Télétravail : 26 mai 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/00912

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Télétravail : 26 mai 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 21/00912
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26 mai 2023
Cour d’appel de Douai
RG n°
21/00912

ARRÊT DU

26 Mai 2023

N° 783/23

N° RG 21/00912 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TUR3

IF/CH

Jugement du

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LILLE

en date du

07 Mai 2021

(RG 19/00109 -section )

GROSSE :

Aux avocats

le 26 Mai 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

– Prud’Hommes-

APPELANT :

M. [N] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Jean-Christophe PAPET, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE :

S.A.S. INDUSTRIES SERVICES ET CONSEILS (ISERCO)

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Nathalie LEROY, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me Agathe SAUVAGE, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Olivier BECUWE

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Frédéric BURNIER

: CONSEILLER

Isabelle FACON

: CONSEILLER

GREFFIER lors des débats : Cindy LEPERRE

DÉBATS : à l’audience publique du 11 Avril 2023

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 26 Mai 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Olivier BECUWE, Président et par Cindy LEPERRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 10 vavril 2023

EXPOSÉ DU LITIGE

Par contrat de travail à durée indéterminée du 12 mai 2014, la société ISERCO (la société), spécialisée dans la conception, la fabrication de matériel de levage et de manutention, a engagé Monsieur [N] [Z], en qualité de responsable bureau d’études, avec le statut de cadre soumis à un forfait annuel de travail de 218 jours.

Fin 2014, Monsieur [Z] s’est associé avec Monsieur [C] [K] au sein de la holding A et G Industries, laquelle devenait actionnaire majoritaire de la société ISERCO. Il conservait le bénéfice de son contrat de travail.

Son salaire mensuel brut s’élevait en dernier lieu à la somme de 5300 euros.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale de la métallurgie.

Par lettre recommandée avec accusé réception du 30 octobre 2018, Monsieur [Z] a été convoqué pour le 8 novembre 2018, à un entretien préalable à son licenciement, avec mise à pied conservatoire.

Par lettre recommandée avec accusé réception du 27 novembre 2018, la société a notifié à Monsieur [Z] son licenciement pour faute lourde.

Monsieur [Z] a saisi le conseil de prud’hommes de Lille et formé des demandes afférentes à un licenciement nul pour cause de harcèlement moral, ainsi qu’à l’exécution de son contrat de travail.

Par jugement du 7 mai 2021, le conseil de prud’hommes de Lille a jugé que le licenciement de Monsieur [Z] reposait sur une faute lourde et l’a débouté de l’ensemble de ses demandes.

Le conseil de prud’hommes a condamné reconventionnellement Monsieur [Z] à payer à la société la somme de 75’000 euros, en réparation du préjudice subi, outre la somme de 1500 euros, au titre de l’indemnité pour frais de procédure.

Monsieur [Z] a fait appel de ce jugement par déclaration du 7 mai 2021, en visant expressément les dispositions critiquées.

Aux termes de ses dernières conclusions, Monsieur [Z] demande l’infirmation du jugement et réitère les demandes formulées en première instance afin que son licenciement soit jugé nul, ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse, et que la société soit condamnée à lui payer les sommes suivantes :

– 5003,70 euros à titre de rappel de salaire en raison de la mise à pied à titre conservatoire, outre 10 % au titre des congés payés

– 15’900 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre 10 % au titre des congés payés

– 6293,75 euros à titre d’indemnité légale de licenciement

– 40’000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ou 26’500 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle sérieuse

– 20’000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du harcèlement moral

– 15’900 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du caractère brutal et vexatoire de son licenciement

S’agissant de l’exécution de son contrat de travail, il demande la condamnation de la société à lui payer les sommes suivantes :

– 500 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l’absence de versement de la prime de vacances

– 2409,09 euros de rappel de salaire au titre des jours travaillés excédant le forfait annuel en jours, outre 10 % au titre des congés payés

– 15’000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la violation des règles du forfait jours

– 7000 euros au titre de l’indemnité pour frais de procédure, outre la charge des dépens

Aux termes de ses dernières conclusions, la société, qui a formé appel incident, demande la confirmation du jugement. Elle sollicite, à titre reconventionnel, la condamnation de Monsieur [Z] à lui payer les sommes suivantes :

– 5’000 euros au titre de l’indemnité pour frais de procédure, outre la charge des dépens

– 307’570 euros à titre de dommages-intérêts en réparation des pertes subies du fait de ses manquements

Il est référé aux conclusions des parties pour l’exposé de leurs moyens, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l’article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l’article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

L’article L.1154-1 du même code prévoit qu’en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement.

Il incombe alors à l’employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l’espèce, Monsieur [Z] invoque les faits suivants :

A – le 9 mars 2018, l’employeur lui a reproché de faire trop de pleins de carburant sur l’autoroute et a mis en doute une facture d’entretien de son véhicule automobile

B – le 3 septembre 2018, il a été dénigré devant les autres salariés

C – au mois de juillet 2018, il a été privé sans motif légitime du versement de la prime de vacances qu’il percevait chaque année

D – les 13 et 14 août 2018, l’employeur lui a demandé de restituer l’ordinateur portable professionnel, il s’est trouvé privé de l’outil informatique nécessaire à son travail jusqu’au 29 octobre 2018

E – le 14 août 2018, l’employeur exigeait la restitution immédiate du véhicule professionnel

F – en août 2018, l’employeur faisait opposition sur sa carte bancaire professionnelle, pourtant indispensable dans l’exercice de son travail en dehors de l’entreprise

G – le 22 août 2018, l’ancien propriétaire de la société faisait pression sur lui en le mettant en garde sur les coûts importants que représente un conflit devant le tribunal en faisant le parallèle avec le licenciement pour faute lourde son associé en septembre 2012.

Le 7 septembre 2008, il se présentait à son domicile pour le convaincre d’accepter l’offre de cession des parts sociales à son associé, lequel profitait de cet entretien pour prendre possession, avec le double des clés, du véhicule automobile stationné devant chez lui, sans l’en avertir

H – le 1er octobre 2018, l’employeur lui imposait une mission de télétravail afin de le maintenir éloigné de l’entreprise

I – il subissait une mesure de rétrogradation vexatoire et humiliante, en ce que le contrôle de la mission de télétravail était confié à l’un de ses propres subordonnés

J – le 10 novembre 2018, il constatait qu’il ne disposait plus de sa ligne téléphonique professionnelle, la carte SIM ayant fait l’objet de déclaration de perte en date du 23 octobre 2018 et la ligne téléphonique été attribuée un autre salarié avant même la notification de son licenciement

S’agissant des faits A, Monsieur [Z] établit que Monsieur [K] lui a demandé d’être vigilant sur le nombre de pleins faits sur autoroute et lui a demandé de l’éclairer sur une facture d’entretien du garage Mercedes du 6 février 2018.

La matérialité des faits A est établie.

S’agissant des faits B, Monsieur [Z] produit un compte rendu de réunion du 3 septembre 2018, sur laquelle il est mentionné ‘[N] = recherche et développement uniquement’. Monsieur [Z] qui n’était pas présent à cette réunion ne démontre pas qu’il aurait été dénigré devant les autres salariés.

La matérialité des faits B n’est pas établie.

S’agissant des faits C, Monsieur [Z] démontre avoir perçu une prime de vacances chaque année de juillet 2014 à juillet 2017. Le bulletin de paie du mois de juillet 2018 n’inclut pas de rémunération au titre d’une prime de vacances.

La matérialité des faits C est établie.

S’agissant des faits D, Monsieur [Z] produit la demande de l’employeur, réitérée le lendemain, de ramener la station de travail. Il sera utilement précisé que la cour considère, contrairement au conseil de prud’hommes, qu’une station de travail est une unité fonctionnelle informatique intégrant un ordinateur.

La matérialité des faits D est établie.

S’agissant des faits E, Monsieur [Z] produit le message du 14 août 2018 par lequel l’employeur lui demande de ramener le véhicule Mercedes le jour même en considérant qu’il s’agit d’un véhicule de service, puis celui du 6 septembre 2018 par lequel Monsieur [K] l’informe qu’il viendra chercher le lendemain le véhicule à son domicile.

La qualification de la nature du véhicule en cause sera examinée ultérieurement, la matérialité des faits E est établie.

La matérialité des faits F n’est pas établie, faute de justificatifs.

S’agissant des faits G, Monsieur [Z] produit un message téléphonique du 22 août 2018 émanant d’un prénommé [B] aux initiales MH dont il n’est pas contesté qu’il s’agisse de [B] [L], l’ancien dirigeant de la société ISERCO, qui collaborait encore à l’entreprise au moment des faits. La tonalité de ce message est à double sens, en rappelant qu’il avait lui-même fait usage d’un licenciement pour faute lourde afin de régler un différent entre associés, il évoque clairement le risque d’une procédure prud’homale avec, à nouveau, un licenciement pour faute lourde si Monsieur [Z] et Monsieur [K] ne trouvent pas une issue à leur conflit d’associés, étant rappelé que Monsieur [K] souhaitait racheter les parts sociales de Monsieur [Z].

En revanche, Monsieur [Z] ne démontre pas que Monsieur [L] se soit présenté à son domicile le 7 septembre 2018.

La matérialité des faits G est partiellement établie.

S’agissant des faits H, Monsieur [Z] ne produit aucun élément de nature à se convaincre que la période de télétravail du mois d’octobre 2018 lui a été imposée.

La matérialité des faits H n’est pas établie.

S’agissant des faits I, Monsieur [Z] produit le contrat de travail de Monsieur [M] [Y] aux termes duquel ce dernier exerçait ses fonctions sous l’autorité de Monsieur [Z], directeur technique. Il résulte des échanges de mails de cette période que Monsieur [Y] a supervisé le travail de Monsieur [Z] en évaluant son temps

de travail à trois semaines, en lui remettant le matériel informatique nécessaire et en recevant le 15 octobre 2018 une partie du travail effectué. Monsieur [Y] a attesté que Monsieur [K], dirigeant de la société, lui avait demandé de superviser hiérarchiquement le travail de Monsieur [Z], son propre directeur technique.

La matérialité des faits I est établie.

S’agissant des faits J, Monsieur [Z] produit un constat huissier aux termes duquel un numéro de téléphone qu’il indique être son numéro professionnel est utilisé par une autre personne, ce qui n’est pas contesté par la société qui indique avoir attribué la ligne téléphonique, le 13 novembre 2018, à un autre salarié.

La matérialité des faits J est établie.

Monsieur [Z] produit un courrier de son médecin traitant du 3 août 2018 adressé pour avis à un médecin spécialiste dont il sera retenu uniquement les constatations médicales, sans qu’il y ait lieu d’écarter cette pièce des débats, à la demande de la société. Le médecin indique ainsi que le patient présente des symptômes de burn-out en rapport avec un état de stress et qu’il ne souhaite pas forcément de traitement.

Il résulte des pièces produites par Monsieur [Z] que les faits A, C, D, E, G et I, pris dans leur ensemble, laisse supposer l’existence d’un harcèlement moral.

Il appartient à l’employeur de démontrer que ces agissements sont justifiés par des raisons objectives étrangères à tout harcèlement.

S’agissant des faits A, l’employeur indique, à juste titre, qu’il se trouvait pleinement dans l’exercice de son pouvoir de direction, afin de vérifier les dépenses de fonctionnement des salariés. Son intervention est justifiée par une cause objective, étrangère à tout harcèlement.

Les faits A sont justifiés.

S’agissant des faits C, le contrat de travail du 9 mai 2014 liant les parties ne prévoit pas de prime de vacances telle que celles que Monsieur [Z] a perçues de 2014 à 2017.

Il s’agit donc d’une gratification bénévole constituant une libéralité dont l’opportunité du versement et du montant appartient à l’employeur à condition de respecter l’égalité entre salarié.

La gratification peut revêtir, par sa fréquence, un caractère obligatoire.

Dans ses conclusions, Monsieur [Z] fait sommation à son employeur de produire les feuilles de paie d’autres salariés dans la même situation que lui, afin de vérifier si la prime de vacances a été versée en juillet 2018.

Force est de constater qu’en l’absence de toute défense au fond, la société ne conteste pas la demande de Monsieur [Z] de versement d’une prime de vacances de 500 €, en rappel de salaire du mois de juillet 2018.

Mais plus encore, elle n’oppose aucun élément objectif justifiant l’absence de versement de la prime de vacances du mois de juillet 2018 résultant d’un engagement unilatéral de l’employeur, étant précisé qu’à ce moment-là la société n’avait engagé aucune procédure disciplinaire à l’encontre de Monsieur [Z].

Il s’ensuit que l’absence de versement de la prime de vacances de l’été 2018 caractérise un élément de harcèlement moral.

En outre, la société sera condamnée à payer à Monsieur [Z] la somme de 500 € au titre de la prime du mois de juillet 2018 non versée.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

S’agissant des faits D, la société ne fait état d’aucun élément objectif justifiant sa demande de restitution du matériel informatique mis à la disposition de Monsieur [Z] en tant que directeur technique de l’entreprise.

Ces faits ne sont pas justifiés.

S’agissant des faits E, les parties conviennent que la qualification de l’usage du véhicule professionnel doit se traiter dans le cadre du contrat de travail de Monsieur [Z]. Monsieur [Z] prétend qu’il bénéficiait d’un véhicule de fonction à titre d’usage, là où la société soutient qu’il ne bénéficiait que d’un véhicule de service, en l’absence de mention de l’avantage en nature sur le bulletin de paie.

Lorsque l’employeur confie un véhicule automobile un salarié, celui-ci peut être une voiture de fonction ou une voiture de service. La voiture de fonction est utilisable hors des heures de travail, dans un cadre privé tandis que la voiture de service est réservée aux déplacements professionnels.

L’octroi d’une voiture de fonction est un avantage en nature qui peut, soit être prévu par le contrat de travail, soit résulter d’un usage. Dans ce cas, l’avantage en nature doit faire l’objet d’une évaluation, reportée sur le bulletin de paie, afin d’entrer dans l’assiette du calcul des cotisations sociales et de l’impôt sur le revenu.

La société n’apporte aucun élément de contestation à l’attestation du voisin de Monsieur [Z] selon lequel il conservait l’usage des différents véhicules automobiles haut de gamme les soirs, les week-ends et pour ses déplacements familiaux pendant les congés, ainsi qu’aux autres éléments de preuve présentés par Monsieur [Z] à ce sujet.

Il en résulte que c’est par un usage que Monsieur [Z] a bénéficié d’un véhicule automobile de fonction, en tant que directeur technique de la société.

Dans ses conditions, la société n’apporte aucun élément objectif pour justifier l’action de son dirigeant, non seulement, d’avoir réclamé la restitution du véhicule qu’il qualifiait subitement, de manière erronée, de véhicule de service mais encore, en étant venu le récupérer le 7 septembre 2018 au domicile de Monsieur [Z].

Ce fait n’est pas justifié.

S’agissant des faits G, la société ne présente aucune défense au fond de nature à objectiver l’intervention de Monsieur [L], l’ancien dirigeant d’entreprise, étant précisé que le harcèlement moral peut être le fait d’un salarié de l’entreprise ou d’une personne extérieure. Si le statut de ce dernier n’est pas clairement établi, il résulte de la lettre de licenciement, qu’il est présenté comme un vendeur pour le compte de la société.

L’intervention à double sens de Monsieur [L] doit être considérée comme une pression exercée sur Monsieur [Z], ce qui caractérise un élément de harcèlement moral.

S’agissant des faits I, la société qui expose que Monsieur [Z] était d’accord avec la proposition de la société de travailler à domicile au cours du mois d’octobre indique que la collaboration avec Monsieur [Y] était une modalité d’organisation du travail que Monsieur [Z] avait acceptée, compte tenu des relations tendues avec Monsieur [K].

Pour autant, ce que la société qualifie de collaboration est en réalité une supervision, Monsieur [Y] ayant notamment évalué le temps de travail de son directeur technique.

S’il ne s’agit pas d’une rétrogradation contractuelle, ainsi que le retient à tort Monsieur [Z], cet agissement de la société a eu pour objet et pour effet une dégradation des conditions de travail de ce dernier dans les conditions de la définition du harcèlement moral.

Au final, par des pressions, par le retrait du matériel informatique professionnel, par la reprise du véhicule de fonction stationné à son domicile, dans une moindre mesure, par l’absence de versement de la prime de vacances, puis enfin par la mise en place d’une supervision confiée à un subordonné, il apparaît, de façon très nette, qu’à compter de l’été 2018, Monsieur [Z] a subi des agissements répétés de harcèlement moral qui ont eu pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L’existence d’un différent concomitant au harcèlement moral, relatif au devenir des parts sociales de Monsieur [Z], actionnaire minoritaire, avec Monsieur [K], actionnaire majoritaire de la société et dirigeant de la société, est établie, au regard de l’attestation de Monsieur [L], l’ancien dirigeant de la société, et du message électronique adressé le 22 août 2018 à Monsieur [Z].

Monsieur [Z] justifie avoir subi un préjudice moral qui sera indemnisé à hauteur de 5000 euros.

Le jugement sera infirmé.

Sur le licenciement pour faute lourde

La faute grave mentionnée à l’article L. 1234-1 du code du travail résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle nécessite le départ immédiat du salarié, sans indemnité.

La faute commise avec l’intention de nuire à l’employeur est qualifiée de faute lourde, elle entraîne la perte du droit aux indemnités de préavis et de licenciement.

La preuve de la faute lourde incombe à l’employeur, conformément aux dispositions des articles 1353 du code civil et 9 du code de procédure civile.

L’employeur doit ainsi prouver non seulement la réalité de la violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail mais également l’intention de nuire qui impose le départ immédiat du salarié, le contrat ne pouvant se poursuivre même pour la durée limitée du préavis.

Si elle ne retient pas la faute lourde, il appartient à la juridiction saisie d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l’employeur, conformément aux dispositions de l’article L. 1232-1 du code du travail.

Aux termes de l’article L 1235-1 du code du travail, si un doute subsiste, il profite au salarié.

Il ressort de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige que Monsieur [Z] a été licencié pour les faits suivants :

‘ Depuis le mois de janvier, je constate des erreurs, des décisions hasardeuses ou mauvaises, des retards… que j’attribuais d’abord à de l’insuffisance ou à un désintérêt pour ton travail, comme pour l’entreprise, c’est pourquoi j’avais imaginé que nous pourrions régler la situation de façon amiable, y compris en ta qualité d’associé. (Je comprends mieux aujourd’hui le temps que tu as fait perdre).

Au mois de septembre, pendant ton arrêt de travail et alors que les sorties n’étaient pas autorisées, je t’ai croisé sur le salon «créer” au grand palais de Lille et j’ai appris par le réseau entreprendre nord, que tu répandais en critiques sur mon compte. J’ai trouvé cela étonnant et déplacé, mais n’ai pas voulu envenimer la situation.

A ton retour, nous avons convenu qu’il serait préférable que dans un premier temps, tu travailles de chez toi, jusque fin octobre, afin que nous discutions avec un peu de distance, d’une rupture amiable de ton contrat de travail et également du rachat de tes parts de la société.

Et puis, juste avant que tu reviennes, notre vendeur m’a indiqué que tu lui avais confié que tu prendrais tous les plans sur lesquels tu étais en train de travailler, ainsi que sur la gamme big bag, pour développer un projet professionnel concurrent.

Le lundi 29 octobre 2018, la durée de la mission qui t’avais été confiée, s’achevant, tu es venu me restituer l’ordinateur. Sans surprise, malheureusement, les plans n’y étaient plus, ce qui donnait tout son sens à ce que je venais d’apprendre, du vendeur.

Je t’ai demandé de restituer les plans et t’ai adressé une mise en demeure, qui est restée sans effet.

Non seulement tu t’es accaparé tous les plans de la gamme big bag, mais également les plans FERTILUX (affaire n° 24064), sur lesquels tu as travaillé en octobre. L’expert informatique que nous avons fait intervenir a déterminé que tu les avais transférés et que tu les avais purement et simplement effacés.

Cela nous a obligés à refaire les plans dans l’urgence via un prestataire extérieur, réorganiser la production qui devait démarrer la fabrication semaine n° 46. A ce jour nous ne tiendrons pas le délai initialement fixé avec le client, ce qui lui pose de gros problèmes. L’impossibilité de facturer dans les délais, l’ensemble des achats ayant été faits, met la société dans une situation de trésorerie tendue, ce qui nous est préjudiciable.

Avec le recul, j’ai compris que je m’étais trompé du tout au tout sur ce que je pensais être un manque de motivation et en reprenant les dossiers, j’ai constaté qu’en réalité, depuis fin 2017, tu torpillais consciencieusement la société.

Ainsi, par exemple, tu as pris des décisions couteuses ou inappropriées ou ne t’es pas préoccupé du suivi de dossiers, ce qui a occasionné des surcoûts importants dans la conception et la réalisation de commandes, des retards sur les listes d’achats et les suivis de conception, dans les livraisons… une perte de rentabilité conséquente et le mécontentement des clients concernés.

Ainsi en est-il, notamment, pour les dossiers suivants, pour lesquels, je le rappelle, tu as la responsabilité en qualité de responsable du bureau d’études :

En juillet, tu es allé jusqu’à émettre un devis à un partenaire allemand pour un prix de vente de 21.680 €. Or le coût de production est déjà supérieur à 40 k€ I J’ai donc dû convaincre le client d’annuler sa commande, ce qu’il aurait pu refuser. Inutile de te dire que notre image en a été là aussi affectée.

Ainsi, en sabotant les dossiers, en t’appropriant de manière frauduleuse les biens de l’entreprise et en les lui soustrayant, tu as intentionnellement nui a la société ISERCO, c’est pourquoi, j’ai pris la décision de te licencier pour faute lourde.’

La société formule ainsi à l’encontre de Monsieur [Z] les griefs suivants :

A – entre les mois de janvier et juillet 2018, par des décisions coûteuses ou inappropriées, avoir tenté de saboter la société

B – en septembre 2018, ne pas avoir respecté les conditions de sortie de son arrêt maladie et avoir dénigré le dirigeant de la société lors d’un salon professionnel

C – le vol de tous les plans de la gamme Big Bag

D – le vol des plans de l’affaire Fertilux 24064 et la destruction du travail effectué en octobre 2018, générant un surcoût pour refaire les plans et un retard de production et de livraison

S’agissant du grief A, Monsieur [Z] estime qu’ils sont prescrits, sur le fondement de l’article L 1132-4 du code du travail, en ce que l’engagement des poursuites disciplinaires a eu lieu plus de deux mois après que l’employeur en ait eu connaissance.

La société estime, d’une part, que les faits relatifs à l’affaire Villeroy et Bosch ne sont pas prescrits car la société a eu pleinement connaissance du surcoût à supporter qu’à la fin du mois d’août.

Elle conclut encore que le vol des plans qui aurait été constaté le 29 octobre 2018 relève de la même intention de nuire que l’ensemble des faits reprochés, et que dès lors, s’agissant de la réitération de faits de même nature, la prescription ne s’applique pas.

Pour autant, la cour ne peut suivre ce raisonnement, dans la mesure où des erreurs ou des négligences professionnelles ne peuvent être considérées comme étant des faits de même nature que le vol de produits essentiels de l’entreprise.

Par ailleurs, il résulte clairement de la lettre de licenciement que, s’agissant de l’affaire Villeroy et Bosch, le dirigeant de l’entreprise a eu lui-même connaissance des faits qu’il reproche à son associé, salarié de la société, à la mi-juillet 2018.

Dès lors, en l’absence de faits postérieurs de même nature, le grief relatif à l’affaire Villeroy et Bosch ne pouvait plus faire l’objet de poursuites disciplinaires après le milieu du mois de septembre 2018.

Il était, par conséquent, prescrit lors de l’engagement de la procédure disciplinaire, le 30 octobre 2018. Il en est de même pour les griefs relatifs aux affaires antérieures.

Le jugement sera confirmé s’agissant de la prescription des griefs A.

S’agissant du grief B, la société procède par affirmation et ne produit aucune pièce justificative.

Le grief B ne pourra pas être retenu au soutien de la faute lourde alléguée.

S’agissant du grief C, la société produit l’attestation de Monsieur [L], l’ancien dirigeant de la société, qualifié dans la lettre de licenciement de vendeur de la société, étant précisé que Monsieur [L] avait recruté Monsieur [Z], en tant qu’ingénieur chargé du bureau d’étude de la société, avant de proposer la reprise conjointe de sa société par Monsieur [K] et Monsieur [Z] ensemble.

Monsieur [L] atteste que Monsieur [Z] lui a dit qu’il avait pris les plans de la gamme Big Bag et qu’il allait les valoriser pour faire concurrence à la société.

Contrairement au conseil des prud’hommes, la cour entend faire clairement la distinction entre le grief relatif à la soustraction frauduleuse de tous les plans de la gamme Big Bag de celui relatif au vol et à la destruction des plans du projet Fertilux sur lequel Monsieur [Z] a travaillé en octobre 2018.

Cette distinction est importante, puisqu’aucun autre élément de la procédure ne vient corroborer les propos que Monsieur [Z] aurait tenu pour démontrer que ce dernier, qui conteste avoir volé des plans appartenant à la société, aurait dérobé les plans de la gamme Big Bag.

En effet, aucun des fichiers étudiés par l’expert informatique dans son rapport technique du 18 mars 2019 relatif à l’étude des fichiers écrasés et du matériel informatique remis par Monsieur [Z] à l’issue de la période de télétravail d’octobre 2019 ne mentionne les termes ‘Big Bag’, là où le nom Fertilux revient sans cesse.

Il s’ensuit que la société ne démontre pas que Monsieur [Z] s’est approprié frauduleusement tous les plans de la gamme Big Bag lui appartenant.

S’agissant du grief D, la société produit un document signé des parties le 2 octobre 2018 aux termes duquel :

– la société a remis à Monsieur [Z] pendant 3 semaines, une station de travail thinkstation, deux écrans, un clavier et une souris, pour un usage strictement professionnel

– Monsieur [Z] s’engage à restituer le matériel à la société au moment de la rupture de ses relations contractuelles avec la société

– il est précisé qu’en cas de détérioration ou perte du matériel prêté, à la suite d’une faute lourde, il devra rembourser la valeur du matériel.

Elle produit la mise en demeure du 7 novembre 2018 sollicitant la restitution des plans disparus.

Elle produit le procès-verbal d’un huissier de justice qui a constaté qu’une tour d’ordinateur Thinkstation comprenant deux disques durs, ainsi qu’un disque dur externe Western Digital ont été copiés par un expert informatique le 12 novembre 2018.

Le rapport de l’expert établit clairement, ce qui n’est pas contesté, que, entre le 22 et le 29 octobre 2018, un utilisateur ‘GD’ a supprimé l’ensemble des fichiers contenu dans le second disque dur de la tour, dont certains se trouvaient sous un fichier ‘Fertilux’. Il précise qu’un répertoire Wetransfer se trouvait dans la corbeille et contenait des données en rapport avec le terme 24064L3 (sur lequel travaillait Monsieur [Z]). Il rapporte qu’une sauvegarde complète a été faite le 11 novembre 2018 sur le premier disque dur de la tour, puis des sauvegardes incrémentielles les jours suivants.

S’agissant du disque dur externe, l’expert mentionne que sept dossiers nommés Fertilux ou Ferti y apparaissent, ils ont tous été créés le 2 octobre 2018 vers 15 heures. Deux d’entre eux ont fait l’objet d’écritures jusqu’au 5 novembre 2018, un dossier ‘Fertilux’ et un autre ‘Sauv Ferti 20.10.18.’

Pour sa part, Monsieur [Z] verse au débat les éléments suivants :

– l’attestation de Monsieur [Y] selon lequel l’ordinateur a été livré vide de tout fichier ou document le 2 octobre 2018 et que ce n’est que le 5 octobre 2018 qu’il a adressé à Monsieur [Z] par Wetransfer les éléments nécessaires à sa mission

– un échange électronique le 15 octobre 2018 avec Monsieur [Y] où Monsieur [Z] rappelle le contenu de sa mission, en 4 points, sur le lot 3 Fertilux et indique avoir terminé le point 1. Monsieur [Y] a accusé réception du contenu adressé via Wetransfer

– le message électronique de Monsieur [K] du 5 novembre 2018 réclamant la restitution des plans supprimés

Les parties conviennent que le matériel, comprenant un disque dur externe Western digital non compris dans la liste des biens du 2 octobre 2018, a été remis à la société le 29 octobre 2018.

La cour relève à ce stade que la société ne démontre nullement que Monsieur [Z] a soustrait frauduleusement les plans Fertilux litigieux en procédant par copie. Cette partie du grief D n’est donc pas caractérisée.

En outre, la société ne démontre pas plus qu’elle n’aurait pas conservé les plans de l’affaire Fertilux, dans l’état où ils se trouvaient lorsque la mission de Monsieur [Z] a commencé le 5 octobre 2018.

Par ailleurs, Monsieur [Z] établit avoir transféré une partie du travail le 15 octobre 2018.

Au final, le grief porte sur la suppression d’une partie de son travail pour le compte de la société réalisé entre le 16 et le 29 octobre 2018.

Monsieur [Z] indique qu’il a supprimé l’ensemble des données du disque dur de la station de travail pour les transférer sur le disque dur externe.

La société échoue à démontrer la faute de son salarié pour trois raisons essentielles.

D’abord, elle ne précise aucunement quelle était la mission confiée à ce dernier, ce qui ne permet pas à la cour de vérifier l’étendue du travail perdu.

Ensuite, en tardant à s’assurer du contenu du matériel remis, elle rend les constatations de l’expert informatique inopérantes, puisque des interventions ont été opérées entre le 29 octobre 2018 et le 5 novembre 2018 sur le disque dur qui lui a été remis le 29 octobre 2018 par Monsieur [Z].

Enfin, par manque de vigilance sur la traçabilité du matériel remis à Monsieur [Z], il n’est pas possible de d’assurer que le disque dur analysé par l’expert est bien celui remis par le salarié.

En conclusion, la société ne caractérise pas l’existence des fautes reprochées à Monsieur [Z], dont le licenciement ne repose, en conséquence, sur aucune cause réelle et sérieuse.

En outre, il apparaît que le licenciement pour faute lourde injustifiée s’inscrit dans la continuité d’actions répétées de harcèlement moral démarrées à l’été 2018, dans un contexte particulier de contentieux entre associés, relatif à la cession des parts sociales du salarié actionnaire à l’actionnaire dirigeant de l’entreprise, étant précisé que la rupture du contrat de travail entraînait ipso facto l’obligation de cession des parts sociales.

Sur le fondement de l’article L 1235-3-1 du code du travail, le licenciement de Monsieur [Z] est, en conséquence, entaché de nullité.

Le salarié victime d’un licenciement nul dont la réintégration est impossible ou qui ne la demande pas a droit aux indemnités de rupture ainsi qu’à une indemnité au moins égale à six mois de salaire au titre du caractère illicite du licenciement.

Au regard de son âge au moment du licenciement, de son ancienneté de quatre années, du montant de sa rémunération moyenne mensuelle, des circonstances du licenciement, de sa formation et de sa capacité à retrouver un emploi, son préjudice sera indemnisé, de façon adéquate, à hauteur de 35000 euros, somme au paiement de laquelle la société sera condamnée.

En outre, la société sera condamnée à payer à Monsieur [Z] les sommes suivantes, non contestées dans leur montant :

– 6293.75 euros, au titre de l’indemnité légale de licenciement

– 15900 euros, au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre 10 % au titre des congés payés.

Le jugement sera infirmé.

Sur le rappel de salaire en raison de la mise à pied à titre conservatoire

Monsieur [Z] a été mis à pied à titre conservatoire le 30 octobre 2018, cette sanction décidée, à titre provisoire, n’était pas plus justifiée.

La société ne conteste pas le quantum du rappel de salaire et de congés payés sollicité, elle sera condamnée à payer au salarié la somme de 5003.70 euros, outre 10 % au titre des congés payés.

Le jugement sera infirmé.

Sur l’action en réparation du préjudice subi du fait du caractère brutal et vexatoire de son licenciement

Les moyens de fait qui ont déjà été retenus dans le cadre du harcèlement moral ne peuvent venir au soutien de la caractérisation d’un préjudice distinct.

Reste les accusations de vol et de concurrence déloyale formulées dans le cadre de la procédure disciplinaire qui ont eu un retentissement sur sa santé, Monsieur [Z] produisant les différents traitements médicamenteux au soutien de la dépression qui en est résulté.

Ces accusations sont particulièrement vexatoires, le préjudice moral et de santé subi par Monsieur [Z] sera indemnisé à hauteur de 3000 euros, somme au paiement de laquelle la société sera condamnée.

Le jugement sera infirmé.

Sur le rappel de salaire au titre des jours travaillés excédant le forfait annuel en jours et l’action en réparation du préjudice subi du fait de la violation des règles du forfait jours

La société estime que ces deux demandes ne sont pas recevables, en ce qu’elles n’ont pas été présentées dans la requête initiale. Elle ajoute que les demandes antérieures à la fin du mois d’octobre 2016 sont prescrites.

L’article 70 du code de procédure civile dispose que les demandes additionnelles ne sont recevables que si elle se rattache aux prétentions originaires par un lien suffisant.

Le droit du travail emporte une distinction cardinale entre les demandes relatives à l’exécution du contrat de travail, d’une part, et celles relatives à la rupture du contrat, d’autre part.

En l’espèce, la demande de rappel de salaire sur le fondement du non-respect du forfait annuel en jours, relative à l’exécution du contrat de travail, ne présente pas de liens suffisants avec les prétentions originaires de Monsieur [Z] relative à la rupture de son contrat de travail.

Il s’ensuit que ces demandes sont irrecevables.

Le jugement sera infirmé.

Sur l’application de l’article L 1235-4 du code du travail

L’article L.1235-4 du code du travail dispose que «Dans les cas prévus aux articles L. 1132-4, L. 1134-4, L. 1144-3, L. 1152-3, L. 1153-4, L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé.

Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées».

Le licenciement de Monsieur [Z] ayant été jugé nul, il y a lieu à l’application de l’article L.1235-4 du Code du travail.

En conséquence, la cour ordonne le remboursement par la société aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées à Monsieur [Z], du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage.

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour le préjudice subi par la société ISERCO

En l’absence de faute du salarié, cette demande non fondée sera rejétée.

Le jugement sera infirmé.

Sur les dépens et l’indemnité pour frais de procédure

En application de l’article 696 du code de procédure civile, la société, partie perdante, sera condamnée aux dépens de la procédure de première instance et d’appel.

Le jugement sera infirmé sur les dépens, ainsi que sur l’indemnité de procédure qui en découle.

Compte tenu des éléments soumis aux débats, il est équitable de condamner la société à payer à Monsieur [Z] la somme de 2000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile pour la procédure de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il rejette les demandes de rappel de salaire au titre des jours travaillés excédant le forfait annuel en jours et en réparation du préjudice subi du fait de la violation des règles du forfait jours

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Condamne la société ISERCO à payer à Monsieur [N] [Z] les sommes suivantes :

– 5000 euros, en réparation du préjudice subi du fait du harcèlement moral

– 35000 euros, à titre de dommages et intérêts pour la nullité du licenciement

– 6293.75 euros, au titre de l’indemnité légale de licenciement

– 15900 euros, au titre de l’indemnité compensatrice de préavis

– 159 euros, au titre des congés payés y afférents

– 5003.70 euros, à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire injustifiée

– 500.37 euros, au titre des congés payés y afférents

– 3000 euros, en réparation du préjudice subi du fait du caractère brutal et vexatoire de son licenciement,

– 500 euros, à titre de rappel de salaire pour la prime de vacances de juillet 2018

Déboute la société ISERCO de sa demande reconventionnelle,

Ordonne le remboursement par la société ISERCO des indemnités de chômage versées à Monsieur [N] [Z] dans la limite de six mois d’indemnités,

Rappelle qu’une copie du présent arrêt est adressée par le greffe à Pôle emploi,

Condamne la société ISERCO aux dépens de première instance et d’appel,

Condamne la société ISERCO à payer à Monsieur [N] [Z] la somme de 2 000 euros, au titre de l’indemnité pour frais de procédure.

LE GREFFIER

Cindy LEPERRE

LE PRESIDENT

Olivier BECUWE

 


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