
de salaires à hauteur de la somme de 8.443,50 euros bruts outre la somme de 844,35 euros bruts représentant l’indemnité au titre des congés payés afférents.
Il explique avoir essuyé un refus à sa demande tendant au réexamen de sa situation sans recevoir d’explications concrètes de la part de la direction et conteste que son positionnement professionnel ait été examiné avec ses supérieurs hiérarchiques.
Il invoque les évaluations positives obtenues au cours de sa carrière professionnelle.
Se comparant à ses collègues, il considère, au regard de son ancienneté de 35 ans, devoir bénéficier d’un coefficient plus élevé pour avoir été le seul collaborateur à avoir travaillé en agence avant d’intégrer la direction régionale et en conclut être victime d’une inégalité de traitement.
L’employeur réplique que les tâches effectuées par M. [E] ont donné lieu à une classification conforme aux dispositions conventionnelles.
Il réfute ne pas avoir apporté d’explications concrètes à sa demande de réexamen de sa situation et ne pas avoir consulté les supérieurs hiérarchiques de l’agent.
Selon l’employeur, les évaluations positives avancées par M. [E] au soutien de ses demandes sont à relativiser, de nécessaires progressions ayant été pointées.
S’agissant de la comparaison avec ses collègues et d’une éventuelle inégalité de traitement, l’employeur considère que l’ancienneté de M. [E] n’est pas un critère justifiant d’un coefficient supérieur, le parcours, les compétences et l’expertise requises étant spécifiques à chacun.
* * *
En cas de différend sur la catégorie professionnelle d’une convention collective qui doit être attribuée à un salarié, il convient de rechercher la nature de l’emploi effectivement occupé et la qualification qu’elle requiert. En outre, il appartient au salarié d’apporter la preuve qu’il exerce effectivement les fonctions correspondant à la qualification qu’il revendique.
Par ailleurs, en application de la règle «’à travail égal, salaire égal’», l’employeur est tenu d’assurer l’égalité de rémunération entre tous les salariés de l’un ou l’autre sexe, pour autant que les salariés en cause soient placés dans une situation identique.
Il résulte de l’article L.3221-4 du code du travail que sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l’ expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse.
Il incombe au salarié qui se prétend victime, de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération directe ou indirecte. Il appartient alors à l’employeur de prouver que la situation critiquée est justifiée par des raisons objectives, pertinentes et matériellement vérifiables. Si cette preuve n’est pas rapportée, l’employeur doit verser un rappel de salaire pour compenser la différence invoquée.
Il est établi par les pièces versées à la procédure par l’une et l’autre des parties, qu’après avoir occupé divers postes administratifs au sein de l’ANPE puis de Pôle Emploi, M. [E] a intégré la fonction informatique.
Ainsi :
– selon avenant à son contrat de travail du 20 décembre 2010, il a été affecté au poste de technicien réseau de la fonction informatique, les autres conditions de son contrat de
travail demeurant inchangées, notamment sa catégorie, son coefficient et son échelon de classification,
– il a bénéficié le 28 janvier 2014 d’une promotion dans la catégorie employé, aux fonctions de technicien expérimenté, assortie d’un coefficient de 245 (coefficient de base : 230-échelon 1),
– à l’occasion de la mise en place de l’organisation Pôle emploi Nouvelle Aquitaine au 1er juillet 2016, il a été «’repositionné’» au service Système d’information de la direction Maîtrise des risques et systèmes d’information, rattaché à la direction maîtrise des risques et administratif finances gestion,
– il a ensuite bénéficié d’une promotion le 1er juillet 2017 en devenant technicien expérimenté dans la catégorie d’agent de maîtrise au coefficient 260 – échelon 2,
– une nouvelle classification a entraîné un changement de son coefficient pour accéder le 1er juillet 2018, au coefficient 675 niveau E échelon 2.
– enfin, à compter du 1er janvier 2021, il a été classé au coefficient 702, niveau E, échelon 3.
– Sur l’inégalité de traitement
Invoquant une inégalité de traitement, M. [E] soutient en premier lieu, qu’il suffit de comparer ses coefficients et ses rémunérations à ceux de ses anciens collègues Messieurs [D] et [G] pour constater qu’il ne bénéficiait pas de la classification correspondant à ses fonctions et responsabilités, ce que conteste l’employeur en faisant valoir que les intéressés, au profil d’informaticien, avaient bénéficié de promotions dans d’autres postes précédents et étaient partis à la retraite respectivement en 2016 et 2017.
La cour constate que M. [E] ne fournit aucun élément susceptible d’étayer ses affirmations.
En second lieu, M. [E] établit dans le cadre de ses écritures un tableau comportant l’identité, l’ancienneté et le coefficient des sept personnes composant le service dont il fait partie.
Ce tableau concorde avec celui produit par l’employeur, même si chaque partie en tire des conséquences différentes.
En comparant les salariés occupant le même emploi que M. [E], à savoir Messieurs [T], [M] et [K], il ressort que l’appelant a bénéficié, à ancienneté égale dans le service, d’un coefficient supérieur à celui de Messieurs [K] et [M], et que son coefficient est également supérieur à celui de M. [T] dont l’ancienneté est moindre. Comme le souligne à juste titre l’employeur, M. [E] a l’un des coefficients les plus élevés après M. [P], ancien responsable de service.
A ce stade, la cour observe que M. [E] ne justifie pas de diplômes obtenus ou de formations qualifiantes suivies dans le domaine informatique et le secteur des télécommunications, ce qui l’a obligé incontestablement à acquérir à partir de 2011 des compétences nouvelles sans lien avec les fonctions qu’il occupait auparavant chez le même employeur.
Dès lors, ce seul tableau, qui n’est étayé par aucun autre élément probant, est insuffisant à établir une rupture d’égalité de traitement.
– Sur la demande de classement au coefficient de base 250 échelon 265 du 1er février 2015 au 30 juin 2017
Revendiquant la classification au coefficient 250 échelon 265 applicable du 1er février 2015 au 31 juin 2017, l’appelant soutient remplir les critères d’adaptation, de technicité de responsabilité et d’initiative requis et prétend qu’avant d’être affecté en 2010 au service «’environnement de travail’», la directrice de Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine avait assuré à Mme [X], la responsable du service, qu’il se verrait attribuer le coefficient «’base 250’» pour une «’mise à niveau de son statut’». Il verse en ce sens l’attestation de Mme [X].
Aux termes de la convention collective et plus particulièrement de l’avenant n° XXVI du 6 juillet 1994 relatif à la classification, il ressort que le contenu de l’activité, correspondant au coefficient de base 230 et de l’échelon 245, attribué à M. [E] à la suite d’une promotion acquise le 1er janvier 2014, est décrit comme suit :
«’Application/adaptation : maîtriser le traitement d’informations variées dans le cadre de situations complexes.
Définition :
Technicité/champ d’application : l’emploi s’exerce dans un cadre large couvrant généralement plusieurs activités. Il nécessite soit la parfaite maîtrise d’une technique dans un domaine précis, soit la bonne maîtrise d’une technique complétée par la mise en ‘uvre de techniques multiples. Il implique l’analyse et l’interprétation de données.
Responsabilité : la responsabilité est liée à l’impact des décisions prises soit sur l’entrée et la sortie de fonds, soit sur la gestion et la qualité du service rendu. Elle porte sur la fiabilité et la rigueur de l’ínformation donnée.
Initiative : l’autonomie porte sur le choix des moyens et l’organisation du travail. Le contrôle s’effectue périodiquement sur les résultats, le plus souvent indirectement.’»
Le contenu de l’activité au niveau du coefficient de base 250 et de l’échelon 265, niveau agent de maîtrise est décrit comme suit :
Sur le critère d’autonomie, initiative et adaptation, il est indiqué : «’ traiter et transmettre des informations de façon à influencer l’action d’autrui …
Initiative : les objectifs, moyens et méthodes sont définis avec précision. Dans le cadre fixé par la direction, les choix d’optimisation restent limités. Le contrôle s’effectue sur les résultats’».
Le niveau de technicité sollicité est : «’soit traiter tout type de situation complexe relevant du secteur d’activité maîtrisé dans l’assurance chômage, soit fournir des informations élaborées dans le domaine technique de compétences, soit encadrer une petite équipe d’agents qui ont le même type d’emploi.’».
Le critère de responsabilité est ainsi défini : « optimiser la qualité du service rendu au public, proposer des méthodes et des moyens dans le cadre de la mise en ‘uvre d’une politique précise.’».
S’agissant de sa technicité, de sa responsabilité et de son initiative, M. [E] considère avoir participé et mis en oeuvre des actions pour des projets nationaux importants tels le passage de tous les sites ex ANPE en téléphonie TOIP, le projet ODIGO et le projet fax in mail.
Il indique avoir également participé depuis 2011 au relogement de 38 sites dans le cadre de schéma d’implantation des sites Pôle Emploi (SISPE) sur les 58 existants dans
l’ancienne Région Aquitaine en intervenant dans tous les domaines liés à ces transferts : gestion des matériels informatiques, téléphoniques, commandes auprès des fournisseurs.
Il dit avoir été le seul interlocuteur pour l’ancienne Région Aquitaine de la DSI (direction des systèmes d’information) et du service immobilier, le seul gestionnaire des bornes UNIDIALOG et des visio guichets, être le seul à avoir effectué les demandes liées aux commandes ADSL avec l’opérateur Bouygues, être le référent en matière de téléphonie fixe, posséder un accès à l’extranet Xerox pour le parc copieur Xerox, être le seul à passer des commandes de matériel ou de prestations dans le logiciel Pôle Emploi SAP, être le seul à avoir un accès à l’extranet Axian, ses codes étant utilisés par ses collègues en cas de nécessité.
Pour en justifier, il produit :
– l’attestation de Mme [X] évoquée supra ;
– des courriels d’avril 2017 de Mme [W], responsable système d’information, et de Mme [I], directrice de la maîtrise des risques, l’informant de la décision de la direction concernant le rejet de sa demande de réexamen de sa situation au regard de la campagne de promotion 2016/2017, ;
– la décision de refus du 29 juin 2017 ainsi expliquée :’
«'(…) j’ai pu vérifier que votre rémunération actuelle est en adéquation avec le poste et les missions confiés. Selon l’article 20.3 de la CCN, le déroulement de carrière s’opère par progression de coefficient qui traduit et reconnaît la montée en qualification de l’agent dans sa fonction. L’attribution d’un échelon dans le niveau de qualification détenu, traduit et reconnaît la maîtrise des compétences et l’expérience acquise dans le poste. Ainsi, il est légitime, dans le cadre du maintien dans un même emploi de reconnaître l’expérience acquise du fait de la pratique courante et continue des activités professionnelles (…) votre manager reconnaît vos facilités à travailler en équipe ce qui vous permet de mettre du lien avec les services transverses de la direction régionale et c’est pourquoi votre direction vous a attribué une promotion au 1er janvier 2014 coefficient 245 et au 1er juillet 2017 coefficient 265-2.
L’établissement distingue les coefficients liés à une nomination et l’attribution d’un coefficient dans le cadre de la campagne de promotion en application de l’article 20.3 de la CCN. En effet le coefficient du poste diffusé correspond au niveau de classification requis sur les aspects de la technicité, de la responsabilité et de l’autonomie lorsque la progression par coefficient est liée à la montée en qualification de l’agent dans sa fonction dans le cadre de la campagne de promotion'(…) » : cette pièce contredit ses affirmations selon lesquelles la direction n’aurait pas justifié sa décision par des éléments objectifs ;
– de nombreux échanges de mails concernant des commandes, le dossier SISPE, des demandes relatives à des problèmes de connexion de Xerox, la gestion des bornes Unidialog, des mails de Mme [W] : ces pièces (datées essentiellement de 2019) sont toutes postérieures à la période considérée.
Concernant l’activité de M. [E], il ressort des entretiens d’évaluation professionnelle établis en 2012, 2013 et 2015 qu’il était CSI (correspondant système d’information), puis CSI adjoint pour la région Aquitaine, contact privilégié de la DSI dans le domaine de la téléphonie et de la gestion de parc ayant pour mission d’assurer la charge de la gestion intégrale de la téléphonie, de la gestion de parc et des déménagements touchant l’informatique. Il était acteur dans les projets d’évolution DSI ainsi que l’interlocuteur privilégié de la DSI, du réseau, des prestataires externes dans le cadre de ses missions. L’entretien d’évaluation établi le 1er avril 2016, ne mentionne pas de changement d’activité.
Si comme le soutient à juste titre le salarié, il a donné entière satisfaction au regard des conclusions de ses entretiens d’évaluation professionnelle sur la période en cause, il n’en demeure pas moins, ainsi que l’a souligné l’employeur, qu’il ne fournit aucun élément de nature à établir une différence entre sa classification et les tâches effectuées qu’il considère relever d’une classification supérieure.
En effet, s’agissant du contenu de l’activité et de son niveau de technicité pour la classification revendiquée, il n’établit pas avoir fourni des informations élaborées dans son domaine technique de compétences ou avoir encadré une petite équipe d’agents qui ont le même type d’emploi. De la même façon, le fait qu’il ait pu gérer seul certains postes de son activité au sein de l’équipe est insuffisant à démontrer qu’il a pu être force de proposition pour la mise en oeuvre de méthodes et de moyens dans le cadre d’une politique précise caractérisant le critère de responsabilité retenu pour accéder au coefficient qu’il sollicite.
En conséquence, à défaut pour M. [E] de démontrer que la réalité de ses fonctions correspond à la description du coefficient base 250 échelon 265 de la convention collective, il doit être débouté de sa demande de reclassification à ce niveau pour la période comprise entre le 1er février 2015 et le 30 juin 2017.
La cour observe à l’instar de l’employeur que M. [E] a bénéficié entre 2014 et 2017 de deux promotions emportant changement de coefficient et de rémunération, en adéquation avec les missions accomplies.
Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
– Sur la demande de classement au coefficient base 280 du 1er juillet 2017 au 30 juin 2018 au lieu du coefficient 260
Le 4 janvier 2017, M. [E] a été informé qu’il se voyait attribuer une promotion à compter du 1er juillet 2017 au coefficient 260, échelon 2, catégorie agent de maîtrise.
Il sollicite un classement au coefficient de base 280 qui correspond au niveau agent de maîtrise ou cadre, ainsi défini aux termes de l’avenant n° XXVI du 6 juillet 1994 :
«’Définition :
Technicité/champ d’application : les emplois de ce niveau consistent soit à conduire des études, des analyses voire des projets liés au domaine technique de compétence en coordonnant la réalisation des activités effectuées par d’autres personnes, soit à organiser, animer et coordonner le travail d’un groupe d’agents.
Responsabilité : définir et proposer des moyens pour améliorer la qualité de la production et la qualité du service rendu, mettre en ‘uvre circuits et procédures nouveaux.
Initiative : l’autonomie porte sur le choix des moyens, sur l’organisation du travail. Le contrôle s’effectue a posteriori.’»
Sollicitant l’application de ce coefficient pour la période comprise entre le 1er juillet 2017 et le 30 juin 2018, M. [E] indique que les fonctions qu’il occupait répondent aux critères conventionnels de classification, ce que confirmeraient les entretiens annuels pour les années 2012, 2013, 2014, 2015, 2016 et 2017.
Il produit les mêmes éléments que ceux évoqués au soutien de sa demande précédente, tous postérieurs à la période considérée sauf deux courriels échangés avec Mme [W] en octobre 2017 et octobre 2018 au sujet de l’annulation de réservation de bornes Unidialog dont on comprend qu’il sollicite son avis sur ce sujet.
De son côté, l’employeur soutient que les explications de l’appelant correspondent au contenu de sa fonction de CSI de sorte qu’il ne peut revendiquer une autre classification.
Il ressort de son entretien annuel 2017 que M. [E] a été considéré comme «’force de proposition et anticipe les actions des autres services qui pourraient impacter notre activité, joue un rôle d’alerte important’» tandis que pour l’année 2018, il a été noté :’«'[N] est monté en compétence dans la gestion des habilitations, des répertoires des listes de diffusions, des bals fonctionnelles etc…et traite les mêmes activités que les autres agents du service, tout en conservant les opérations SISPE, les commandes de matériels, le suivi des bons de livraison et la mise à jour du fichier de suivi des budgets’». En commentaire, M. [E] a précisé : «’la prise en charge de la gestion des habilitations est une nouvelle activité que j’essaie d’assumer mais avec difficulté, l’aide précieuse de mes collègues est très appréciable et j’ai bien noté que les activités que j’exerce seront également prises en charge par mes collègues du service’».
Ce n’est donc qu’à partir de 2018 que son activité a été étendue avec de nouvelles compétences dont il reconnaît lui-même qu’elles étaient en cours d’acquisition dans le courant de l’année 2018. Elles ont en conséquence justifié un changement de classification qui lui a été octroyé en juillet 2018 au coefficient 675 niveau E échelon 2 selon la nouvelle nomenclature mise en place à l’issue des accords du 22 novembre 2017 correspondant à l’ancienne classification 260-265.
A défaut pour M. [E] de démontrer que la réalité de ses fonctions correspond à la description du coefficient de base 280 de la convention collective pour la période considérée, il doit être débouté de sa demande à ce titre et le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
– Sur la demande de classement au coefficient 702 E3 à compter du 1er juillet 2018 correspondant à l’ancienne classification 280
L’appelant indique qu’à compter du 1er janvier 2021, il a bénéficié du coefficient 702 niveau E échelon 3 grâce à la demande de sa responsable de service alors que ses fonctions sont demeurées identiques, en concluant que l’employeur doit s’en expliquer.
Il produit les mêmes éléments que précédemment, démontrant contrairement à ce qu’il prétend, que son activité était encadrée et qu’il apparaissait comme un intervenant dans les processus, étant soit interrogé sur des vérifications de connexion d’appareils (Xerox) soit répondant ou donnant son avis, ce qui est insuffisant à caractériser les critères fixés pour parvenir au coefficient sollicité.
L’employeur rétorque que la promotion obtenue en janvier 2021 est consécutive à l’évolution de la maîtrise par M. [E] des activités qui lui ont été confiées en application de l’article 19.1 de la convention collective nationale qui prévoit la progression d’un agent permettant de reconnaître la maîtrise des compétences et de l’expérience acquise.
Il se déduit de l’entretien annuel de 2019 que M. [E] a intégré les nouvelles compétences relatives à la gestion des habilitations tout en continuant à traiter les activités précédentes : «’tout ce qui a été prévu dans le cadre de la montée en compétence de [N] (…) a été pris en charge de façon exemplaire avec toujours autant de professionnalisme, de sérieux et de rigueur’».
Contrairement à ce que soutient l’appelant, ces éléments traduisent sans conteste une progression dans les tâches et missions accomplies qui a été reconnue par l’octroi d’un nouveau classement, au coefficient 702, niveau E, échelon 3 au début de l’année 2021, conformément à ses demandes formulées ainsi dans son commentaire :’«’je continue à traiter les activités qui me sont confiées avec sérieux et professionnalisme malgré les aléas liés au manque de reconnaissance par la direction (coefficient 675 niveau E après 35 ans d’ancienneté et d”expériences nombreuses et variées)’».
Dès lors, la demande à ce titre sera rejetée.
Ce nouveau classement correspondait aux fonctions exercées par M. [E] ainsi que le soutient l’intimé.
Eu égard à l’ensemble de ces éléments, la demande formulée par l’appelant au titre de rappels de salaire et de la rectification des bulletins de salaire sera rejetée.
Sur les autres demandes
M. [E], partie perdante à l’instance et en son recours, sera condamné aux dépens ainsi qu’à verser à Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine une somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf à rectifier l’erreur matérielle affectant le jugement en ce qu’il a dit que M. [E] était correctement classé au coefficient 675 niveau E ‘depuis le 1er juillet 2017″,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que M. [E] était correctement classé au coefficient 675 niveau E de l’accord de classification Pôle Emploi depuis le 1er juillet 2018,
Dit que M. [E] a été correctement classé au coefficient 702, niveau E, échelon 3 de l’accord de classification Pôle Emploi depuis le 1er janvier 2021,
Condamne M. [E] aux dépens ainsi qu’à verser à Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.
Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire