Télétravail : 30 mars 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01653

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Télétravail : 30 mars 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01653
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30 mars 2023
Cour d’appel de Versailles
RG n°
21/01653

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

21e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 30 MARS 2023

N° RG 21/01653 – N° Portalis DBV3-V-B7F-URIH

AFFAIRE :

[G] [N]

C/

S.A.S.U. LEFEBVRE SARRUT SERVICES… ……..

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 07 Mai 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section : E

N° RG : 18/02428

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Christophe VIGNEAU

Me Virginie BADIER-CHARPENTIER

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TRENTE MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame [G] [N]

née le 06 Décembre 1973 à ALGERIE

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par : Me Christophe VIGNEAU, Plaidant/Constitué avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D617

APPELANTE

****************

S.A.S.U. LEFEBVRE SARRUT SERVICES SAS AU CAPITAL DE 500.000 Euros immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 509620290 Prise en la personne de son Président en exercice Monsieur [B] [U]

N° SIRET : 509 620 290

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par : Me Virginie BADIER-CHARPENTIER, Plaidant/Constitué avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 509 -Représentée par : Me Aymeric DE LAMARZELLE, Plaidant/Constitué , avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K 0168

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 14 Février 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Véronique PITE, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas LE MONNYER, Président,,

Madame Véronique PITE, Conseiller,

Mme Florence SCHARRE, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Alicia LACROIX,

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [G] [N] a été engagée, par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 4 juillet 2016, en qualité d’analyste métier, statut cadre, par la société par actions simplifiée ELS Gestion qui a pour activité le conseil de gestion, et relève de la convention collective nationale de l’édition.

Parallèlement, elle exerçait le mandat de conseillère municipale déléguée de la commune d'[Localité 4].

Convoquée le 23 juin 2017 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 6 juillet suivant, reporté au 24 juillet, Mme [N] a été licenciée par lettre datée du 27 juillet 2017 énonçant une cause réelle et sérieuse.

Contestant son licenciement, Mme [N] a saisi, le 24 septembre 2018, le conseil de prud’hommes de Nanterre aux fins de demander la nullité de son licenciement, sinon la reconnaissance de son caractère abusif et condamner la société au paiement de diverses indemnités, et la société s’est opposée aux demandes de la requérante.

Par jugement rendu le 7 mai 2021, notifié le 21 mai suivant, le conseil a statué comme suit :

Déboute Mme [N] de l’ensemble de ses demandes

Condamne Mme [N] aux entiers dépens

Déboute la société ELS Gestion de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le 1er juin 2021, Mme [N] a relevé appel de cette décision par voie électronique.

Selon ses dernières conclusions, remises au greffe le 14 juillet 2021, Mme [N] demande à la cour d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes et l’a condamnée aux entiers dépens, et par conséquent, statuant à nouveau :

A titre principal :

Dire et juger son licenciement nul car intervenu en violation de son statut protecteur,

Condamner la société ELS Gestion à lui payer les sommes suivantes :

– 175 000 euros au titre de l’indemnité pour violation du statut protecteur.

– 40 000 euros de dommages et intérêts pour rupture illicite.

A titre subsidiaire,

Dire et juger son licenciement abusif,

Condamner la société ELS Gestion à lui payer la somme de 40 000 euros de dommages et intérêts pour rupture abusive.

En tout état de cause,

Condamner la société ELS Gestion à lui payer 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dire que les condamnations à intervenir porteront intérêts à partir de chaque échéance mensuelle avec capitalisation desdits intérêts selon l’article 1343-2 du code civil à partir de la date de la saisine.

Aux termes de ses dernières conclusions, remises au greffe le 7 octobre 2021, la société par actions simplifiée Lefebvre Sarrut Services venant aux droits de la société ELS Gestion, demande à la cour de :

A titre principal

Confirmer le jugement du 7 mai 2021 du conseil de prud’hommes de Nanterre en ce qu’il a :

o Débouté Mme [N] de l’ensemble de ses demandes,

o Condamné Mme [N] aux entiers dépens,

Infirmer le jugement du 7 mai 2021 du conseil de prud’hommes de Nanterre en ce qu’il a débouté la société ELS Gestion de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

En conséquence :

Condamner Mme [N] à lui verser 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire

Réduire les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à de plus justes proportions ;

En tout état de cause :

Condamner la requérante au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.

Par ordonnance rendue le 1er février 2023, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 14 février suivant.

MOTIFS

I – Sur le licenciement

La lettre de licenciement est ainsi libellée :

« Votre absence à [l’]entretien ne nous a pas permis de recueillir des explications.

Intégrée au sein de notre société depuis le 4 juillet 2016, vous occupez actuellement le poste d’Analyste métier au sein du SI Gestion, département de la DSI. Dans le cadre de vos fonctions, vos principales missions sont les suivantes : rédaction et mis[e] à jour des business process, rédaction des expressions de besoins et des spécifications générales fonctionnelles, rédaction des spécifications fonctionnelles détaillées et use cases détaillés, rédaction des scenarii de tests fonctionnels, rédaction du manuel utilisateur.

En décembre 2016, vos objectifs 2017 vous ont été fixés : dans le cadre de la mise en place d’un nouvel ERP pour le Groupe, vous aviez pour mission la rédaction des « BRS Orders », à savoir les spécifications fonctionnelles détaillées et les use cases relatifs aux commandes dont l’Administration des ventes (ci-après « ADV ») a la charge. Cette documentation détaillée devait être livrée au cours du 1er semestre 2017. Cette livraison constituait votre priorité principale.

A mi-semestre, fin mars 2017, vous ne fournissiez aucune date de livraison de ces spécifications et de ces use cases.

Constatant que vous n’étiez toujours pas en mesure de fournir la documentation attendue, vous avez été alertée en avril de la nécessité de fournir les livrables qu’on attendait de vous. Pour ce faire, votre manager a mis en place un plan d’action et vous a proposé des réunions bimensuelles pour vous aider et vous guider dans la rédaction des BRS.

Il vous a également indiqué que vos actions devaient essentiellement se concentrer sur ces livrables.

Lors d’une de ces réunions bimensuelles en mai dernier, un point a été fait sur les use cases détaillés que vous deviez produire de toute urgence compte tenu de l’état d’avancement du projet ERP. Force a été de constater qu’ils étaient très génériques et qu’ils ne répondaient pas aux use cases détaillés qu’un analyste métier, a fortiori senior, doit produire dans l’exercice de ses fonctions. Aucune action ni rédaction n’avait été mise en place pour recenser, inventorier et répertorier l’ensemble des cas concrets, pratiques et détaillés de commandes auxquels l’ADV est confrontée au quotidien : par type de commande (création, modification, retour, etc.), par nature (une seule commande, un abonnement, une souscription etc.), par type de produits (papier, numérique, logiciel, etc.), etc.

En juin, lors de votre premier point avec votre nouveau manager, qui consistait à faire un état des lieux de la production, celui-ci vous a demandé, comme à l’ensemble de l’équipe des analystes métier, de lui fournir la documentation que vos fonctions d’analyste métier impliquaient, ce que vous avez été dans l’incapacité de faire.

L’absence de cette documentation met en péril le projet central pour notre Groupe que constitue la mise en place d’un ERP unique. Seule des spécifications fonctionnelles détaillées et des use cases détaillés peuvent permettre au projet d’avancer, de produire un cahier de test fiable et de garantir des fonctionnalités adaptées aux besoins de l’ADV.

L’urgence était telle et votre manque de production si important que des domaines dont vous aviez la charge ont été confiés à d’autres collaborateurs. Votre charge de travail a ainsi été reportée sur d’autres collaborateurs concernant les thématiques suivantes : accès numériques et multi entity et profils ADV (autorisations et groupes).

Outre votre manque de production, nous avons également constaté un certain nombre de fausses déclarations de votre part dans notre outil de gestion des temps.

Pour rappel, c’est par cet outil que vous devez poser vos jours de congés ou de RTT (ou demi-journées de congé ou de RTT) et que vous devez également, en début de mois M, déclarer vos journées ou demi-journées de présence au cours du mois précédent M-1.

Après vérification de la Direction, il s’avère qu’à de nombreuses reprises, vos déclarations ne correspondent pas à la réalité de votre activité.

Tout d’abord, le 22 février 2017, vous avez déclaré que vous étiez présente l’après-midi dans votre déclaration de présence du mois de février. Or, après vérification de la Direction des ressources humaines, il s’avère que vous animiez une conférence toute l’après-midi, sans lien avec votre activité professionnelle au sein de notre société.

Après vérification de la part de la Direction, il s’avère également qu’il n’y a aucune activité de votre part sur un certain nombre de journées ou de mi-journées alors que vous n’avez déclaré aucune journée ou demi-journée d’absence et que vous avez déclaré votre présence dans l’outil de gestion des temps.

Tel a été le cas notamment :

– Le 21 juin 2017 ;

– Le 17 mai 2017 toute la matinée ;

– Le 26 avril 2017 tout l’après-midi ;

– Le 26 avril 2017 tout l’après-midi ;

– Le 5 avril 2017 tout l’après-midi ;

– Toute la journée du 8 février 2017 ;

– Le 18 janvier 2017 tout l’après-midi ;

– Le 11 janvier 2017 toute la matinée ;

– Le 4 janvier 2017 toute la matinée ;

– Le 23 novembre 2016 tout l’après-midi ;

– Le 19 octobre 2016 tout l’après-midi ;

– Le 12 octobre 2016 tout l’après-midi.

Enfin, concernant le 21 juin 2017, vous avez été absente et injoignable toute la journée, alors que votre manager cherchait à vous joindre. Vous n’avez préalablement fait aucune déclaration d’absence dans le logiciel.

C’est à la suite de la question de votre manager posée par mail le 21 juin, et auquel vous n’avez jamais répondu, que vous avez régularisé le lendemain, 22 juin, uniquement une demi-journée d’absence au titre de la matinée du 21 juin. Pourtant après vérification de la Direction, il s’avère qu’il n’y a aucune activité de votre part concernant le 21 juin après-midi.

Non seulement vous n’avez pas respecté la procédure de déclaration des jours ou demi-journées de présence et d’absence, mais vous avez effectué des fausses déclarations dans l’outil à de nombreuses reprises depuis le mois d’octobre 2016.

En conséquence, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse ».

Sur la nullité du licenciement

Mme [N] fait valoir son mandat électoral porté à la connaissance de l’employeur, lui donnant qualité, en application de l’article L.2123-9 du code général des collectivités territoriales, de salarié protégé au sens du livre IV de la 2ème partie du code du travail, dans la mesure où, bénéficiaire d’une délégation de pouvoirs, ses fonctions de conseiller municipal doivent être assimilées à celle d’un adjoint du maire, et où l’employeur aurait dû solliciter l’autorisation de l’administration du travail avant de la licencier, ce qu’il omit. Ce à quoi, rappelant avoir méconnu, en tout état de cause, le mandat, la société Lefèbvre Sarrut services objecte le défaut d’un fondement à la protection réclamée.

L’article L.2123-9 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction antérieure à la loi du 27 décembre 2019, dit que « les maires, d’une part, ainsi que les adjoints au maire des communes de 10 000 habitants au moins, d’autre part, qui, pour l’exercice de leur mandat, ont cessé d’exercer leur activité professionnelle, bénéficient, s’ils sont salariés, des dispositions des articles L.3142-83 à L.3142-87 du code du travail relatives aux droits des salariés élus membres de l’Assemblée nationale et du Sénat.

(‘)

Lorsqu’ils n’ont pas cessé d’exercer leur activité professionnelle, les élus mentionnés au premier alinéa du présent article sont considérés comme des salariés protégés au sens du livre IV de la deuxième partie du code du travail. »

Si Mme [N] soutient l’identité des situations de l’adjoint au maire et du conseiller municipal délégué au regard de la protection instituée par le livre IV de la 2ème partie du code du travail par similitude de leurs crédits d’heures prévus à l’article L.2123-2 du code général des collectivités territoriales et de leurs indemnités au sens de l’article L.2123-4, il n’en reste pas moins que la règle prévue à l’article L.2123-9 constitue une exception au droit commun, et que d’interprétation stricte, elle ne saurait être étendue au-delà de son champ au moyen d’une interprétation téléologique que le texte ne commande nullement. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a écarté ses prétentions en nullité du licenciement.

Sur le défaut de cause du licenciement

L’insuffisance

Plaidant la carence probatoire de son contradicteur, Mme [N] conteste l’objectif et les tâches dont il se prévaut dans la lettre de licenciement et soutient n’avoir eu dans son propre travail aucun retard, lequel dérivait de difficultés inhérentes au projet ERP ayant entraîné des modifications de sa planification.

Estimant que la preuve de sa compétence incombe à son adversaire qui y défaille, la société Lefèbvre Sarrut services se réfère, pour le contour de ses tâches, à la fiche de poste « senior business analyst TC », à la déclinaison de ses objectifs du 1er semestre 2017 et aux échanges avec son supérieur, et fait valoir qu’elle en eut les moyens en raison de l’accompagnement personnalisé dont elle bénéficia, sans les atteindre.

Selon l’article L.1235-1 du code du travail, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Cela étant, l’insuffisance professionnelle, qui se caractérise par une mauvaise qualité du travail due à une incompétence professionnelle ou une inadaptation à l’emploi, constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement si elle repose sur des éléments précis, objectifs et imputables au salarié.

La fiche de poste dit que le salarié est « responsable de la configuration des systèmes sur [son] périmètre », que « dans l’implémentation des nouveaux systèmes (‘), [le salarié a] en charge la rédaction des cas d’utilisation, des spécifications fonctionnelles (générales et détaillées) et le pilotage des développements spécifiques en lien avec le chef de projet » et qu’« en phase de maintenance, [il est] le garant du bon fonctionnement des applications. »

Si la société Lefèbvre Sarrut reproche à Mme [N] l’insuffisance des résultats fixés en décembre 2016 pour le 1er semestre 2017, le résumé sur papier libre de l’entretien qu’elle produit à cet effet dont l’intéressée conteste la tenue et les termes, disant « finaliser les BRS dans le bon niveau de détail au S1 2017 » ne spécifie ni nom ni trace d’envoi, et n’a aucune force probante. De la sorte l’employeur n’établit pas les objectifs figurant dans la lettre de licenciement et dont il se prévaut.

Cependant, Mme [N] ne critique pas utilement n’avoir pas eu la tâche de rédiger les spécificités fonctionnelles, dites BRS orders, lesquelles, selon elle, auraient déjà été établis « en 2017 », puisque, comme l’ont observé les premiers juges, le tableau qu’elle produit de leur avancement au 11 mai 2017, montre que certains, sous son nom, étaient en cours d’élaboration et d’autres non commencés, le terme de leur achèvement se distribuant entre le 15 juin au plus tôt et la fin de l’année 2017 au plus tard.

Par ailleurs, l’employeur considère avoir prévenu la salariée fin mars 2017 de son retard, avoir mis en place des réunions bimensuelles pour le juguler et avoir constaté l’inanité de son travail.

Mais les écrits sur papier libre, dénommés « points mensuels », dont Mme [N] défend qu’il s’agisse des comptes rendus de ses entretiens et dément leur transmission tout en relevant que les travaux y mentionnés concernaient l’entière équipe, et qui ne la citent pas au contraire d’autres prénoms, sont dépourvus de force probante et ne sauraient établir ni son accompagnement personnalisé, ni fonder ses éventuelles insuffisances.

En revanche, le « point mensuel » d’avril 2017, qu’elle concède à l’employeur, est « dédié à un recentrage dans [son] activité vers la production », dont le caractère insuffisant est évoqué, et elle s’en défend, dans sa réponse par mail, au regard du planning « SOW10 pour la partie BRS », en relevant la multiplicité des réunions notamment dues à la « replanification », qui l’entrave.

Par ailleurs, il n’est pas établi par les pièces produites aux débats que Mme [N] aurait livré un travail imparfait car trop général sur les cas concrets et détaillés, en juin 2017.

S’il reste que la comparaison de l’état des lieux au 11 mai 2017 et au 18 juillet 2017 laisse voir, sous son nom, que la rédaction de BRS qui devait être achevée le 15 juin (BRS Bulk upload, BRS quick order) ou le 30 juin (BRS : order conversion), n’était pas prête, et dont l’appelante ne critique pas utilement la portée faute de s’en expliquer mieux, pour autant, il n’est pas suffisamment établi d’éléments précis, objectifs et imputables à la salariée l’ayant empêchée d’atteindre un objectif dont les contours demeurent flous, dans le contexte par ailleurs d’un report de livraison du système, pour immaturité technique, fin 2016, dont s’était fait l’écho le mail du 6 octobre 2016 de M. [S], directeur des systèmes d’information de gestion. Le doute lui profitant en application du dernier alinéa de l’article L.1235-1 du code du travail, ce motif ne saurait fonder le licenciement.

Le mensonge

Mme [N] fait valoir la prescription des faits fautifs en application de l’article L.1332-4 du code du travail, dans dix cas sur onze reprochés, sinon la carence probatoire de son contradicteur et l’inversion de la charge de la preuve par ses premiers juges. Elle excipe au surplus de l’accord passé avec l’employeur quant à l’organisation des mercredis, évinçant la nécessité d’une déclaration d’absence. Elle met en lien son licenciement finalement avec son alerte sur les risques psycho-sociaux.

La société Lefèbvre Sarrut services, qui rappelle que la prescription ne peut concerner des fautes répétées, à les supposer connues, dont l’une n’en est frappée et qui soutient que le débiteur de la prestation de travail doit justifier sa libération, considère que l’intéressée participait l’après-midi du 22 février 2017 à une conférence non professionnelle, et ne justifie d’aucune activité, ni d’une déclaration d’absence les mercredis énoncés dans la lettre, durant lesquels elle n’avait concédé aucune autorisation d’un travail à distance, en méconnaissance de ses propres accords d’entreprise et du contrat.

L’article L.1332-4 du code du travail énonce qu’« aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales. »

Toutefois, si l’employeur ne peut fonder le licenciement sur des faits prescrits en application de cette disposition, il en va autrement si ces faits procèdent d’un comportement fautif de même nature que celui dont relèvent les faits non prescrits donnant lieu à l’engagement des poursuites disciplinaires.

Cela étant, l’employeur reproche à la salariée son absence certains jours ou demi-journées pour lesquels elle déclara son activité, échelonnés du 12 octobre 2016 au 21 juin 2017. Mme [N] ayant été convoquée le 23 juin 2017, et la dernière absence reprochée datant du 21 juin, il s’en induit que les faits, étant de même nature, ne sont pas prescrits en droit disciplinaire, peu important qu’elle l’eût avisé ou pas de son absence le 21 juin, ainsi qu’elle le prétend.

Ainsi, le 22 février 2017, Mme [N] déclarait sa présence l’après-midi, et son agenda mentionne qu’elle était « occupée » de 12h30 à 17h30, étant précisé que le contrat de travail exprime qu’elle exercera ses fonctions dans l’établissement de [Localité 5], et qu’elle n’était pas, au regard de son ancienneté, dans le champ du télétravail selon l’accord d’entreprise.

Or, l’employeur justifie de sa présence à la conférence « arc de l’innovation » tenue à [Localité 6] à 14h30 où elle fut photographiée à la tribune au milieu des intervenants. Si elle prétend n’y avoir annoncé que l’absence du président de la collectivité Plaine commune, Mme [N] n’en administre pas la preuve.

Par ailleurs, il n’est pas contesté que l’intéressée n’a pas déclaré son absence les journées ou demi -journées listées dans la lettre de licenciement,

Or, si son ancienne responsable partie à la fin de l’année 2016 atteste, le 5 juin 2018, qu’il était convenu en raison de ses mandats qu’il « lui serait possible de faire du télétravail », elle n’exprime pas qu’un accord singulier l’avait concédé le mercredi après-midi, et l’assertion de la salariée, dans son mail du 25 avril 2017 adressé à M. [S], dans celui du 22 juin suivant à M. [R], ses supérieurs, ou la circonstance, selon le « point équipe » du 24 mars 2017 d’un « mercredi journée libre BA pour la production », ne sont pas susceptibles d’apporter la preuve contraire. En tout état de cause, elle a rédigé une fausse déclaration, puisqu’elle disait être présente, et ne l’était pas.

Si son activité est suffisamment établie par la production de billets d’avion nominatifs justifiant de déplacements professionnels le 23 novembre 2016 l’après-midi et le 8 février 2017 dans la journée, il n’en va pas de même pour les neuf autres dates, le mail dont elle se prévaut le 5 avril ayant été adressé en fin de matinée à 12h50, et l’invitation par Skype à une réunion le 11 janvier entre 16 et 17 heures, qui devait ensuite se tenir chaque semaine, ne mentionnant aucun destinataire. Au contraire, l’employeur établit qu’elle ne répondit pas à ses sollicitations la journée du 21 juin 2017, faute d’avoir été présente et faute d’aucune correspondance à distance.

Dès lors qu’elle n’était pas sur site, qu’elle n’avait pas d’accord démontré d’un travail à distance dont la régularité de la procédure et de la déclaration n’aurait au demeurant pas été suivie, et qu’il n’y a aucune preuve de son activité durant 8 demi-journées et une journée, force est de constater que Mme [N] a manqué à la loyauté due à l’employeur, par fraude, et se trouve en position d’être absente sans en justifier.

C’est en conséquence à bon droit que le conseil de prud’hommes a considéré le licenciement fondé et a rejeté l’ensemble des prétentions de la requérante, et il sera confirmé.

Sur les autres demandes

Il n’y a pas lieu de réformer les dispositions du jugement sur les frais de justice, et il convient en cause d’appel d’allouer à la société Lefèbvre Sarrut 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, Mme [N], partie succombante, étant tenue des dépens.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire

Confirme le jugement dans toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Condamne Mme [G] [N] à payer à la société par actions simplifiée Lefèbvre Sarrut 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [G] [N] aux dépens.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, et par Madame FIORE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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