Your cart is currently empty!
19 avril 2023
Cour d’appel de Versailles
RG n°
21/01347
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
17e chambre
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 19 AVRIL 2023
N° RG 21/01347
N° Portalis : DBV3-V-B7F-UPQA
AFFAIRE :
[Y] [U]
C/
Société CGI FRANCE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 1er avril 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de NANTERRE
Section : E
N° RG : F 18/00740
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Khaled AZZI
Me Bertrand MERVILLE
Copie numérique adressée à :
Pôle Emploi
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX NEUF AVRIL DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [Y] [U]
né le 15 septembre 1976 à [Localité 6] (Maroc)
de nationalité française
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentant : Me Khaled AZZI, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B1067
APPELANT
****************
Société CGI FRANCE
N° SIRET : 702 042 755
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Bertrand MERVILLE de la SCP LA GARANDERIE AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire: P0487, substitué à l’audience par Me Juliette HALBOUT, avocat au barreau de Paris
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 15 février 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Aurélie PRACHE, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Aurélie PRACHE, Président,
Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller,
Monsieur Laurent BABY, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Marine MOURET
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
M. [U] a été engagé en qualité d’ingénieur en technologie de l’information, par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 2 mai 2008, par la société Logica IT Services France, aux droits de laquelle vient la CGI France.
Cette société, qui applique la convention collective dite Syntec, a pour activité la prestation de services informatiques de haut niveau. L’effectif de la société était, au jour de la rupture, de plus de 10 salariés.
Par avis du 13 octobre 2014, le médecin du travail a déclaré le salaire « apte avec réserves ».
Par décision du 30 avril 2015, la qualité de travailleur handicapé du 1er mars 2015 au 28 février 2018 a été reconnue au salarié.
Par lettre du 15 janvier 2016, le salarié a été convoqué à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement, fixé le 3 février 2016. Par lettre du 3 février 2016, le salarié a de nouveau été convoqué à un entretien préalable, fixé le 11 février 2016.
Il a été licencié par lettre du 9 mars 2016 pour cause réelle et sérieuse dans les termes suivants:
« Nous sommes ainsi amenés à vous notifier votre licenciement pour comportement fautif, caractérisé par votre désinvolture, votre laxisme, vos retards répétés malgré de nombreux recadrages et votre manque de professionnalisme, entrainant votre sortie anticipée sur deux missions successives, et mettant ainsi CGI en difficulté vis-à-vis de ses clients, le non-respect des règles de l’entreprise.
En effet, nous avons tout d’abord eu à déplorer deux sorties de mission brutales et prématurées sur deux comptes stratégiques (Canal + et LVMH), à la demande du client, et pour des faits similaires : « manque de professionnalisme sur les attendus mission, manque de motivation et de proactivité et retards répétés ».
Ces deux missions ont respectivement duré 3 et 4 semaines seulement alors qu’il s’agissait initialement de missions longues pouvant déboucher sur des perspectives d’évolution. Dans les deux cas, vous avez fait preuve d’un manque d’implication préjudiciable au bon déroulement des projets.
La première mission s’est déroulée chez LVMH du 6 juillet au 24 août 2015. Elle était prévue pour durer entre 1 et 2 ans. Elle correspondait en tout point à vos compétences en termes de savoir-faire sur la partie coordination, et aucun pré-requis particulier n’était attendu sur la partie technologique.
Les objectifs de cette mission vous ont été présentés à l’occasion de la préparation et du rendez-vous client. Vous n’avez alors formulé aucune remarque particulière et avez même exprimé votre motivation à la mener à bien.
Or, le 4 août, soit 3 semaines seulement après le démarrage, le client nous a fait part de son insatisfaction quant à votre prestation : non-respect des horaires de travail et de réunion client, manque de professionnalisme dans l’exécution de vos tâches, manque de motivation et de proactivité.
Ainsi, durant la période où vous étiez le backup du référent CGI, vous n’avez traité aucune des demandes relatives aux autres applications alors que cela faisait partie de vos tâches.
Il était également attendu que vous remontiez de manière régulière un état d’avancement ou d’éventuels points de blocage à votre encadrant CGI. Or, celui-ci a constaté que vous n’effectuiez aucun reporting, ni comptes-rendus d’activités.
De plus, vous n’avez pas pris en compte certaines informations transmises par votre encadrant sur des processus de base. A titre d’exemple, le responsable de mission CGI a dû fournir à plusieurs reprises des urls qu’il vous avait déjà transmises, ce qui n’est pas acceptable pour quelqu’un de votre niveau.
L’objectif de fournir un premier lot de livrables documentaires n’a pas non plus été atteint. Ainsi, le client vous a fait part d’une demande précise : retravailler la documentation VIPP pour la renvoyer à l’éditeur. Le temps nécessaire, soit 3 semaines, vous a été alloué pour traiter cette demande. Or, à l’issue de ce délai, le travail n’était pourtant pas finalisé.
Ceci est d’autant plus dommageable que vous n’avez à aucun moment alerté votre responsable de mission CG1 sur de potentielles difficultés.
Par ailleurs, nous avons eu à déplorer le non-respect de vos horaires d’arrivée et de vos horaires de réunion : arrivées entre 10h30 et 11h00 plusieurs fois par semaine sans que vous ne préveniez de vos retards.
Malgré différents recadrages faits par votre responsable de mission, vous n’avez pas modifié votre attitude. Deux jours après le dernier recadrage, vous êtes même arrivé à la fin de la réunion client à laquelle vous étiez convié, sans même avoir pris la peine de prévenir de votre retard.
En conséquence de ce laxisme et de votre manque d’implication, le client a demandé le 04 Août 2015 à ce que vous sortiez du projet immédiatement. Par votre comportement inacceptable, vous avez mis en difficulté le projet et fragilisé nos liens de collaboration avec notre client LVMH. Ceci est d’autant plus dommageable qu’il s’agit d’un compte particulièrement stratégique pour l’entité CPGR Retail à laquelle vous êtes rattaché, puisqu’il s’agit du client générant le plus important chiffre d’affaires.
Ces manquements vous ont été signifiés lors de votre entretien de fin de mission du 02 septembre 2015. Nous avons néanmoins pu constater qu’ils se sont répétés sur la mission Canal + qui a suivi.
Cette mission, qui correspondait également à vos compétences, s’est déroulée du 09 décembre 2015 au 07 janvier 2016. Il s’agissait une fois de plus d’une mission de longue durée, pour laquelle vous avez, durant l’entretien de présentation, affiché motivation et intérêt.
Or, après un mois sur la mission, le client nous a fait part de sa profonde insatisfaction : non-respect des horaires de travail, retard important dans la livraison du premier livrable, manque d’engagement, de motivation et d’implication.
Ainsi, le 22 décembre 2015, soit 10 jours après le démarrage de la mission, un questionnaire permettant d’acquérir les particularités du système d’information du client vous a été remis avec une « deadline » de réponse au 04 janvier. Vous deviez utiliser la documentation à votre disposition pour mener votre tâche à bien. A titre de référence, les salariés sur notre centre d'[Localité 5] réalisent ce même questionnaire en deux heures en moyenne.
Le lundi 04 janvier, le client, n’ayant pas reçu le livrable attendu, vous a accordé un délai supplémentaire de 48h.
Toujours sans réponse le mardi soir à l’expiration du délai, le client vous a relancé le mercredi matin et a fini par obtenir le document attendu.
Ce manque de fiabilité dans le respect des jalons, et ce, dès le démarrage de la mission, n’est pas acceptable, d’autant plus qu’une nouvelle fois vous n’avez pas alerté sur d’éventuelles difficultés, vous contentant d’être dans une position attentiste.
Par ailleurs, une fois encore, nous avons eu à déplorer de nombreux retards, pour la plupart non justifiés. Ainsi la semaine du 14 décembre, vous vous êtes présenté à plusieurs reprises sur le site client après 10h, et ces absences ont été remarquées par le client.
[C] [X], responsable du compte, vous a alors rappelé le respect de vos horaires lors d’un recadrage. Vous vous êtes par la suite engagé, dans un mail du 17 décembre adressé à votre manager, à arriver dorénavant à 9h30. Cependant, nous avons pu constater que les retards ont perduré. Ainsi, sur la semaine du 4 janvier, [C] [X] a noté les mardi 5, mercredi 6 et jeudi 7 décembre, des arrivées à plus de 10h.
Au vu de ces nombreux manquements, le client nous a fait part, dans un mail du 7 janvier 2016, de sa forte insatisfaction et a demandé votre sortie de mission pour le jour-même. Cette sortie brutale a non seulement fragilisé l’équipe en place, mais elle a également porté atteinte à nos relations commerciales avec notre client, ainsi qu’à l’image de CGI.
Outre votre comportement inadapté sur deux missions successives, nous avons également eu à regretter un manque de rigueur dans le respect des règles de l’entreprise, et notamment dans la soumission de vos relevés d’activité.
Comme le stipule notre règlement intérieur à l’article 11, « Chaque salarié(e) justifie de son activité et de son temps de travail ou absences, en renseignant le(s) document(s) spécifique(s) de l’entreprise, selon la périodicité demandée par la Direction.
Plus précisément, chaque salarié(e) est tenu de renseigner et de soumettre son relevé de temps de travail, chaque semaine, selon les conditions et processus applicables ».
Nous avons ainsi pu constater que malgré de nombreuses relances de vos managers, vous n’avez ni complété, ni soumis, un nombre conséquent de « timesheets », obligeant l’équipe administrative à le faire à votre place. Ces manquements répétés entraînaient outre une perte de temps pour les assistantes, des risques d’imputations et donc de facturations erronées, ainsi que de nombreuses actions correctives qui auraient pu être évitées.
De plus, votre manager [G] [E] avait dû, le 10 juin 2015, vous adresser un mail de rappel à l’ordre relatif à la non justification d’une absence pour maladie.
Enfin, malgré de très nombreuses relances par mail de vos managers depuis janvier 2014, les e-learning d’entreprise obligatoires n’ont été complétés qu’en mai 2015.
En considération des éléments sus-développés, nous vous notifions, par la présente, votre licenciement pour cause réelle et sérieuse. »
Le 3 janvier 2017, M. [U] a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre aux fins de constater une inégalité de traitement à son égard et la violation par l’employeur de ses obligations de sécurité et de formation, de voir régulariser son statut, de dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir le paiement de diverses sommes de nature indemnitaire.
Une ordonnance de radiation a été prononcée le 14 mars 2018 pour défaut de diligences des parties et l’affaire a été réinscrite au rôle le 26 mars 2018.
Par jugement du 1er avril 2021, le conseil de prud’hommes de Nanterre (section encadrement), en sa formation de départage, a :
– dit qu’il n’y avoir lieu à rabat de l’ordonnance de clôture du 23 janvier 2018,
– dit que le licenciement de M. [U] par la société CGI France a une cause réelle et sérieuse,
– fixé la moyenne mensuelle brute des salaires à la somme de 2 927,73 euros,
– condamné la société CGI à payer à M. [U] la somme de 313,88 euros à titre de rappel d’indemnité de licenciement, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 4 janvier 2017,
– condamné la société CGI à payer à M. [U] les sommes suivantes :
. 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité,
. 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de formation,
. ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du présent jugement,
– ordonné la capitalisation des intérêts échus,
– ordonné à la société CGI de remettre à M. [U] une attestation Pôle emploi rectifiée dans le mois de la notification du présent jugement,
– dit n’y avoir lieu d’ordonner une astreinte,
– ordonné l’exécution provisoire du présent jugement à concurrence de la moitié des sommes allouées,
– condamné la société CGI à payer à M. [U] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté les parties de leurs autres demandes,
– condamné la société CGI aux dépens de l’instance.
Par déclaration adressée au greffe le 6 mai 2021, M. [U] a interjeté appel de ce jugement.
Une ordonnance de clôture a été prononcée le 17 janvier 2023.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 5 août 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles M. [U] demande à la cour de :
– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :
. condamné la société CGI France à lui payer les sommes suivantes :
* 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité,
* 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de formation,
* ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du présent jugement,
. condamné la société CGI France à lui payer 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– réformer le jugement dont appel du 1er avril 2021 pour le surplus,
et statuant à nouveau,
– constater que l’ordonnance de clôture avait été rabattue antérieurement par le conseil de prud’hommes après l’ordonnance de radiation du 14 mars 2018 puis rétablissement de l’instance conformément à ladite ordonnance,
– dire et juger que l’ordonnance de clôture avait été rabattue antérieurement au renvoi à la section départage et partage au sein de la section encadrement,
– requalifier le licenciement du 9 mars 2016 en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– dire et juger que l’employeur a procédé à un licenciement abusif et en tout état de cause sans cause réelle et sérieuse,
– dire et juger que la lettre de rupture vise des griefs infondés « d’insuffisance professionnelle » et qu’un salarié ne peut faire l’objet d’un licenciement pour « comportement fautif » quelque que soit la cause de « l’insuffisance » alléguée,
– dire et juger que le licenciement prononcé sur des griefs aussi infondés qu’injustifiés est nécessairement dénué de cause réelle et sérieuse,
– dire et juger que les motifs allégués sont prescrits et infondés comme le démontre les pièces communiquées,
– dire et juger que les prétendus griefs ont été fermement contestés lors de l’entretien préalable puis ultérieurement,
– dire et juger que le salarié avait donné entière satisfaction au sein de CGI France sur ses missions précédentes depuis novembre 2001,
– dire et juger que la rupture notifiée constitue la réponse à la demande renouvelée du salarié de respect de son handicap, des restrictions médicales et de classification au coefficient 130,
– dire et juger que l’employeur a organisé et imposé deux missions, dont l’une incompatible avec la santé du salarié et en violation des préconisations du médecin du travail, pour ensuite organiser la rupture abusive et injustifiée,
– dire et juger que les griefs allégués ne peuvent constituer une cause réelle et sérieuse en l’absence d’élément objectif matériellement vérifiable,
– dire et juger que le licenciement constitue un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,
– dire et juger que l’employeur a procédé à un licenciement abusif et en tout état de cause sans cause réelle et sérieuse,
– dire et juger qu’il est fondé à solliciter la réparation des préjudices causés par la rupture abusive et injustifiée,
– condamner la société CGI France à lui payer la somme de 67 223 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– condamner la société CGI France à lui payer un rappel d’indemnité de licenciement de 1 120,64 euros,
sur l’inégalité de traitement injustifiée et la discrimination,
– dire et juger que le salarié démontre une inégalité de traitement injustifiée et une discrimination tant salariale qu’en matière d’évolution de carrière et de rémunération,
– dire et juger que l’employeur ne produit aucun élément justifiant éventuellement de la différence de traitement salariale et d’évolution de carrière,
– ordonner à la société CGI France de produire sous tel délai qu’il plaira à la cour de fixer à la prochaine audience de mise en état les éléments qui justifieraient la différence de traitement et la discrimination dont a été victime le concluant,
– condamner la société CGI France à lui payer la somme de 22 407 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice causé par cette discrimination et l’inégalité de traitement,
sur la classification du salarié et la réalité de ses fonctions depuis 2012,
– constater qu’un autre salarié au coefficient 130 occupait les mêmes fonctions qu’il aurait dû bénéficier de ce même coefficient 130 à minima depuis la mission EDF courant 2012,
– dire et juger que le salarié a occupé des activités et missions, depuis janvier 2012, correspondant au statut de « chef de projet » « coefficient 130 » visé par le référentiel de la société CGI,
– ordonner la régularisation des fiches de paie sur la période non prescrite et la production par la société CGI France de bulletins de paie modifiés faisant mention de ce coefficient et de la mention « chef de projet »,
– dire et juger que la réalité de ses fonctions au coefficient 130 entraîne une modification de sa rémunération en rapport avec l’accord d’entreprise et les textes conventionnels,
sur le rappel de salaire au titre de la « Modalité 2 » de l’accord RTT du 22 juin 1999 de la branche Syntec,
– dire et juger qu’il relève de la « Modalité 2 » de l’accord RTT du 22 juin 1999 de la branche Syntec,
– dire et juger qu’il est fondé à solliciter le rappel de salaire et prime de vacances fondé sur le plafond minimum de sécurité sociale et subsidiairement sur le minimum conventionnel augmenté de 15 %,
– condamner la société CGI France à lui payer :
. de mai 2013 à mai 2016 (base PMSS) une somme de 15 603,57 euros
. le rappel de congés payés afférents sur la même période : 1 560,35 euros
. subsidiairement sur la même période (base 115%) une somme de 10 807,10 euros,
. le rappel de congés payés afférents sur la même période : 1 080,71 euros,
sur l’intéressement, la participation et le 13ème mois,
– condamner la société CGI France en conséquence du rappel de salaire sur la classification et la « modalité 2 » :
. à procéder au rappel et au paiement de la participation et de l’intéressement due sur la période non prescrite (mai 2013 – juin 2016),
. à procéder au rappel et au paiement du 13ème mois sur la période non prescrite (mai 2013 – juin 2016),
. sous astreinte définitive de 100 euros / jour dans le mois suivant la notification du jugement à intervenir,
bulletins de paie rectifiés sur la période mai 2013 à juin 2016 et attestations,
– ordonner à la société CGI France de lui remettre : les bulletins de paie rectifiés sur les mois de mai 2013 à juin 2016, une attestation de travail rectifiée avec mention coefficient au 1er mai 2013 une attestation Pôle emploi rectifiée conforme à la décision à intervenir,
– ordonner une astreinte en vue de la délivrance des bulletins de paie et documents rectifiés sous astreinte de 100 euros / jour de retard et par document,
sur les demandes au titre des organismes sociaux,
– condamner la société CGI France à rembourser aux organismes sociaux les indemnités Pôle emploi,
sur les intérêts et l’exécution provisoire,
– ordonner la capitalisation des intérêts à compter de la saisine du 21 décembre 2016,
– dire et juger que la moyenne mensuelle brute des salaires est fixée à 3 734,64 euros,
– ordonner l’exécution provisoire sur le fondement de l’article 515 du code de procédure civile,
– condamner la société CGI France à lui payer la somme de 4 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société CGI France aux entiers dépens d’appel avec distraction pour ces derniers au profit de Me Khaled Azzi.
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 4 novembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la société CGI demande à la cour de :
– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nanterre en ce qu’il a débouté M. [U] de ses demandes au titre du licenciement, du passage au coefficient 130, de la prime de vacances, de la prime de 13e mois, de l’intéressement et de la participation, de la discrimination, et en ce qu’il a fixé la moyenne mensuelle brute des salaires à 2 927,73 euros,
– infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nanterre en ce qu’il a condamné la société CGI France au paiement des sommes suivantes :
. 313,88 euros à titre de rappel d’indemnité de licenciement,
. 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité,
. 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation,
. 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– et en ce qu’il l’a déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
statuant à nouveau,
– constater que le licenciement de M. [U] est bien fondé,
– constater que la société n’a commis aucun manquement relatif à l’obligation de sécurité,
– constater qu’aucun manquement à l’obligation de formation ne saurait être caractérisé,
– constater que M. [U] n’a fait l’objet d’aucune discrimination,
– constater que le coefficient 120 attaché au poste de M. [U] était justifié,
– débouter M. [U] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
– condamner M. [U] à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur le rabât de l’ordonnance de clôture du conseil de prud’hommes
Le salarié demande à la cour de :
– ‘constater que l’ordonnance de clôture avait été rabattue antérieurement par le conseil de prud’hommes après l’ordonnance de radiation du 14 mars 2018 puis rétablissement de l’instance conformément à ladite ordonnance,
– dire et juger que l’ordonnance de clôture avait été rabattue antérieurement au renvoi à la section départage et partage au sein de la section encadrement’
Il soutient que la section du départage ne pouvait estimer n’y avoir lieu à rabat de l’ordonnance de clôture du 23 janvier 2018 qui avait déjà été rabattue antérieurement par la section encadrement, et que le document visé par le jugement dont l’intimée a demandé qu’il soit écarté est constitué par les cotes de plaidoiries remise aux conseillers pour leur commodité. L’employeur ne conclut pas sur ce point.
La cour rappelle toutefois qu’elle n’est saisie que de prétentions, ce que ne constituent pas des demandes de constat ou de dire et juger, au surplus la demande d’infirmation du chef de dispositif ayant dit n’y avoir lieu à rabat de l’ordonnance de clôture du 23 janvier 2018 est contradictoire avec l’argumentation du salarié selon laquelle l’ordonnance de clôture avait été rabattue antérieurement au renvoi à la section départage et partage au sein de la section encadrement. Enfin, le salarié ne tire aucune conséquence juridique procédurale dans le cadre de l’appel formé contre le jugement, de ce chef de dispositif dont il demande l’infirmation.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a dit n’y avoir lieu à rabat de l’ordonnance de clôture du 23 janvier 2018.
Sur le licenciement
Le salarié expose que la lettre de licenciement invoque des griefs qui relèvent de l’insuffisance professionnelle, laquelle ne peut être retenue dès lors que le premier juge a retenu un manquement à l’obligation de formation, et non d’un comportement fautif, que les griefs ne sont ni précis ni vérifiables, que son licenciement a été organisé dès août 2015, les griefs relatifs aux missions LVMH et Canal+ étant infondés, que des missions lui ont été imposées en violation des préconisations du médecin du travail et des retards reprochés alors qu’il était en arrêt maladie.
L’employeur, qui ne réplique pas au moyen tiré de la prescription des faits fautifs, de sorte qu’il est réputé s’approprier les motifs du jugement, objecte que le licenciement est fondé, les griefs étant réels et sérieux, que le salarié n’a jamais alerté son référent sur des difficultés à assurer les missions confiées, que ses nombreux retards ont désorganisé son service.
Sur la qualification du licenciement
La lettre de licenciement fixe les limites du litige et il appartient au juge de qualifier les faits évoqués.
Le grief d’insuffisance professionnelle peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement lorsqu’il repose sur des éléments précis, objectifs et imputables au salarié (Soc., 1er juillet 1981, pourvoi n°79-42.423, publié). L’insuffisance professionnelle ne revêt pas un caractère fautif et ne peut donc donner lieu à un licenciement disciplinaire sauf lorsque qu’elle procède de la mauvaise volonté délibérée ou de l’abstention fautive du salarié (Soc., 31 mars 1998, Bull. civ. V, n°186, pourvois n°96-40.022 et 95-45.639).
L’insuffisance professionnelle est caractérisée par des manquements ou des carences du salarié dans l’exécution des tâches qui lui ont été confiées en vertu du contrat de travail.
S’il résulte des termes de la lettre de licenciement, quand bien même l’employeur n’aurait pas expressément qualifié les faits de « fautifs » que celui-ci a entendu sanctionner par le licenciement un agissement du salarié qu’il estimait fautif, ce licenciement présente un caractère disciplinaire et le juge est tenu par cette qualification.
Au cas présent, la lettre de licenciement mentionne expressément un comportement fautif caractérisé par une désinvolture, un laxisme, des retards répétés malgré de nombreux recadrages,
démontrant un manque de professionnalisme du salarié, de sorte que l’ensemble des griefs est bien de nature disciplinaire, ce qui est d’ailleurs favorable au salarié puisqu’il peut, ainsi qu’il le fait d’ailleurs, invoquer la prescription des faits fautifs, ce qu’il ne pourrait faire si le licenciement était motivé par son insuffisance professionnelle.
La cour retient donc le caractère disciplinaire du licenciement, ainsi que l’ont retenu les premiers juges.
Sur la prescription des faits fautifs
Aux termes de l’article L. 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.
Si les poursuites disciplinaires sont engagées plus de deux mois après la connaissance des faits par l’employeur, la prescription est acquise et le licenciement se trouve dès lors dépourvu de cause réelle et sérieuse (Soc., 5 juillet 2017, pourvoi n° 16-15.475).
Cependant que les dispositions de l’article L.1332-4 du code du travail ne font pas obstacle à la prise en considération d’un fait antérieur de plus de deux mois dans la mesure où le comportement fautif du salarié s’est poursuivi ou s’est réitéré dans les deux mois précédant l’engagement de la procédure de licenciement et s’il s’agit de faits de même nature (Soc. 9 avril 2014, pourvoi n° 12-23.870).
Au cas présent, ainsi que l’ont relevé à juste titre les premiers juges les faits de 2014 invoqués dans la lettre de licenciement concernant les «timesheet » et le « e-learnings » étaient prescrits lors de l’engagement de la procédure de licenciement, par la lettre du 3 février 2016 convoquant le salarié à un entretien préalable au licenciement.
De la même façon, et contrairement cette fois à ce qu’ont retenu les premiers juges, sont prescrits les faits reprochant au salarié le retard dans l’envoi de ses arrêts de travail, pour lesquels la mise en demeure de l’employeur date du 1er octobre 2015, soit plus de deux mois avant l’engagement de la procédure de licenciement disciplinaire, l’employeur ne justifiant pas de faits similaires pour la période non atteinte par la prescription.
En revanche, s’agissant des faits reprochés au salarié lors de la mission LVMH du 6 juillet au 24 août 2015, si la lettre de licenciement indique que ‘le 4 août soit trois semaines seulement après le démarrage, le client nous a fait part de son insatisfaction’ consistant notamment en des retards récurrents du salarié, la lettre de licenciement indique également que des faits identiques se sont répétés lors de la mission Canal+, du 9 décembre 2015 au 7 janvier 2016, de sorte que ne sont pas prescrits les griefs concernant la mission LVMH, qui sont de même nature que ceux relatifs aux faits, non prescrits, relatifs à la mission Canal+.
Sur le bien fondé du licenciement
Le salarié fait valoir que les prétendus griefs ont été fermement contestés lors de l’entretien préalable puis ultérieurement, qu’il avait donné entière satisfaction au sein de CGI France sur ses missions précédentes depuis novembre 2001, que la rupture notifiée constitue la réponse à la demande renouvelée du salarié de respect de son handicap, des restrictions médicales et de classification au coefficient 130, que l’employeur a organisé et imposé deux missions, dont l’une incompatible avec la santé du salarié et en violation des préconisations du médecin du travail, pour ensuite organiser la rupture abusive et injustifiée, de sorte que les griefs allégués ne peuvent constituer une cause réelle et sérieuse en l’absence d’élément objectif matériellement vérifiable.
L’employeur objecte que le licenciement repose sur des faits démontrés ayant généré des dysfonctionnements, et il ne peut être reproché à la société aucun manquement à son obligation de sécurité de résultat, rappelant que le salarié, exerçant ses fonctions en qualité d’ingénieur en technologie de l’information, avait vocation à être détaché chez les clients dans le cadre de missions de longue durée sur des projets d’infrastructures informatiques.
**
Selon les articles L.1232-1 et L.1232-6 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, énoncée dans une lettre notifiée au salarié. Les juges du fond apprécient souverainement la réalité de ces faits (Soc., 17 décembre 2014, pourvoi n° 13-22.270) puis le sérieux du motif invoqué (Soc. 21 novembre 2012 pourvoi n°11-19.196).
En l’espèce, la lettre de licenciement reproche au salarié un non-respect des directives, sur les missions LVMH et Canal+, de nombreux retards désorganisant le service, l’absence d’envoi des fiches de temps, les dysfonctionnements générés par les défaillances du salarié.
De nombreuses pièces du dossier de l’employeur, notamment des échanges de courriel entre le supérieur hiérarchique et les interlocuteurs du salarié au sein de Canal+, des courriels de collègues missionnés avec lui, établissent la réalité des retards du salarié, et son non respect des horaires et directives durant ces deux missions, dont les clients ont déduit le manque d’implication et de professionnalisme du salarié.
Certes, le contrat de travail comporte une clause de mobilité professionnelle qui indique ‘Nous attirons votre attention sur la mobilité nécessaire aux collaborateurs d’une société de service telle que Logica IT Services France, qui sont notamment appelés à se déplacer pour des durées variables en particulier auprès de la clientèle de la société, en France ou à l’étranger. En conséquence vous acceptez d’effectuer des déplacements, des missions ou des séjours temporaires nécessaires à l’accomplissement de vos fonctions dans toutes régions ou pays dans lesquels la société exerce ou exercera son activité. Les frais que vous serez amené(e) à engager à titre de déplacement (…) vous seront remboursés à partir de la ville de [Localité 7]’.
Toutefois, il ressort des pièces médicales produites par le salarié que le médecin du travail a émis plusieurs avis d’aptitude du salarié à son poste mais avec réserves. Ainsi la cour relève :
– un avis d’aptitude avec réserves du 13 octobre 2014 indiquant ‘apte sous réserve d’une modification ergonomique de poste de travail : grand écran, siège ergonomique, possibilité de télétravail souhaitable’ (pièce 20S)
– un avis d’aptitude du 28 février 2015 indique ‘avec mêmes préconisations que le 13/10/2014 + Temps de trajet ‘1h x 2 / j’ (pièce 21S)
– un avis, comportant les mêmes restrictions, du 16 novembre 2015 (pièce 22S), c’est à dire un temps de trajet limité et du télétravail.
Contrairement aux affirmations de l’employeur selon lesquelles le salarié n’aurait pas alerté et ne verserait aucune pièce à l’appui de ses allégations, le salarié établit au contraire avoir rappelé ces restrictions médicales rappelées à sa supérieure hiérarchique par courriel du 25 août 2015, dans lequel il sollicite une mise en place de charte d’intercontrat, et indique qu’il a ‘une restriction médicale qui demande de favoriser le télétravail en cas de possibilité’. L’employeur se contente d’y répondre par courriel du 28 août ‘étant donné ton positionnement à compter de lundi prochain sur la mission Chanel, la signature d’une charte d’intercontrat n’est plus d’actualité pour le moment’, sans se positionner sur les restrictions médicales et le télétravail que le médecin du travail l’invite à mettre en place pour ce salarié.
La mission Canal+ ensuite confiée au salarié ne comporte pas davantage de mesures en terme de télétravail, alors que le site du client est distant de plus d’une heure de transport du domicile du salarié, mission au cours de laquelle l’employeur s’ est contenté de lui demander comment cela se passe, ‘à part les trajets’…
En outre, il ressort des pièces du dossier que le salarié a été reconnu travailleur handicapé en mars 2015 pour une durée de trois ans, de sorte que cette qualité devait également prise en compte par l’employeur dans le cadre des missions confiées au salarié et des attentes à son égard, s’agissant d’un travailleur handicapé.
Il en résulte qu’aucune des deux missions confiées par l’employeur au salarié ne respectant les préconisations du médecin du travail en terme de temps de trajet domicile/travail, dont il n’est pas contesté, ni contestable, qu’il était supérieur à une heure aller et une heure retour par jour, les griefs tirés du non respect par le salarié des horaires de travail, s’ils sont réels, ne sont en revanche pas sérieux. A cet égard, il importe peu qu’ils aient eu une incidence en terme d’organisation de la société et d’image vis à vis du client, dans la mesure où il appartenait à l’employeur de ne pas y missionner ce salarié.
Le manque d’implication et de professionnalisme reproché au salarié étant le corolloraire de ce non respect, par le salarié, de ses horaires de travail, ce grief ne saurait davantage être retenu comme un motif sérieux de licenciement.
Il en résulte que, par voie d’infirmation, il convient de juger le licenciement du salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Sur la classification
Le salarié expose qu’il aurait dû bénéficier d’une classification au coefficient 130 a minima depuis le 3 décembre 2012 lorsqu’il a intégré la mission EDF pour y piloter un ensemble d’activités, en raison d’une « mission suffisamment critique (applications commerce sensibles) avec un travail de coordination important » (Pièces n°126 et 127 du salarié), que M. [A], directeur principal, et Mme [B], responsable des ressources humaines lui ont confirmé la classification au coefficient 130, sans aucune condition, que son coefficient aurait dû être modifié puisque ses activités correspondaient au statut de chef de Projet coefficient 130 visé par le référentiel CGI (Pièce n° 137, 138, 139 et 140 du salarié).
L’employeur objecte, mais seulement dans la partie de ses conclusions relatives à la discrimination, que les performances en demi-teinte du salarié ne lui ont pas permis passer au coefficient 130, et dans la partie de ses écritures relatives aux demandes du salarié relatives au rappel d’indemnité de licenciement au titre d’un coefficient 130, à nouveau qu’il était clair que sa promotion était subordonnée à la réussite de ses missions, ce qui lui a été rappelé par courrier du 15 janvier 2016. Il ajoute que que le passage au coefficient 130 est conditionné chez CGI à l’obtention de bons résultats au cours des années antérieures, ainsi naturellement qu’à une perception similaire de ces résultats de la part du salarié et de sa hiérarchie, que cependant dès 2014, son manager a alerté sa hiérarchie dans la fiche d’entretien annuel de l’appelant sur le fait qu’il existait « un réel écart entre la perception d’Abdelhamid de son travail et la perception qu’en a CGI ».
**
En cas de contestation sur la catégorie professionnelle dont relève le salarié, il appartient au juge de rechercher la nature de l’emploi effectivement occupé par ce dernier et la qualification qu’il requiert (Soc., 19 décembre 1979, Bull. V, n° 1019).
En outre, la charge de la preuve pèse sur le salarié qui revendique une classification autre que celle qui lui a été attribuée, les juges du fond appréciant souverainement les éléments qui leur sont soumis (Soc., 10 juin 1992, pourvoi n° 88-40701, Bull. civ., V, n° 377 ; Soc., 31 mars 2016, pourvoi n° 14-22.569).
En l’espèce, le salarié, entré dans l’entreprise en 2008 au coefficient 100, a été classé en janvier 2015 au coefficient 21-120.
Ce coefficient correspond à un emploi d’analyste selon la grille d’évolution des compétences qu’il produit (sa pièce 137), et prévoit, à la compétence ‘Initiatives’ que ce salarié ‘Prend des initiatives dans le cadre de sa mission, en tenant sa hiérarchie informée’, tandis que le poste de ‘chargé de projet’, coefficient 130, revendiqué par le salarié ‘agit de manière décisisive et rapide dans un contexte difficile, cherche à mettre en place, de manière active et avec les autres, des actions pour réussir’.
S’agissant de la compétence ‘Analyse et Synthèse’, le chef de projet ‘détecte plusieurs causes à un événement ou plusieurs conséquences à une action. Canalise et organise ses idées, établit des priorités, propose quelques solutions’
S’agissant de la compétence en terme de ‘Coopération’, le chef de projet ‘sollicite l’avis des autres et reconnaît leur contribution et leur valeur’.
‘Sens du client’ : ‘développe une relation de confiance, prend personnellement la responsabilité de la satisfaction du client, sait se rendre immédiatement disponible’
‘Innovation’ : ‘imagine et partage de nouvelles idées ou solutions permettant de mieux travailler, se crée un réseau en interne’.
Le salarié établit Mme [B], HR Director lui a indiqué le 16 juillet 2015 (pièce 44 du salarié),: ‘je te confirme ce que t’a proposé [D] à savoir passage au K130 à la prochaine salary review de janvier au salaire de 3140 € BBS, prime de 1000 € versée en deux fois (500€ en septembre et 500 € en décembre)’ -à la suite duquel le salarié a relancé l’intéressée par courriel du 22 décembre 2015, puis s’est inquiété, dans un courriel qu’il lui a adressé le 8 janvier 2016, en copie à Mme [F], sa responsable : ‘je viens d’avoir un échange avec [H] [I]. Il me disait ne pas être au courant à propos de mon passage sur un coefficient 130 sur la salary review de ce mois’, lui demandant de voir ce qu’il en est.
Mme [F] y a répondu le 8 janvier 2016 que ‘[H] [I] va te contacter pour te proposer un rendez-vous’, et, par lettre datée du 8 janvier 2016 intitulée ‘confirmation des décisions de révision salariales’, l’employeur a écrit au salarié que : ‘suite aux échanges que vous avez eu avec votre management durant cette période, nous vous confirmons que votre salaire brut mensuel s’élève à 2 744,46 € hors PV (en équivalent temps plein) soit un salaire annuel de 32 933,52 € bruts, à effet du 1er janvier 2016. Cette décision salariale vous a été expliquée oralement par votre manager.
Par une lettre recommandée du 15 janvier 2016 l’employeur a indiqué au salarié que la proposition de [D] [A] était conditionnée à la réussite de ses missions et à la conformité de ses résultats sur l’année, et que les deux sorties de mission successives ne permettent plus d’envisager de promotion ni de revalorisation salariale.
Par un courriel de M. [U] du 1er février 2016 à la HR Director, le salarié indique ‘ j’ai reçu pendant mes vacances un courrier dont l’objet est ‘confirmation des décisions de révision salariales’. Il y est fait état de mon salaire brut annuel, celui de 2015, et donc la décision qui avait été prise en juillet 2015 n’y est pas intégrée. Par ailleurs sur mon bulletin de paie de janvier je ne trouve toujours pas les primes convenues. Est ce une erreur ” et lui demandant de la rencontrer.
Le licenciement étant jugé sans cause réelle et sérieuse, les motifs du refus de l’employeur de procéder à l’augmentation salariale promise en juillet 2015, au surplus sans conditions, étaient infondés, de sorte qu’il convient de retenir que M. [U] devait être placé au coefficient 130 a minima à compter du 1er janvier 2016, conformément à l’engagement unilatéral pris par l’employeur à l’égard de son salarié.
S’agissant de la période antérieure au 1er janvier 2016, le salarié n’établit pas qu’il a assuré une prestation de chef de projet pour le client Société Générale, mission proposée le 14 mars 2012, pour faire du « Management de projet » (Pièce n° 131du salarié), la fiche produite ne mentionnant pas son nom. En revanche il résulte d’un courriel du 11 octobre 2012 que, pour un appel d’offres pour ErDF, son responsable a modifié son CV en y indiquant son rôle de ‘chef de projet technique’, ce que ne conteste pas l’employeur.
Le salarié produit en outre une attestation d’un supérieur qui indique que : « la mission est suffisamment critique (applications commerce sensibles) avec un travail de coordination important pour qu’Abdelhamid prétende à son coeff » (pièces 126 à 127 du salarié).
En outre, il justifie avoir été sollicité pour une mission Chanel en qualité de « Chargé de projet » proposée le 28 août 2015 (Pièce n°133 du salarié), et en qualité de ‘chef de projet’ pour une mission L’Oréal, en novembre 2015, l’employeur ne répliquant pas sur ce point, se bornant à solliciter la confirmation du jugement, lequel n’évoque pas ces missions.
Dès lors, la mission ErDF ayant été renouvelée en mai 2015 (cf pièce 143 du salarié), et les missions ensuite confiées correspondant à un emploi de chef de projet, le salarié justifie qu’il occupait effectivement un emploi de chef de projet, coefficient 130, à compter d’octobre 2012.
Par voie d’infirmation du jugement qui a débouté le salarié de ses demandes au titre de la revalorisation de son statut professionnel de janvier 2012 à mars 2016, ainsi que de l’ensemble des demandes afférentes, la cour retient en conséquence que le salarié doit être positionné au coefficient 130, en qualité de ‘chef de projet’, à compter du 30 octobre 2012.
La cour relève toutefois ici que le salarié ne formule aucune demande de rappel de salaire chiffrée et se contente de solliciter ‘la régularisation des fiches de paie sur la période non prescrite et la production par la société CGI France de bulletins de paie modifiés faisant mention de ce coefficient et de la mention « chef de projet »’, ce qu’il convient d’ordonner ainsi qu’il sera dit au dispositif.
Sur l’inégalité de traitement et la discrimination
Le salarié expose qu’il aurait dû bénéficier en janvier 2016 d’une augmentation promise de 8 %, justifiée par la nature de ses missions, pour lesquelles il établit qu’un autre salarié affecté à la même mission chez le même client, et justifiant de la même expérience et des mêmes diplômes, bénéficiait d’une rémunération supérieure de 20 %. Il invoque le principe « à travail égal, salaire égal » mais rappelle qu’il a demandé, à plusieurs reprises, à mettre en place des actions de suivi, notamment, depuis qu’il a été reconnu travailleur handicapé pour tenir compte des réserves à son aptitude par la Médecine du Travail.
L’employeur objecte que la situation de M. [S], auquel se compare le salarié, n’est en rien comparable à la sienne, qu’en effet M. [S] a été embauché le 1er octobre 2007 au coefficient 115, (alors que le salarié a été embauché en mai 2008, sans la même expérience, au coefficient 110), avec la promesse de passer rapidement au coefficient 120 et de gagner en rémunération, ce qui fût effectivement le cas courant 2008, après une excellente première année, et que ce n’est que 6 ans plus tard, et au terme d’une année 2014 extrêmement satisfaisante, que M. [S] a été promu au coefficient 130, tandis que, pour sa part, le salarié a été promu au coefficient 120 en 2014, après deux « mauvaises années » en 2010 et 2011.
**
A titre liminaire, la cour d’appel relève que le salarié ne sollicite pas la nullité du licenciement en raison de la discrimination alléguée en raison de l’état de santé et du handicap, mais demande seulement des dommages-intérêts ‘en réparation du préjudice causé par cette discrimination et l’inégalité de traitement’. Le fondement juridique de sa demande est par conséquent la discrimination en raison de l’état de santé caractérisée par une atteinte au principe d’égalité de traitement.
Le principe d’égalité de traitement impose à l’employeur de rémunérer de façon identique des salariés effectuant un même travail ou, à défaut, de devoir justifier toute différence de rémunération par des critères objectifs et pertinents.
S’il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal salaire égal » de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs justifiant cette différence (Soc. 28 septembre 2004, n° 03-41.825 et 03-41.829).
Au cas présent, à l’appui de ses allégations d’inégalité de traitement, le salarié invoque l’absence de suivi, d’évolution de carrière et de salaire, et le fait que, lors de la rupture, le salaire brut du salarié était de 2 744 euros, soit une augmentation de 4,3% en 8 ans au sein de l’entreprise, soit moindre que l’inflation durante cette période (7,4 %), qu’il n’a bénéficié que d’une seule journée de formation, qu’il a fréquemment changé de manager et vainement sollicité des plans de formation.
Ainsi qu’il a été précédemment jugé le salarié aurait dû bénéficier du coefficient 130 correspondant à un emploi de chef de projet depuis le 30 octobre 2012, de la même façon que son collègue, également affecté à la mission ErDF, et qui est passé à ce coefficient dès 2013.
Le salarié présente donc des éléments laissant supposer une inégalité de traitement auxquels l’employeur ne répond qu’en invoquant une différence d’expérience des deux salariés lors de leur embauche et des évaluations professionnelles de M. [U] ne lui permettant pas l’accès à ce coefficient.
Toutefois, les trois seules évaluations produites par l’employeur sur les huit années de la relation de travail, ne concernent que les années 2009, 2012 (entretien du 13 avril 2012, soit antérieur à la mission ErDF),et l’année 2014, sans qu’aucun élément produit par l’employeur ne concerne la période pendant laquelle le coefficient 130 a été atteint par le salarié.
La différence de coefficient existant et donc de traitement entre les deux salariés n’est, par conséquent, pas justifiée par l’employeur par des éléments objectifs.
En revanche, la différence salariale, le manque de formation et le changement fréquent de manager, s’ils sont établis, ne laisse toutefois pas supposer l’existence d’une discrimination en raison de l’état de santé et du handicap de M. [U].
Par voie d’infirmation, il convient donc de faire droit à la demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de la seule inégalité de traitement et de condamner l’employeur à verser au salarié la somme de 5 000 euros de dommages-intérêts à ce titre.
Sur les conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuse
Sur le salaire de référence
Le salarié indique formuler ses demandes sur la moyenne des trois derniers mois de salaire, qu’il fixe à la somme de 3 734,64 euros, sans intégrer une revalorisation salariale sur la base de la reclassification au coefficient 130 à juste titre revendiqué, ainsi qu’il a été précédemment jugé, ni le rappel de salaire ci-après revendiqué au titre de la ‘modalité 2″.
L’employeur, sans développer de moyen sur ce point, sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a fixé la moyenne mensuelle brute des salaires à 2 927,73 euros, corrrespondant au calcul de l’employeur, sur la base du salaire revalorisé de janvier 2016, majoré de la prime de vacances et de la participation.
**
Au vu des bulletins de salaire produits, le salaire de référence, qui correspond à la moyenne mensuelle des douze derniers mois précédant le licenciement, ou le tiers des trois derniers mois (article R. 1234-4 du code du travail), avec un lissage des rémunérations non mensuelles, doit être fixé, par voie d’infirmation, à la somme de 3 534,24 euros, incluant la prime versée mensuellement au salarié.
En effet, s’agissant d’un licenciement notifié le 9 mars 2016, les trois derniers mois à prendre en compte sont les mois de décembre 2015 et janvier et février 2016 (février 2016 : 3792 euros;
janvier 2016 : 4 145,21 euros ; décembre 2015 : 2 665,52 euros).
Sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Le salarié sollicite une indemnité de 67 223 euros calculée sur la base de 18 mois de salaire, compte tenu d’une entrée dans le groupe CGI en 2001, en exposant qu’il est resté plusieurs années sans trouver d’emploi et a bénéficié de l’ASS, tout en étant confronté à des charges fixes sans ses revenus antérieurs puisqu’il ne perçoit qu’une allocation réduite après avoir subi un différé d’indemnisation.
L’employeur objecte que l’indemnité sollicitée correspond à 24 mois de salaire, que le bienfondé du licenciement ayant été démontré, le salarié sera débouté de cette demande, et qu’en tout état de cause, il ne démontre pas l’existence d’un quelconque préjudice alors même que cette preuve lui incombe.
**
S’agissant d’un licenciement notifié le 9 mars 2016, l’indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, en application de l’article L. 1235-3 du codet du travail, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017.
Compte tenu de l’ancienneté du salarié (sept ans et dix mois), dans une entreprise de plus de onze salariés, de son âge (40 ans) de sa rémunération mensuelle brute sur les six derniers mois, et de la longue période durant laquelle il justifie avoir été sans emploi et allocataire de l’allocation spéciale de solidarité, il convient de condamner l’employeur à verser au salarié la somme de 25 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en application de l’article L. 1235-3 du code du travail.
En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, dans sa version applicable à l’espèce, il convient d’ordonner à la société CGI de rembourser à Pôle emploi les indemnités chômages éventuellement versées au salarié dans la limite de six mois d’indemnité.
Sur le rappel d’indemnité de licenciement
Le salarié sollicite ‘compte tenu du salaire de référence retenue l’indemnité de licenciement totale est fixée à : 7.697,66 + 916,38 = 8.614,04 soit une somme à recevoir de 1.120,64 euros.’
Au terme de l’attestation destinée à Pôle emploi et du bulletin de salaire du mois de juin 2016, le salarié a perçu une indemnité de licenciement d’un montant de 7 493,40 euros alors qu’il aurait du percevoir la somme de 9 228,29 euros.
Compte tenu du salaire de référence précédemment retenu, il convient, par voie d’infirmation, de condamner la société CGI France à payer au salarié, dans la limite de sa demande, un rappel d’indemnité de licenciement de 1 120,64 euros.
Sur le rappel de salaire au titre de la « Modalité 2 » de l’accord RTT du 22 juin 1999 de la branche Syntec
Le salarié expose qu’initialement son contrat de travail visait la modalité 2, également applicable conformément à l’accord d’entreprise du 30 juin 2008, que néanmoins, la rémunération visée par le minimum conventionnel est inférieure au plafond de la sécurité sociale depuis plusieurs années, que diverses juridictions ont eu à connaitre de contentieux sur la question et ont rendues diverses décisions confirmant l’irrégularité de la situation dans laquelle étaient placés les salariés , et que dans une décision du 4 novembre 2015 (14-25.745 ; 14-25.751) la Cour de cassation a estimé que le recours à la Modalité 2 nécessitait que le plafond de la sécurité sociale soit respecté non seulement à l’embauche mais durant toute l’exécution du contrat de travail.
L’employeur ne réplique pas sur ce point, de sorte qu’il sera fait application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, selon lesquelles la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.
Toutefois, il ne ressort pas des motifs du jugement que celui-ci ait statué sur ce chef de demande du salarié.
**
Il résulte des dispositions de l’article 3 du chapitre II de l’accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail et annexé à la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, dite convention Syntec, que seuls les ingénieurs et cadres dont la rémunération est au moins égale au plafond de la sécurité sociale relèvent des modalités de réalisation de missions. (Soc., 4 novembre 2015, pourvoi n° 14-25.747, 14-25.748, 14-25.749, 14-25.750, 14-25.751, 14-25.745, 14-25.746, Bull. 2015, V, n° 220).
En l’espèce, si le contrat de travail initial indique que les dispositions relatives au temps de travail correspondent à la modalité 2 l’accord d’entreprise sur l’ARTT, il indique également que ‘elles pourront être revues en fonction de l’évolution de votre coefficient’ (pour mémoire, coefficient 100 lors de l’embauche).
Or, par avenant au contrat de travail du 29 septembre 2008, le salarié a accepté de relever de la « modalité standard » de l’accord d’entreprise ARTT fixant une durée annuelle de travail de 1607 heures et 12 jours par an de repos RTT.
Ainsi, il résulte des bulletins de paie produits correspondant au coefficient 120 que le salarié est à la modalité RTT ‘standard’ et non à la modalité 2 comme il le soutient. En tout état de cause, ses allégations selon lesquelles sa rémunération n’est pas égale au plafond de la sécurité sociale sont dépourvues d’offre de preuve et de toute explicitation du calcul réalisé pour parvenir aux montants sollicités.
Par conséquent, ajoutant au jugement, il convient de débouter le salarié de sa demande de rappel de salaire et congés payés afférents fondée sur le plafond minimum de sécurité sociale et subsidiairement sur le minimum conventionnel augmenté de 15 %.
Sur l’intéressement, la participation et le 13ème mois
Cette demande est la conséquence du rappel de salaire sur la classification et la « modalité 2 », lesquelles n’ont pas été ordonnés, faute de demande s’agissant de la classification, et en raison de leur rejet s’agissant de la modalité 2.
Il convient en conséquence, ajoutant au jugement qui n’a pas statué sur ces chefs de demande, de débouter le salarié de ces chefs de demande.
Sur l’obligation de sécurité
L’employeur, qui sollicite l’infirmation de ce chef de dispositif, soutient le salarié ne verse aucune pièce au soutien de ses allégations selon lesquelles la société n’aurait pas respecté les préconisations du médecin du travail relatives à ses temps de trajet, alors que ce temps était de 1h11, ce qui était conforme aux préconisations médicales, et qu’il avait à sa disposition un siège ergonomique.
Le salarié ne développe pas de moyen sur ce point, mais demande que la décision des premiers juges soit confirmée, de sorte qu’il est réputé en adopter les motifs.
**
Compte tenu des constatations effectuées par la cour dans le cadre du bien-fondé du licenciement, il convient de confirmer la décision des premiers juges qui ont, par des motifs pertinents que la cour adopte, fait droit à cette demande du salarié en condamnant l’employeur à lui verser à ce titre la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité.
Sur l’obligation de formation
L’employeur soutient que le salarié s’est bien vu accorder une formation lorsqu’il en a fait la demande en 2008, et qu’en revanche, lors de la suite de la relation contractuelle jusqu’à son licenciement, les fiches des entretiens annuels de l’appelant indiquent expressément que le salarié n’a formulé aucune autre demande de formation et qu’il a même refusé d’aborder le sujet avec sa hiérarchie.
Le salarié ne développe pas de moyen sur ce point, mais demande que la décision des premiers juges soit confirmée, de sorte qu’il est réputé en adopter les motifs.
**
Il convient de confirmer la décision des premiers juges qui ont, par des motifs pertinents que la cour adopte, fait droit à cette demande du salarié en condamnant l’employeur à lui verser à ce titre la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de formation, les éléments produits par l’employeur en appel étant insuffisants à modifier l’appréciation des premiers juges du manquement de l’employeur à cette obligation, qui ne disparaît en l’absence de demande expresse du salarié formulée en ce sens.
Sur les intérêts
La décision des premiers juges sera confirmée en ce qu’il a assorti des intérêts au taux légal à compter du jugement les dommages-intérêts alloués au titre du manquement de l’employeur à ses obligations de sécurité et de formation, et des intérêts au taux légal à compter du 4 janvier 2017 le rappel d’indemnité de licenciement.
Les intérêts au taux légal sur les créances indemnitaires allouées par le présent arrêt courront à compter du prononcé de cette décision et à compter de la date de réception par l’employeur de sa convocation à comparaître à l’audience de conciliation pour les créances salariales.
Le jugement sera également confirmé en ce qu’il ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil. Y ajoutant, il convient d’ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil sur les sommes allouées par le présent arrêt.
Sur les autres demandes
Il convient d’ordonner à la société CGI France de remettre au salarié, dans les limites de sa demande, les bulletins de paie rectifiés sur les mois de mai 2013 à juin 2016, une attestation de travail rectifiée avec mention du coefficient 130 au 1er mai 2013, et une attestation Pôle emploi rectifiée conforme au présent arrêt, sans qu’il n’y ait lieu de prononcer une astreinte.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.
Il y a lieu de condamner la société CGI France aux dépens de l’instance d’appel et de la condamner à payer au salarié la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, avec distraction pour ces derniers au profit de Me Khaled Azzi, et de rejeter la demande de la société fondée sur ce texte.
PAR CES MOTIFS:
La cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :
INFIRME le jugement entrepris, mais seulement en ce qu’il fixe la moyenne mensuelle brute des salaires à la somme de 2 927,73 euros, dit que le licenciement de M. [U] par la société CGI France a une cause réelle et sérieuse, le déboute de ses demandes au titre de la revalorisation de son statut professionnel de janvier 2012 à mars 2016, et de l’ensemble des demandes afférentes, ainsi que de sa demande de dommages-intérêts au titre de l’inégalité de traitement, et en ce qu’il condamne la société CGI à payer à M. [U] la somme de 313,88 euros à titre de rappel d’indemnité de licenciement,
CONFIRME le jugement pour le surplus,
Statuant à nouveau des seuls chefs infirmés, et y ajoutant,
DIT que M. [U] doit être reclassé au coefficient 130 en qualité de chef de projet, à compter du 30 octobre 2012,
ORDONNE en conséquence à la société CGI France d’établir, pour la période du 30 octobre 2012 au 09 juin 2016, des bulletins de paie faisant mention de ce coefficient et de l’emploi de chef de projet,
CONSTATE que M. [U] ne formule aucune demande de rappel de salaire au titre de cette classification,
DIT que le licenciement de M. [U] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
CONDAMNE la société CGI France à verser à M. [U] les sommes suivantes :
– 25 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 1 120,64 euros à titre de rappel d’indemnité de licenciement,
– 5 000 euros de dommages-intérêts au titre de l’inégalité de traitement,
DIT que les intérêts au taux légal sur les créances indemnitaires courront à compter du prononcé de la présente décision, et à compter de la date de réception par l’employeur de sa convocation à comparaître à l’audience de conciliation pour les créances salariales,
ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,
ORDONNE à la société CGI de rembourser à Pôle emploi les indemnités chômages éventuellement versées au salarié dans la limite de six mois d’indemnité.
ORDONNE à la société CGI France de remettre au salarié les bulletins de paie rectifiés sur les mois de mai 2013 à juin 2016, une attestation de travail rectifiée avec mention du coefficient 130 au 1er mai 2013, et une attestation Pôle emploi rectifiée conforme au présent arrêt,
REJETTE la demande d’astreinte,
DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
CONDAMNE la société CGI à verser à M. [U] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, avec distraction au profit de Maître Khaled Azzi,
CONDAMNE la société CGI aux dépens.
. prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
. signé par Madame Aurélie Prache, Président et par Madame Marcinek, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente